2. Une stratégie ambitieuse pour préserver les marges de progression du chiffre d'affaires de cessions de droits de l'INA

Néanmoins, le stock que l'INA peut encore exploiter commercialement demeure considérable. Le fonds d'archives de l'INA issu des diffuseurs publics représente au total 1 600 000 heures de programmes , dont 800 000 heures de télévision et 800 000 heures de radio. Toutes les heures sont potentiellement exploitables, que ce soit sous forme d'extraits ou d'intégrales, mais leur disponibilité effective pour une commercialisation peut être très variable et dépend des contraintes techniques et juridiques. D'une manière générale, le stock est rarement directement et immédiatement exploitable, compte tenu des adaptations techniques, des analyses juridiques et des libérations de droits auxquelles il est parfois nécessaire de procéder au préalable.

À l'heure actuelle, la demande d'archives porte encore sur des périodes pour lesquelles l'INA détient des droits quasi complets. À plus long terme, le stock commercialisable de l'INA aura tendance à se rétrécir du fait de la disparition progressive de ses droits sur les diffusions d'émissions sous forme intégrale. Les chaînes de télévision publiques s'en réservent désormais la commercialisation, l'INA n'ayant que la mission de les archiver, de les conserver et de les exploiter sous forme d'extraits.

L'INA considère, toutefois, que ce risque ne devrait pas se concrétiser avant dix ans. En effet, l'Institut dispose encore de marges significatives de progression de sa commercialisation d'images : aujourd'hui, 90 % de son chiffre d'affaires de cession de droits est réalisé à partir de seulement 5 % des images disponibles . Aussi, le projet de COM met-il en avant une trajectoire volontariste de 3 % d'augmentation du chiffre d'affaires de cessions de droits sur la période 2010-2014. L'INA compte ainsi mettre en oeuvre une stratégie ambitieuse au service de la montée en puissance de ses recettes commerciales, en s'appuyant sur :

- une meilleure commercialisation de son stock ancien, en proposant une offre attractive d'extraits ;

- l'enrichissement de son catalogue par l'accueil de nouveaux fonds via les dons, les legs et surtout les prises de mandats d'exploitation.

À cet égard, le recours aux mandats d'exploitation devrait constituer, selon l'INA, une réponse efficace au tarissement de ses droits complets d'exploitation : c'est une façon, en effet, pour l'Institut de reconstituer et d'enrichir son offre commerciale avec des programmes issus de la production indépendante, dans un cadre contractuel (le mandat) et non plus sur la base d'une dévolution de droits à titre légal. Dans le cadre d'un mandat d'exploitation, un mandant confie à un mandataire (l'INA, en l'espèce) l'exploitation de son fonds audiovisuel, particulièrement sous la forme d'extraits. L'INA fait l'avance des frais de numérisation et d'enrichissement des notices documentaires du fonds qui lui est confié. Il récupère ensuite la somme investie de façon prioritaire sur un couloir de recettes provenant de l'exploitation du fonds en mandat, le reste étant réparti entre le mandataire et le mandat.

Pour que les recettes issues de l'exploitation des fonds permettent d'amortir les investissements du mandataire, la durée du mandat doit être longue, de l'ordre de 12 à 15 ans. Le système du mandat d'exploitation a le double mérite, d'un côté, de permettre au mandant de faire entretenir et de faire vivre son fonds d'archives par un mandataire à l'expertise reconnue qui se charge de le valoriser et de le commercialiser, et, de l'autre, de garantir le mandataire contre tout recours dès lors que le mandant garde à sa charge la gestion des ayants droit (artistes, auteurs, coproducteurs, etc.).

Les mandats de commercialisation signés à ce jour par l'INA représentent 41 700 heures de programmes, dont, pour les principaux :

- TF1 : 31 000 heures d'actualités ;

- Home (film de M. Arthus Bertrand) : 925 heures de rushes ;

- Agence France-Presse : 556 heures ;

- Ardisson SA : 511 heures ;

- Comité international olympique : 1 541 heures ;

- Amaury Sport Organisation : 968 heures ;

- Fédération française de tennis : 2 781 heures ;

- Fédération française de rugby : 290 heures.

Le chiffre d'affaires provenant des mandats d'exploitation a représenté 500 000 euros en 2008 et 750 000 euros en 2009 (dont 50 %, en 2009, au titre du mandat conclu avec TF1).

