B. UNE DOCTRINE D'INVESTISSEMENT À AFFERMIR

1. Le FSI n'est pas un fonds « classique » de capital-investissement
a) Veiller à ne pas exercer un effet d'éviction à l'égard des acteurs privés

A l'instar des dirigeants et actionnaires du FSI, votre rapporteur spécial estime que cette structure n'a clairement pas vocation à concurrencer les fonds privés de capital-investissement , dès lors que ceux-ci ne présentent pas une menace pour les intérêts stratégiques de notre économie, mais à exercer un effet de levier sur le marché, en incitant les investisseurs privés à prendre conscience de l'intérêt stratégique d'une société. De même, il ne saurait constituer un « ultime recours » pour des entreprises non viables ou structurellement déficitaires.

Le directeur général du FSI estime que le risque éventuel d'effet d'éviction à l'égard du secteur privé est marginal . Créé au plus fort de la crise, le FSI a permis en 2009 de pallier l'absence d'investisseurs dans un marché du capital-investissement très déprimé. Il peut ainsi combler un manque de financements disponibles pour des entreprises pourtant porteuses de projets de croissance. En tant qu'investisseur avisé, il doit intervenir à des conditions de marché , mais il ne participe pas aux processus concurrentiels de cessions 71 ( * ) et envisage des durées de retour sur investissement plus longues que celles des acteurs privés.

Les conditions d'investissement du FSI ne sont donc pas immédiatement comparables à celles des fonds privés de capital-investissement. La distinction entre complémentarité et substitution peut toutefois se révéler subtile . En jouant un rôle proche des fonds privés, mais avec des exigences financières moins strictes en termes de taux annuel de rendement interne, le FSI est susceptible d'exercer une forme de concurrence à l'égard des acteurs traditionnels du capital-investissement. Mais en tant qu'investisseur de long terme, socialement responsable, minoritaire et soucieux de stabiliser le capital des sociétés, il entend aussi apporter une valeur ajoutée qui ne soit pas que financière .

Le président du COS, Jean-François Dehecq, a également indiqué à votre rapporteur spécial que, de son point de vue, certains investissements auraient sans doute pu être réalisés sans le FSI. En outre, ainsi qu'il a été évoqué plus haut, la nature des premiers recrutements, réalisés auprès de fonds de capital-investissement, a imprimé sa marque sur l'approche financière du Fonds.

L'activité du capital-investissement est corrélée aux cycles économiques 72 ( * ) . Il convient donc de veiller davantage, dans la période actuelle de reprise de la croissance et de dynamisation du capital-investissement, à ce que le FSI ne se substitue pas aux fonds privés.

Votre rapporteur spécial juge ainsi que le Fonds devrait s'abstenir d'intervenir si sa présence ne crée pas de réel effet d'entraînement sur d'autres investisseurs et s'il apparaît qu'un investissement potentiel peut être financé dans de bonnes conditions par les seuls acteurs privés. Jean-Dominique Comolli a ainsi confirmé à votre rapporteur spécial que le FSI n'a vocation à intervenir que si le marché ne le fait pas, ou en tant qu'alternative à la reprise par un fonds dont les objectifs n'apparaîtraient que financiers et de court terme. Ses interventions reposent sur une analyse « contrefactuelle » , consistant à évaluer ce qu'il adviendrait de la société si le FSI ne la soutenait pas.

Outre le FSI, le groupe CDC est aussi un investisseur avisé de long terme , qui se positionne à la fois comme acteur financier (dont les revenus contribuent au financement de ses missions d'intérêt public) et comme investisseur d'intérêt général, au profit du développement territorial et des PME. Ses doctrines d'investissement ont ainsi été précisées et publiées le 18 décembre 2008.

A cet égard, votre rapporteur spécial s'interroge sur la légitimité du positionnement de la Caisse sur le segment du LBO, via sa filiale Qualium (ex-CDC Capital Investissement), qui détient notamment des sociétés telles que Quick et la Foir'fouille. Certes, Qualium investit également sur le segment du capital-développement et entend se distinguer des fonds privés de LBO en intégrant explicitement les principaux thèmes de l'investissement socialement responsable. La contribution du LBO à l'intérêt général, malgré son insertion dans les principes d'investissement de la Caisse, paraît toutefois plus ténue que celle des autres activités de capital-investissement financées par la CDC.


* 71 Les phénomènes d' « enchères » sont toutefois plutôt constatés sur le segment du LBO en haut de cycle (effet de rareté et abondance des liquidités).

* 72 Avec généralement un certain décalage, lié à la phase de levées de fonds.

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