2. Un dispositif fiscal favorable à l'innovation dans l'industrie

La mission constate avec satisfaction que le crédit d'impôt recherche est un dispositif fiscal qui profite aux PME et pas seulement aux grands groupes, et que, dans l'ensemble, il profite plus à l'industrie qu'aux autres secteurs économiques , ainsi que le montre le troisième rapport adressé au Parlement sur le CIR, établi par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR) 170 ( * ) .

Le MESR a ainsi conduit, en 2009, une enquête sur le CIR auprès de 8 000 entreprises, dont rend compte son dernier rapport. De manière générale, cette étude montre que 57,9 % des sociétés ayant répondu à l'enquête ont déclaré avoir effectué des dépenses de R&D plus élevées du fait du CIR et que 71,5 % des entreprises déclarent être incitées à lancer des projets de « plus long terme » qu'auparavant. De plus, même si l'impact est moindre, il est significatif que 43,5 % des entreprises sondées se déclarent enclines à lancer des projets de R&D « plus risqués ».

Pour ce qui concerne la répartition du CIR par taille d'entreprises, elle ne montre pas de captation de l'avantage fiscal par les seules grandes entreprises, les PME et les ETI demeurant, en effet, nettement prépondérantes. Ce constat serait cependant légèrement à nuancer si l'on se limitait aux seules entreprises indépendantes au sens fiscal : les PME recueillent ainsi 43,9 % du total du CIR en 2009, en progression par rapport à 2008 (où elles ne captaient que 35,2 % du crédit d'impôt) et les entreprises de plus de 5 000 salariés progressent également, passant de 6,3 % à 8,4 %, probablement sous l'effet du déplafonnement du CIR 171 ( * ) .

Sur ce dernier point, le rapport du sénateur Christian Gaudin précité constate que les vingt entreprises ayant déclaré plus de 100 millions d'euros de dépenses de R&D, qui bénéficient à ce titre du CIR au taux de 5 % pour la fraction de leurs dépenses excédant ce seuil, disposent de près de 1,2 milliard d'euros de créances à l'égard de l'État. Il est possible d'en déduire que le coût de la tranche de CIR à 5 % s'élève à 588 millions d'euros 172 ( * ) , ce qui est élevé pour un dispositif dont l'effet incitatif est sans doute bien moindre que celui du CIR « de droit commun », qui est, quant à lui, au taux de 30 %.

Le tableau ci-après retrace la distribution des déclarants et des bénéficiaires du CIR selon la taille des entreprises.

Distribution des bénéficiaires(*) du CIR par taille d'entreprises

(*) Les groupes fiscalement intégrés cumulant le CIR de leurs filiales, le nombre de bénéficiaires est inférieur au nombre de déclarants.

Source : MESR

S'agissant ensuite de la répartition du CIR par secteurs économiques, elle est apparue satisfaisante pour la mission, les industries manufacturières restant de loin les premières bénéficiaires de cet avantage fiscal. Ces industries bénéficient, en effet, des deux tiers du CIR, au travers le plus souvent de holdings de groupes 173 ( * ) .

Le tableau suivant rend compte de la distribution, en pourcentage, des bénéficiaires, des dépenses déclarées et du CIR lui-même en fonction du secteur d'activité des entreprises concernées.

Distribution des bénéficiaires, des dépenses déclarées et du CIR
par secteur d'activité

(en %)

Source : MESR

Ces statistiques attestent bien d'une prépondérance incontestable du secteur industriel, ce qui est également cohérent avec la finalité du CIR. Cela confirme que, conformément aux caractéristiques des dépenses fiscales, la répartition entre les secteurs se réalise par rapport aux caractéristiques des besoins du marché.

Un tel constat plaide pour que la puissance publique ne se préoccupe pas de la ventilation sectorielle du CIR mais se concentre sur la limitation des effets d'aubaine ou, pire, des abus et de la fraude .

Lors des auditions et des déplacements de la mission, certaines dérives du CIR ont en effet été pointées du doigt, à l'instar d'une utilisation abusive par les grandes entreprises, les banques, les assurances ou, encore, par des entreprises de services. Ces effets d'aubaine, de même que l'utilisation du crédit d'impôt recherche pour des activités qui ne seraient pas directement liées au soutien de l'innovation, ne peuvent perdurer et nécessitent une adaptation du dispositif.

Le rapport final des « États généraux de l'industrie » affirme que les évolutions induites par la réforme du CIR de 2008 ne modifient pas en profondeur cette répartition : « le CIR étant, depuis cette réforme, essentiellement proportionnel au volume des dépenses de R&D, il profite de ce fait majoritairement aux secteurs industriels qui représentent une large majorité des dépenses de R&D. Dans le contexte de crise, le CIR contribue au maintien des dépenses de R&D des entreprises ».

Lors de son audition par la mission, M. Hervé Pichon, délégué pour les relations avec les institutions publiques françaises du groupe PSA Peugeot Citroën, a confirmé cette analyse. Après avoir décrit le crédit d'impôt recherche comme un dispositif intelligent, il a ainsi précisé qu'il a permis à son groupe de continuer à investir pendant la crise.

Le constat d'une part prépondérante de l'industrie parmi les bénéficiaires du CIR doit cependant être nuancé : le secteur industriel est effet sous-représentée, si l'on se rapporte à son poids dans le total des dépenses de R&D des entreprises. Il s'agirait en effet, selon des données du MESR de l'année 2007, d'environ 88 % de dépenses de R&D assurées par les entreprises industrielles, contre seulement 12 % pour les entreprises de services.


* 170 Rapport au Parlement sur le crédit d'impôt recherche, mars 2010.

* 171 Ces chiffres doivent être interprétés avec prudence, tant du fait de la présence de la ligne « non renseignés » (13,7 % des entreprises déclarantes) que du fait de la prise en compte des sociétés non indépendantes d'un point de vue fiscal ; ces dernières perçoivent plus des deux tiers du crédit d'impôt, sans que l'on puisse dire si les groupes ou les maisons-mères sont « grandes » ou non. De manière générale, il ne semble pas, toutefois, que le CIR ait été orienté massivement vers les plus grandes entreprises après l'entrée en vigueur de la réforme de 2008.

* 172 En effet, si le CIR était plafonné à 30 millions d'euros, ces vingt bénéficiaires auraient perçu 600 millions d'euros.

* 173 Il est constaté que, pour de nombreux groupes fiscalement intégrés, ce sont des structures du type « holding » qui perçoivent le CIR de l'ensemble de leurs filiales.

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