B. ALLÉGER LA CHARGE CONTENTIEUSE
Les travaux de vos rapporteurs se sont déroulés dans le cadre d' une forte actualité en matière de contentieux de l'urbanisme et de lutte contre les recours malveillants . Les mesures récemment adoptées répondent à de nombreuses attentes exprimées par les élus et les particuliers face à un contentieux sclérosant.
1. Anticiper le recours au juge en amont
a) La motivation des documents d'urbanisme
La plupart des difficultés pourraient être évitées par une meilleure justification des choix de zonage et des délimitations opérés dans les PLU et les SCoT.
L'audit de 2012 signale ainsi que « les effets d'arbitrage des dispositions particulières au littoral par les jurisprudences seraient réduits par une meilleure justification des aménagements projetés, notamment au regard de leur localisation (examen de solutions alternatives), et cela très en amont, aux différentes échelles de planification. C'est bien ce à quoi doivent logiquement répondre les documents d'urbanisme, et tout particulièrement les SCoT. »
Ce travail de motivation et d'explication s'inscrit dans une inspiration anglo-saxonne du droit du littoral . Il permet notamment au juge d'apprécier in concreto la nature et l'objectif des choix opérés : si la jurisprudence est correctement prise en compte dans les documents d'urbanisme, le juge se limite à un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation, beaucoup plus souple. Cette démarche permet également d'éviter les annulations fréquentes de PLU pour vice de procédure, en raison d'une insuffisante motivation des conclusions du commissaire enquêteur.
De nombreux élus bretons se félicitent d'avoir appliqué cette méthode et leur exemple est désormais suivi dans d'autres régions (notamment Provence-Alpes-Côte d'Azur et Languedoc-Roussillon).
b) Ressusciter les commissions de conciliation
Pour éviter que les élus aient le sentiment d'être pris par surprise à l'occasion d'un recours contentieux, une instance de concertation est indispensable au moment de l'élaboration des documents d'urbanisme.
Le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) prévoit de moderniser la commission de conciliation . Les associations agréées de protection de l'environnement y joueraient un nouveau rôle : elles compteraient un représentant parmi les personnalités qualifiées désignées par le préfet et la saisine de la commission leur serait ouverte .
LES COMMISSIONS DÉPARTEMENTALES DE CONCILIATION Les commissions de conciliation en matière d'élaboration des documents d'urbanisme ont été créées dans chaque département par la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État (loi Defferre). Leur régime juridique est défini à l'article L. 121-6 du code de l'urbanisme. Elles ont pour principal objet de rechercher des solutions aux conflits qui peuvent survenir entre les personnes publiques associées à l'élaboration des documents d'urbanisme, ce rôle ayant été précédemment joué par le préfet. La commission de conciliation n'est cependant pas un organe d'arbitrage et n'a pas de pouvoir de décision puisqu'elle formule de simples propositions . En pratique, ces commissions n'ont jamais joué le rôle espéré au moment de l'adoption des lois de décentralisation. La plupart du temps, les préfets et élus locaux préfèrent discuter directement entre eux les arrangements possibles. |
Le cadre procédural de ces commissions est renforcé dans le projet de loi ALUR. Les parties intéressées, comme les associations agréées de protection de l'environnement, sont entendues à leur demande. Afin d'en renforcer le rôle préventif, la saisine porte non seulement sur le document d'urbanisme approuvé, mais également sur le projet de document d'urbanisme arrêté . Dans ce dernier cas, les propositions de la commission sont jointes au dossier d'enquête publique.
Le délai de remise des propositions est également raccourci à un mois au lieu de deux. Puis, l'EPCI compétent ou la commune disposent à leur tour d'un mois pour préciser les suites données à ces propositions. Lorsque la commission est saisie du document d'urbanisme approuvé, la saisine interrompt le délai de recours contentieux jusqu'à la réponse de la commune ou de l'EPCI compétent.
En pratique, cette procédure précontentieuse a surtout pour avantage d' obliger les collectivités à expliquer les choix opérés dans leurs documents d'urbanisme . Il ne s'agit pas pour autant d'en faire une condition de recevabilité préalable à tout recours devant le juge.