3. Le tabou irlandais : l'impôt sur les sociétés

La dureté du plan proposé par le gouvernement irlandais peut laisser songeur tant il fait porter sur le citoyen le coût de la faillite du système bancaire. Entièrement consacré à la recherche de nouvelles recettes, il ne prévoit pas, pour autant, d'actionner le levier de l'imposition sur les sociétés, fût-ce de façon modérée.

L'impôt sur les sociétés demeure en Irlande un sujet tabou, la faiblesse de son taux suscitant un large consensus au sein de la société. Ce sentiment est renforcé par les déclarations alarmistes des responsables des entreprises multinationales, qui, à l'image de la Chambre de commerce americano-irlandaise, prévoient la fermeture des sites en cas d'augmentation de la fiscalité. S'il devait y avoir remise en cause de son taux, celle-ci ne pourrait concerner que les entreprises ne disposant en Irlande que d'une adresse fiscale.

L'avantage comparatif lié à la fiscalité est donc considéré comme un élément fondamental de l'identité nationale irlandaise à l'heure de l'intégration européenne. L'attractivité du territoire et l'ouverture aux multinationales qu'elle induit constitue une double réponse aux peurs de dilution de l'Irlande au sein du vaste ensemble européen et à une perception d'une Europe émolliente, à croissance économique limitée, incapable d'adopter une stratégie de développement viable et de répondre au défi du chômage de masse.

L'attitude de la population irlandaise peut apparaître paradoxale. Elle condamne, tout en l'acceptant de façon résignée, l'austérité imposée par le gouvernement à l'ensemble de la société mais elle refuse, dans le même temps, une participation des entreprises au redressement des banques. Elle critique l'intervention européenne au motif qu'elle remet en cause l'indépendance nationale, mais estime celle-ci garantie par l'ouverture de son territoire et la mondialisation.

Ces réticences justifient les hésitations puis les effets d'annonce du Gouvernement irlandais à l'heure de solliciter l'intervention de l'Union européenne et du Fonds monétaire international. Après avoir été niée, l'aide a été ainsi initialement présentée comme une réponse à la seule crise du secteur bancaire, ne visant pas directement les comptes publics, dont la maîtrise appartient encore au Gouvernement. Les autorités ont toujours affirmé en même temps que la révision du taux d'imposition sur les sociétés ne pouvait constituer un préalable à l'octroi de l'aide.

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