2. La nécessité d'une vitrine au service d'une meilleure connaissance des collections historiques en France

À la différence des beaux-arts pour lesquels notre pays dispose d'établissements publics nationaux prestigieux tels que le Louvre, le Centre national d'art et de culture Georges Pompidou ou le musée d'Orsay, l'histoire ne bénéficie pas d'une institution de médiation culturelle susceptible de valoriser aussi bien les résultats de sa recherche que nos collections à caractère historique au plan national et international. Or, au cours de ses auditions, votre rapporteur a pu identifier une véritable demande sociale et scientifique en faveur de la constitution d'une vitrine nationale qui soit en mesure de conférer à nos collections historiques et à nos musées d'histoire nationaux et territoriaux la visibilité qu'ils méritent .

La notion de musée d'histoire recouvre, en France, une réalité protéiforme, caractérisée une très grande multiplicité d'établissements présentant une collection historique et parmi lesquels la synthèse est particulièrement difficile à opérer. Signe de cette difficulté à dégager une ambition, une stratégie ou des principes d'organisation communs entre ces divers organismes et établissements, on a pu constater qu'en même temps que se multipliaient les musées d'histoire, les vocables pour les désigner se sont diversifiés pour préférer à celui de « musée », jugé passéiste et démodé, ceux de « mémorial » et d' « historial ».

À l'heure actuelle, la plupart des musées d'histoire en France travaillent de façon isolée, aussi bien les uns vis-à-vis des autres que par rapport au monde de la recherche en histoire. Ainsi, parmi les problématiques recensées par M. Dominique Vièle et Mme Marie-Hélène Joly en introduction du colloque « Des musées d'histoire pour l'avenir » de 1996, on peut citer :

- la nécessité de développer une meilleure connaissance et une plus grande médiatisation des collections à caractère historique au niveau national , dont nous n'avons encore qu'une vision parcellaire voire erronée, en l'absence de mécanismes réguliers de partage entre nos musées d'histoire. Ils considèrent, ainsi, que « les prochaines années devraient voir un effort de mise en réseau et de publications thématiques communes, pour faciliter la réflexion » 14 ( * ) ;

- nombreux sont les musées d'histoire qui n'entretiennent aucun lien avec les acteurs et les institutions de la discipline historique , ce qui peut les conduire à ignorer les grandes évolutions de l'historiographie et à privilégier une histoire à caractère principalement événementiel, axée sur les batailles et les grands hommes.

Les musées d'histoire courent le risque de perdre des publics en ne renouvelant pas leurs contenus et leurs modes de présentation au regard des évolutions de l'historiographie et des acquis de la recherche historique. Il est indispensable de travailler à la capacité d'évolution et d'adaptation des musées d'histoire, en entretenant un lien permanent avec la communauté scientifique.

Mme Marie-Hélène Joly souligne que « si nombre de musées d'histoire se sont créés au XIX e siècle, on observe depuis quinze à vingt ans une multiplication de ces établissements, touchant principalement les musées d'histoire locale et les musées de guerre, et il convient de replacer ce phénomène dans le contexte plus général de la multiplication des musées d'identité, d'ethnographie et de techniques à partir des années 1970 » 15 ( * ) . La très large prédominance de l'histoire locale dans la conception des musées d'histoire n'a pas empêché, pour autant, l'émergence de quelques établissements à vocation plus généraliste, tels que le Mémorial de Caen comme musée généraliste dédié à la Seconde Guerre mondiale ou l'Historial de Péronne comme musée généraliste consacré à la Première Guerre mondiale. Néanmoins, les exemples de musées d'histoire proposant une synthèse nationale demeurent rares et sont subordonnés à la constitution de comités scientifiques, composés d'historiens, susceptibles d'élargir leur perspective. Or, la mise en place de ces comités scientifiques et la formalisation de liens permanents avec la communauté scientifique sont loin d'être systématiques en ce qui concerne les nombreux musées d'histoire éparpillés sur notre territoire.


* 14 VIÈLE, Dominique, et JOLY, Marie-Hélène, « Problématiques du colloque » in Des musées d'histoire pour l'avenir , actes du colloque organisé à l'Historial de Péronne du 19 au 21 novembre 1996, Noêsis, Paris, 1998.

* 15 JOLY, Marie-Hélène, « Les musées d'histoire » in Des musées d'histoire pour l'avenir , actes du colloque organisé à l'Historial de Péronne du 19 au 21 novembre 1996, Noêsis, Paris, 1998.

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