3. Promouvoir la valorisation économique des résultats de la recherche au profit du développement du Sud
Les pays du Sud expriment naturellement le besoin de « transformer » les résultats des recherches, c'est-à-dire de leur donner des effets économiques. Comme l'a résumé le président de l'IRD, M. Michel Laurent, lors de son audition, quand nos opérateurs de recherche pensent « Recherche pour le développement », le Sud pense « Recherche et développement » : il a besoin d'un retour sur investissement de son effort de recherche.
À cet égard, votre mission relève le succès rencontré par le programme d'accompagnement à la création d'entreprises innovantes en Méditerranée (PACEIM) que propose l'AIRD et auquel le MAEE apporte un financement de 2 millions d'euros sur trois ans. Ce programme finance des bourses de deux ans destinées à favoriser la création d'entreprise dans le pays d'origine de l'étudiant. Le président de l'IRD a indiqué à votre mission que 100 étudiants étaient ainsi devenus créateurs d'entreprise dans les pays du Maghreb et au Liban. Ce programme, aidé à ses débuts par l'UE et désormais porté par la France, doit absolument être poursuivi ; des partenariats de financement doivent être envisagés, par exemple avec Bpifrance qui succède à Oseo depuis juillet dernier dans la mission de soutien à l'innovation et à la croissance des PME. D'autres programmes du type PACEIM rencontreraient assurément les besoins d'autres partenaires du Sud au-delà de la Méditerranée.
De même, il conviendrait de multiplier les incubateurs d'entreprise. Trois sont actuellement soutenus par l'AIRD. Un incubateur public a ainsi été créé avec six universités publiques sénégalaises afin de donner les moyens à des porteurs de projets d'entreprise de les concrétiser. Cette pratique doit être encouragée ; votre rapporteure a pu constater le savoir-faire indien en la matière puisque, tant l' Indian Insitute of Science que le National Center for Biological Sciences abritent en leur sein des incubateurs au plus près des laboratoires de recherche.
Lors de son audition par votre mission, Mme Alice Dautry, alors directrice générale de l'Institut Pasteur, a fait part de la très grande appétence du Sud pour les incubateurs d'entreprises à partir des découvertes faits dans les instituts : elle a indiqué que cette appétence se ressentait à travers tout le réseau international de l'Institut, aussi bien à Shanghai qu'à Montevideo ou Tunis. Elle a d'ailleurs évoqué l'exemple de la start-up créée en Inde par une femme qui, travaillant sur la fermentation, a eu l'idée d'utiliser des levures pour fabriquer des produits biologiques pour la santé ; votre rapporteure a, depuis, eu la chance de rencontrer cette femme, Mme Shaw, à Bangalore 145 ( * ) . L'Institut Pasteur se voit donc sollicité de par le monde par de nombreux entrepreneurs, pour son expérience en matière de création d'entreprises et de brevets.
La création récente du Consortium de valorisation thématique (CVT) « Valorisation Sud » participe de cette volonté de valoriser les résultats de la recherche avec le Sud : ce consortium, le seul à ne pas être thématique mais transversal, bénéficie d'un financement de 9 millions d'euros sur la période 2012-2020 dans le cadre des «Investissements d'avenir» 146 ( * ) . Il vise à dynamiser le transfert des technologies et savoir-faire issus de l'ensemble des laboratoires de recherche français, présentant un intérêt socio-économique pour les pays en développement.
Dans le cadre de l'AIRD, le Cirad, l'Institut Pasteur, l'Institut de recherche pour le développement (IRD) se sont ainsi associés à quatre universités d'outre-mer 147 ( * ) pour constituer ce consortium. Il s'agit essentiellement de protéger les inventions en constituant un portefeuille de brevets, de logiciels et de certificats d'obtention végétale (COV), générateur de revenus pour la commercialisation de ces technologies avec le Sud et au Sud. Le CVT « Valorisation Sud » a vocation à contribuer à la croissance économique de la France et de ses territoires d'outre-mer en adressant de nouveaux marchés, mais, en même temps à favoriser le développement des pays du Sud . Il leur offre en effet des opportunités et des services « à la carte » : aide à la gestion de la propriété intellectuelle ; constitution d'un portefeuille de brevets avec mandat de valorisation ; marketing et promotion des technologies ; maturation pré-industrielle, gestion de projets, contrats de licence ; conseil pour la création d'entreprises innovantes...
M. Michel Laurent, président de l'IRD, a précisé à votre mission que, dans la cadre de ce CVT, près de 20% des brevets pris par l' IRD étaient en copropriété avec le Sud. Il a indiqué que l'objectif de l'IRD était de porter cette part à 50 %.
Votre mission considère qu'en effet, la relation doit être partenariale jusqu'au bout de la chaîne, donc jusqu'au dépôt de brevets.
Dans cet esprit, votre mission préconise de renforcer le soutien à toute nouvelle opportunité de valorisation de la recherche française en faveur du développement des pays du Sud.
Se fondant sur une pleine mise au service du développement de ses partenariats de recherche, la France pourrait mieux faire connaître son offre partenariale, à l'égard des pays du Sud comme auprès de ses partenaires bailleurs .
* 145 Cf. supra.
* 146 La convention de financement de ce CVT a été signée avec l'Agence nationale de la recherche (ANR) le 17 décembre 2012.
* 147 La Réunion, Antilles-Guyane, Nouvelle-Calédonie et Polynésie française.