D. VIOLENCE VÉHICULÉE DANS ET PAR LES MÉDIAS

Les médias sont omniprésents dans la vie quotidienne. La violence qu'ils peuvent véhiculer n'est pas sans conséquence sur le comportement des individus et des sociétés dans leur ensemble, même s'il reste difficile d'établir un lien de causalité direct entre l'exposition d'une personne à un produit ou un service de médias à caractère violent et un acte d'agression ou de violence ensuite commis par cette personne. Le développement d'Internet relance aujourd'hui le débat et invite les autorités à adapter leur corpus législatif.

C'est pourquoi la commission de la culture, de la science, de l'éducation et des médias, par l'intermédiaire de son rapporteur, Sir Roger Gale (Royaume-Uni - GDE), a adopté une série de recommandations incitant les États membres du Conseil de l'Europe à une gestion active de ce problème.

Mme Maryvonne Blondin (Finistère - SOC), rapporteure pour avis de la commission des questions sociales, de la santé et du développement durable , a cependant fait remarquer que le projet de résolution ne donnait pas suffisamment d'importance au groupe le plus vulnérable dans l'environnement médiatique, à savoir les enfants. Le seul outil juridique contraignant sur ce point est aujourd'hui la Convention européenne sur la télévision transfrontière, en particulier avec son article 7. Or, les enfants sont de plus en plus exposés. Ils sont les premiers utilisateurs des nouveaux outils technologiques, dont ils savent se servir de plus en plus tôt, comme le montrent les études récentes, par exemple celles menées par l'Union internationale des télécommunications. De nombreux dangers les menacent, que ce soit le grooming , cette prise de contact par Internet à des fins sexuelles, ou encore les vidéos pornographiques et le cyber-harcèlement. Les défis lancés sur Facebook atteignent dorénavant des niveaux d'absurdité et de dangerosité jamais égalés et doivent aussi faire l'objet de toutes les attentions.

M. François Rochebloine (Loire - UDI) a évoqué sa crainte que les seules recommandations juridiques ne suffisent pas. En effet, l'émission d'images de violence échappe de plus en plus facilement au contrôle des autorités publiques grâce aux échanges par Internet. Leur filtrage au prétexte d'un contenu violent doit dans le même temps être manié avec précaution, devenant sinon une justification trop facile aux gouvernements autoritaires pour porter atteinte à la liberté d'expression et de communication. Le développement de la violence dans les médias est aussi, selon lui, la traduction d'une crise plus large du vivre ensemble. Les fusillades dans les universités américaines ne sont pas sans lien avec la tradition constitutionnelle américaine qui fait de la possession libre d'une arme à feu une liberté individuelle fondamentale. Quand la mentalité collective ne met pas de borne à la possession d'instruments de la violence, il devient impossible de limiter efficacement la représentation médiatique de cette violence et l'on assiste à un « processus d'accoutumance et de désensibilisation » généralisé. Enfin, il faut aussi s'intéresser aux grandes entreprises de jeux vidéo qu'il faut mettre devant leurs responsabilités dans la déstructuration mentale d'une partie de la population et notamment des jeunes. En fait, c'est la difficulté croissante d'aboutir à des relations sociales équilibrées, à une régulation acceptée des activités économiques, qui crée la situation dont la violence infligée aux enfants par les médias est l'un des aboutissements. Il faut certes traiter les effets, mais en considérant d'abord leurs causes.

Mme Pascale Crozon (Rhône - SRC) a noté que, pour l'essentiel, le rapport recommande la mise en oeuvre de solutions déjà en pratique en France depuis de nombreuses années avec, en particulier, un organe de régulation, l'éducation à l'image et la normalisation d'une signalétique adaptée. Ces éléments n'ont cependant pas suffisamment protégé les enfants. Contrairement aux adultes, l'enfant ne choisit pas toujours librement, en pleine conscience, les images auxquelles il va être exposé, ni de regarder des images violentes. Il n'est pas nécessairement armé pour les comprendre, en connaître le contexte et le sens qui font de cette image une information. Il n'a pas toujours une conscience parfaite des images qui relèvent de la réalité et de la fiction. L'équilibre n'est pas toujours simple à trouver entre le respect dû aux contenus, qui relève de libertés fondamentales telles que la liberté de création, la liberté d'expression et le droit à l'information, et la nécessité de réguler l'accès à ces contenus dans l'objectif prioritaire de protéger les enfants. Il n'est pas plus aisé de faire la part de ce qui relève du champ de la régulation et de ce qui relève du champ de l'éducation, c'est-à-dire de la responsabilité parentale. C'est d'autant plus compliqué à l'ère des nouveaux médias. C'est là que la régulation classique, par l'interdiction de diffusion à certains horaires ou l'avertissement parental, rencontre ses limites. Les outils de filtrage parental existent pourtant. En France, ils doivent être obligatoirement proposés par chaque fournisseur d'accès. Néanmoins, ils sont peu utilisés : quels que soient les moyens réglementaires ou technologiques mis en oeuvre, rien n'est possible sans l'implication des parents. C'est pourquoi il est utile de responsabiliser l'ensemble des acteurs et de les inciter à travailler les uns avec les autres.

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