Première table-ronde : Place et rôle des femmes dans la Résistance

Présidence : Jacques Vistel

Président de la Fondation de la Résistance

Intervenantes :

Claire Andrieu

Professeure des universités au Centre d'Histoire de Sciences Po

Danielle Tartakowsky Professeur d'histoire contemporaine,

Présidente de l'Université de Paris VIII-Vincennes-Saint-Denis

Catherine Lacour-Astol

Docteure en histoire

1. Introduction : M. Jacques Vistel, président de la Fondation de la Résistance

Depuis plus de dix ans, la Fondation de la Résistance a pris l'initiative de célébrer le 27 mai par des cérémonies qui se tiennent successivement au monument Jean Moulin, au bas des Champs-Élysées, puis à l'Arc de Triomphe où nous ravivons la flamme. Ceci d'ailleurs m'obligera malheureusement à vous quitter vers 16 h 30.

La loi de 2013 proposée par le sénateur Mirassou donne désormais à cette célébration une dimension nationale, avec un axe fort que le Sénat a souhaité en direction de la jeunesse et des enseignants, pensant aujourd'hui que dans de très nombreux villages de France quelque chose est en train de se passer pour célébrer et commémorer le 27 mai. L'anniversaire de la première réunion du Conseil national de la Résistance est ainsi devenu grâce à vous la Journée de la Résistance, ce qui justifie évidemment pleinement notre colloque.

« Femmes Résistantes », tel est le titre de ce colloque. Jean-Pierre Lévy 7 ( * ) a écrit : « Sans elles, on n'aurait rien pu faire » . Et ce fut en effet une grande nouveauté : jusqu'alors, à l'exception de Jeanne d'Arc et de Jeanne Hachette, la guerre était une affaire d'hommes. Et le régime de Vichy ne s'y était pas trompé : il a même voulu opérer un grand retour en arrière. Songeons à la loi d'octobre 1940, qui écarte les femmes mariées de tous les emplois publics. De même, l'interruption de la grossesse, désormais punie de mort : il y eut sous Vichy des exécutions de femmes qui avaient interrompu leur grossesse.

On était loin alors des idéaux de la Résistance, au sein de laquelle des femmes se sont engagées ; et très certainement, la Résistance marqua une époque essentielle à leur émancipation, même si ce fut difficile. N'oublions pas en effet - vous le rappeliez tout à l'heure, Monsieur le Président - qu'au sein du Conseil national de la Résistance, il n'y avait que des hommes, qu'une discussion y eut lieu sur le droit de vote des femmes, que le CNR n'inscrivit pas à son programme... C'est donc le Général de Gaulle lui-même, avec l'Assemblée consultative, qui rendit effectif le droit de vote.

Je dirai pour commencer, s'agissant de l'action des femmes dans la Résistance, qu'elles furent d'abord des épouses, ce qui n'était pas indifférent puisqu'il fallait adhérer et trouver une communion de pensée entre un homme - qui aura peut-être une visibilité plus grande dans l'avenir - et son épouse, qui accomplit naturellement avec lui des missions de Résistance. Je pense notamment à ma mère, qui cachait de temps en temps des documents et qui transmettait des messages à mon père dans des paquets-cadeaux lorsqu'il était en prison. Songeons aussi à Gilberte Brossolette.

Beaucoup de femmes furent aussi agents de liaison, distribuèrent des tracts et des journaux clandestins, furent secrétaires... Je pense en particulier à un agent de liaison de mon père, Hélène Berthaud, dite « Moineau », qui nous a quittés il y a quelques jours. Mais en réalité elles exercèrent tous les « métiers de la Résistance ». Parmi ceux-ci, la propagande, notamment auprès des femmes - voyez l'action de Danielle Casanova quand elle a créé les Comités populaires de Résistance dans une grande partie de la France - agents secrets, radio, renseignement... À cet égard, je citerai Nicole de Hauteclocque ou Marie-Madeleine Fourcade.

Les femmes résistantes prirent également en charge, cela vient d'être dit, l'hébergement des évadés (aviateurs alliés, juifs...), la recherche de terrains d'atterrissage, l'organisation de parachutages - comme Geneviève Rivière, dont l'époux deviendra parlementaire 8 ( * ) - la fabrication et la rédaction de la presse clandestine - Germaine Lelièvre, en Bretagne, Geneviève de Gaulle pour le journal Défense de la France -, la fabrication de faux papiers, tellement importante ! Dans beaucoup de villages en effet, les institutrices, étant également secrétaires de mairie, travaillèrent beaucoup à la fabrication de faux-papiers.

Les femmes furent aussi infirmières. Songeons aux infirmières de la grotte de la Luire, dans le massif du Vercors, qui furent toutes déportées, lorsqu'elles ne furent pas exécutées par les Allemands.

Certaines prirent également part à l'action armée : Madeleine Riffaud, Paulette Jacquier, Claude Gérard, qu'on appela le Commandant Claude. Beaucoup de « petites mains » certes, comme dans l'ensemble de la Résistance, mais quelques-unes accédèrent aux plus hautes responsabilités : Berty Albrecht au sein du mouvement « Combat », ou Lucie Aubrac, de « Libération », qui participa à l'Assemblée consultative. Certaines des survivantes, on l'a dit, devinrent parlementaires, et ce fut une façon de poursuivre le combat pour des valeurs pour lesquelles elles avaient été prêtes à risquer leur vie.

