2. Syndicats et négociations

De la même manière, le paysage syndical favoriserait le dialogue social. Il semble cependant exister sur ce point un décalage important entre la situation prévalant dans l'industrie où, du côté des salariés mais aussi des entreprises, il existe une forte tradition syndicale, et les autres secteurs.

En outre, une érosion de la participation syndicale est en cours en Allemagne avec cependant un peu moins d'ampleur qu'en France.

Le paysage syndical, des employeurs comme des salariés,
est-il aussi fragmenté qu'en France ? La représentativité des différents acteurs fait-elle l'objet d'un débat ?
(1)

« En ce qui concerne les salariés, on constate, depuis la réunification, une baisse significative du taux de syndicalisation. Il est ainsi passé en 20 ans de 40 % à 17 % avec de très fortes disparités, il reste traditionnellement élevé dans les secteurs industriels et faible dans les services, à l'exception du secteur public et parapublic.

Le paysage syndical n'en demeure pas moins assez concentré. La Confédération générale des syndicats (DGB) regroupe, avec un peu plus de 6 millions d'adhérents (dont retraités), en effet 80 % des salariés syndiqués. C'est toutefois une centrale syndicale très déconcentrée, organisées en fédérations professionnelles qui, dans les faits, sont les véritables syndicats allemands. Les deux plus importants sont IG Metall (industrie métallurgique et automobile) et Ver.di (services) avec 1,5 million d'adhérents chacun.

La seule organisation importante non affiliée au DGB est la Fédération des fonctionnaires allemands (DBB) qui, outre la représentation quasi exclusive des agents publiques statutaires, regroupe des syndicats des anciens services publics (poste, télécommunications, transports). Elle regroupe 1,3 million d'adhérents.

Ces deux organisations sont considérées comme représentatives.

Il n'en va pas automatiquement de même avec les autres organisations syndicales de salariés, dont les Syndicats chrétiens, qui se sont vus, récemment, refusé la capacité à signer un accord instituant un salaire minimum dans le secteur postal.

En ce qui concerne les employeurs, l'Allemagne connaît une division traditionnelle entre la Confédération des associations d'employeurs allemands (BDA), qui représente les intérêts sociaux des employeurs, et la Fédération de l'industrie (BDI) qui représente les intérêts économiques de l'industrie.

Là encore, on assiste à une nette érosion de la représentativité des organisations patronales. Au moment de la réunification, environ les trois quarts des salariés travaillaient dans des entreprises adhérentes à une organisation patronale signataire d'une convention collective. C'est seulement le cas de 40 % d'entre eux aujourd'hui ».

(1) Source : rapport de la délégation sénatoriale à la prospective n° 227 « Prospective du pacte social dans l'entreprise ».

A priori , le régime de la négociation salariale ne diffère pas significativement du régime appliqué en France. Cependant, les extensions de conventions collectives seraient plus rares selon une réponse à un questionnaire adressé par les rapporteurs de la délégation à la prospective signataires de son rapport sur la prospective du pacte social dans l'entreprise.

« Les salaires ainsi que les conditions de travail sont déterminés par le contrat de travail, encadré par la convention collective régulièrement négociée. En principe, les accords collectifs ne valent que pour les parties : entreprises membres de la ou des associations patronales et adhérents aux syndicats signataire. Dans les faits, les entreprises parties prenantes étendent le bénéfice de la convention à tous leurs salariés.

En outre, le ministère du travail a la possibilité d'étendre une convention collective à l'ensemble d'une branche ou d'un secteur à condition que les employeurs soumis représentent plus de 50 % des salariés de la branche ou du secteur en question. Cette dernière disposition est très rarement appliquée.

Les accords collectifs peuvent être négociés à plusieurs niveaux :

au niveau de l'entreprise, comme c'est souvent le cas dans l'automobile, mais aussi les anciens monopoles d'État (énergie, transports publics, poste et télécom) ;

au niveau national, comme dans l'imprimerie ;

au niveau d'un Land, comme dans la métallurgie, mais dans ce cas il est fréquent qu'une région ait un rôle pilote et que l'accord conclu soit transposé dans les autres régions moyennant des ajustements. »

Par ailleurs, la réunification serait prise en compte dans les négociations salariales.

« Enfin, les différences de niveau de vie et de situation de l'emploi font que dans la plupart des branches existe une dualité de convention collective entre les anciens Länder de l'Ouest et les nouveaux de l'Est (ex RDA). Dans l'ensemble, les conventions collectives sont conclues au niveau de la branche (80 % à l'Est, 92 % à l'Ouest), le reste étant au niveau de l'entreprise ».

Enfin, mais une forte pression existe pour une réforme, l'absence de salaire minimum donnerait plus d'espace à la négociation salariale qu'elle n'en a en France.

« Il n'existe pas de salaire minimum universel, des salaires minima de branche étant réglés par les accords collectifs. Alors qu'ils avaient refusé un projet de salaire minimum il y a 10 ans, les syndicats font campagne depuis 2006 pour l'instauration d'une telle législation. Passée au second plan avec la crise, la revendication d'un salaire minimum généralisé à 8,50 euros est l'objet d'une grande offensive des syndicats comme on l'a vu lors de leur récent congrès.

Par rapport au contrat de coalition, hostile, la position du gouvernement évolue. L'hostilité des partis au pouvoir à un salaire minimum généralisé s'est longtemps fondée sur des craintes pour l'emploi, comme le manifeste le contrat de coalition qui prévoyait de réexaminer à cette aune les salaires instituées par le gouvernement dans certaines branches. Si Mme Merkel, lors de son intervention au congrès du DGB en mai, a refusé l'idée d'un salaire minimum généralisé, la ministre du travail et des affaires sociales y a annoncé son soutien à l'instauration d'un salaire minimum dans le secteur de l'intérim, tout comme dans le secteur des soins aux malades et aux personnes âgées. Ce dernier a été adopté entre-temps, entrant en vigueur le 1er août, portant à 8,50 euros le salaire minimum à l'Ouest, 7,50 euros à l'Est.

Cette évolution est notamment la conséquence de l'ouverture du marché du travail aux ressortissants des nouveaux États-membres, appuyée par la jurisprudence Rüffert de la Cour de justice des communautés européennes. Gouvernement, salariés comme entrepreneurs du secteur craignent en effet la concurrence d'intérimaires des nouveaux États-même qui, en l'absence de salaire minimum généralisé et opposable à toutes les entreprises, pourraient proposer des prestations de service sur la base de 3 ou 4 euros de l'heure. Les entreprises qui pratiquent des tarifs supérieurs ou voisins du salaire minimum revendiqué par les organisations syndicales ont donc, dans ce contexte, tout intérêt à l'instauration d'un salaire minimum légal ou à tout le moins de salaires minima ayant force légale dans toute la branche ».

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