2. Mettre en oeuvre sans tarder les avancées de la loi « Médicament » en matière de dispositifs médicaux
a) Tirer profit des avancées de la loi « Médicament »

L'objectif affiché de la loi du 29 décembre 2011 était de corriger les insuffisances du système français de pharmacovigilance, mises en lumière par le scandale du Mediator. Son champ dépassait celui des règles applicables au contrôle et à la surveillance du médicament et concernait également, à travers plusieurs de ses dispositions, les dispositifs médicaux : renforcement des conditions dans lesquelles ceux pris en charge par l'assurance maladie sont contrôlés (article 35), évaluation de ceux utilisés à l'hôpital (article 37), encadrement de la publicité pour les dispositifs médicaux (article 34), création d'un groupement d'intérêt public (Gip) habilité à réaliser des études de vigilance à partir des données de l'assurance maladie (article 33).

Six mois après la promulgation de la loi, les décrets d'application de ces articles ne sont toujours pas parus , bien que l'échéancier de mise en application de la loi, disponible sur le site Légifrance 79 ( * ) , affiche toujours une publication envisagée en avril 2012. Seules les modalités d'application des mesures concernant la publicité ont été fixées par un décret du 9 mai 2012 80 ( * ) .

Une telle situation est regrettable car les dispositions en question répondent à plusieurs critiques communément soulevées à l'encontre de la réglementation des dispositifs médicaux implantables et corrigent certaines de ses lacunes.

Proposition n° 11 :
Publier rapidement les textes d'application de la loi « Médicament »
relatifs aux dispositifs médicaux

b) Contrôler la conformité des dispositifs médicaux aux spécifications requises pour pouvoir être remboursés

L'article 35 donne à l'ANSM le pouvoir d'effectuer un contrôle des dispositifs médicaux inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables (LPP), c'est-à-dire ceux remboursés par l'assurance maladie, afin de s'assurer qu'ils respectent les critères techniques sur la base desquels l'inscription sur cette liste est autorisée. Si, en conduisant un tel contrôle, elle constate qu'un fabricant n'a pas respecté ses obligations, l'ANSM le met en demeure de s'y conformer et le comité économique des produits de santé (Ceps) peut lui infliger une pénalité financière dont le montant peut aller jusqu'à 10 % du chiffre d'affaires réalisé par le fabricant en France.

La procédure d'inscription la plus courante sur la LPP, dite par description générique 81 ( * ) , permet à des dispositifs médicaux présentant des caractéristiques techniques similaires à celles de produits faisant déjà partie de la liste d'y figurer après une simple déclaration à l'ANSM. Seuls les dispositifs médicaux innovants ou nécessitant un suivi particulier du fait de leur impact économique ou sanitaire doivent être inscrits dans une ligne spécifique, sous forme de nom de marque. Dans ce cas, une évaluation de ce produit et de son service attendu par la Commission nationale des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) de la Haute Autorité de santé (HAS) est obligatoire.

Il existe aujourd'hui plus de 3 100 lignes génériques dans la LPP. Cet article permet donc de compenser l'aspect purement administratif de cet enregistrement en ouvrant la voie à des contrôles renforcés et à des sanctions pour les fabricants dont les produits et prestations ne sont pas conformes aux principes de sécurité établis par les législations communautaires et françaises. Il s'agit donc d'un progrès en matière de surveillance du marché des dispositifs médicaux. Il représente également un premier pas vers une maîtrise de la dépense en la matière, car lorsqu'un manquement aux règles d'inscription a entraîné un remboursement indu, l'assurance maladie peut se retourner contre le fabricant ou, le cas échéant, son mandataire et le recouvrer auprès de lui.

c) Etendre l'obligation d'évaluation des dispositifs médicaux utilisés à l'hôpital

De même, l'article 37 modifie profondément les conditions dans lesquelles les établissements de santé peuvent utiliser des dispositifs médicaux et obtenir leur prise en charge par l'assurance maladie. A l'heure actuelle, depuis la mise en place de la tarification à l'activité (T2A), deux modalités de financement cohabitent. La première, celle de droit commun, consiste en l'intégration des dispositifs médicaux dans les tarifs des groupes homogènes de séjour (GHS). Toutefois, comme l'a présenté à la mission M. François-Xavier Selleret, directeur général de l'offre de soins (DGOS) au ministère des affaires sociales et de la santé, certains dispositifs médicaux implantables sont remboursés en sus des GHS, pour des raisons médicales et de coût. D'après ses explications, « il faudrait que leur prix, pour une pathologie donnée, ne varie pas pour qu'ils puissent être inclus dans un séjour. Or, pour les deux grandes familles de dispositifs médicaux implantables, en cardiologie et en orthopédie, la dispersion des coûts est souvent supérieure à 30 % » .

Ces produits sont donc inscrits sur une « liste en sus », selon l'expression consacrée, et bénéficient d'un remboursement intégral de la part prise en charge par l'assurance maladie. Ils doivent obligatoirement figurer, au préalable, sur la LPP. Leur suivi est facilité et ils ont, dans certains cas, déjà fait l'objet d'une évaluation par la CNEDiMTS.

Ce n'est pas le cas des dispositifs médicaux intégrés aux GHS, qui ne sont soumis à aucune étude particulière et dont la connaissance même, tant au niveau de la consommation que du rapport, pour chacun, entre bénéfices et risques, est limitée.

Dans ce contexte, l'article 37 de la loi a limité la prise en charge des dispositifs médicaux, entrant dans des catégories homogènes prédéterminées, achetés et utilisés par les établissements de santé, à ceux inscrits sur une liste établie par les ministres de la santé et de la sécurité sociale, après avis de la CNEDiMTS. Pour y figurer, un dispositif médical devra soit avoir fait la preuve de son efficacité clinique, soit démontrer des spécifications techniques particulières, soit avoir montré son efficience au regard des alternatives thérapeutiques disponibles. La CNEDiMTS sera chargée du traitement des demandes d'inscription au regard de ces critères et pourra exiger que des études complémentaires soient réalisées. Les hôpitaux qui achèteraient des dispositifs médicaux appartenant à ces catégories homogènes mais ne figurant pas sur cette liste s'exposeraient à des sanctions, tout comme les fabricants qui refuseraient de réaliser les éventuelles études cliniques demandées.

La généralisation de règles jusque-là applicables aux seuls dispositifs médicaux innovants constitue donc la concrétisation d'une nouvelle orientation en matière de santé publique , grâce à la prise en compte de critères scientifiques et sanitaires pour déterminer quels produits seront ouverts au remboursement. En l'attente d'un décret d'application, ces dispositions restent encore virtuelles. Une mesure d'une telle ampleur, qui modifie en profondeur les pratiques dans les hôpitaux, ne saurait être mise en place en quelques semaines. La mission émet néanmoins le voeu qu'elle entre en vigueur rapidement car elle constitue assurément un pas dans la bonne direction en matière d'encadrement du marché des dispositifs médicaux.


* 79 http://www.legifrance.gouv.fr ; voir le dossier législatif de la loi du 29 décembre 2011, consulté le 10 juillet 2012.

* 80 Décret n° 2012-743 du 9 mai 2012 relatif à la publicité pour les dispositifs médicaux.

* 81 Article R. 165-3 du code de la sécurité sociale.

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