2. Le maintien d'une présence judiciaire appropriée

Il s'agit, par la création ou le maintien, à la place du tribunal supprimé, d'une structure plus légère, de conserver sur place une implantation judiciaire ou parajudiciaire qui facilite l'accès au droit ou aide les justiciables dans les démarches à entreprendre vis-à-vis de la juridiction supprimée.

On a vu précédemment ce que ces implantations pouvaient recouvrir : maison de la justice et du droit, antennes juridiques, point d'accès au droit, voire, comme à Hazebrouck ou Saint-Gaudens, une borne de visioconférence, qui permet d'échanger avec un représentant du greffe de la juridiction de rattachement.

Ces dispositifs ne remplacent pas le tribunal supprimé. Toutefois, ils en compensent partiellement la perte et permettent notamment de maintenir à disposition des justiciables un réseau d'auxiliaires de justice qui peuvent les aider à accéder au juge. Plusieurs chefs de cours et de juridictions, magistrats et élus se sont félicités de la mise en place de telles structures. À l'inverse, d'autres ont regretté que les promesses formulées au moment de la suppression de la juridiction, du maintien d'un point d'accès au droit n'aient pas été suivies d'effets.

Mesurant l'intérêt que de tels dispositifs peuvent présenter à titre subsidiaire, vos rapporteurs constatent cependant, avec les associations d'élus, qu'ils opèrent transferts aux collectivités territoriales de la charge de l'accès au droit précédemment assumée par le ministère de la justice. La chancellerie ne finance en effet, dans les points d'accès au droit que le premier équipement - notamment la borne « visio public », le reste des dépenses, et notamment la mise à disposition de personnels étant à la charge des collectivités territoriales.

Ils observent par ailleurs, avec M. Jacques Beaume, procureur général près la cour d'appel de Montpellier, représentant de la conférence nationale des procureurs généraux, que, contrairement à ce qui avait été annoncé, aucune politique volontariste de maintien d'une présence judiciaire là où la suppression des tribunaux a eu de graves conséquences, n'a été mise en place.

Ils jugent par conséquent nécessaire que des engagements soient pris en ce sens par le ministère de la justice, pour remédier, au moins en partie, aux difficultés les plus flagrantes.

3. La réinstallation d'implantations judiciaires

Enfin, la dernière solution envisageable pour réparer le tort causé par la disparition du tribunal, est la réimplantation de la juridiction supprimée ou la création d'une chambre détachée 106 ( * ) .

Cette voie n'est pas inédite. Comme on l'a vu, elle a déjà été empruntée deux fois par le ministère de la justice : une première fois, à son initiative, à Fougères et la seconde, après l'annulation par le Conseil d'État de la suppression du tribunal de grande instance de Moulins.

Dans le premier cas, la chancellerie s'est finalement ralliée tardivement à la solution défendue par les chefs de cour, qui tendait à fusionner les deux tribunaux d'instance de Vitré et de Fougères, plutôt que de les rattacher tous deux à celui de Rennes. On ne peut que regretter l'inutilité et le coût de ce détour.

Lors de leur déplacement au tribunal de grande instance de Moulins, vos rapporteurs ont pu mesurer le gâchis humain, financier et organisationnel que cette suppression a constitué. Si cette juridiction peut aujourd'hui regarder vers l'avenir, les personnels restent marqués par l'épreuve traversée.

L'une et l'autre de ces expériences montrent que la réinstallation des tribunaux supprimés ne peut être qu'une solution exceptionnelle, réservée aux cas les plus graves, lorsque cette suppression est notamment la source de dysfonctionnements majeurs de la justice ou qu'elle a significativement réduit l'accès des justiciables à leur juge. L'étendre serait courir le risque, à faire et défaire la réforme, de désorganiser un peu plus l'institution judiciaire, à un coût prohibitif alors qu'elle a besoin, pour remplir sa mission, de stabilité.


* 106 La chambre détachée correspond à une projection territoriale du tribunal de rattachement. La chambre détachée, pour le contentieux qui lui est affecté, fonctionne exactement comme n'importe quelle chambre de la juridiction d'origine.

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