Audition de M. Bruno Martel-Jantin, adjoint au chef du service Ressources minérales, Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM)

M. Serge Larcher, président

Nous sommes curieux d'entendre l'avis du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) sur les réserves de notre zone économique exclusive outre-mer.

M. Bruno Martel-Jantin

Vous m'avez invité en tant qu'adjoint au chef du service Ressources minérales du BRGM ; depuis, les ressources minérales ont été regroupées avec la géologie et la géothermie. Même si mes compétences sont plus commerciales que scientifiques, je suis prêt à alimenter le débat.

Le BRGM compte 1 100 salariés, dont 700 ingénieurs et techniciens. Nous sommes présents dans toutes les régions et la plupart des territoires d'outre-mer, sauf à Saint-Pierre-et-Miquelon ; nous n'avons plus de représentation permanente en Polynésie. Notre chiffre d'affaires outre-mer représentait 6 millions d'euros en 2011, sur un total de 140 millions : 2 millions à La Réunion et à Mayotte, 1,5 à la Martinique, 1 en Guyane, 0,9 en Guadeloupe et 0,3 en Nouvelle-Calédonie.

Nos missions sont l'appui aux politiques publiques, la recherche et les activités à caractère commercial : cela vaut aussi pour l'outre-mer. Notre personnel en outre-mer est très limité et dispersé : 35 personnes, dont 10 volontaires du service civique.

Le BRGM, outre-mer, se préoccupe de géologie, de maîtrise des risques, de gestion de l'eau et des ressources minérales. Sur ce dernier point, nous sommes surtout actifs en Guyane. En Nouvelle-Calédonie, nous n'avons qu'un agent détaché.

Notre activité minière outre-mer est prioritairement orientée vers l'aide aux politiques publiques régaliennes, d'où nos fortes relations avec les services d'État et la faiblesse de nos relations contractuelles avec les régions.

Depuis la fin des grands inventaires miniers des années 1970, le BRGM ne s'intéresse plus guère aux ressources minérales en Guyane, même s'il apporte un appui technique à l'exploitation légale de l'or. Cela dit, M. Arnaud de Montebourg, ministre du redressement productif, nous a récemment sollicités pour relancer l'inventaire minier en France, y compris en outre-mer. On reverra donc le BRGM en Guyane.

Le BRGM s'implique aussi dans la gestion des ressources en granulats. Il est associé à ERAMET dans un projet sous-marin à Wallis-et-Futuna, en lien avec L'IFREMER.

M. Joël Guerriau, co-rapporteur

Comment se répartit votre activité entre trois missions ?

M. Bruno Martel-Jantin

Dans l'ensemble, par tiers. Les activités commerciales nous servent à équilibrer nos comptes et donc à amplifier nos actions publiques et scientifiques.

M. Joël Guerriau, co-rapporteur

Quels sont vos clients ?

M. Bruno Martel-Jantin

Nous avons une stratégie opportuniste : nous faisons feu de tout bois. Cela dit, nous nous efforçons d'être cohérents avec notre mission publique. Les mêmes questions nous sont posées par nos clients privés et nos tutelles publiques sur la sécurité d'approvisionnement ou la stratégie de développement minier : nous leur répondons en fonction du même socle de connaissances.

M. Joël Guerriau, co-rapporteur

Ces clients s'intéressent-ils à l'outre-mer ?

M. Bruno Martel-Jantin

Certains, oui. Iamgold, qui a connu des déboires en Guyane, a songé à nous confier les études environnementales sur le site de Grand Caïman, mais nous avons refusé. Nous sommes beaucoup plus sollicités que par le passé, notamment en Guyane.

M. Jean-Étienne Antoinette, co-rapporteur

Le BRGM est un établissement public.

M. Bruno Martel-Jantin

Industriel et commercial.

M. Jean-Étienne Antoinette, co-rapporteur

Comment arbitrez-vous donc entre les collectivités publiques et les sociétés privées? Qui décide ?

M. Bruno Martel-Jantin

Tout dépend du directeur régional, qui est le mieux placé pour apprécier les enjeux au regard de nos activités. Il est le premier à recevoir les sollicitations des préfectures pour l'appui aux politiques publiques dans la prévention des risques naturels et le secteur minier. Si une activité du BRGM peut mettre en difficulté une de nos antennes par rapport à la tutelle, nous la limitons. Nous privilégions l'appui au développement des territoires. L'activité commerciale ne vient qu'après, s'il ne remet pas en cause notre stratégie.

M. Jean-Étienne Antoinette, co-rapporteur

Les inventaires sont-ils publics ? N'importe qui peut-il savoir où se trouve tel ou tel métal, ou y a-t-il une sécurisation ? Je pense aux orpailleurs clandestins...

M. Bruno Martel-Jantin

Tous les inventaires sont publics. Détenteur de ce patrimoine, nous sommes extrêmement sollicités pour le mettre à disposition. Notre tutelle a rappelé qu'il n'y avait aucune limite à la mise à disposition à condition d'assurer la traçabilité des demandes.

Quotidiennement, cela pose problème. Répondre aux appels téléphoniques et organiser la consultation des documents a un coût...

M. Jean-Étienne Antoinette, co-rapporteur

Quid du domaine marin ? Y-a-t-il des échanges d'information avec le Brésil ou le Surinam ?

M. Bruno Martel-Jantin

Le domaine marin n'est pas la spécialité du BRGM même si une cartographie des fonds de Mayotte établie à partir de techniques géophysiques figure dans notre rapport d'activités. De manière générale, l'IFREMER a compétence sur la mer. Nous collaborons sur la frange côtière et l'exploitation des granulats ; nous sommes associés au projet mené à Wallis-et-Futuna où nous nous occupons des aspects géologiques.

Les collaborations interrégionales ? Elles sont faibles. Pour avoir travaillé en Guyane, j'estime qu'elles devraient l'être davantage dans le secteur minier avec le Brésil. Il y a des synergies à développer, bien que les frontières limitent les collaborations pour des raisons économiques et financières.

M. Richard Tuheiava, co-rapporteur

Participez-vous à la réforme du code minier ?

M. Bruno Martel-Jantin

Le BRGM a mis en place un atelier interne. Je n'y suis pas assez impliqué pour vous en dire plus. La question du guichet « H » et de la mise à disposition de l'information nous occupe et pose de nombreuses questions. Est-ce judicieux de prévoir une mise à disposition complète ? Il n'y a pas d'obligation, actuellement, pour les données de sondage et certaines données d'exploration. Si oui, selon quelles modalités pratiques ? Faut-il élargir les missions du guichet « H » au-delà des données juridiques ?

M. Serge Larcher, président

Merci de ces renseignements.

M. Richard Tuheiava, co-rapporteur

Comment concilier les activités commerciales avec la protection des intérêts nationaux ?

M. Bruno Martel-Jantin

Certaines de nos missions d'appui aux politiques publiques sont confidentielles ; c'est le cas de la mission d'intelligence économique sur les ressources minérales. Généralement, la tutelle nous demande de décliner nos rapports sous une forme adaptée à la diffusion publique.

M. Richard Tuheiava, co-rapporteur

Le Centre d'analyse stratégique fait-il partie de vos clients politiques ?

M. Bruno Martel-Jantin

Oui, de même que la Défense.

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