B. LE CALCUL DES DÉDOMMAGEMENTS

1. Les apports de la loi de 2007

La loi du 29 octobre 2007 améliore sensiblement le calcul des dédommagements accordés par les tribunaux aux victimes de contrefaçons, dissuadant ainsi la poursuite des atteintes aux droits de la propriété intellectuelle.

Soucieuse, conformément à la directive 2004/48 21 ( * ) , de donner aux juridictions des bases plus larges pour apprécier le montant des dommages et intérêts accordés aux titulaires de droits lésés, la loi prévoit en effet que les dommages et intérêts devront :

- soit prendre en compte, outre les conséquences économiques négatives et le préjudice moral subis par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur ;

- soit être fixés de manière forfaitaire , ce forfait étant déterminé sur la base minimale des redevances que le titulaire de droits aurait pu percevoir si le contrefacteur avait demandé son autorisation. L'indemnisation forfaitaire est destinée à permettre une réparation du préjudice dans l'hypothèse, par exemple, où des éléments de preuve manquent pour apprécier avec précision le préjudice subi par le titulaire de droits.

2. Les effets de la loi sur le montant des dédommagements accordés par les juridictions civiles

Les travaux préparatoires soulignent que l'intention du législateur, en conformité avec la directive, était de conduire les magistrats à réévaluer le calcul des dédommagements accordés mais sans contrevenir au droit commun de la responsabilité, fondé sur la réparation stricte mais intégrale du préjudice .

Une récente réponse à la question écrite posée par M. Laurent Béteille 22 ( * ) précise que les dispositions de la loi susmentionnées sont de nature, « sans pour autant remettre en cause le principe de réparation intégrale du préjudice, à inciter les tribunaux à prendre en considération l'ensemble des conséquences économiques des actes de contrefaçon dont ils sont saisis ».

Autrement dit, et contrairement à l'interprétation faite par une partie de la doctrine 23 ( * ) , la réforme de 2007 permet certes d'attribuer à la victime tout ou partie des bénéfices réalisés par le contrefacteur grâce à la contrefaçon mais dans la limite de la réparation du préjudice. La réforme ne permet donc pas aux juridictions de dépasser le montant du préjudice et d'écarter dans le domaine particulier de la propriété intellectuelle, la règle traditionnelle de réparation intégrale du seul préjudice (« tout le préjudice mais rien que le préjudice »).

La loi de 2007 a-t-elle conduit à une augmentation des dommages et intérêts ?

Trois ans après sa promulgation, il paraît encore prématuré de répondre avec certitude à cette interrogation.

La réponse à la question écrite précitée relève une augmentation des dommages et intérêts dans le domaine des brevets : « Les premiers éléments d'information recueillis font cependant état d'une augmentation des dommages-intérêts alloués dans le domaine des brevets. »

De même, une note réalisée par l'AAPI (association des avocats de propriété industrielle) le 12 février 2010 conclut que, dans le domaine de la propriété industrielle , « la tendance est à la hausse dans le montant des dommages et intérêts déterminés par les juges ».

Maître Kami Haeri évoque, quant à lui, une tendance -non limitée à la sphère des droits de propriété intellectuelle- des tribunaux civils et commerciaux à mieux apprécier et valoriser le préjudice subi 24 ( * ) .


* 21 Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle.

* 22 Question écrite n° 09776 de M. Laurent Béteille publiée dans le JO Sénat du 30/07/2009 - page 1873 ; Réponse du ministère de la justice publiée dans le JO Sénat du 12/11/2009 - page 2651. La question et la réponse sont consultables sur Internet à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/questions/base/2009/qSEQ090709776.html .

* 23 Voir, par exemple, l'article de M. Hervé Lécuyer, professeur à l'Université Panthéon-Assas (Paris II), dans la Gazette de la Propriété industrielle n° 3, p. 12 à 15 (mars 2008).

* 24 Gazette de la propriété industrielle, n° 6, p. 25.

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