D. ADAPTER LE FINANCEMENT EN RÉFÉRENCE AUX DYSFONCTIONNEMENTS DU SYSTÈME DE PRIX

Une note de contexte importante doit être formulée .

Pour des raisons diverses, la France est l'un des pays où les prix des services numériques sont les plus bas au monde. L'inflexion à la baisse des prix s'est muée en une véritable chute des prix sur les offres mobiles sous l'effet des pratiques commerciales de l'un des opérateurs.

Le graphique ci-dessous permet de visualiser la comparaison des prix de certaines offres analogues dans différents pays comparables.

COMPARAISON DES PRIX PRATIQUÉS DANS LE SECTEUR DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

(1) Appels illimités (min. 500 minutes), SMS/MMS illimités (min.1000 SMS), Internet 1, 2 ou 3 Go, avec fonction modem quand disponible, offres sans mobile, offres sans engagement quand disponible; opérateurs dont la part de marché > 15 %

(2) Appels nationaux illimités (min. 3 000 minutes), internet haut débit avec téléchargement illimité y compris pour usage intensif quand disponible, TV, hors câblo-opérateurs

Source : Fédération française des télécoms.

La situation des prix sur le marché français se rapproche de celle d'un marché de concurrence pure et parfaite où règnerait des objectifs de court terme.

Dans un tel cas, les marges des concurrents sont sacrifiées, ce qui équivaut à renoncer à la rémunération du capital (voir ci-dessus) et à réduire les incitations et les capacités d'investissement.

Le consommateur bénéficie du surplus de productivité de l'investissement passé, ce qui peut bien le satisfaire à court terme (à condition que l'investissement en place permette de lui offrir les services correspondants, ce qui n'est pas encore complètement le cas dans la mesure où le réseau n'est pas complet).

Mais, toute innovation étant bloquée (sauf à faire le pari d'une évolution des équilibres de marché...), le surplus revenant au consommateur « se paye » par une dégradation de la qualité du service 59 ( * ) actuel et d'un coût d'opportunité pour le futur.

Pour restaurer les droits de l'avenir il importe que le consommateur actuel comprenne que sa propension consumériste entraîne le sacrifice de ce que les économistes nomment l'utilité future.

Pour favoriser cette prise de conscience, il faut que les conditions d'une confiance dans le recyclage de surplus du consommateur immédiat par des investissements élevant le niveau de son surplus à venir soient réunies. Cette confiance peut être légitimement ébranlée par la perspective que les entreprises du secteur puissent mésuser des marges qu'un prix supérieur leur offrirait.

Il est donc essentiel que le partage de l'excédent brut d'exploitation soit réalisé conformément à une logique de diffusion de l'innovation.

Il faut donc parvenir à un équilibre du taux d'investissement de sorte que toute élévation du prix des services numériques puisse aller à l'investissement sous la condition d'une rémunération normale des risques pris par l'investisseur. Ceci peut être réalisé dans le cadre d'arrangements multiples.

Parmi ceux-ci, une élévation des prélèvements sur les abonnements permettrait de s'assurer que l'augmentation de valeur soit fléchée vers l'investissement dans les infrastructures à condition bien entendu que le produit en soit affecté au fonds de financement dédié.

Au cours du présent rapport on a encore abordé des difficultés ponctuelles sur les prix de certaines offres comme l'offre de gros du fil de cuivre. Il existe avec l'IFER, une imposition qui frappe en partie cette infrastructure. L'élévation du prix de l'offre ou du moins l'affectation de la partie correspondant à son renouvellement ont pu être évoquées par certains. Vos rapporteurs ont déjà indiqué qu'à leurs yeux ces éventualités appelaient à ce stade des études très approfondies.

Il faut cependant ajouter une remarque importante.

Les produits recouvrés au titre de la composante « répartiteurs de la boucle locale cuivre » de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER) s'élèvent à 393,9 millions d'euros en 2012 , avec une très forte disparité régionale qui reflète l'état variable des équipements.

Il faut relever que l'avancée du programme de déploiement de la fibre pourrait occasionner des pertes de produits à due proportion.

Cette perspective équivaut à un financement spontané des collectivités territoriales du programme d'investissements des opérateurs qui contribuent à l'IFER.

Potentiellement, sous réserve d'une adaptation de l'assiette, le transfert récurrent recouvre la recette, soit sur 10 ans, 3,9 milliards d'euros à mettre en rapport avec les estimations portant sur les intentions d'investissement des opérateurs (12 milliards d'euros pour le total, mais 7 milliards seulement pour les investissements dans la zone d'intérêt privé).


* 58 A cet égard, les taux d'imposition effectif de certains acteurs résidents semblent très éloignés du taux théorique.

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