Mais en général, beaucoup de femmes après la guerre revinrent à la vie civile et familiale ; elles intriguèrent peu pour les places et les décorations. D'ailleurs, dans le dossier qui vous a été distribué 9 ( * ) , on voit des femmes tout-à-fait extraordinaires qui n'ont eu aucune décoration : beaucoup d'entre elles furent oubliées. On les appela parfois - je cite Claire Andrieu - « les intendantes de la Résistance » .

Mais plutôt que de citer Claire Andrieu, je vais simplement lui céder la parole.

2. La Résistance a-t-elle un genre ? (Claire Andrieu)

Claire Andrieu, professeure des universités au Centre d'Histoire de Sciences-Po 10 ( * )

Les raisons d'un titre

Avec ce titre, « La Résistance a-t-elle un genre ? », je dois quelques explications. La langue française connaît le genre masculin et le genre féminin, mais depuis les années 1970 en France s'est développée l'histoire des femmes, puis celle des hommes, avec pour interrogation fondamentale les rapports entre la nature et la culture, c'est-à-dire les relations entre le sexe biologique et le rôle social qui l'accompagne, qu'on appelle le genre. La question est de savoir si le genre est uniquement le produit de processus éducatifs et sociaux ou s'il est prédéterminé par le sexe biologique.

On connaît la position radicale de Simone de Beauvoir (« On ne naît pas femme, on le devient ») et on pourrait peut-être appliquer aux hommes ce discours : « On ne naît pas homme, on le devient ».

Sans trancher cette question, qui rappelle le débat pluriséculaire sur l'inné et l'acquis, on peut s'attacher à l'histoire des rôles sociaux fondés sur les différences de sexes. Les historiens, les historiennes et les sociologues ont montré que la féminité, comme construction sociale, a une histoire, de même que la masculinité. Ces deux types de rôles sociaux se bâtissent, évidemment, dans une constante interaction. C'est ce qu'on appelle les rapports de genre. Aujourd'hui, ce sont les rapports de genre spécifiques à la Résistance qui retiennent notre attention.

Première évidence : la Résistance est bien de son temps, elle se créé et se développe dans le contexte d'un rapport de genres accentué, qui est celui des années 1930 jusqu'aux années 1960. C'est une période où la différenciation des rôles sociaux de sexes est peut-être maximale sur la durée du XX ème siècle, avec pour schéma idéal, d'un côté l'homme chef de famille, travailleur, pourvoyeur du foyer et seul détenteur du suffrage universel jusqu'en 1944, et de l'autre, la femme épouse, mère au foyer, et exclue de la démocratie élective.

La question n'est donc pas tant de savoir si la « masculinité hégémonique » , comme le dit le sociologue australien Robert Connell (en 1983), ou la « domination masculine » , comme disait Pierre Bourdieu (en 1998), a imprégné ou non la Résistance, puisqu'il s'agit d'une évidence. La question est plutôt de voir si la Résistance a été l'occasion d'une certaine dé-différenciation des rôles sociaux de sexe, et si ce mode d'activité inédit que fut la Résistance a desserré l'étau des constructions sociales genrées de son temps.

Pour apprécier la brèche opérée par la Résistance dans le mur du patriarcat, on peut prendre d'abord comme terrain d'analyse les embryons de Parlement qui ont réuni les résistants, c'est-à-dire le Conseil national de la Résistance (CNR) en France occupée, et à Alger l'Assemblée consultative provisoire (ACP). Le CNR est créé en mai 1943 et réunit seize membres, des représentants des mouvements de Résistance, des syndicats ouvriers et de l'ensemble des partis politiques d'avant-guerre, à l'exclusion de l'extrême-droite. La première ACP 11 ( * ) , installée à Alger le 3 novembre 1943, réunit des résistants dont la composition est homothétique de celle du CNR. Ils sont au nombre de 84, puis de 102 à partir de décembre 1943. Ils sont donc tous nommés et tous des hommes - sauf Marthe Simard, dont il sera question tout à l'heure.

Depuis ce double observatoire, CNR et ACP d'Alger, il est éclairant de revisiter le débat sur le vote des femmes, qui est déjà connu mais que l'on peut regarder sous ce jour particulier.

On sait que c'est par l'Ordonnance du Comité français de la Libération nationale du 21 avril 1944 que le droit de vote a été accordé aux femmes. Les tendances lourdes à l'échelle nationale et internationale y menaient de toute façon. En effet, la Chambre des Députés s'était déjà prononcée dans ce sens à plusieurs reprises dans l'entre-deux-guerres, et presque toutes les nations développées en avaient adopté la mesure au lendemain de la Première Guerre mondiale.

En 1943 et 1944, dans les enceintes résistantes masculines, le débat porte donc sur le calendrier à choisir pour la mise en oeuvre du principe plutôt que sur le principe lui-même. Il n'était pas acquis d'avance que dès les premiers jours de la Libération, les femmes seraient déclarées les égales de l'homme dans le domaine civique. Et si finalement cela a été le cas, le détail des discussions montre que la participation des femmes à la Résistance a joué le rôle d'un adjuvant à la prise de décision : un adjuvant décisif, mais amené en dernier recours dans le débat.

