2ÈME PARTIE : INTÉGRER LA CULTURE DU RISQUE DANS LA GESTION DU LITTORAL

En dépit de la répétition de catastrophes naturelles de cette nature ou de nature similaire, la France demeure peu sensible à des risques qui, pour être localement statistiquement rares, se reproduisent régulièrement sur l'ensemble de notre territoire. L'urbanisation excessive dans des zones sensibles, la déficience des digues et de leur gouvernance, la complexité des dispositifs d'alerte et de prévision sont des questions débattues depuis des années. Pourtant, les réponses, souvent quasi-unanimes, restent lettre morte.

Face à ce constat, votre mission juge indispensable d'intégrer la culture du risque dans la gestion du littoral. A cette fin, elle souhaite d'abord rappeler que le littoral est un espace de plus en plus convoité mais aussi exposé à un risque croissant (I). Elle observe que le cadre législatif actuel répond imparfaitement à cet enjeu (II) et que l'absence de conscience du risque constitue un défi qu'il est impératif de relever (III).

I. LE LITTORAL, UN ESPACE CONVOITÉ MAIS EXPOSÉ À UN RISQUE CROISSANT

A. UNE PRESSION DÉMOGRAPHIQUE ACCRUE SUR LE LITTORAL

Selon les chiffres des Nations Unies, près de 40 % de la population mondiale vit actuellement sur le littoral , plus précisément à moins de 60 kilomètres des côtes. L'ONU prévoit même qu'en 2020, 80 % des hommes habiteront sur une bande côtière de 100 kilomètres.

Cette concentration près des côtes s'explique dans certains cas par des raisons liées à la géographie locale. Ainsi en est-il au Japon , archipel montagneux dont les seules zones habitables sont situées dans les plaines littorales. Selon les chiffres donnés par les représentants de l'ambassade du Japon en France, 70 % du territoire est en zone montagneuse, contre 30 % seulement en zone habitable. 50 % de la population et 75 % des biens sont concentrés sur seulement 10 % du territoire, dans des zones en dessous du niveau de la mer, surtout autour des trois baies majeures.

Toutefois cette répartition démographique s'explique surtout - par une préférence des populations pour les espaces littoraux du fait d'un climat plus doux et de la proximité de la mer, source de richesses. Les grandes métropoles mondiales, dotées de plusieurs millions d'habitants, s'y développent.

L'agence européenne pour l'environnement a publié en 2006 une étude montrant que la population riveraine de la Méditerranée , qui comptait 246 millions d'habitants en 1960, en totalise aujourd'hui 450 millions . En cinq ans, le Portugal a vu ses villes littorales s'étendre de 34 % et l'Espagne de 18 %. Les prévisions font état de près de 700 millions d'hommes à la fin du XXIème siècle sur les rives de la Méditerranée.

La France n'échappe pas à cette tendance. Selon les chiffres fournis par la délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), le littoral a absorbé 25 % de la croissance de la population française , soit 2 millions d'habitants sur 8, entre 1936 et 1968 . Entre 1968 et 1999, la population des communes littorales métropolitaines a continué à croître à un rythme plus rapide que la moyenne nationale, avec un taux de croissance de 20 %, contre 18 % au niveau national. Enfin, entre 1990 et 1999, les communes littorales ont vu leur population progresser de 5,7 % contre 3,6 % au niveau national, soit 200 000 habitants de plus en métropole et autant dans les départements d'Outre-mer. Le taux d'augmentation est donc moins fort que durant les périodes précédentes, mais reste important pour un espace qui représente 4 % du territoire métropolitain. Au total, et selon les chiffres résultant des enquêtes de recensement, la densité au bord du littoral est 2,5 fois plus élevée que sur l'ensemble du territoire , soit 272 habitant au km² contre 108 en moyenne sur l'ensemble du pays. Localement, ces chiffres peuvent s'élever à 2 500 habitants par kilomètre carré, dans certaines parties du littoral des Alpes-Maritimes par exemple.

La dynamique démographique du littoral en France comme dans le monde est donc une donnée majeure dont il faut tenir le plus grand compte.

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