Clôture

George-Pau LANGEVIN,
Ministre des outre-mer

Monsieur le président de la Délégation sénatoriale à l'outre-mer,

Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Monsieur le président de la FEDOM,

Mesdames et Messieurs,

J'ai tenu à assister à cette table ronde car j'étais sûre d'entendre des témoignages particulièrement intéressants. Les échanges ont été très riches, à la fois sur les contraintes du développement touristique ultramarin pesant sur chaque territoire, mais aussi sur les opportunités dont disposent nos outre-mer pour prendre toute leur place sur le marché mondial.

Le secteur du tourisme occupe une place centrale dans la vie des territoires ultramarins. Selon les lieux, il représente jusqu'à 10 % du PIB. Après un essor important, le développement de l'activité touristique a connu un coup d'arrêt dans les années 2000. Il est vrai que les efforts que vous avez déployés depuis plusieurs années ont tendu à restaurer l'offre touristique ultramarine et à améliorer la qualité du service. Comme vous l'avez souligné, on pouvait considérer que l'offre ne répondait plus suffisamment aux attentes qualitatives des touristes, et je crois que ce constat est assez largement partagé. De surcroît, la concurrence des pays voisins, souvent à bas coût de main d'oeuvre (République dominicaine, Maurice, Cuba, Vanuatu...) a pour conséquence d'obliger les acteurs français à se positionner sur des créneaux différents.

Dorénavant, nous devons dépasser le stade du constat en voyant sur quels leviers agir pour améliorer la chaîne touristique au niveau de la desserte, de l'offre et du service.

J'ai apprécié le ton parfois tonique avec lequel les acteurs nous ont fait part de leurs perspectives. Tout ceci rejoint les constats que nous avons dressés au ministère ainsi que les pistes que nous avons essayé de tracer. À deux mois de la COP21, il faut souligner que le tourisme ultramarin doit s'inscrire résolument dans l'objectif du développement durable de la planète. Nous savons que les outre-mer peuvent être les premières victimes des dérèglements climatiques et les premières gagnantes des stratégies destinées à les atténuer. Les risques sont connus : destruction d'infrastructures touristiques proches du littoral, de villes et de villages en bord de mer, crises sanitaires liées à l'élévation de température et l'humidité, dégradation de la biodiversité et des paysages et réduction de l'attractivité des outre-mer... L'État s'engage pour atténuer les atteintes à l'environnement naturel. Cette année, l'État a engagé onze millions d'euros pour le ramassage des sargasses aux Antilles. Le plan à moyen terme doit permettre de gérer cette crise en utilisant les algues pour des produits divers. Tous ensemble, nous devons nous sentir concernés pour embellir le pays et les plages afin d'avoir achevé le ramassage des sargasses pour le début de la saison.

Nous savons d'ailleurs que le tourisme lui-même emporte des effets sur l'environnement puisqu'il contribue au réchauffement climatique. Nous avons donc à la fois à mieux comprendre et à protéger les écosystèmes, à poursuivre les évaluations des impacts du réchauffement climatique et à intégrer les données dans les documents de planification. Nous devons aussi poursuivre la diversification de l'offre et des pratiques touristiques afin de réduire la pression sur les écosystèmes et renouveler l'image de marque du tourisme ultramarin. Il est vrai que les atouts de la Guyane ne sont pas les mêmes que ceux de La Réunion. Nous avons donc à sauvegarder la beauté de ces paysages et soutenons de très près l'initiative française pour les récifs coralliens qui, depuis 2011, a engagé un travail d'évaluation globale des services rendus par les écosystèmes coralliens, les mangroves et les herbiers.

Nous avons aussi à encourager une prise de conscience forte quant aux risques de dégradation du milieu et donc de la qualité du produit touristique. Nous ne réussirons pas en matière de tourisme si nous n'entraînons pas l'adhésion des populations, en particulier en matière d'accueil. Au ministère des outre-mer, nous sommes engagés dans ce travail de sensibilisation de la population pour développer ce tourisme durable et respectueux de l'environnement. Nous avons d'ailleurs évoqué le sujet avec les États du Pacifique lorsque j'ai participé au Sommet des îles du Pacifique. Là encore, nous voyons à quel point les outre-mer français sont totalement insérés dans leur environnement régional.

Lors de la COP21, les échanges y compris informels seront nombreux et nous risquons, en tant qu'ultramarins, d'être quelque peu submergés par leur masse. C'est pourquoi, dès le 15 octobre, j'ai proposé l'organisation d'un séminaire afin que nous puissions par anticipation parler des outre-mer face aux changements climatiques et observer les bonnes pratiques pour en atténuer les effets.