La Résistance féminine dans le regard des hommes :
une action extraordinaire mais circonstancielle

C'est pourquoi dans un premier temps, je voudrais montrer que la Résistance est bien un phénomène genré, au sens qu'elle est perçue par les hommes avec un regard d'homme. Nous verrons ensuite le regard des femmes. Ce regard des résistants est globalement le suivant : la Résistance des femmes est bien une activité extraordinaire mais circonstancielle, et sans incidence pratique ou presque sur les relations que les hommes auront avec les femmes après la guerre. Le droit de vote des femmes a été repoussé aussi bien par le CNR que par la Commission de législation et de réforme de l'État de l'ACP. Donc deux refus, dans un premier temps.

Au Conseil national de la Résistance, le témoignage de Jacques Debû-Bridel 12 ( * ) montre que c'est l'opposition ferme du parti radical qui a interdit d'inscrire la mesure dans le programme, alors même que le général de Gaulle s'était prononcé en juin 1942 pour cette mesure (dans la déclaration qu'il avait faite aux mouvements de résistance). De même à la commission concernée de l'Assemblée consultative provisoire présidée par Paul Giacobbi 13 ( * ) , un radical représentant la Corse, la mesure a d'abord été éliminée du projet d'organisation des pouvoirs publics à la Libération, alors même que le Comité français de Libération nationale l'avait introduite dans son propre projet.

Finalement, le projet de la Commission ne posait pas le principe du vote des femmes et prévoyait seulement qu'aux municipales, les femmes seraient éligibles, mais non électrices, si bien que les élections législatives s'annonçaient uniquement masculines et qu'il reviendrait à l'Assemblée constituante de bien vouloir se prononcer sur le vote des femmes 14 ( * ) . Comme l'a dit un député au cours des débats, c'était repousser aux calendes grecques la décision.

Il est intéressant de voir quel est le déclic qui a fait qu'en séance plénière, l'Assemblée consultative provisoire 15 ( * ) a finalement inclus le principe du vote des femmes dans l'article 1, et le droit pour les femmes d'être électrices aux municipales 16 ( * ) .

Fondamentalement, ce n'est pas la Résistance qui a joué un rôle ; ce sont deux cultures politiques qui portaient une image des femmes différente de celle du parlementarisme libéral incarné par la III ème République.

Ces deux cultures avaient en commun une vision spécifique de la famille dans la Cité ; une vision de la famille comme politique. Je veux parler de la culture politique communiste et de la culture politique catholique 17 ( * ) . Ce parallèle n'est pas très rare en histoire, mais en l'occurrence il paraît valable car les deux porte-parole les plus actifs en faveur du vote des femmes étaient, d'une part, le communiste Fernand Grenier, et d'autre part, à un moindre degré, Robert Prigent, futur député MRP après la Libération. L'un et l'autre étaient militants actifs de ces deux mouvances respectives depuis l'enfance et étaient issus de milieux ouvriers du département du Nord, ce que je livre à ma voisine Danielle Tartakowsky, spécialiste de la Résistance des femmes dans le Nord. C'est l'intervention de Robert Prigent qui a introduit le principe du vote des femmes dans l'article 1, et celle de Fernand Grenier qui a fait modifier les articles en faveur du droit de vote des femmes aux municipales 18 ( * ) .

Que retenir de ces débats successifs ? Il est intéressant de relever qu'en petit comité, que ce soit entre les seize membres du CNR ou entre les onze membres de la Commission de législation et de réforme de l'État de l'Assemblée consultative provisoire, la masculinité fait barrage. L'idée que des femmes puissent participer à ces discussions politiques enfumées, et donc pénétrer dans l'entre-soi masculin de la lutte politique, leur paraît presque un acte de barbarie, certainement d'incivilité et d'indécence. À ce niveau, c'est l'identité masculine qui est en question. Mais dans une assemblée plus large, ouverte aux regards extérieurs, et donc plus en phase avec les évolutions du monde, ce réflexe conditionné joue moins. C'est là que Fernand Grenier et Robert Prigent ont pu rappeler le rôle des femmes dans le combat de la Résistance, et prendre appui sur leur « courage » et leur « sacrifice » , selon leurs termes, pour exiger que le droit de vote soit accordé aux femmes séance tenante. Cet argument a finalement emporté l'avis de l'Assemblée, non sans quelques réticences. La résistance fut le dernier argument employé, mais finalement décisif.

Il faut dire que d'une certaine façon, le regard que les femmes portaient sur « leur » Résistance était aussi imprégné de cette culture patriarcale en vigueur.

