C. DÉBAT D'ACTUALITÉ SUR LES CONSÉQUENCES POLITIQUES ET HUMANITAIRES DE LA CRISE EN UKRAINE

Sur proposition du Bureau, l'Assemblée a, pour la troisième fois cette année, décidé de consacrer son débat d'actualité du jeudi sur l'Ukraine. Elle s'est inquiétée cette fois des conséquences politiques et humaines de la crise dans ce pays. Ce débat a été suivi par le discours de M. Petro Porochenko, nouveau Président ukrainien élu le 25 mai dernier à une large majorité, qui a présenté son plan de paix à cette occasion. Si la réforme constitutionnelle de l'Ukraine se poursuit avec l'organisation, d'ici la fin de l'année, d'élections législatives qui devraient garantir à tous les électeurs de pouvoir se rendre aux urnes, la violence du conflit a empiré. Les activités criminelles et les cas d'enlèvements ou de détentions augmentent rapidement. Des exemples de torture et des assassinats ont même été rapportés. La Russie affirme par ailleurs que 5 000 Ukrainiens ont déjà demandé le statut de réfugié en Russie et les données du service frontalier russe parlent de 140 000 personnes massées à la frontière. Le rapport du Commissaire des droits de l'Homme des Nations unies du 23 juin évoque, quant à lui, 46 000 personnes déplacées. 11 500 personnes, notamment des Tatars, ont en outre dû quitter la Crimée sans possibilité d'y retourner.

M. René Rouquet (Val-de-Marne - SRC) , président de la délégation française , a souligné l'espoir suscité par l'élection du Président Porochenko dans des conditions qui garantissent sa pleine légitimité. L'élection s'est en effet déroulée dans des conditions globalement satisfaisantes et avec un taux de participation élevé. Il convient désormais d'oeuvrer à la résolution du conflit, et en particulier de concilier le respect de l'unité de l'Ukraine et l'autonomie de l'Est du pays, notamment sur le plan linguistique et culturel. Il faut également lutter contre la corruption et, plus généralement, mettre en place un véritable État de droit, avec une justice indépendante et au service de l'intérêt de tous. C'est peut-être là que l'Assemblée et le Conseil de l'Europe ont un rôle à jouer après s'être montré relativement effacés pendant la crise ukrainienne, avec quelques actions utiles mais très marginales, telles que l'envoi d'un conseiller à la Rada. Les sanctions contre la délégation russe, tout à fait légitimes au regard de l'ampleur de la violation des principes de base du droit international en Crimée, ont de façon plus que prévisible conduit au retrait de celle-ci de l'APCE. La collaboration avec les autres organisations paneuropéennes que sont l'Union européenne et l'OSCE est plus que jamais nécessaire.

M. Bernard Fournier (Loire - UMP) s'est félicité de l'intense activité diplomatique des derniers jours. Il a constaté lui aussi que la légitimité électorale du nouveau Président ukrainien lui permet d'engager un dialogue véritable avec l'ensemble de ses compatriotes, en particulier ceux de l'Est, et de réfléchir collectivement à l'avenir institutionnel de l'Ukraine. Le défi est de taille car il s'agit à la fois de préserver l'intégrité territoriale du pays et de respecter la grande diversité de sa société. Les cérémonies du 70 ème anniversaire du Débarquement en Normandie, le 6 juin dernier, ont permis aux Présidents Porochenko et Poutine de rétablir le dialogue entre l'Ukraine et la Russie. Un groupe de contact trilatéral Ukraine-Russie-OSCE pour un plan de paix pour l'Est de l'Ukraine a alors été mis en place, en lien avec la décision de négociations russo-ukrainiennes. Dès le lendemain, Petro Porochenko proposait un plan de paix pour le Donbass en trois points : l'amnistie pour les combattants qui déposent les armes, pourvu qu'ils n'aient pas de sang sur les mains ; la mise en place de corridors pour évacuer les mercenaires russes souhaitant rentrer dans leur pays ; le dialogue avec les citoyens ukrainiens pacifiques. Il a également présenté ses engagements envers les habitants des régions de Donetsk et de Lougansk : décentralisation du pouvoir, élections locales anticipées, liberté de l'usage de la langue russe, respect des spécificités régionales, plan de reconstruction économique élaboré conjointement avec l'Union européenne, etc. Bien sûr, le poids de la Russie dans la décision des chefs séparatistes ukrainiens a été déterminant, le plan de paix du Président Porochenko ayant reçu le soutien de principe du Kremlin. Pour consolider l'avenir, deux conditions devront être réunies : d'une part, l'organisation d'élections législatives anticipées, la composition actuelle de la Rada ne reflétant plus la réalité du paysage politique ukrainien, et, d'autre part, la conclusion d'un accord anticorruption au niveau national.

Le débat a ensuite été suivi par le discours de M. Petro Porochenko, Président de l'Ukraine, qui a pu développer les principaux points de son plan de paix que sont le retrait des troupes russes de la zone frontalière, la fermeture de la frontière et un cessez-le-feu, et rappeler ses engagements envers le Donbass, notamment sur la restauration de son économie.

M. Bernard Fournier (Loire - UMP) a interrogé le Président ukrainien sur le problème de la corruption, et plus particulièrement sur le plan anti-corruption qui devrait être mis en place dans le cadre du plan de paix.

M. Petro Porochenko lui a répondu qu'il faudrait non seulement modifier la législation, mais aussi obtenir des résultats concrets. Il a constaté que la corruption ne peut sévir dans un pays qu'à partir du moment où les personnes corrompues sont protégées par quelqu'un de haut placé. Le phénomène est rendu possible par l'absence de toute volonté politique de lutter contre la corruption. Or, la situation, aujourd'hui, a changé, ces hautes protections sont tombées.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page