B. DES PROPOSITIONS POUR RÉNOVER LE DIALOGUE ENTRE L'ETAT ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES SUR L'ENSEMBLE DU TERRITOIRE
1. Améliorer le fonctionnement des instances de dialogue
a) L'institutionnalisation de la CNE ainsi que la rénovation de ses missions favoriseraient l'émergence d'un dialogue apaisé.
La pérennité de la CNE est fortement liée à son institutionnalisation et à la redéfinition de son rôle. En effet, comme vos rapporteurs l'ont constaté précédemment, l'absence de fondement juridique de la CNE limite substantiellement son efficacité, privant ainsi les élus locaux et le pouvoir central d'un instrument de dialogue national efficient et dénué de toute crispation.
C'est pourquoi, vos rapporteurs préconisent, en premier lieu, de conférer une assise juridique à la CNE, en insérant un article « fondateur » dans le CGCT 48 ( * ) . Cet ajout permettrait ainsi d'organiser sur des bases juridiques fortes la concertation qui doit présider aux relations entre l'Etat et les collectivités ainsi que l'équilibre des pouvoirs entre les deux partenaires.
Proposition n° 1 : Institutionnaliser la conférence nationale des exécutifs (CNE) par sa consécration dans le CGCT. |
Outre la mise en place d'un fondement juridique de la CNE, le CGCT définirait la composition de la CNE, son rôle et ses modalités de fonctionnement.
S'agissant de la composition , vos rapporteurs optent pour que la CNE réunisse, outre le Premier ministre, les ministres intéressés, les présidents du CFL et du CSFPT, les trois principales associations nationales d'élus (Association des maires de France, Assemblée des départements de France et Association des régions de France), au moins une association nationale d'élus représentant les EPCI à fiscalité propre (Assemblée des communautés de France) et quatre représentants du Parlement.
Afin que le dialogue puisse être constructif, le nombre de ses membres ne devrait pas être trop élevé. S'il n'appartient pas à vos rapporteurs de le définir précisément dans ce rapport, ils considèrent qu'un effectif d'au plus vingt-cinq personnes serait adapté.
Proposition n° 2 : Modifier la composition de la CNE actuelle en ajoutant a minima une association nationale d'élus représentant les EPCI à fiscalité propre et quatre parlementaires. |
Par ailleurs, il apparaît indispensable aux yeux de vos rapporteurs de préciser le rôle et les missions de la CNE . Si cette instance a vocation à être un lieu de concertation, de dialogue et de négociation entre les collectivités territoriales et l'Etat, ses missions doivent être clairement identifiées afin d'éviter qu'elle ne devienne une « coquille vide ».
Il est d'autant plus important de rénover ses objectifs que seul un des trois axes de travail, cités précédemment, est encore valable, les deux autres étant devenus sans objet, à savoir la préparation de la présidence française et une réflexion sur la réforme des collectivités territoriales.
Enfin, vos rapporteurs ayant observé que la multitude d'instances de dialogue n'a pas permis, sur le long terme, des échanges de qualité, ils s'interrogent sur leur fusion au sein d'une CNE renforcée. Ainsi, vos rapporteurs estiment que la CNE pourrait englober les missions de la Conférence nationale des déficits publics.
Dans ces conditions, la CNE pourrait devenir, à l'instar des instances de dialogue entre le pouvoir central et les régions existant dans certains pays européens et dont le fonctionnement a été décrit précédemment, l'instance naturelle de dialogue à haut niveau entre l'Etat et les collectivités territoriales , offrant la possibilité de centraliser des relations qui s'effectuent le plus souvent entre ministères et strates de collectivités. Par conséquent, cette CNE rénovée pourrait se prononcer sur :
- les perspectives de réformes dont la mise en oeuvre est susceptible de toucher les différents niveaux de collectivités territoriales ou leurs groupements ;
- les problématiques liées aux politiques publiques décentralisées nécessitant un partenariat entre l'Etat et les collectivités ;
- l'évolution de la situation des finances publiques, la lutte contre les déficits publics ;
- les projets de loi ainsi que les documents relatifs à la position de la France sur les projets de normes communautaires, ayant trait à l'organisation, aux compétences et aux finances des collectivités territoriales ;
- tout autre sujet intéressant les collectivités territoriales ou le Gouvernement.
Enfin, la CNE pourrait être chargée de la définition des clauses de revoyure prévues dans le cadre des réformes des collectivités territoriales.
Proposition n° 3 : Mettre en place une CNE aux missions rénovées qui aurait vocation à se prononcer sur : - les perspectives de réformes dont la mise en oeuvre est susceptible de toucher les différents niveaux de collectivités territoriales ou leurs groupements ; - les problématiques liées aux politiques publiques décentralisées nécessitant un partenariat entre l'Etat et les collectivités ; - l'évolution de la situation des finances publiques et la lutte contre les déficits publics ; - les projets de loi ainsi que les projets d'actes législatifs de l'Union européenne touchant à l'organisation, aux compétences et aux finances des collectivités territoriales ; - la définition des clauses de revoyure prévues dans le cadre des réformes des collectivités territoriales ; - tout autre sujet intéressant les collectivités territoriales ou le Gouvernement. Proposition n° 4 : Fusionner les missions de la conférence nationale des déficits publics au sein d'une CNE rénovée. |
Enfin, l'institutionnalisation de la CNE et la redéfinition de ses missions nécessitent la mise en place d'un secrétariat technique permanent pour coordonner et organiser ses différentes actions. De plus, pour permettre une réelle progression des dossiers, les réunions de la CNE devraient se tenir à échéance régulière, au minimum trois fois par an, selon un calendrier et un ordre du jour prévus suffisamment à l'avance, pour que les sujets évoqués soient préparés sérieusement.
Vos rapporteurs préconisent donc de doter la CNE d'un secrétariat permanent . Cette structure serait en relation avec les services compétents de l'Etat et les associations représentatives de collectivités pour préparer techniquement les réunions. L'ordre du jour et les dates des réunions seraient décidés par la conférence, en laissant une certaine flexibilité sur la date à condition de respecter le rythme prévu.
Dans la mesure où le quatrième alinéa de l'article 24 de la Constitution dispose que le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales , le secrétariat de la CNE pourrait dépendre de la chambre haute. Cependant, l'équipe administrative de la Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation étant actuellement restreinte, vos rapporteurs préconisent plutôt que la direction générale des collectivités locales (DGCL) assure ce secrétariat, comme elle le fait d'ailleurs pour le CFL, la CCEC ou la CCEN. En revanche, prévoir la présence de fonctionnaires parlementaires dans le secrétariat permettrait au Parlement d'être également représenté dans l'équipe administrative.
Proposition n° 5 : Mettre en place un secrétariat permanent de la CNE et garantir la présence du Parlement en permettant la présence de fonctionnaires parlementaires au sein de ce secrétariat. |
* 48 Pour mémoire, un amendement au projet de loi portant réforme des collectivités territoriales et visant à institutionnaliser la CNE avait été rejeté lors de son examen en commission le 20 mai 2010 à l'Assemblée nationale.