La Résistance des femmes dans le regard des femmes :
un combat pour l'Homme

Je dois apporter ici quelques précisions factuelles et quelques chiffres sur la Résistance, bien que l'exercice soit très périlleux du fait que, pour des raisons que l'on comprend, la Résistance n'a pas été recensée du temps de son activité. Quand on évoque la Résistance aujourd'hui, on parle beaucoup de celle répertoriée après la guerre, de la Résistance recensée à travers des procédures sélectives, qui traduisent mal - voire déforment - le tableau de ce grand mouvement social à l'échelle nationale que fut la Résistance. Selon ces recensements sélectifs, le pourcentage de femmes dans la Résistance varie entre 10 et 15 %, dont environ 12 % parmi les combattants volontaires de la Résistance, titre délivré après la guerre. On trouve plus de femmes dans les réseaux de renseignement, qui correspondaient mieux, d'une certaine manière, à leurs aptitudes reconnues socialement, un peu moins dans les mouvements et évidemment encore moins dans les maquis, où il s'agissait de prendre les armes. On trouve aussi beaucoup de femmes (24 %) dans le mouvement religieux « Témoignage Chrétien », ce qui n'est sans doute pas un hasard, de même que dans le mouvement « Défense de la France » (17 %), qui est essentiellement étudiant : là aussi, on note une grande disponibilité des jeunes filles. La grande inconnue demeure la Résistance des femmes au foyer : toutes ces femmes, qui représentent à-peu-près la moitié des femmes de 15 à 64 ans, qui ont participé directement à la Résistance et qui ne sont en général enregistrées nulle part, alors qu'elles ont joué un rôle crucial, notamment d'hébergement.

Je voudrais risquer l'hypothèse d'une aptitude supérieure des femmes de l'époque à l'engagement résistant : c'est l'idée qu'il y a forcément, dans la mesure où les rôles masculins et féminins sont alors très différenciés, une culture politique spécifique des femmes, puisqu'elles ont une position sociale spécifique. Cette culture repose sur le fait qu'un pourcentage important d'entre elles est au foyer, qu'elles sont prédisposées par la société aux tâches matérielles, qui sont des tâches ouvrières dans le foyer, et préposées aux soins des enfants. Elles ont par ailleurs une culture religieuse plus active, une véritable pratique religieuse, et elles sont statistiquement moins instruites. L'ensemble de ces paramètres entraîne une culture politique - ou civico-politique - particulière.

Je vais en citer un exemple, tiré d'un témoignage d'Édith Thomas, alors conservateur aux Archives nationales et résistante au sein du Comité national des écrivains. Celle-ci, dans son journal - ce n'est pas une reconstitution après coup - raconte l'anecdote suivante, datée du 11 octobre 1941 :

« Rencontré ce matin une voisine qui se rendait à l'église : « Je vais prier pour les Russes », m'a-t-elle dit. Je ne peux pas croire que Dieu les abandonne. » Je n'ai pas pu m'empêcher de lui demander : Vous croyez que Dieu est avec les communistes ? » « Oui, m'a-t-elle répondu. Jésus ne peut être qu'avec les communistes, les vrais. »

Ce genre de dialogue nous met sur la voie d'une appréhension de la vie politique autre, qui facilite l'accès à la Résistance car elle fait de ces femmes des outsiders de la société établie : étant hors de la société, elles ont moins d'efforts que les hommes à faire pour se retrouver hors-la-loi. C'est ainsi qu'un certain nombre de femmes sont clairement à l'initiative de mouvements de Résistance, par exemple Lucie Aubrac, Hélène Viannay, Micheline Eude, Germaine Tillion et bien d'autres encore...

Pour conclure, je dirai que cette participation au combat, à risques presque égaux avec ceux des hommes, ne faisait pas nécessairement des femmes résistantes des féministes au sens des années 1970 et suivantes. Pour la plupart, c'est plutôt un certain humanisme qu'elles défendaient, ni masculin ni féminin. Comme l'a écrit Annie Guéhenno dans ses souvenirs de Résistance : « La Résistance fut comme un embarquement dans notre vie d'homme - c'est une femme qui écrit cela en 1965 -. Derrière les titres, l'argent, tous ces fantômes, se trouvent les hommes, et ils sont semblables » .

« L'identité humaine » , tel était, je crois, le fondement de la lutte citoyenne contre le III ème Reich.

Je vous remercie. [Applaudissements]

Jacques Vistel

Merci beaucoup, Claire Andrieu, pour cette présentation synthétique et dense. Je donne la parole à Mme Danielle Tartakowsky, professeure d'histoire contemporaine et présidente de l'Université Paris VIII-Vincennes-Saint-Denis.

3. Un cas particulier : les manifestations de ménagères organisées par le Parti communiste français (Danielle Tartakowsky)

Danielle Tartakowsky, professeure d'histoire contemporaine, présidente de l'Université Paris VIII-Vincennes-Saint-Denis

À partir de 1940 et durant plus de cinq ans, la France subit le rationnement et la faim qui frappent certains plus que d'autres, du fait de défaillances de l'organisation du ravitaillement général, de deux hivers particulièrement rigoureux et plus encore bien sûr, de l'occupant dont les prélèvements privent la France d'une grande partie de ses ressources.

La réaction vient des femmes, de femmes confrontées aux étals vides, à la pénurie. De novembre 1940 à l'été 1944, elles participent à plusieurs centaines de manifestations de rue dans la France entière, qui touchent toutes les zones de pénurie alimentaire : bassin minier du Nord, région parisienne, axe rhodanien, littoral méditerranéen.