Il faut souligner que les chaînes publiques ont maintenu une production propre d'actualités, de magazines et d'émissions de plateaux, et ces programmes ont continué d'alimenter les fonds d'archives de l'INA. Le stock de programmes exploitables concerne, ainsi, très largement l'actualité et les magazines, et ce genre est très représenté dans les ventes d'extraits (aujourd'hui 50 % du chiffre d'affaires des ventes d'extraits). Dès lors, l'enjeu consiste pour l'INA à négocier avec les producteurs privés (ARDIS, par exemple, dans le cas des émissions de M. Thierry Ardisson, ou DMD, pour M. Michel Drucker) des mandats d'exploitation permettant de proposer des émissions ou des oeuvres documentaires produites dans les années 1990 et 2000.

Outre la prise de mandats d'exploitation, l'INA peut s'appuyer, pour l'enrichissement de ses collections, sur les dons et legs ainsi que sur l'acquisition de catalogues. Les dons et legs, qui représentent environ 7 000 heures de programmes, sont versés dans une perspective de conservation patrimoniale et ne présentent pas de dimension commerciale. Ils ne portent souvent que sur les supports matériels et non sur les droits d'exploitation attachés. Ces nouvelles collections sont dans ce cas gérées à l'INA dans le cadre du dépôt légal de l'audiovisuel, pour un usage essentiellement scientifique et universitaire. En revanche, l'acquisition de catalogues, encore peu utilisée par l'INA, est présentée comme une démarche pertinente pour combler des manques ou compléter des thématiques.

Sur la période 2005-2009, couverte par le deuxième COM, la croissance du chiffre d'affaires de cessions de droit initialement prévue était de 33 %. Les résultats enregistrés de 2005 à 2008 se sont ainsi avérés sensiblement supérieurs, en moyenne de + 4 millions d'euros, aux objectifs cibles fixés par le COM pour chaque année. Toutefois, le pôle « Diffusion et Création » de l'INA a été particulièrement touché, en 2009, par la double crise qui a affecté l'audiovisuel en France, avec un effet négatif sur les ventes réalisées par sa direction « Marketing et ventes ». En effet, dans un contexte économique difficile pour un secteur de l'audiovisuel en berne et face aux ajustements liés à la réorganisation de France Télévisions, plusieurs projets ont dû être reportés ou annulés, et des économies ont été annoncées sur le coût des grilles. Le chiffre d'affaires de cessions de droits s'est ainsi élevé, en 2009, à seulement 12,4 millions d'euros, inférieur à l'objectif cible de 13,3 millions d'euros et en baisse de 20 % par rapport au chiffre d'affaires réalisé en 2008 (15,5 millions d'euros de cessions de droits).

Dans le projet de troisième COM, la croissance du chiffre d'affaires de cessions de droits prévue pour la période 2009-2014 est de seulement 16 %, soit un objectif sensiblement moins ambitieux que dans le deuxième COM. En outre, le projet annuel de performance de la mission « Avances à l'audiovisuel public » annexé au projet de loi de finances pour 2010 souligne, pour le programme 845 « Institut national de l'audiovisuel », que la part du chiffre d'affaires résultant des cessions de droits a connu une baisse au cours des deux dernières années en raison des difficultés commerciales de l'INA sur les ventes d'extraits , liées à la baisse des achats de la part des clients historiques.

Dès lors, afin de maintenir la progression de ses cessions de droits, l'INA s'engage, dans le troisième COM, à :

- élargir et diversifier son offre en s'appuyant sur une politique de prises de mandats d'exploitation et d'alliance avec des détenteurs de fonds voisins ou complémentaires ;

- reformater certains programmes pour les rendre plus actuels et attractifs et faciliter ainsi l'accès au marché des diffuseurs récents. Dans cette logique, l'INA développera une politique active de service aux nouveaux médias en ligne (vidéo à la demande, sur abonnement, etc.), reposant sur la constitution d'une offre simplifiée, disponible et tarifaire.

De plus, la généralisation de la numérisation, l'actualisation des accords avec les auteurs et la signature de conventions avec les représentants des ayants droit salariés ont permis d'accélérer l'accès aux fonds sur les plans technique et juridique, et ainsi d'exploiter plus facilement les archives sur les nouveaux circuits de diffusion : Internet, vidéo à la demande, télévision mobile personnelle, etc. Ce travail de simplification juridique et technique permet à l'INA de réellement profiter d'une partie importante des droits de commercialisation qui lui étaient jusqu'ici dévolus mais qui restaient encore purement théoriques en raison de blocages juridiques avec les ayants droit.

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