c) Le fonctionnement du crédit d'impôt recherche
Le CIR, mis en place dans sa première version en 1983, a beaucoup évolué depuis son apparition. À l'origine, il ne s'appliquait en effet qu'à « l'excédent des dépenses de recherche exposées au cours d'une année par rapport aux dépenses de même nature, revalorisées de la hausse des prix à la consommation, exposées au cours de l'année précédente ». Son taux avait été fixé à 25 %, dans la limite d'un plafond de 3 millions de francs (457 347 euros). S'il a évolué au fil du temps 163 ( * ) , sa logique profonde est demeurée la même jusqu'en 2004 : le crédit d'impôt ne devait financer que l'accroissement des dépenses de R&D des entreprises, et non les dépenses de R&D elles-mêmes.
Afin d'améliorer l'efficacité du CIR, les lois de finances pour 2004 et 2006 ont porté le plafond du CIR à 16 millions d'euros et, surtout, ont instauré puis renforcé la division du CIR en deux parts :
- une part dite « en accroissement » , s'appliquant, comme auparavant, à l'augmentation des dépenses de R&D des entreprises. Son taux a été diminué, pour s'établir à 45 % à partir de 2004 et à 40 % à partir de 2006 ;
- une part dite « en volume » , dont l'assiette était constituée par l'ensemble des dépenses de recherche et développement exposées par les entreprises. Son taux, de 5 % en 2004, a été porté à 10 % à compter de 2006.
La principale réforme du CIR a enfin été adoptée dans le cadre de la loi de finances pour 2008, qui a singulièrement modifié et renforcé ce dispositif. Cette loi de finances a procédé à la suppression de la part dite « en accroissement » 164 ( * ) , qui correspondait à l'ancienne assiette. En revanche, la part « en volume » a été sensiblement renforcée, puisque son taux de droit commun est triplé , pour atteindre désormais 30 % 165 ( * ) (pour les entreprises qui demandent à bénéficier pour la première fois du CIR, ou qui n'en ont pas bénéficié depuis cinq ans, le taux de la part « en volume » est même majoré à 50 % la première année, puis à 40 % la deuxième année). En outre, le CIR a été déplafonné à l'occasion de la réforme de la loi de finances pour 2008. Toutefois, pour la fraction des dépenses dépassant 100 millions d'euros (ce niveau concernant seulement une vingtaine d'entreprises), le taux du crédit d'impôt a été réduit , pour passer à 5 % 166 ( * ) .
En 2009 et 2010, en raison de la crise et contrairement aux dispositions habituellement en vigueur 167 ( * ) , il a été décidé de procéder au remboursement immédiat du CIR : les entreprises ont pu obtenir, sur demande, le remboursement immédiat d'une estimation de la différence positive entre, d'une part, le montant du CIR calculé à raison des dépenses de recherche engagées au titre des années 2008 et 2009 et, d'autre part, le montant de l'impôt sur le revenu dû au titre de 2008 et 2009.
La loi de finances pour 2011 a procédé à quelques aménagements, restrictifs mais de faible envergure, de ce dispositif complexe 168 ( * ) .
Les dépenses éligibles pour le calcul du CIR sont les dotations aux amortissements des immobilisations affectées à la recherche, les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs, aux techniciens de recherche et aux salariés inventeurs, et, enfin, les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations et fixées forfaitairement à 75 % des dépenses de personnel. À cet égard, il convient, en outre, d'observer que le CIR est soumis à une procédure de rescrit fiscal, qui permet au contribuable de demander à l'administration fiscale si un projet de dépenses de recherche est éligible 169 ( * ) . L'administration dispose alors de trois mois pour répondre de manière motivée, les dépenses étant, à défaut, considérées comme éligibles.
* 163 Le taux du CIR est ainsi passé à 50 % et son plafond a été relevé jusqu'à 6,1 millions d'euros.
* 164 Il s'agissait de rendre cette aide fiscale à la fois plus compréhensible et plus attractive, les modalités de calcul de cette part étant complexes et surtout peu incitatives sur le long terme.
* 165 Sur de telles bases, la réforme ne peut faire que très peu de perdants à court terme et presque aucun au bout de plusieurs années. En effet, seules les entreprises faisant plus que doubler leurs dépenses de R&D peuvent être pénalisées par l'effet cumulé de la suppression de la part « en accroissement » et du triplement de la part « en volume ». Or un tel rythme de progression n'est pas réaliste à moyen et long terme.
* 166 De ce fait, même à taux réduit, tout investissement des entreprises en R&D sur le sol français peut bénéficier d'un soutien fiscal. L'incitation existe donc toujours, y compris pour les grands groupes les plus actifs en matière de recherche, qui dépassaient parfois les anciens plafonds.
* 167 Le CIR est imputé sur l'impôt dû par le contribuable (impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés) au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses de recherche prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été exposées. L'excédent de crédit d'impôt constitue au profit de l'entreprise une créance sur l'État d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période. En d'autres termes, si l'entreprise ne peut imputer le CIR sur son impôt, le reliquat ne lui est remboursé qu'au bout de 4 ans.
* 168 Le forfait pour dépenses de fonctionnement a été réduit de 75 à 50 % des dépenses de personnel mais son assiette est étendue aux amortissements réalisés au titre d'immobilisations affectées à des recherches, à hauteur de 75 % de leur montant ; les dépenses de sous-traitance auprès d'organismes de recherche privés ou d'experts agréés sont désormais retenues dans la limite de trois fois le montant total des autres dépenses de recherche ouvrant droit au CIR ; enfin, les rémunérations versées à des tiers au titre de prestations de conseil pour l'octroi du bénéfice du CIR sont déduites de l'assiette à concurrence de leur montant total si elles sont proportionnelles au montant du CIR et, pour les autres sommes, à hauteur du montant le plus élevé entre 15 000 euros hors taxes et 5 % du montant total des dépenses de recherche éligibles minoré des subventions publiques reçues.
* 169 Pour l'examen de ces demandes, l'administration fiscale peut solliciter l'avis des services du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR) ou d'Oséo lorsque l'appréciation du caractère scientifique et technique du projet de dépenses de recherche présenté par l'entreprise le nécessite. Dans ces conditions, l'avis est notifié au contribuable et à l'administration des impôts.