Ces femmes, souvent accompagnées de leurs jeunes enfants, sont parfois quelques dizaines, plus souvent quelques centaines, exceptionnellement plus d'un millier. Elles se portent depuis les marchés vides vers les préfectures, les sous-préfectures et les mairies, et réclament aux autorités de quoi se nourrir. Durant l'hiver 1940-1941, elles obtiennent souvent satisfaction.

Ces manifestations s'inscrivent, jusqu'en 1942 du moins, dans le rythme saisonnier des récoltes. Le rôle de la rumeur dans leur diffusion, leur atomisation, le rapport d'immédiateté spatio-temporelle avec les causes et les objectifs (les étals sont vides, on a faim) sont autant de facteurs qui amènent à voir en elles des mouvements teintés de ces archaïsmes caractéristiques de la culture politique de Vichy, et qui peuvent les apparenter aux émeutes de subsistance d'Ancien Régime.

Certaines de ces manifestations sont indéniablement spontanées, en zone sud en premier lieu. Du moins, leur rythme, leur implantation, leur nombre ne sauraient-ils se comprendre sans prise en compte des effets croisés de la conjoncture alimentaire et de la stratégie du Parti communiste, qui va intégrer ces mouvements sociaux, ces mouvements de protestation sociale fondés sur les revendications les plus élémentaires - la faim - dans sa stratégie politique, dans sa stratégie de résistance. Ces manifestations sont évoquées pour la première fois par L'Humanité clandestine dès la mi-novembre 1940 : c'est la première fois qu'on a une attestation de ces mouvements de ménagères (un terme totalement disparu des usages de l'entre-deux-guerres, sauf rarissimes exceptions). Ces manifestations dites de ménagères représentent de novembre 1940 à mai 1942 plus de la moitié des manifestations de rues qui se sont déployées sur un objectif ou sur un autre dans la France entière, malgré les interdictions.

Durant l'hiver 1940-1941, une première vague frappe principalement, mais non exclusivement, la zone occupée, où les risques sont pourtant majeurs. La plupart de ces manifestations se déroulent dans d'anciennes municipalités communistes, dans le département de la Seine et le bassin du Nord en premier lieu. Elles deviennent exceptionnelles durant l'été 1941, puis reprennent avec force à la fin de l'année sous l'effet d'une pénurie accrue.

Au début de 1942, elles se déploient principalement en zone sud du fait de l'aggravation des restrictions et de l'afflux des réfugiés en zone occupée. À partir de cette date, le phénomène cesse de se limiter aux fiefs militants d'avant-guerre pour s'étendre à au moins vingt-quatre départements français.

Le Parti communiste ne revendique pas explicitement la paternité de ces mouvements, mais il sait se saisir d'un mécontentement surgi sur le terrain de la consommation - qui ne relevait pas de son champ d'action coutumier dans l'entre-deux-guerres - pour l'organiser, ou du moins l'amplifier. Contrairement au titre de cet exposé, je dirai qu'il interagit plutôt qu'il organise ce mouvement. Il mobilise d'abord sur le seul terrain revendicatif, conformément à l'analyse de la guerre anti-impérialiste qui est la sienne jusqu'au début 1941, puis conserve ce mode d'action au nombre de ses formes de résistance après le tournant de 1941 en devant (je cite un préfet) « à l'effective ampleur du problème posé de trouver là un terrain d'action » .

Un terrain d'action où le mécontentement social se conjugue avec l'action de comités de base animés par quelques femmes, futures cadres de l'Union des Femmes françaises, qui les impulsent et qui demeurent légales. Ces manifestations attestent d'une précoce résistance civile et populaire qui contribue, dès l'hiver 1941-1942, à saper le consensus social souhaité par Vichy. Le gouvernement s'en inquiète et réagit en juillet 1942 en faisant adopter des mesures visant à priver ces manifestations de toute publicité. Il demande aux préfets d'avertir les maires qu'il n'y aura jamais de distributions spéciales après une manifestation de ce type, pour éviter que les manifestations, dont j'ai dit qu'elles avaient été suivies d'effets positifs durant l'hiver 19440-1941, ne fassent tache d'huile. Cependant, dans certaines villes plus que d'autres, la répression se durcit : c'est le cas dans le Doubs et à Marseille, où se produisent des internements administratifs de femmes ou des arrestations à la suite de ces manifestations de ménagères.

La progression de la Résistance, son affirmation stratégique et le développement de la lutte armée contribuent à modifier la place et le rôle de ces manifestations qui, toutefois, ne disparaissent pas. Elles deviennent inférieures en nombre aux manifestations dites patriotiques qui vont en se multipliant. Elles s'émancipent du temps saisonnier des troubles de subsistance pour désormais s'intégrer au rythme global de la lutte contre Vichy et l'occupant.

Les manifestantes, puisqu'il ne s'agit que de femmes, souvent accompagnées de leurs enfants, cessent du reste de tenir les autorités pour des interlocuteurs et intègrent parfois à leur mouvement des revendications d'autre sorte, dont le rejet du Service du travail obligatoire. La place qu'y jouent les comités de femmes, parfois soutenus par des Francs-tireurs et partisans - c'est le cas rue Daguerre à Paris - devient pour elles beaucoup plus ouverte. Certaines de ces manifestations vont s'inscrire explicitement dans la préparation de la grève du 14 juillet 1944 et de la grève insurrectionnelle, en s'affirmant comme des composantes à part entière de la Résistance organisée.

