IX. RÉUNION DU JEUDI 23 JUILLET 2015

A. AUDITION DE MME MONIQUE LEGRAND-LARROCHE, DIRECTRICE DES OPÉRATIONS ET M. FRANÇOIS COJAN, DIRECTEUR DU SERVICE CENTRALISÉ DES ACHATS DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DE L'ARMEMENT

M. Philippe Bonnecarrère, président . - Nous allons débuter notre première - et dernière - audition concernant la commande publique en matière de défense. Nous souhaitons connaître votre approche et votre analyse en la matière.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Merci d'avoir répondu à notre invitation. Nous menons une mission globale sur la commande publique, afin de savoir quel impact pourrait avoir une politique de la commande publique impliquant les PME non pas en tant qu'entreprises sous-traitantes, mais en tant que titulaires des marchés, si on leur octroyait une place plus conforme à celle qu'elles occupent dans notre économie. Cette mission d'information a commencé ses travaux voilà quelques mois et vous faites partie des dernières personnes auditionnées. Nous allons vous poser une série de questions. Vous avez déjà reçu un questionnaire qui synthétise nos principales interrogations.

Concernant le ministère de la Défense, pourriez-vous présenter les modalités organisationnelles et procédurales de vos achats, à partir d'un exemple tel que le Rafale ? Le ministère de la Défense poursuit-il des objectifs de gains économiques au niveau de ses achats ? La commande publique est aujourd'hui soumise à des exigences d'économies importantes. Comment votre volonté de gains sur achats se matérialise-t-elle ?

La directive 2009/81/CE du 13 juillet 2009 ouvre le marché de la défense à la concurrence européenne. Mais chacun des Etats membres continue de pouvoir recourir à l'article 346 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) pour éviter les mises en concurrence. Qu'est-ce qui fait, concrètement, qu'un programme est exclu de la mise en concurrence ? Pourriez-vous indiquer succinctement le montant des achats du ministère, en précisant la proportion de ceux qui sont exclus de la mise en concurrence ?

Pourriez-vous aussi faire le point sur l'action du ministère pour faciliter l'accès des PME aux marchés ? L'allotissement n'étant qu'une faculté pour vous, quel pourcentage de vos marchés représente-t-il ?

Concernant la dimension européenne de votre action, certains achats sont gérés par l'organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR). Des mises en concurrences sont-elles organisées dans ce cadre ? Quels sont les principaux exemples de marchés attribués à un autre Etat membre de l'Union européenne ou à un Etat non membre de l'Union européenne ?

Nous souhaiterions ensuite aborder l'exécution des contrats d'armement. La Cour des comptes a suggéré en 2010 que la quasi-totalité des programmes connaissaient une augmentation importante des coûts unitaires par rapport aux prévisions, accompagnée d'une réduction du nombre d'unités commandées. Comment l'expliquez-vous ?

Enfin, pourriez-vous faire le point sur le système de paie Louvois et évoquer les problèmes rencontrés avec ce projet ?

Mme Monique Legrand-Larroche, directrice des opérations . - Je commencerai par préciser le périmètre d'action de la Direction générale de l'armement (DGA). Nous gérons à peu près 80 programmes d'armement, et bien plus d'opérations qui ne sont pas érigées en programmes. En ce qui concerne les montants, je raisonnerai plutôt en paiements, les engagements étant fortement variables. En 2014, nous avons dépensé un peu plus de 9 milliards d'euros au titre des programmes et opérations, et 800 millions d'euros au titre des études amont.

La DGA se situe sur un segment particulier par rapport au reste du ministère de la Défense, dont les achats classiques pour des besoins récurrents sont souvent régis par la première partie du code des marchés publics, dans un environnement très concurrentiel, qu'il s'agisse de restauration, d'habillement ou d'approvisionnement. Les achats de la DGA, pour leur part, concernent presque exclusivement la défense et la sécurité. Ils sont donc éligibles à la troisième partie du code des marchés publics ou bien font partie des exclusions prévues par celui-ci.

Nos marchés sont des marchés généralement longs et ne sont jamais répétitifs. Il n'existe pas deux marchés qui se ressemblent.

