ANNEXE VIII

CONTRIBUTION DU GROUPE RDSE

La Commission de l'Économie, du Développement Durable et de l'Aménagement du Territoire du Sénat a examiné, le mercredi 8 juin 2011, la dernière version du Schéma National des Infrastructures de Transport (SNIT). Le groupe RDSE ne s'est pas opposé à ce document dans la mesure où des avancées concrètes et positives ont été obtenues grâce au travail du groupe conduit par le Sénateur Louis Nègre. Nous rappelons que c'est à la demande insistante de notre collègue Raymond Vall, Sénateur RDSE du Gers, que ce groupe de suivi a été constitué, et que l'économie générale du premier projet de SNIT a été améliorée. Pourtant bien des aspects du SNIT demeurent ambigus, insuffisants, voire inacceptables. Ce sont les solutions et les réponses apportées dans la suite des travaux qui détermineront la position finale du groupe RDSE et de chacun de ses membres.

Nos observations peuvent être articulées autour des dix thèmes dans la présentation des conclusions de la Commission. Nous rappelons ces dix points :

1. Expertise indépendante de l'état des réseaux routiers et fluviaux.

Nous soutenons l'idée présentée par le groupe de travail d'un diagnostic et d'un chiffrage de la mise à niveau des réseaux routiers et fluviaux, conduit par un organisme privé et indépendant, comme cela a été fait pour le ferroviaire par l'Ecole polytechnique de Lausanne.

2. Association des collectivités locales

Le projet de SNIT implique financièrement les collectivités locales à un niveau jamais atteint et dont la « soutenabilité » n'est pas établie. Le premier corolaire de cette perspective est la légitimité et la nécessité d'une concertation étroite et permanente avec les contributeurs locaux. Notre groupe est également favorable au principe d'une actualisation périodique du SNIT. Mais surtout cette sollicitation financière des collectivités locales serait totalement inacceptable si l'État continuait de diminuer ses efforts annuels d'entretien de son réseau. La redistribution des compétences en matière de domaine public routier a suffisamment allégé la charge de l'État, en accroissant corrélativement celles des collectivités, pour qu'aujourd'hui il ne soit plus acceptable de voir le domaine routier national, dans certaines sections, se dégrader en deçà des conditions minimales de sécurité et de fonctionnalité, et il convient de rappeler que lors du transfert aux départements d'une grande partie du réseau national le ministre de l'Equipement avait officiellement pris l'engagement de ne pas solliciter les collectivités locales pour l'entretien, la modernisation du réseau restant à l'État.

3. La pérennisation des ressources de l'AFITF

Il est évident pour notre groupe que les cofinancements d'infrastructures ne peuvent continuer d'impliquer de plus en plus les ressources des collectivités territoriales. Il faut trouver des financements pérennes hors des budgets locaux. L'éco-redevance est un exemple, et nous ne sommes pas opposés à la recherche d'autres ressources pour atteindre certains objectifs prioritaires de modernisation et de sécurisation des infrastructures de transport.

4. La hiérarchisation des projets

Cette hiérarchisation nous semble évidente et incontournable compte tenu de l'insuffisance des ressources. Le rapport n'a pas assez souligné combien la rénovation de certains réseaux existants devait être prioritaire par rapport à la construction de nouvelles infrastructures. En effet la réalité territoriale est encore souvent celle du dépérissement et de l'abandon de vastes zones mal desservies tant par la route, le fer que le fluvial et l'aérien. Dans le projet actuel de SNIT les zones enclavées, mal desservies, voire pas desservies du tout, sont confinées dans leur isolement. Les meilleurs exemples sont - et notre collègue Raymond Vall s'est farouchement battu pour lui - le centre du sud-ouest, autour de la RN 21, et l'ouest du massif central avec le problème de la RN 122 et l'enclavement d'Aurillac (ville préfecture) mis en exergue par notre collègue Jacques Mézard. La question n'est même pas posée de savoir si ces zones offrent des opportunités en termes d'infrastructures existantes à aménager (par exemple des lignes ferroviaires inutilisées), encore moins des conséquences à venir de la pérennisation de leur situation actuelle. La ruralité est, dans ce document, l'absente sacrifiée, a contrario des ambitions clairement formulées lors du CIAT du 11 mai 2010. Nous sommes aux antipodes de l'engagement solennel du Président de la République enjoignant, dans son discours de Morée du 9 février 2010 que le « SNIT permette de régler les problèmes d'enclavement routier que connaissent encore nos territoires ».