« Actions genrées », dit-on aujourd'hui parfois avec une certaine condescendance. Certes, il s'agit bien d'un mode d'action genrée au sens où il épouse la partition convenue des rôles sociaux, mais cette partition, par-delà la place des femmes, est alors assumée comme un atout par le PCF. En effet, dans ce secteur comme dans d'autres, ce parti joue sur des pratiques sociales préexistantes de toutes natures, pour pouvoir ancrer dans le terrain social et populaire sa résistance de masse. Dès lors, les femmes se voient délibérément assigner une place à la mesure de leur rôle majeur dans le tissu social.

D'aucuns diront que cette attitude des femmes fut une attitude d'opposition plus que de résistance. C'est oublier que ces manifestations dangereuses - il y eut des femmes arrêtées - contribuent dès la fin 1941 à mettre sur la place publique l'existence d'un mécontentement et à attester de formes de résistance, avant de s'inscrire dans des orientations politiques et stratégiques nationalement définies. Ces manifestations de femmes ordinaires ont sans doute été un moyen pour elles d'entrer en résistance, sinon dans la Résistance, et même - sans doute une étude serait-elle nécessaire sur ce point - d'entrer, selon les formes qui étaient les leurs, en politique.

Jacques Vistel

Merci, Madame, de cette évocation, qui se situe bien dans le prolongement de vos travaux sur les mouvements sociaux. Nous allons maintenant aborder la situation des femmes dans la Résistance sous l'angle géographique, avec une étude de cas sur le département du Nord par Catherine Lacour-Astol, docteure en histoire contemporaine, qui a été votre élève, Claire Andrieu, et à laquelle je suis heureux de donner la parole.

4. La résistance féminine dans le Nord : exemplarité, singularité (Catherine Lacour-Astol)

Catherine Lacour-Astol, docteure en histoire 19 ( * )

J'ouvrirai ce propos par une citation, puisqu'on a beaucoup parlé de la louange immédiate et consensuelle qui a entouré l'investissement des femmes dans la Résistance :

« A l'origine, la Résistance fut spontanée, instinctive, individuelle ! Dans cette réaction immédiate, les femmes furent sans doute plus nombreuses que les hommes » . 20 ( * )

Dès 1946, Élisabeth Terrenoire met l'accent sur le fait que non seulement les femmes se sont engagées, mais qu'elles ont sans doute été plus nombreuses que les hommes.

Indépendamment de la louange dont a fait l'objet la mobilisation des femmes dans la Résistance, l'histoire de la Résistance, en revanche, a longtemps peiné à prendre en compte cet engagement, et plus encore à considérer sa spécificité.

Poser la question de la Résistance féminine dans le Nord, c'est prendre acte des avancées récentes de l'historiographie de la Résistance, et donc tenter de dresser le portrait d'un engagement singulier parce que féminin. C'est aussi prendre en compte la dimension territoriale de la Résistance, qui ne s'est de toute évidence pas développée à l'identique dans une France écartelée.

Deux questions, donc.

En quoi la Résistance des femmes du Nord est-elle exemplaire de la Résistance féminine ? Quelles marques spécifiques y a apporté l'inscription dans un espace singulier à plus d'un titre ?

Dans le Nord, comme ailleurs sur le territoire français, l'étude de la mobilisation féminine fait état d'une activité plurielle, celle des agents de liaison, des boîtes aux lettres, des agents de renseignements, des passeuses de ligne... Ce tableau foisonnant atteste que si la Résistance armée est restée majoritairement « l'affaire des hommes » 21 ( * ) , aucune activité n'a été ignorée par les résistantes.

Répartition des arrestations effectuées par les Allemands
ou sur leur ordre dans le Nord, 1940-1944

Le tableau qui vous est proposé 22 ( * ) est fait, non pas à partir des archives de la reconnaissance mais à partir de celles de la répression, et met donc en évidence les activités qui ont été sanctionnées par l'occupant en soulignant le rôle des femmes par rapport à celui des hommes. Ce rôle est évidemment classé au prorata de l'importance prise par les femmes dans l'activité en question. Le tableau commence par les sabotages, pour lesquels le rôle des femmes est quasiment nul, ou en tout cas n'a pas été réprimé, pour se terminer par l'hébergement, dans lequel l'engagement des femmes, les choses a été essentiel.

En dehors de la pluralité des activités, d'autres traits de l'engagement résistant féminin peuvent être mis en évidence : sa précocité, sa réactivité, dont a fait état Danielle Tartakowsky, son ancrage dans le quotidien, son inscription au coeur du foyer, cette irruption de la Résistance dans la sphère privée autorisant pour partie sa survie. Je voudrais insister sur la précocité, qui signe une résistance pionnière, « un désordre de courage » , pour reprendre l'expression de Malraux. Dans le Nord, cette précocité est lisible dans la chronologie des arrestations, comme dans celles des déportations. La première femme déportée du Nord, Mariette Roëls-Duflot, est arrêtée le 2 septembre 1940 et déportée à Aix-la-Chapelle le 16 novembre de la même année. Elle passera plus de 1 600 jours en déportation 23 ( * ) .

