IV. LES NOUVEAUX ENJEUX DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

A. LA CORRUPTION : UNE MENACE À LA PRÉÉMINENCE DU DROIT

La lutte contre la corruption au sein des institutions publiques fait partie des priorités du Conseil de l'Europe, qui considère qu'elle affaiblit l'État de droit et sape la confiance des citoyens dans leurs gouvernements. L'Assemblée parlementaire a adopté depuis 2000 un certain nombre de textes relatifs à la lutte contre la corruption visant à la fois la bonne conduite en matière électorale, les partis politiques, les conflits d'intérêts ou le lobbying. Ces travaux viennent compléter ceux de deux organismes dépendant du Conseil de l'Europe : le Groupe d'États contre la corruption (GRECO), créé en 1994, et le Comité d'experts sur l'évaluation des mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme (MONEYVAL), mis en place en 1997.

La commission des questions juridiques et des droits de l'Homme relève cependant que cinq États membres sont classés au-delà de la centième place dans le classement des 174 pays mis en place par Transparency international pour évaluer l'indice de perception de la corruption. Les projets de résolution et de recommandation qu'elle a présentés devant l'Assemblée parlementaire invitent en conséquence les États à intensifier leur coopération en la matière et à adapter leurs législations aux nouveaux enjeux.

La résolution adoptée insiste ainsi sur un meilleur suivi des circuits empruntés par les capitaux qui font l'objet de virements électroniques ou sur l'adoption de mesures adaptées à l'égard des établissements bancaires complices. Le texte invite également à incriminer tous les actes de corruption active ou passive. Il plaide pour le renforcement du droit à l'information des actionnaires minoritaires de sociétés privées et le renforcement de la lutte contre le délit d'initié. La confiscation des actifs des personnes physiques ou morales incriminés doit également être facilitée.

M. Yves Pozzo di Borgo (Paris - UDI-UC) a souligné dans son intervention la nécessité de mieux utiliser les instruments que constituent le GRECO et MONEYVAL et de rechercher des synergies avec d'autres organismes internationaux :

« Le débat d'aujourd'hui n'est pas anodin au sein de notre Assemblée. Il vient en effet nous rappeler combien notre Organisation dispose d'une légitimité incontestable en matière de lutte contre la corruption.

Je voudrais, avant d'aborder mon intervention, faire une remarque. La démocratie est bâtie sur trois piliers : l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Je suis un peu fatigué de voir, aussi bien en France que dans les assemblées internationales, les parlementaires qui se flagellent en permanence sur la corruption. J'ai tendance à penser, en ce qui concerne les corruptions qui peuvent avoir lieu au sein de notre Assemblée, qu'il nous appartient de les gérer. Et il en va de même dans les assemblées nationales. Il est très important pour la démocratie que les parlements assument leur propre gestion des risques et ne laissent pas à l'exécutif et au judiciaire le soin de régler ce type de problème. C'était juste une remarque que je tenais à faire.

Avec le groupe d'États contre la corruption (GRECO), le Conseil de l'Europe possède en son sein un instrument de contrôle efficace, rassemblant 46 membres et combinant évaluation, mise en oeuvre d'une procédure de conformité et suivi.

Le GRECO témoigne de la volonté des membres du Conseil de l'Europe de renforcer leur coopération dans des domaines clés. Il permet de combattre l'image de producteurs de droit mou dans laquelle on veut enfermer le Conseil de l'Europe.

Rappelons que le rapport Juncker présenté au sein de cette Assemblée en 2007, insistait sur la nécessité de mettre en oeuvre de façon effective une coopération pleine et entière entre l'Union européenne et le Conseil de l'Europe, via des projets concrets.

Indubitablement, la lutte contre la corruption peut incarner cette complémentarité recherchée. Je rappelle à cet égard que le statut et le règlement intérieur du GRECO prévoient la participation de l'Union européenne aux activités du groupe. Nous pourrions ainsi rechercher des synergies avec Eurojust. Dans le même ordre d'idée, il pourrait être opportun de renforcer notre coopération avec l'Office de lutte antifraude (OLAF) de l'Union européenne afin d'éviter doublons et autres chevauchements d'activité. Une collaboration avec les Nations unies ne serait pas non plus dépourvue d'intérêt à l'heure de la mondialisation. L'Office des Nations unies contre la drogue et le crime dispose ainsi d'une expérience non négligeable sur le sujet. Envisageons également un rapprochement avec le groupe de travail sur la corruption de l'OCDE.

Je le répète, la lutte contre la corruption représente un réel exemple de la valeur ajoutée des travaux du Conseil de l'Europe. Nous ne pouvons dédaigner, en ces temps incertains pour notre Organisation, l'opportunité qu'elle représente pour donner plus de visibilité à nos travaux.

Au-delà même de cette question, les partenariats que j'appelle de mes voeux ne peuvent que renforcer les démarches entreprises au sein des États concernés en vue de lutter contre la corruption.

Je souscris à ce titre aux observations contenues dans l'excellent rapport de notre collègue Mailis Reps. »

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