5. La problématique routière

Nous nous associons aux conclusions énoncées sur ce point par le Président Louis NEGRE, mais nous attendons que les choses soient dites plus clairement, plus fermement, de façon plus pragmatique et que les conséquences utiles en soient tirées. Faisons un usage intelligent du Grenelle de l'environnement. Ne diabolisons pas systématiquement le routier, surtout lorsqu'il n'y a pas d'alternative pertinente en matière de transport et de désenclavement. Que dit l'article 10 de la loi dite « Grenelle I » ? Il pose comme principe que l'augmentation des capacités routières doit être limitée au traitement des points de congestion, des problèmes de sécurité ou des besoins d'intérêt local. Quelle interprétation en a le Gouvernement ? Il refuse d'inscrire dans le SNIT les projets d'aménagement de routes existantes qui ne répondent qu'à des problèmes de desserte du territoire, de sécurité, de congestion, de nuisances, ou d'intégration environnementale. Il veut réserver le SNIT aux aménagements induisant de « nouvelles fonctionnalités », modifiant à grande échelle les comportements au travers de nouveaux trafics ou des reports modaux. Cette interprétation du Grenelle nous semble erronée et abusive. Nous sommes nombreux à penser au sein du RDSE que le Gouvernement instrumentalise le Grenelle. Nous faisons de la reprise des ambitions de désenclavement rural affichées lors du CIAT du 11 mai 2010 une condition incontournable de son soutien.

6. L'urgence du lancement des études

Nos travaux ont conduit à la prise en compte dans le SNIT d'un certain nombre d'opérations vitales pour l'accessibilité de territoires enclavés. Ces itinéraires font l'objet d'une fiche spécifique, dite ROU 6, annexée au SNIT. Nous demandons l'inscription de crédits d'études pour ces onze projets prioritaires dès la prochaine loi de finances.

7. Les externalités négatives du transport routier de marchandises

Nous ne sommes pas opposés à l'idée formulée par le président du groupe de travail d'une étude sur ce sujet confiée à un organisme indépendant.

8. La régénération du réseau ferroviaire

Nous sommes comme tous nos collègues préoccupés par le vieillissement du réseau ferré et inquiets de la faisabilité financière des efforts qu'il faudra déployer dès 2012 pour, après avoir contenu la dégradation, entreprendre une véritable régénération de notre système ferroviaire. Là encore la question des ressources pérennes ne peut être évacuée.

9. Le SNIT et le réseau transeuropéen de transport (RTE-T)

Nous sommes d'accord avec les conclusions présentées par le président du groupe de travail quant à l'insuffisance de l'inscription du SNIT dans un contexte et une perspective européenne. La part du trafic routier relevant de l'international nous parait devoir être mieux appréciée, ainsi que les conséquences à en tirer en matière de plans de financement des travaux de modernisation. Nous pensons également, comme lui, qu'il faut approfondir la problématique du développement portuaire et de son interconnexion avec les réseaux ferré et fluvial.

10. L'évaluation environnementale du SNIT

Les conclusions du groupe de travail n'appellent pas d'observations particulières de notre part. Bien au contraire, nous appuyons son exigence de territorialisation et le réalisme de ses considérations en matière de transferts modaux.

Notre groupe a repris, à dessein, l'approche de dix angles d'appréciation du projet de SNIT. Les dix observations du Président Emorine n'épuisent pas le sujet. Il ne nous est pas possible de taire, dans un document d'ambition planificatrice à vingt ou trente ans, comme se veut être le SNIT, l'absence accablante de projets emblématiques comme par exemple la Traversée Centrale des Pyrénées, qui n'est que maladroitement et équivoquement mentionnée. Certains collègues feraient sans soute la même observation concernant la RCEA (Route Centre Europe Atlantique), d'autres le dernier maillon de l'A51.

Le groupe du RDSE salue le travail réalisé par ce groupe de suivi qui a répondu aux sollicitations pressantes de notre collègue Raymond Vall, que la première version du document scandalisait, et aux observation faites lors du débat qui s'est tenu au Sénat le 15 février 2011 en séance publique à la demande du président du RDSE, Yvon Collin, observations faites tant par Raymond Vall que par Jacques Mézard qui sont intervenus pour notre groupe dans ce débat. Dans la version aujourd'hui présentée les lignes ont bougé, mais demeurent nécessaires un recadrage et un recalage des grands silences du SNIT sur la ruralité et les enjeux du désenclavement. Le groupe RDSE ne se contentera pas d'intentions louables. Il sera vigilant sur les engagements affichés quant au lancement des études, par exemple sur la modernisation et la sécurisation de la RN 21. Citons, une dernière fois, le discours de Morée (9 février 2010) du Président de la République: « Autant j'étais contre le tout-autoroute ou le tout-route comme on a pu le voir pendant des années dans le pays ; autant passer à l'excès inverse de l'interdiction de tout projet, c'est condamner des départements et des territoires à une mort qui ne correspond en rien à leur avenir . » C'est bien la traduction concrète de ces engagements solennels qui déterminera nos prises de positions à venir.

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