Perçue et sanctionnée par l'occupant, cette Résistance pionnière sera reconnue à la fin de la guerre, puisque selon les dates retenues par l'administration dans le cadre de la reconnaissance par la carte verte - la carte du Combattant Volontaire de la Résistance (CVR) - 27 % des résistantes du Nord se sont engagées en 1940-1941, contre 13 % des résistants.

La grève des mineurs de 1940-1941, qui alerte l'occupant sur la capacité de mobilisation dans une région rompue à la lutte ouvrière, éclaire les modalités d'un engagement féminin pluriel. Dans la grève, le rôle des femmes de mineurs est de faciliter la lutte masculine, ainsi qu'en témoignent les ordres allemands qui cherchent à cantonner les femmes au foyer, relayés en cela par les autorités françaises, comme le montre le document suivant.

Affiche émanant de la mairie d'Auchel
relayant un ordre de la Kreiskommandantur de Béthune 24 ( * )

Certaines femmes sont aussi considérées comme des meneuses, et poursuivies comme telles, quand d'autres poursuivront la lutte dans les rangs communistes.

Ces traits majeurs de l'engagement féminin sont sans doute accusés dans le Nord, qui connaît un régime d'occupation aggravé.

Divisions administratives du Militärbefehlshaber in Belgien und Nordfrankreich (commandement militaire en Belgique et dans le Nord de la France) 25 ( * )

Les départements septentrionaux, qui dépendent de l'OFK-670, sont en effet rattachés au Commandement militaire allemand de Bruxelles et placés sous la coupe d'un Oberfeldkommandant doté des pleins pouvoirs sur sa province. La violence de l'invasion et la précocité de l'occupation, effective dès la mi-juin 1940, influent sur la mobilisation féminine. En septembre 1940, la condamnation à mort d'une femme, Blanche-Joséphine Paugan, accusée d'avoir coupé les lignes téléphoniques, est un signal fort adressé aux populations.

Avis de condamnation à mort de Blanche-Joséphine Paugan

L'indifférence au sexe manifesté par cette condamnation 26 ( * ) , même si elle n'a finalement pas été exécutée, est un marqueur fort de la rigueur immédiate qui caractérise la zone rattachée.

Dans le Nord, la mobilisation féminine est aussi influencée par le précédent de 1914, dont la mémoire régionale a conservé le souvenir, et particulièrement celui de figures féminines du refus de l'occupant comme Louise de Bettignies. En 1927, un monument financé par une souscription nationale est inauguré à Lille par le maréchal Foch à la mémoire de la jeune femme et aux femmes héroïques des pays envahis.

Deux ans avant, sous le titre La guerre des femmes , Antoine Redier avait signé un hommage à toutes celles qui avaient résisté avant la lettre 27 ( * ) .

Monument en l'honneur de Louise de Bettignies, entrée du boulevard Carnot, Lille.

Inscription : « A Louise de Bettignies et aux femmes héroïques des pays envahis ».

Photographie de Léo Greggs, aviateur américain,
hébergé et soigné de février 1944 à mai 1944 par Léa Leroux-Delannoy 28 ( * )

Cette mobilisation spécifique est le fait de femmes seules, dont certaines étaient déjà des résistantes en 1914, à l'instar de Jeanne Gadenne-Jourdain. Elle a ouvert les portes de sa maison en 1914 lorsque son mari était mobilisé, elle le fait à nouveau en 1940. Arrêtée en septembre 1943, déportée en février 1944, elle revient sauve de déportation en 1945 à l'âge de 64 ans 29 ( * ) . Son itinéraire, qui montre la filiation entre les deux conflits, témoigne aussi de ce que la résistance d'aide est un tremplin pour d'autres formes d'engagement : dans son cas, le renseignement, pour le compte de l'Organisation civile et militaire (l'OCM).

Cependant cette résistance d'aide, et plus généralement cette résistance civile, est surtout le fait de femmes engagées au sein du couple. Reflet du caractère dominant de la résistance non armée, l'engagement familial est, dans le Nord, l'objet d'une reconnaissance appuyée en sortie de guerre. En témoigne la consécration de Lucienne Buysse d'Hallendre 30 ( * ) , proposée pour siéger dans le cénacle masculin de la commission départementale de la CVR, à l'instar de Lucie Aubrac à l'échelle nationale. Sa consécration, comme son itinéraire, en font l'idéal type de la résistante du Nord. Maturité (elle est née avant le siècle), précocité de l'engagement, anglophilie (elle est Lise Dallen en Résistance), engagement familial aux côtés de son époux et de son fils, elle est, en sortie de guerre, une icône de la Résistance féminine régionale, et est la gardienne d'une activité résistante partagée au sein du couple, quelle qu'ait été la valeur de ce partage.

Eugène d'Hallendre, responsable OCM, fusillé à Bondues le 27 décembre 1943
et Lucienne Buysse-d'Hallendre,
membre de l'OCM, arrêtée avec son mari, déportée, rapatriée

Pour finir, je voudrais revenir sur le modèle familial et les rapports sociaux à l'intérieur de la famille, pour rappeler que ce couple évoque un propos tenu par Antoine Prost - manifestement encore d'actualité dans les années 1940 et 1950 - selon lequel « dans les années 1930, se marier c'est logiquement faire équipe» . 31 ( * )

Jacques Vistel

Merci beaucoup, Madame, d'avoir mis l'accent sur les différences entre la zone dite libre, la zone occupée, les zones annexées et la zone Nord-Pas-de-Calais, qui présentent évidemment des caractéristiques extrêmement variées en matière de répression.

