2. Des collectivités locales mieux rodées après une longue phase d'apprentissage

À certains égards, l'attitude de l'administration est compréhensible . Pendant longtemps, les collectivités locales n'ont pas véritablement joué le jeu de la planification.

À l'époque, les élus découvrent eux aussi la décentralisation . En ce qui concerne la loi Littoral, pour sa gestion géographique et juridique, le travail du maire regroupe les responsabilités antérieures de dix-sept administrations d'État. Les services locaux ne sont pas toujours structurés, et parfois insuffisamment incités à assumer leur nouvelle charge de travail, dans un contexte où il est juridiquement interdit de rémunérer les fonctionnaires territoriaux au même niveau que les fonctionnaires d'État.

Cette situation est exacerbée par l'insistance et la précision des orientations transmises par l'État, qui sont parfois mal ressenties. Les élus sont déstabilisés par l'agressivité des premières circulaires de 1989 et 1991. Le rapport de 2000 constate ainsi que « la plupart du temps aujourd'hui les élus répugnent (...) à reprendre à leur compte dans le plan d'occupation des sols des contraintes d'application de la loi Littoral. Ils n'ont pas l'impression d'avoir, dans ce cas-là, un pouvoir de décision analogue à celui dont ils disposent depuis la décentralisation pour les autres zonages. » Ils ne réalisent même pas qu'à l'époque, le juge administratif se prononce plutôt en leur faveur et condamne presque systématiquement l'État.

Certains décident alors de publier rapidement leurs plans d'occupations des sols (POS) pour figer définitivement les droits de construction . Peu ou mal contrôlés, ces POS sont validés par les services de l'État alors qu'ils contiennent parfois des zonages manifestement illégaux au regard de la loi Littoral, ouvrant par exemple des zones à l'urbanisation en périphérie de hameaux.

Aujourd'hui un grand nombre de communes se retrouve dans une situation délicate . Si elles délivrent un permis de construire sur la base du POS, les permis sont susceptibles d'être attaqués par les associations de défense de l'environnement, qui obtiennent généralement gain de cause. Si elles le refusent, elles sont attaquées par les particuliers pour non-conformité de la décision avec le document d'urbanisme. Dans le pire des cas et par un effet de chaîne, les POS successifs peuvent être annulés : les communes reviennent à l'application restrictive du règlement national d'urbanisme (RNU) et perdent la maîtrise du droit du sol.

Pour autant, les élus estiment difficile de remettre en cause des droits de constructibilité considérés comme acquis par leurs concitoyens. Les conséquences en termes de valeur foncière peuvent entraîner des drames personnels. Ils parient alors sur la faible probabilité statistique de voir les permis de construire déférés au juge administratif par les services préfectoraux : en raison de l'échantillonnage du contrôle de légalité, moins de 5 % d'entre eux courent en effet le risque d'être annulés. Si aucun riverain ni aucune association de défense de l'environnement ne s'en saisit dans les délais de recours contentieux, la construction illégale est ainsi réalisée en toute impunité.

Pour sortir de l'ornière, l'administration entend aujourd'hui lutter contre ce phénomène de « POS dormeurs ». La sécurisation juridique des documents d'urbanisme est un chantier prioritaire des services de l'État qui ont engagé une analyse systématique de la compatibilité des PLU avec la loi Littoral. Le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR), actuellement en cours d'examen par le Parlement, devrait accélérer cette démarche, puisqu'il prévoit la caducité des POS non transformés en PLU au 31 décembre 2015 . L'application de la loi Littoral en sera certainement facilitée.

LA COUVERTURE DES COMMUNES LITTORALES EN DOCUMENTS D'URBANISME

Au 1 er janvier 2013, 92 % des communes littorales sont dotées d'un POS/PLU approuvé . Plus précisément, d'après les données communiquées par la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) du ministère de l'Écologie, sur 1 212 communes littorales : 529 sont dotées d'un PLU ; 584 sont dotées d'un POS (dont 88 ont été approuvés avant 1986 et 124 entre 1986 et 1989) ; 25 sont dotées d'une carte communale et 74 sont régies par le RNU.

La couverture est nettement meilleure que sur le reste du territoire national où seulement 55 % des communes disposent d'un POS/PLU approuvé, en cours de révision ou d'élaboration, tandis que 19,5 % sont dotées d'une carte communale et 25 % n'ont aucun document de planification.

Cependant, une majorité de POS, voire de PLU, n'est toujours pas compatible avec la loi Littoral dans les communes soumises à son application.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page