D. TROIS TYPES DE CONTENTIEUX

Il y a actuellement une dizaine de contentieux avec les régions qui sont examinés par les tribunaux administratifs. Ils sont gérés, pour la SNCF, par la direction générale. Il existe trois types de contentieux :

- les contentieux relatifs aux clauses de paysage : si la loi change, cela a des répercussions sur le contrat. La réforme des retraites a conduit à un renchérissement du coût pour la SNCF. Il en est de même du fait de la réforme de la fiscalité locale entraînant une modification de l'imposition des matériels. Dès lors, la SNCF a demandé aux régions une modification des conventions afin de prendre en compte ses surcoûts. 8 contentieux sur 10 sont concernés par ce problème ;

- les contentieux pour lesquels la région est à l'origine : ce qui est en cause c'est la qualité du service, comme en Midi-Pyrénées ou en Aquitaine. Le contentieux porte sur la question de savoir si la SNCF a mis suffisamment de moyens ;

- les contentieux relatifs aux éléments d'actualité, sur la transparence financière notamment. L'ARF souhaiterait vérifier que ce que la région paie est une chose réellement due. Dès lors, se pose la question des coûts affectés et des coûts calculés : comment est prise en compte une personne travaillant pour plusieurs services ? Un autre sujet de tension est la question du devenir des bénéfices des contrats TER. Les régions souhaitent en récupérer une partie. Guillaume Pepy s'est engagé à prendre un certain nombre de mesure en matière de transparence financière. Les collectivités territoriales ont face à elle une entreprise en situation de monopole, à qui sont attribuées les conventions TER sans appel d'offres, ce qui amène à des relations plus incisives.

Ces contentieux sont révélateurs d'une évolution :

- les collectivités territoriales - et au premier chef la région - sont des autorités organisatrices : la SNCF doit le reconnaitre et ne pas comprendre ceci comme une dépossession ;

- le temps est au dialogue, au partenariat, à la contractualisation. La SNCF doit adapter une autre culture et reconnaître l'expertise des régions. Il est évident que la complexité d'organisation de la SNCF, l'importance de la dette, le coût de la maintenance du réseau sont sources de tensions.


La dette : elle était de 20 MD€. En 2022, elle atteindrait 60 milliards d'euros. Le projet de nouveau schéma national des infrastructures de transport (SNIT) réussira-t-il, à lui seul, à modérer cette augmentation ?

Il est aujourd'hui évident que la réforme de 1997 créant un nouveau partage de la dette ne l'a pas fait décroître.

Auteur d'un récent rapport, Jean-Louis Bianco, considère que la séparation en 1997 de Réseau Ferré de France (RFF) et de la SNCF a entraîné de lourds dysfonctionnements et une impasse économique : le déficit structurel annuel est de l'ordre de 1,5 milliard d'euros. En l'absence de réforme, il pourrait atteindre 2 milliards d'euros. Ce déficit pèse sur la dette.

La Cour des comptes elle-même a critiqué cette réforme, qu'elle a qualifiée, dans un rapport de 2008 d' » inachevée » pour « une stratégie incertaine ». Plus récemment, elle a mis en cause un « emboîtement complexe dont la mise en oeuvre reste largement dominée par la SNCF. » Voici l'appréciation qu'elle porte sur le dispositif SNCF-RFF : « élaboré dans un contexte de méfiance réciproque, il aboutit à un dispositif tatillon et procédurier, faiblement régulé dont le renouvellement par avenant ou nouvelles conventions s'est effectué au prix de négociations de plus en plus laborieuses, qui mobilisent les énergies et le temps des responsables des deux établissements publics . 25 ( * ) »


La maintenance du réseau : nous avons un réseau caractérisé par sa diversité, son hétérogénéité, son vieillissement, son faible maillage.

À partir de 1980, la SNCF a investi massivement sur les lignes à grande vitesse au détriment de la maintenance des autres voies. Le déficit de celles-ci s'est accumulé.

Un plan de renouvellement - 2008/2015 - représentant 13 MD€ a été mis en place, doublant les réalisations qui passent de 500 km/an à 1 000 km/an. Cet effort récent n'a pas encore eu d'effets visibles et tangibles 26 ( * ) .

Toutefois, afin d'apaiser les tensions, le recours au médiateur est systématique. Ainsi, sur la question des retraites, c'est un ancien directeur de la caisse des retraites de la SNCF qui a été nommé médiateur. On constate ainsi que, pour le premier type de contentieux - le plus important en nombre - le recours au juge fait souvent l'objet d'un consensus entre les parties afin de trouver une solution.

À la SNCF, l'ensemble des dossiers est traité par la direction générale. En ce qui concerne les régions, chacune est en charge de son dossier. Cela s'explique notamment par le fait que, d'une part, chaque région est autorité organisatrice des transports et que, d'autre part, chaque convention est particulière répondant au besoin d'un territoire déterminé.

Toutefois, l'ARF pourrait se voir confier un rôle, notamment de conseil juridique , sur des points susceptibles de concerner l'ensemble des régions. Ainsi, en ce qui concerne les retraites, afin d'avoir une position unique et sécurisée pour l'ensemble des régions, l'ARF pourrait être en charge de négocier une clause générale relative à la prise en charge de la retraite des cheminots.

De manière générale, que faire pour pacifier les relations territoriales du secteur ferroviaire ?


* 25 Rapport de la Cour des comptes, à la demande du Sénat, sur l'entretien du réseau ferroviaire national, approuvé le 27 juillet 2012, présenté à la commission des Finances du Sénat le 26 septembre 2012. La Cour reconnait que le système instauré en 1997 a « apporté une amélioration notable par rapport à la situation antérieure, l'émulation de l'entreprise historique. L'aiguillon qu'a représenté l'action de RFF a permis un certain nombre d'évolution en matière méthodologique. »

* 26 En outre, comme le souligne la fédération FO Cheminots (audition du 16 septembre 2013), à ce rythme, les dernières lignes construites ne seront renouvelées ou restaurées que dans vingt-huit ans.

Page mise à jour le

Partager cette page