Nous avons terminé cette première table ronde, et j'invite Guy Krivopissko à rejoindre la tribune.


* 7 Jean-Pierre Lévy (1910-1996) fut chef du groupe lyonnais « France-Liberté », co-fondateur puis chef national du mouvement « Franc-Tireur », Compagnon de la Libération.

* 8 Paul Rivière, Compagnon de la Libération, député de la Loire de 1962 à 1978.

* 9 Les documents figurant dans le dossier remis au public le jour du colloque ont été reproduits en annexe.

* 10 Les notes en bas de page sont de l'auteure.

* 11 La première ACP siège jusqu'au 25 juillet 1944 ; la quasi-totalité de ses membres, tous nommés, sont des résistants de France ou des territoires extérieurs. De même qu'au CNR, tous les partis politiques y sont représentés, sauf l'extrême droite. Aucune femme ne siège au CNR, une seule à l'ACP.

* 12 Jacques Debû-Bridel (1902-1993), membre du CNR où il représentait la Fédération républicaine, parti de la droite catholique, fut député en 1944-1945 puis sénateur de 1948 à 1958.

* 13 Paul Giacobbi (1896-1951), élu sénateur de la Corse en 1939 puis député de la Corse de 1945 à 1951.

* 14 Le texte sorti des débats de la commission de l'ACP en mars 1944 ne représentait donc qu'un petit progrès par rapport au silence du CNR. Il autorisait seulement les femmes à se présenter aux premières élections municipales, cantonales et nationales qui désigneraient une partie des membres des assemblées provisoires, peu après la Libération. Dans cette période de transition, les femmes pouvaient donc être éligibles, mais non électrices. L'électorat restait entièrement masculin. Le principe du suffrage féminin n'étant pas énoncé, la garantie n'était pas donnée que les femmes seraient électrices lors des élections ultérieures.

* 15 Celle-ci était alors exclusivement masculine, puisque Marthe Simard, seule déléguée de sexe féminin, n'y siégeait pas à cette date.

* 16 L'article premier de l'ordonnance du 21 avril 1944 portant organisation des pouvoirs publics en France après la Libération dispose que la future Assemblée nationale constituante sera élue « par tous les Français et Françaises majeurs » et que, pour toutes les élections aux assemblées provisoires, les articles 17 et 21 spécifient que « Les femmes sont électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes » .

* 17 Cette vision incluait la famille comme acteur civique, à travers chacun de ses membres, et en particulier les femmes.

* 18 Il s'agit des articles 16 et 20 (devenus les articles 17 et 21 dans le texte final).

* 19 Les notes sont de l'auteure.

* 20 Terrenoire, Élisabeth, Combattantes sans uniforme, les femmes dans la Résistance , Paris, Bloud et Gay, 1946, p. 8.

* 21 « La guerre est l'affaire des hommes » est le titre du chapitre consacré par Margaret Collins Weitz à la Résistance militaire, chapitre dans lequel elle insiste sur les obstacles faits aux femmes pour y participer. Collins-Weitz, Margaret, Les combattantes de l'ombre : histoire des femmes dans la Résistance (1940-1945) , Paris, Albin Michel, 1997, 416 p.

* 22 À paraître en 2015 dans Catherine Lacour-Astol, Le genre de la Résistance. Répression et reconnaissance de l'engagement féminin dans le Nord (1940-début des années 1950) , Paris, Presses de Sciences Po.

* 23 ONAC/SD Nord, dossier CVR 212, Mariette Roëls-Duflot.

* 24 Archives Nationales de Pierrefitte, Fonds 72AJ/853.

* 25 Archives nationales, La France et la Belgique sous l'occupation allemande 1940-1944, les fonds allemands conservés au Centre historique des Archives nationales, Inventaire de la sous-série AJ40, Centre historique des Archives nationales, 2002.

* 26 Archives Nationales de Pierrefitte, Affiches du comité d'histoire de la Seconde guerre mondiale, 72AJ/837.

* 27 Antoine Rédier, La guerre des femmes, histoire de louise de Bettignies et de ses compagnes, Paris, Éditions de la Vraie France, 1924.

* 28 Archives Départementales du Nord, 170W71060, Dossier de médaille de la Résistance de Léa Leroux-Delannoy, Lille.

* 29 ONAC/SD Nord, dossier CVR 50, Jeanne Gadenne-Jourdain.

* 30 ONAC/SD Nord, dossier CVR 16, Lucienne Buysse d'Hallendre.

* 31 Prost, Antoine « La famille et l'individu » , in Antoine Prost, Gérard Vincent, Histoire de la vie privée. De la première Guerre mondiale à nos jours , Paris, Seuil, 1987, p. 90. Dans cette contribution, Antoine Prost utilise les résultats d'une enquête réalisée par le magazine Confidences de juin 1938 (« Comment concevez- vous le bonheur conjugal ? » ).

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