VI. UNE COMPÉTENCE EMBLÉMATIQUE : LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

La compétence économique est à plus d'un titre emblématique de la décentralisation. Elle s'enracine dans le mouvement de « socialisme municipal » lancé dans l'entre-deux-guerres par un grand nombre de communes face à la crise économique, qui a donné lieu à une jurisprudence précise et toujours actuelle du Conseil d'Etat sur les conditions de l'interventionnisme économique des collectivités. Elle est à l'origine de la régionalisation, avec la création en 1956 de 22 régions de programme tournées vers le développement économique. Dans un contexte où la répartition des activités évolue de façon déstabilisante pour un grand nombre de nos territoires, elle est au premier plan des préoccupations de nos concitoyens.

A. UNE COMPÉTENCE PARTAGÉE

Dès l'acte I de la décentralisation au début des années 80, la compétence économique a été partagée entre les différentes catégories de collectivités. L'article 5 de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, tout en disposant que « l'Etat a la responsabilité de la conduite de la politique économique et sociale, ainsi que de la défense de l'emploi. » , prévoyait que « néanmoins, sous réserve du respect de la liberté du commerce et de l'industrie, du principe de l'égalité des citoyens devant la loi ainsi que des règles de l'aménagement du territoire définies par la loi approuvant le Plan, la commune peut intervenir en matière économique et sociale dans les conditions prévues au présent article ».

L'article 48 de la même loi accordait des prérogatives identiques aux départements, tandis que, aux termes de l'article 64, les établissements publics régionaux recevaient pour mission de « contribuer au développement économique, social et culturel de la région (...) ». Les dispositions de la loi de 1982 approuvant le plan intérimaire 1982-198313, codifiées aux articles L. 1511-1 à L. 1511-5 du Code général des collectivités territoriales, a défini par ailleurs les conditions dans lesquelles les communes, les départements et les régions pouvaient, lorsque leur intervention a pour objet la création ou l'extension d'activités économiques, accorder des aides directes ou indirectes aux entreprises. Cette compétence a été confortée par le législateur, notamment par la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité et de la loi de 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

Enfin, le développement économique fait partie des compétences obligatoires des EPCI à fiscalité propre. Comme l'observait le rapport de la mission d'information du Sénat sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, les intercommunalités apparaissent de plus en plus comme des acteurs essentiels du développement économique, en particulier dans les zones agglomérées où elles se substituent au département, celui-ci conservant toutefois un rôle incontournable en zone rurale, le plus souvent.

Sur cet arrière-plan législatif, l'introduction du rapport publié en 2007 par la Cour des comptes sur les aides des collectivités territoriales au développement économique constatait que « (...) de toutes les compétences ainsi dévolues aux collectivités territoriales celle concernant l'aide au développement économique a été précisément la seule à échapper à l'application de ce principe [selon lequel chaque domaine de compétences ainsi que les ressources correspondantes soient affectés en totalité soit à l'Etat, soit aux communes, soit aux départements, soit aux régions] . Considérée en effet par le législateur, plus que toute autre, comme une compétence inhérente à la légitimité de chaque collectivité de maîtriser le développement de son territoire, l'aide en faveur des entreprises a été dès l'origine conçue comme une compétence partagée entre l'Etat et chacune des autres collectivités territoriales. La force de cette exception a été telle qu'elle ne fut jamais par la suite remise en cause. »

Ajoutons que les collectivités territoriales représentent 75 % des investissements publics civils : l'équipement du pays est de plus en plus leur responsabilité.

Cet état de fait que l'on est fondé à juger légitime et irréversible implique une rationalisation permanente des méthodes de l'action publique, ce qui nécessite une conscience des options stratégiques en amont des choix de politiques publiques.

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