II. UNE NOUVELLE ÉTAPE

Le phénomène des violences conjugales est universel : en France, comme ailleurs, ni l'éducation, ni l'argent, ni le milieu social ne peuvent protéger une femme de la violence conjugale. Cependant, la désocialisation et l'insuffisante autonomie financière sont les deux principaux facteurs de fragilité qui en accroissent la fréquence et la gravité.

Le « déclic » qui s'est manifesté dans la société française après l'adoption de la loi du 4 avril 2006, et qui se manifeste par la montée du taux de révélation de ces violences, démontre cependant que ces dernières peuvent être combattues et réduites par une action volontariste des pouvoirs publics. En même temps, l'évolution des comportements et la mise en oeuvre des outils prévus par la loi de 2006 ont fait apparaître l'opportunité d'un certain nombre d'ajustements législatifs. Les deux propositions de loi soumises à l'examen du Sénat s'efforcent de répondre à ce double défi d'impulsion et d'adaptation de notre droit.

A. LA PROPOSITION DE LOI N° 118 (2009-2010), PRÉSENTÉE PAR M. ROLAND COURTEAU ET LES MEMBRES DU GROUPE SOCIALISTE

Présentée par l'auteur de la proposition de loi dont l'initiative avait déjà été déterminante pour l'adoption de la loi du 4 avril 2006, elle vise à franchir une deuxième étape en reprenant certaines des suggestions qui n'avaient pas été retenues par les lois du 4 avril 2006 ou du 5 mars 2007 et en complétant ce dispositif par un volet relatif aux enfants.

Plus concise que le texte adopté par l'Assemblée nationale cette proposition se compose de cinq articles auxquels s'ajoute un gage financier.

- Le premier, en s'inspirant de la législation espagnole, vise tout d'abord à introduire un nouvel article au sein du code pénal destiné à sanctionner ceux qui se livrent à des violences, physiques ou psychologiques, habituelles au sein des couples.

- Lorsque les violences exercées par l'un des époux mettent en danger son conjoint ou ses enfants, l'article 220-1 du code civil permet au juge aux affaires familiales d'organiser la résidence séparée des époux en écartant l'agresseur du logement conjugal pendant quatre mois. L'article 2 prévoit l'extension de la compétence du juge aux affaires familiales aux situations de concubinage et de PACS : celui-ci pourrait ainsi ordonner l'éviction du parent violent du domicile familial dans l'intérêt du parent victime des violences comme dans l'intérêt des enfants.

- L'article 3 prévoit de dispenser dans les écoles, les collèges et les lycées une information sur le respect mutuel et l'égalité entre les sexes à raison d'une séance mensuelle. Ces séances pourront associer les personnes contribuant à la répression des violences à l'égard des femmes, celles qui viennent en aide aux victimes et, plus généralement tout autre intervenant extérieur. Cet article prévoit également d'instituer une journée nationale d'information et de prévention, par voie de presse, radio, télévision..., sur les violences à l'égard des femmes en général, et au sein des couples en particulier.

- Se fondant sur le fait que, dans 24 % des cas de violences conjugales, la victime se confie, en premier lieu, au médecin, aux personnels soignants ou aux associations, bien avant de s'adresser à la police, à la gendarmerie ou à la justice, l'article 4 pose le principe de la formation initiale et continue de tous les acteurs sociaux, médicaux et judiciaires afin d'améliorer l'accueil, la protection et le suivi des victimes de violences conjugales, dans un souci de prévention, de dépistage et de protection des victimes de violences conjugales .

- L'article 5 prévoit enfin que les victimes de violences conjugales bénéficieront de l'aide juridictionnelle sans conditions de ressources.

Pour l'essentiel, les préoccupations de la proposition n° 118 (2009-2010) relative aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, présentée par M. Roland Courteau et les membres du groupe socialiste sont susceptibles d'être satisfaites par les 35 articles du texte adopté par L'Assemblée nationale. Un certain nombre de personnes se sont manifestées auprès des parlementaires pour rappeler que les hommes ne sont pas tous violents et qu'un certain nombre sont également victimes de violences. Au cours des auditions, les associations ont estimé la proportion d'hommes à moins de 2 % du nombre total des victimes de violences conjugales en ajoutant que le taux de révélation était sans doute encore plus faible chez les hommes que chez les femmes. Ces considérations amènent à souligner que l'intitulé de la proposition sénatoriale est plus neutre, au regard du principe d'égalité des chances, que celui qui a été retenu par l'Assemblée nationale.

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