3. Recentrer le CIR sur les PME, mieux évaluer son impact sur l'industrie et l'étendre à l'innovation

Si le CIR constitue un dispositif fiscal qui profite efficacement aux PME, la mission juge utile de recentrer encore davantage ce crédit d'impôt sur les PME.

D'une part, une modulation du taux du CIR selon la taille des entreprises , en vue de privilégier les PME, pourrait être envisagée. En vue de garantir un accès effectif des PME au CIR, une part significative du CIR devrait leur être réservée .

D'autre part, la mission propose de renforcer les logiques coopératives entre grands groupes et PME en matière de recherche et développement . Il peut être observé à cet égard que le CIR encourage déjà la collaboration entre grands groupes et PME d'une part, et entreprises et organismes publiques de recherche d'autre part, dans la mesure où les dépenses sous-traitées à certains organismes publics ou privés (agréés à cet effet) peuvent entrer dans l'assiette du CIR dans la limite d'un plafond de 12 millions d'euros pour les entités publiques et de 10 millions d'euros pour les entités privées. Une augmentation de ces plafonds permettrait certainement de consolider l'intérêt financier des logiques de rapprochement.

Par ailleurs, la mission propose la mise en place d' une véritable stratégie nationale d'évaluation du CIR . Elle viserait à contrôler toutes les implications du crédit d'impôt, qu'il s'agisse de son efficacité économique pour les entreprises, de son impact sur l'attractivité du territoire national, ou, surtout, de sa contribution au dynamisme de nos secteurs industriels . Cette stratégie d'évaluation, qui se conjuguerait avec une vigilance accrue en matière de lutte contre la fraude et les abus 174 ( * ) , permettrait d'apprécier rigoureusement le retour de chacune des composantes du crédit d'impôt recherche. À ce sujet, l'efficacité, en termes d'effets incitatifs, de la tranche de crédit d'impôt au taux de 5 % dont bénéficient la fraction de dépenses de R&D des entreprises qui dépassent 100 millions d'euros est incertaine, alors même que son coût s'est élevé à 588 millions d'euros en 2009. La réflexion à ce niveau doit donc se poursuivre, sachant que des pistes stimulantes ont été tracées dans le dernier rapport du Conseil des prélèvements obligatoires 175 ( * ) et que le travail d'évaluation de l'Inspection générale des finances est appelé à être prolongé 176 ( * ) .

Enfin, la mission plaide pour un élargissement des dépenses éligibles au CIR vers l'aval du cycle de la R&D , le cas échéant en réservant une telle extension aux PME. Un tel aménagement du CIR s'apparenterait à l'instauration d'un « crédit d'impôt innovation ». Son taux devra être moindre que les 30 % du CIR dans la mesure où les contraintes budgétaires actuelles sont fortes et que les dépenses d'innovation hors R&D contribuent moins à engendrer d'effets externes liés à la diffusion des connaissances. Et il devra prévenir les effets d'aubaine qui ne manqueront d'accompagner sa mise en oeuvre.

Il nécessitera également d'établir une distinction nette entre la recherche et l'innovation. D'après le rapport final des « États généraux de l'industrie », l'assiette de cet outil fiscal serait distincte de celle du CIR, et serait constituée par « les dépenses de conception technique d'un nouveau produit ou service aboutissant à la réalisation du prototype, incluant le design qui est une forme d'innovation source d'importants gains de compétitivité. La définition précise de l'assiette, du taux et du champ d'application du crédit d'impôt innovation devrait être arrêtée en fonction de simulations et dans un cadre de concertation adapté ».

La mission remarque que la recherche se situe généralement clairement en amont du cycle de la production et que ses résultats présentent la particularité d'être incertains 177 ( * ) . À l'inverse, l'innovation vise pour sa part à produire ou à organiser l'entreprise en fonction de connaissances connues, même si ces dernières peuvent être tout particulièrement récentes et nouvelles.


* 174 Il s'agirait ainsi de s'assurer que les montages d'optimisation fiscale réalisés par certaines entreprises ne conduisent pas à gonfler exagérément les sommes perçues au titre du crédit d'impôt.

* 175 Rapport du Conseil des prélèvements obligatoires « Entreprises et "niches" fiscales et sociales. Des dispositifs dérogatoires nombreux », octobre 2010, pp.303 à 306.

* 176 « Mission d'évaluation sur le crédit d'impôt recherche », rapport n° 2010-M-035-02 de l'Inspection générale des finances, septembre 2010.

* 177 Pour reprendre les termes figurant dans le manuel de Frascati publié par l'OCDE, qui constitue une référence internationale : « le critère fondamental permettant de distinguer la R&D des activités connexes est l'existence, au titre de la R&D, d'un élément de nouveauté non négligeable et la dissipation d'une incertitude scientifique et/ou technologique, autrement dit lorsque la solution d'un problème n'apparaît pas évidente à quelqu'un qui est parfaitement au fait de l'ensemble des connaissances et techniques de base couramment utilisées dans le secteur considéré ».

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