CONCLUSION

La formation de déserts médicaux, paradoxale dans un pays comme la France qui dispose d'un nombre globalement suffisant de médecins et consacre une fraction considérable de sa richesse aux dépenses de santé, a des répercussions inacceptables en termes d'égalité d'accès à la santé. Elle appelle donc une action forte et volontaire de la part des pouvoirs publics, qui ne peuvent accepter que perdure et s'amplifie même ce phénomène.

A la lumière de l'expérience, force est de constater que les mesures mises en place par les gouvernements successifs sont insuffisantes, pour ne pas dire inefficaces.

Le souci de ne pas heurter les médecins et les futurs médecins a jusqu'à présent paralysé nos gouvernants. Il est à cet égard révélateur d'observer la prudence des hommes politiques sur ce sujet, particulièrement lorsqu'ils accèdent aux responsabilités. Ainsi, Nicolas Sarkozy ou Jean-Marc Ayrault ont tour à tour renoncé aux mesures audacieuses qu'ils avaient un temps proposées. Le gouvernement précédent est même revenu, par la « loi Fourcade » de 2011, sur les quelques mesures de la « loi HPST » de 2009 qui marquaient une évolution pourtant timide en la matière.

Aujourd'hui, la gravité de la situation et des perspectives d'évolution exige la prise en compte du seul intérêt général.

Le présent rapport d'information, dont la publication a été approuvée à l'unanimité par la commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire, témoigne que la Haute Assemblée a pleinement conscience de la gravité de la situation de la désertification médicale, de ses conséquences et de ses enjeux, et de la nécessité d'agir vraiment.

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS DU RAPPORT

I. FAIRE ÉVOLUER LES ÉTUDES DE MÉDECINE

Proposition n° 1 :

Mener une réflexion approfondie pour adapter les critères de sélection lors de l'accès aux études de santé , afin notamment d'élargir les origines sociales et géographiques des étudiants, peu propices à l'installation dans les zones sous dotées.

Proposition n° 2 :

Diversifier l'enseignement aujourd'hui centré sur la pratique hospitalière en introduisant des matières (gestion, communication, psychologie, bioéthique, économie de la santé) favorisant l'installation en ambulatoire et préparant les futurs médecins à être de véritables acteurs de santé.

Proposition n° 3 :

Rendre effective l'obligation des stages d'initiation en médecine générale , en conditionnant la validation du deuxième cycle des études médicales à leur réalisation, et en favorisant l'accueil des étudiant (aides au logement et au transport, équipement des maisons de santé en logements étudiants, encouragement et reconnaissance des maîtres de stages).

Proposition n° 4 :

Adapter les épreuves classantes nationales , qui ouvrent l'accès au troisième cycle des études médicales, aux besoins des différentes filières médicales de chaque région.

Proposition n° 5 :

Mettre en place une quatrième année professionnalisante en fin de troisième cycle pour les étudiants en médecine générale, accomplie de préférence dans les zones sous denses.

II. METTRE EN oeUVRE À L'ÉCHELLE DES TERRITOIRES UNE POLITIQUE D'ACCÈS AUX SOINS

Proposition n° 6 :

Créer à l'échelle du département une commission de la démographie médicale qui délimitera des aires de santé et définira et organisera les moyens d'accéder aux soins sur ces territoires.

Proposition n° 7 :

Favoriser la coopération et les transferts d'actes entre les différentes professions de santé , pour améliorer la prise en charge des patients, en refondant les textes réglementaires définissant celles-ci sur la base de la notion de missions et non plus sur la notion d'actes.

Proposition n° 8 :

Favoriser l'exercice regroupé pluriprofessionnel en apportant un financement incitatif à l'installation en maisons et pôles de santé (« forfait équipe coordonnée », « forfait structure » ou « forfait secrétariat »).

Proposition n° 9 :

Favoriser l'allongement de la durée d'activité des médecins en exonérant du paiement des cotisations d'assurance vieillesse les médecins retraités reprenant ou poursuivant une activité dans les zones sous médicalisées.

Proposition n° 10 :

Développer lorsque cela est nécessaire des formes de médecine salariée , en confortant les centres de santé et en mettant en place une offre de soins ambulatoire assurée par des remplaçants salariés dans les zones fragiles.

Proposition n° 11 :

Encourager le développement de la télémédecine en clarifiant juridiquement la responsabilité du médecin sollicité et en établissant une cotation spécifique aux actes de télé-consultation et de télé-expertise.

III. CLARIFIER ET PROMOUVOIR LES MESURES INCITATIVES EXISTANTES

Proposition n° 12 :

Évaluer et réorienter les aides financières à l'installation en zones sous-dotées en fonction du rapport entre leur coût et leur impact réel.

Proposition n° 13 :

Faire des agences régionales de la santé le point d'entrée unique des aides financières , en développant les plates-formes internet d'appui aux professionnels de santé et en dotant de moyens adéquats un « référent-installation » dans chaque agence régionale de santé.

IV. MIEUX RÉGULER L'INSTALLATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ

Proposition n° 14 :

Étendre aux médecins le conventionnement sélectif, qui existe déjà pour les principales autres professions de santé, en fonction de la nature des zones d'installation (zones sur dotées ou sous dotées).

Proposition n° 15 :

Instaurer, pour les médecins spécialistes, une obligation d'exercer pendant deux ans à la fin de leurs études, à temps plein ou partiel, dans les hôpitaux des chefs-lieux de départements où le manque de spécialistes est reconnu par les agences régionales de santé.

Proposition n° 16 :

Informer dès à présent les étudiants en médecine de la possibilité d'instaurer pour les médecins généralistes une obligation de quelques années d'exercice en zone sous-dotée en début de carrière si, au terme de la présente législature, la situation des inégalités de répartition territoriale des médecins n'a pas évolué positivement.

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