Dans les outre-mer, nous avons mené un certain nombre d'expériences innovantes et qui mériteront d'être mises en avant : géothermie, éoliennes, énergies renouvelables, SWAC ( Sea Water Air-Conditioning )...

Bien entendu, le tourisme comme les autres secteurs économiques des outre-mer, souffre d'une difficulté à défendre ses avantages comparatifs face à la concurrence régionale. Pour vous aider, nous nous sentons le devoir de compenser en grande partie les difficultés par un certain nombre de dispositifs conçus à cette fin.

Je tiens à rappeler que, cette année, un crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) majoré à 9 % entrera en vigueur pour l'outre-mer. Nous avions pris l'engagement de consentir un effort supplémentaire en faveur des secteurs exposés à la concurrence tels que l'hôtellerie et les services liés au tourisme. Le budget 2016 tient cet engagement puisque nous avons inscrit une baisse de charges supplémentaires pour les secteurs exposés, même si nous recentrons les allègements de charges sur les bas salaires. Grâce à ces mesures et à l'exonération des cotisations famille jusqu'à 3,5 SMIC, le coût du travail va baisser significativement en outre-mer en 2016, ce qui va vous aider à faire face à la concurrence.

Comme vous l'avez affirmé, le travail essentiel doit porter sur l'image des destinations ultramarines. Je trouve d'ailleurs Monsieur Liénafa quelque peu pessimiste, car nous ne sommes plus au temps de l'image négative du bagne. Aujourd'hui, un grand nombre de touristes cherchent un tourisme vert, que la Guyane peut faire valoir pleinement.

Chaque territoire a des atouts exceptionnels : lagons de Polynésie ou de Mayotte, plages des Antilles, montagnes de La Réunion, gastronomie unique... Il faut également rappeler que nos infrastructures de santé sont calées sur la métropole, et donc de très grande qualité par rapport aux territoires concurrents. Enfin, dans une période mondiale assez troublée, nos territoires représentent des havres de paix par rapport à de nombreuses destinations. Nous disposons de toutes les chances pour participer au mouvement de croissance du secteur du tourisme, estimé à 3 % par an d'ici 2030.

Évidemment, toute la question consistera à mettre en place l'organisation adéquate pour conquérir les marchés. Il y a le tourisme de niche, par exemple le tourisme d'affaires. Nous avons également travaillé à une série d'autres mesures avec Laurent Fabius et Christian Mantei pour améliorer la visibilité et l'image de nos destinations. Nous avons des marges de progression à accomplir dans ce domaine, de sorte qu'une campagne de communication centrée sur le comportement des Français à l'égard des touristes sera déclinée spécifiquement pour la population ultramarine. Il sera en outre important d'améliorer les dessertes aériennes directes en provenance de l'étranger.

Nous devons aussi développer le numérique grâce à des portails internet de qualité et une action sur les moteurs de recherche. De même, nous devons encourager l'effort de formation des personnels de tourisme pour parvenir à l'excellence en matière d'accueil, y compris dans la pratique des langues étrangères. Enfin il faut attirer de nouvelles clientèles en provenance d'Europe et du reste du monde.

Nous sommes conscients que les stratégies touristiques sont principalement le fait des collectivités territoriales. Toutefois, nous avons le sentiment qu'avec une meilleure coordination nous obtiendrions de meilleurs résultats. Atout France, opérateur de l'État, développera son rôle de cluster tourisme dans les outre-mer. Si ce cluster connaît mieux l'activité et joue un rôle opérationnel et stratégique dans les outre-mer, il constituera un support essentiel pour notre tourisme. Nous comptons beaucoup sur son action. Nous avons également le besoin d'améliorer la connaissance statistique des données touristiques, en expérimentant une exploitation des données des compagnies aériennes et des voyagistes en quasi temps réel pour avoir une meilleure réactivité.

Je ne reviens pas sur la stratégie de restructuration du secteur hôtelier et, notamment, de la grande hôtellerie. Cette année encore, nous avons introduit dans la loi de finances des dispositions d'aide à la rénovation du parc immobilier.

Enfin, la déclinaison aux outre-mer des actions financées par le nouveau Fonds d'investissement tourisme, sur lequel travaille la Caisse des dépôts et des consignations, est aussi un élément pouvant épauler significativement les entreprises ultramarines. Le Gouvernement est prêt, avec les outils dont il dispose, à faire partie de cette stratégie de développement du tourisme en outre-mer. Je ne doute pas que nous pourrons y travailler ensemble de manière tout à fait profitable. Au ministère, nous serons heureux d'apporter notre contribution à cette tâche essentielle.

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