2. Déclinés en France, ces principes conduisent à un plan global de protection des populations et non à un simple plan digue
a) Un plan de gestion du trait de côte plutôt qu'un plan digues

L'élaboration d'une stratégie globale suppose de définir avec précision ce que sont les ouvrages de défense contre la mer. A ce titre, il serait réducteur de ne considérer que les digues de front de mer stricto sensu . Le cordon dunaire, qui a été très attaqué par les tempêtes de ces dernières années, doit être considéré comme une défense naturelle contre la mer qu'il faut bien évidemment conforter. De même, Xynthia a montré que le système hydraulique, avec ses ouvrages, joue un rôle essentiel quand il s'agit d'évacuer l'eau à la suite d'une surverse massive. Sans ces ouvrages, l'eau se retrouve piégée derrière les digues et ces dernières deviennent des obstacles à l'évacuation des eaux. Ainsi, tous les ouvrages, qu'ils soient le résultat de la main de l'homme ou de l'action exclusive de la nature, qui participent effectivement à la défense contre la mer et à la protection des populations, doivent entrer dans le plan digues. C'est vrai pour les ouvrages amont ou aval comme les digues de retrait permettant la formation de casiers hydrauliques, ou encore les berges des étiers.

Il s'agit donc d'une classification des ouvrages par destination , dès lors qu'ils participent à la défense contre la mer, plutôt que par nature.

Enfin, le coût important des ouvrages de protection impose qu'il y ait une réflexion approfondie, mais pragmatique, sur les priorités. Il est évident qu'une attention toute particulière doit être portée à la protection des populations. Ce doit être la priorité. Mais le périmètre d'intervention ne doit pas exclure la problématique de la protection des zones non bâties en ce qu'elles représentent un intérêt économique ou environnemental en termes de biodiversité, d'ailleurs bien souvent façonnée par la main de l'homme.

Pour être efficace, la stratégie ne doit pas se limiter à une vision étroite des seuls ouvrages artificiels protégeant exclusivement des zones habitées. Elle doit prendre en compte les exigences plus globales de la gestion du trait de côte et de la lutte contre les submersions marines.

Il convient de concevoir une approche d'ensemble intégrant le réseau hydraulique qui, dans notre pays, connaît de nombreuses défaillances et les fleuves, comme le font les Pays-Bas.

Le terme de digue correspond lui-même à des ouvrages de nature et de type variables : des ouvrages en remblai, des murs en maçonnerie ou en béton armé, et des ouvrages élevés à d'autres fins (routes, voies ferrées) qui sont amenés à jouer le rôle de digues sans en avoir les caractéristiques techniques. Les épis, qui sont des ouvrages perpendiculaires au trait de côte, jouent également un rôle dans la défense contre la mer. Enfin le cordon dunaire, avec parfois des enrochements, joue un rôle essentiel. Il faut rappeler qu'il existe environ 1 000 kilomètres de dunes sur les côtes de l'Atlantique et de la Manche, en grande partie gérées par l'Office national des forêts.

Un « plan digues » ne peut donc se limiter à un inventaire d'ouvrages et à l'application de solutions systématiques . Il doit procéder d'une étude préalable sur les différentes méthodes de protection des populations, en étudiant par exemple le renforcement des dunes et du trait de côte, et intégrer les procédés de construction les plus expérimentés. Le rehaussement doit tenir compte de l'élévation du niveau des mers déjà intervenue au cours du siècle dernier et pouvant se produire dans les prochaines années. En fait, ce plan doit s'intégrer dans une approche globale du risque de submersion et préconiser des solutions individualisées. Il nécessite également de définir le maître de l'ouvrage , la propriété , mais aussi l'autorité fixant les normes de construction et assurant le contrôle de l'entretien. Il n'aura pas d'effet s'il ne précise pas également le mode de financement immédiat et dans la durée (voir infra).

La mission a insisté à plusieurs reprises pour, non pas l'adoption d'un simple plan digue, mais d'un plan de protection des populations intégrant différentes solutions étudiées au cas par cas.

Elle souhaite que le plan digue annoncé par le Gouvernement fasse l'objet d'une concertation avec les acteurs concernés, en particulier les élus qui connaissent les priorités et l'état des ouvrages existants.

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