C. CONSTRUIRE UN CONSENSUS SUR LES MODALITÉS DE PARTICIPATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES

Les rapporteurs spéciaux ont pu avoir le sentiment, au cours de leurs différents entretiens, que l'association des collectivités territoriales italiennes au redressement des finances publiques se faisait de façon plus consensuelle qu'en France .

Il ne faut pas chercher la cause de ce consensus dans les modalités de concertation entre l'État et les collectivités territoriales , qui ne sont pas fondamentalement différentes entre les deux pays. L'explication du consensus réside peut-être plutôt dans l'ancienneté de l'association des collectivités territoriales italiennes au redressement des finances publiques et donc notamment dans sa survivance aux changements de majorité.

La concertation, en Italie, se fait dans le cadre de quatre conférences :

- la Conferenza Stato - Regioni , ou Conférence État - Régions, est le lieu de concertation entre l'État central et les régions ; en sont membres notamment le Président du Conseil des ministres et les présidents des différentes régions ;

- la Conferenza Stato - Città e autonomie locali , ou Conférence État villes et autonomies locales, est l'organe de concertation entre l'État, les provinces et les communes ; en sont membres notamment le Président du Conseil des ministres, les présidents des provinces et les présidents des associations représentant le bloc local ;

- la Conferenza unificata , ou Conférence unifiée, réunit les deux précédentes, lorsqu'elles ont à se prononcer sur un même sujet ;

- la Conferenza permanente per il coordinamento della finanza pubblica , ou Conférence permanente pour la coordination des finances publiques, réunit également l'État et des représentants des collectivités territoriales ; elle a notamment pour rôle de « concourir à la définition des objectifs de finances publiques ».

Ces conférences ont des fonctions essentiellement consultatives, qui les rapprochent assez fortement du Comité des finances locales (CFL) français et de ses émanations que sont la Commission consultative d'évaluation des normes et la Commission consultative sur l'évaluation des charges. S'agissant de la répartition des efforts, comme en France, l'effort global est fixé par l'État et les instances de concertation peuvent proposer une répartition.

Sur le fond, les divers interlocuteurs de vos rapporteurs spéciaux ne leur ont pas donné le sentiment que la concertation était plus riche ou plus facile qu'en France. Ainsi, Pasqualino Castaldi, de la Ragioneria dello Stato , leur a mentionné une « guerre continue » entre l'État et les collectivités territoriales pour déterminer la part d'efforts revenant à chacun. Caterina Cittadino, secrétaire générale de la Conférence État - villes et autonomies locales, a évoqué des négociations tendues et mentionné le fait que les propositions des différentes conférences n'étaient jamais reprises. Guido Castelli, vice-président de l'Association nationale des communes italiennes (ANCI) leur a, pour sa part, indiqué que les conférences étaient « mieux que rien ».

La concertation entre l'État et les régions pourrait toutefois pendre une forme radicalement nouvelle, si la réforme du Sénat actuellement en discussion au Parlement aboutissait, en transformant la Haute assemblée italienne en chambre des régions.

Quoi qu'il en soit, vos rapporteurs spéciaux considèrent que le succès d'un pilotage des finances locales passe par son acceptation par les collectivités territoriales . Or, la concertation sur ce sujet en France est relativement limitée et essentiellement formelle, à travers des « conférences des finances locales ». Les débats de ces dernières années montrent une certaine défiance entre l'État et les collectivités, qui se fonde notamment sur l'opposition entre ceux qui estiment que les collectivités territoriales font plus d'effort que l'État et ceux qui pensent le contraire, et sur la prise en compte du coût des transferts de compétences ou des normes imposées par l'État.

Il faut donc réellement associer les collectivités territoriales à la définition des règles qui les concernent, et, pour éviter les différences d'analyse, établir un diagnostic commun entre l'État et les collectivités sur les efforts passés et ceux à fournir à l'avenir, sur le modèle de ce qui a été fait pour le coût des allocations individuelles de solidarité grâce au groupe de travail État-départements de 2013. Vos rapporteurs spéciaux rejoignent ici l'analyse formulée par Alain Lambert et Martin Malvy dans leur récent rapport 28 ( * ) : « seul un diagnostic partagé peut en effet légitimer une contrainte accrue sur les finances des collectivités dans une logique de responsabilité et de partage collectif des efforts ».

Vos rapporteurs spéciaux considèrent également qu'il est nécessaire de donner un cap aux collectivités territoriales.

En effet, quel est le but de la mise en place de l'Odedel ? L'équilibre budgétaire des collectivités ? La diminution de leurs dépenses ? Mais comment serait alors défini ce « niveau optimal » ? La baisse des concours de l'État ? Au-delà de l'objectif annuel ou pluriannuel d'évolution des dépenses locales, il serait nécessaire de définir un objectif de moyen - long terme, qui ait un sens économiquement, pour les collectivités comme pour les citoyens .

D'autre part, vos rapporteurs spéciaux considèrent qu'il faut également définir quelle pourrait être l'évolution des concours de l'État une fois les finances publiques assainies , afin de donner des perspectives positives aux collectivités territoriales.


* 28 Alain Lambert et Martin Malvy, Pour un redressement des finances publiques fondé sur la confiance mutuelle et l'engagement de chacun , avril 2014.

Page mise à jour le

Partager cette page