M. DANIEL DUBOIS, DIRECTEUR CENTRAL ADJOINT DE LA POLICE AUX FRONTIÈRES

Accueillant M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, M. Serge Larcher, président , a souhaité qu'il présente la situation spécifique des différents départements d'outre-mer en matière de lutte contre l'immigration illégale.

M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a indiqué que la Guyane connaissait la situation la plus délicate en matière d'immigration illégale, même si celle de Mayotte était encore plus préoccupante.

Il a indiqué que le nombre d'interpellations d'étrangers en situation irrégulière s'était élevé à quelque 13 000 en 2007, soit presque 10 % des interpellations réalisées en métropole. Ce nombre a connu une baisse sensible en 2008, de l'ordre de 20 %, avec 10 000 interpellations et cette tendance s'est confirmée au premier trimestre de l'année 2009, même si on constate une légère hausse ces dernières semaines.

Il a souligné que la Guyane était principalement confrontée à une immigration clandestine en provenance des pays voisins, comme le Surinam, le Guyana, Haïti ou le Brésil et, dans une moindre mesure, la République dominicaine, immigration de proximité de nature davantage économique que politique.

Il a indiqué que la police aux frontières était déployée à trois endroits, à Cayenne, dans l'aéroport et au centre de rétention, à Saint-Laurent, à la frontière avec le Surinam, et à Saint-Georges de l'Oyapock, à la frontière avec le Guyana, et que l'ensemble des services de police, de gendarmerie nationale et même de l'armée étaient impliqués dans la lutte contre l'immigration clandestine, les frontières de la Guyane étant très perméables.

M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a estimé que la situation de la Martinique était très différente, avec une immigration illégale de moindre importance et en diminution.

Il a indiqué qu'il avait été procédé à 477 interpellations d'étrangers en situation irrégulière en 2008, contre 527 en 2007, soit une baisse de 10 % et que cette tendance s'était confirmée au premier trimestre 2009.

Il a toutefois rappelé que cette diminution faisait suite à une forte hausse de l'immigration clandestine à la Martinique jusqu'en 2005, qui avait pu être maîtrisée grâce à la conclusion d'une série d'accords bilatéraux de libre circulation des personnes et de réadmission avec les pays voisins, comme Sainte-Lucie ou la République dominicaine.

Il a souligné que la Martinique était également confrontée à une immigration illégale de proximité, en provenance d'Haïti et de Sainte-Lucie, employée principalement dans la production de canne à sucre mais impliquée aussi dans le trafic de stupéfiants.

Évoquant ensuite le cas de la Guadeloupe, M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a estimé que la situation était plus délicate que celle de la Martinique, avec environ 1 800 interpellations d'étrangers en situation irrégulière par an jusqu'en 2007, même si on a constaté une diminution de 11 % en 2008, avec près de 1 600 interpellations, les flux migratoires clandestins provenant essentiellement des pays voisins, Haïti et la République dominicaine.

M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a enfin précisé que La Réunion était relativement épargnée, avec seulement 120 interpellations d'étrangers en situation irrégulière en 2008 contre une centaine en 2007, principalement des ressortissants malgaches et mauriciens et, dans une moindre mesure, des personnes originaires des Comores, de l'Afrique du Sud ou des Seychelles.

M. Éric Doligé, rapporteur , s'est interrogé sur la politique des visas en soulignant les différences entre la métropole et les départements d'outre-mer, un ressortissant brésilien étant exempté de visa pour se rendre en métropole alors qu'il doit en obtenir un pour se rendre en Guyane.

M. Georges Patient a renchéri en confirmant qu'il était plus facile pour un Brésilien de passer par la métropole pour se rendre en Guyane, plutôt que de franchir directement la frontière.

M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a indiqué que la politique des visas ne relevait pas des attributions du ministère de l'intérieur mais de celles du ministère de l'immigration, même si la direction centrale de la police aux frontières alertait les services compétents en cas de forte pression migratoire en provenance d'un État afin que ces services étudient la possibilité de rétablir l'obligation de visa à l'égard des ressortissants de ce pays.

M. Georges Patient a souhaité avoir des éclaircissements sur trois points : le manque d'effectifs de la police aux frontières en Guyane, notamment à Saint-Georges et à Saint-Laurent ; les manquements constatés dans le dernier rapport de la commission nationale de déontologie des services de sécurité en matière de respect des droits de l'homme par les services de sécurité outre-mer à l'égard des étrangers en situation irrégulière ; le délit d'assistance aux personnes en situation irrégulière, compte tenu de la situation particulière de la Guyane.

M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a apporté les précisions suivantes :

- la police aux frontières a vu ses effectifs augmenter sensiblement en Guyane, passant de 200 agents en 2004 à 253 en 2008, soit une augmentation de 25 % ; les contraintes budgétaires et les mesures prises dans le cadre de la révision générale des politiques publiques rendant difficile toute augmentation des effectifs et nécessitant d'opérer des redéploiements entre les territoires ; la police aux frontières est toutefois confrontée à une réelle difficulté en matière de recrutement, notamment en ce qui concerne les adjoints de sécurité, en raison de l'image peu valorisante de cette fonction, tant aux yeux des jeunes policiers, qui lui préfèrent souvent les missions de sécurité publique, que dans l'opinion publique, même si ces agents réalisent un métier difficile et indispensable ;

- le ministre de l'intérieur devrait répondre prochainement aux observations formulées par la Commission nationale de déontologie des services de sécurité dans son dernier rapport, qui ne correspondent pas toujours aux enquêtes approfondies réalisées en Guyane par les services de l'Inspection générale de la police nationale ; en tout état de cause, les services de police agissent toujours en matière répressive sous l'autorité du procureur de la République et, s'il existe des procédures particulières d'audition des étrangers en situation irrégulière, hors de la procédure de garde à vue et des garanties qu'elle comporte, afin de faire face à l'afflux du nombre d'étrangers en situation irrégulière et d'éviter un engorgement des procédures, c'est toujours dans l'intérêt des personnes concernées et avec leur accord ;

- concernant ce qu'il est convenu d'appeler le délit de solidarité, actuellement examiné à l'Assemblée nationale, il est clair qu'il ne jouera pas dans le cas d'une assistance humanitaire apportée à un étranger en situation irrégulière. Même dans les cas où la personne concernée est entendue dans le cadre d'une enquête, il n'existe aucun exemple d'une personne poursuivie ou condamnée pour avoir porté secours à un étranger en situation illégale.

M. Serge Larcher, président , a considéré qu'une application stricte de ce délit de solidarité pourrait conduire à faire de la société guyanaise un État policier, compte tenu du nombre important d'étrangers en situation irrégulière.

Interrogé par Mme Lucienne Malovry sur le nombre de récidive en matière d'immigration clandestine outre-mer, M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a estimé que malgré l'absence d'études précises sur cette question, le phénomène était certainement important.

Observant que l'immigration clandestine se manifestait soit par un franchissement illégal de la frontière, soit par une arrivée régulière suivie d'un maintien sur le territoire après expiration du titre de séjour, M. Daniel Marsin s'est interrogé sur la possibilité de mettre en place un système d'enregistrement des entrées et des sorties du territoire.

En réponse, M. Daniel Dubois, directeur central adjoint de la police aux frontières, a indiqué que la mise en place d'un tel système, utilisant la technique de la biométrie, était à l'étude au sein de l'Union européenne et qu'une expérimentation était actuellement conduite à La Réunion, avec l'accord de la CNIL.

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