B. UNE MISE À CONTRIBUTION CONSIDÉRABLE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES ITALIENNES

1. La crise des finances publiques italiennes

Dans le sillage de la crise financière de 2007, la crise de la zone euro, née des inquiétudes sur la soutenabilité de la dette publique grecque, touche durement l'Italie à compter de la fin 2010. Comme le montre le graphique ci-dessous, le taux d'intérêt à long terme de la dette italienne passe de 4 % environ mi-2010 à plus de 7 % fin 2011.

Rendement des obligations d'État de référence à 10 ans

Italie

Source : OCDE, Études économiques de l'OCDE - Italie , mai 2013

En novembre 2011, Mario Monti est nommé Président du Conseil et mène une importante politique d'ajustement budgétaire : en deux ans, les dépenses publiques diminuent de 45 milliards d'euros quand les recettes fiscales augmentent de 50 milliards d'euros, ce qui permet de respecter la règle des 3 % de déficit public dès 2012.

Cet ajustement budgétaire s'accompagne d'une révision constitutionnelle 18 ( * ) en 2012, destinée notamment à rassurer les marchés financiers, qui pose le principe de l'équilibre budgétaire pour l'ensemble des administrations publiques . Il demeure néanmoins possible de s'endetter dans une logique contra-cyclique ou pour faire face à des événements exceptionnels, tels une importante récession, une crise financière ou des calamités naturelles.

2. Des collectivités italiennes dans une situation financière relativement saine mais dont les dépenses ont fortement augmenté

Les collectivités italiennes sont dans une situation financière relativement proche de leurs homologues françaises, dans la mesure où leur dette et leur déficit sont limités, notamment si on les compare à l'État .

Évolution des soldes budgétaires des administrations publiques et des collectivités territoriales (CT) en France et en Italie

Déficit public italien

Déficit public français

Solde des CT italiennes

Solde des CT françaises

(en points de PIB)

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données Eurostat

Ainsi, les collectivités territoriales italiennes enregistraient en 2014 un excédent de 0,1 point de PIB , quand le déficit public s'élevait à 3 % du PIB.

S'agissant de la dette, celle des administrations publiques italiennes atteignait 132,1 % du PIB, dont 8,6 points « seulement » imputables aux collectivités territoriales.

Évolution de la dette publique italienne

(en pourcentage du PIB)

dont dette des collectivités territoriales

Dette publique italienne

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données Eurostat

En revanche, en Italie - comme en France -, on observe que les dépenses des collectivités territoriales ont évolué à un rythme beaucoup plus soutenu que celles de l'État , comme le montre le graphique ci-dessous, qui ne neutralise cependant pas les transferts de compétence ayant pu intervenir et que l'on peut estimer à 10 points de base (12 milliards d'euros environ au titre de l'Acte II de la décentralisation et du transfert du revenu minimum d'insertion (RMI) et du revenu de solidarité active (RSA)).

Évolution des dépenses de l'État et des collectivités territoriales

En Italie

En France

(base 100 en 1995)

(base 100 en 1995)

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données Eurostat

On peut d'ailleurs noter qu'en France, le décrochage entre les collectivités territoriales et l'État en matière de rythme d'évolution des dépenses a lieu en 2002, c'est-à-dire juste après la mise en place d'une règle d'évolution des dépenses de l'État 19 ( * ) .

3. Un effort financier considérable

Malgré cette situation financière relativement peu dégradée, les collectivités territoriales sont fortement mises à contribution , avec une réduction nette de leurs ressources de 26 milliards d'euros en sept ans.

Réduction nette des ressources des collectivités territoriales italiennes

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Régions à statut ordinaire

4 000

4 040

5 100

6 160

9 352

9 352

9 352

Régions à statut spécial

-

230

1 200

1 940

2 342

2 342

2 342

Provinces

300

850

2 115

2 560

3 742

4 751

5 751

Communes

1 500

4 030

6 200

6 826

8 313

8 313

8 313

Total

5 800

9 150

14 615

17 486

23 749

24 758

25 758

Baisse des dotations en France

1 500

5 170

8 840

12 500

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données de l'Ufficio parlamentare di bilancio

En quatre ans, les collectivités italiennes ont vu leurs recettes diminuer de 17,5 milliards d'euros (8 % de leurs dépenses environ) ; celles de leurs homologues françaises baisseront d'ici 2017 de 12,5 milliards d'euros (5 % de leurs dépenses environ).

Parallèlement à ces réductions des ressources, le « pacte de stabilité interne » (cf. infra ) impose aux collectivités des objectifs d'amélioration de leur solde budgétaire ou de maîtrise de leurs dépenses .

Ainsi, une collectivité peut, la même année, voir ses ressources diminuer du fait d'une baisse de dotation et se voir assigner un objectif contraignant d'amélioration de son solde budgétaire ou de limitation à la hausse de ses dépenses. Le tableau ci-dessous retrace l'effort qui leur a ainsi été demandé à travers le pacte de stabilité interne, hors baisse des ressources.

Effort financier demandé aux collectivités territoriales italiennes
dans le cadre du Pacte de stabilité interne

(en millions d'euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Régions à statut ordinaire

900

1 380

2 440

3 945

2 175

4 088

5 518

6 276

6 274

Régions à statut spécial

600

920

2 120

4 620

4 848

5 180

5 523

5 523

5 523

Provinces

310

550

980

1 660

682

1 543

1 585

1 660

1 710

Communes

1 340

2 350

4 160

5 795

2 708

4 442

5 004

5 435

5 435

Total

3 150

5 200

9 700

16 020

10 413

15 253

17 630

18 894

18 942

Source : Commission des finances du Sénat à partir des données de l'Ufficio parlamentare di bilancio

Les deux types de contrainte (baisse des ressources et pacte de stabilité interne) retracés dans les deux tableaux précédents sont présentés séparément dans la mesure où elles ne se cumulent pas nécessairement.

En effet, hors recours au levier fiscal, une collectivité qui voit ses recettes de fonctionnement diminuer devra ajuster ses dépenses en conséquence : la baisse des recettes permet ainsi de respecter l'objectif sur les dépenses. En revanche, si elle doit améliorer son solde budgétaire, elle devra ajuster ses dépenses à la baisse des recettes, puis consentir un effort supplémentaire pour améliorer le solde : dans ce cas les deux contraintes se cumulent.


* 18 Legge costituzionale n° 1 del 20 aprile 2012 « Introduzione del principio del pareggio di bilancio nella Carta costituzionale ».

* 19 Objectif de croissance de 1 % en volume des dépenses de l'État.

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