Nous avons recours aux exemptions du code des marchés publics et à l'article 346 du TFUE pour les domaines de la dissuasion, de la cybersécurité et du renseignement ainsi que pour tous les marchés de recherche. Ces exemptions représentent de l'ordre de 4 milliards d'euros sur le total de 9 milliards d'euros. Le reste relève de la troisième partie du code des marchés publics que nous respectons scrupuleusement. Une partie des dépenses sont effectuées par l'OCCAR et correspondent à des contrats de droit privé. Quand nous intervenons dans le cadre de la troisième partie du code des marchés publics, nous pouvons être conduits à lancer une mise en concurrence ou non, en fonction des spécificités du domaine.

Nous nous inscrivons dans un horizon temporel assez long. La plupart des programmes actuels ont été lancés avant la directive 2009/81/CE et sa transposition. Les premières études sur le Rafale ont été lancées il y a 25 ans. Si ce programme était lancé aujourd'hui, il relèverait de la troisième partie du code et ne ferait probablement l'objet d'aucune mise en concurrence. Les autres grands programmes que sont le Tigre, l'A400M et la FREMM ont tous été contractualisés par l'OCCAR. Le programme NH90 a été lancé dans le cadre OTAN, via un contrat passé par une agence qui dépend de l'OTAN.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Qu'en est-il de l'accès des PME à vos marchés ?

Mme Monique Legrand-Larroche . - Nous avons mis en place des mesures spécifiques pour les PME, par l'intermédiaire de dispositifs tels que Rapid, qui représente 50 millions d'euros et qui est très apprécié par les entreprises. Il leur permet de bénéficier d'un soutien de notre part pour le développement de nouveaux produits. Concernant nos programmes, le code des marchés publics ne nous autorise pas à favoriser les PME dans le cadre d'une mise en concurrence. Nous devons respecter le libre accès à la commande publique et nous ne pouvons pas prévoir d'incitation pour les PME. Il arrive que des PME remportent des appels d'offres d'envergure limitée, mais nous n'avons pas les moyens de les favoriser à ce niveau. Nous avons par ailleurs conclu des partenariats avec les grands maîtres d'oeuvre pour les inciter à favoriser les PME et à bien les traiter, mais en tant qu'entreprises sous-traitantes.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Les PME ne sont donc quasiment jamais titulaires des contrats.

Mme Monique Legrand-Larroche . - Les PME sont titulaires d'un grand nombre de marchés, mais ces derniers représentent un montant total assez faible.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Quelle est la part de vos marchés qui est allotie et dont les PME sont titulaires ?

M. François Cojan, directeur du service centralisé des achats . - Au sein du ministère de la Défense, à peu près 50 % des marchés en nombre et non en valeur sont attribués à des PME. Pour les programmes d'armement, nous utilisons très peu, voire jamais les mécanismes d'allotissement, car nous achetons des systèmes complexes dont seul le maître d'oeuvre est capable d'assembler les morceaux en temps et en heure dans le respect des performances exigées. Le mécanisme d'allotissement tel que prévu dans le code des marchés publics ne permet pas d'aboutir à un véhicule qui roule ou qui vole avec le niveau de performance opérationnelle demandé. Dans le cadre des grands programmes d'armement, la DGA et le ministère n'ont pas souhaité faire voler en éclat l'environnement des grands systémiers. Ils ont choisi d'inciter ces systémiers à faire appel à des PME françaises et à les traiter correctement, en faisant la chasse aux clauses abusives. Nous avons, pour cette raison, clairement oeuvré, dans le cadre des mesures du plan PME du ministère de la Défense, pour que le dialogue entre les grands maîtres d'oeuvre et les sous-traitants soit clarifié.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - S'agit-il d'un programme type « Pacte PME » ?

M. François Cojan . - Tout à fait. Il s'agit de mesures visant à l'amélioration de la relation entre maître d'oeuvre et sous-traitant. La mise en lumière des bonnes pratiques est l'une des mesures les plus intéressantes à mes yeux, en tant que directeur des achats de la DGA, du Pacte PME du ministre de la Défense.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Que pouvez-vous nous dire des difficultés d'exécution des contrats d'armement ?

Mme Monique Legrand-Larroche . - Les augmentations de coûts que nous constatons sur les programmes d'armement sont le plus souvent liées à un manque de ressources budgétaires, qui nous conduit à étaler ces programmes ou à réduire le nombre d'unités. Le coût de développement d'un programme ne change pas avec le nombre de systèmes produits à l'issue de celui-ci. Lorsque l'on calcule, comme le fait la Cour des comptes, le prix unitaire d'un système en prenant le montant total et en le divisant par le nombre de systèmes produits, vous comprendrez que lorsqu'au lieu de produire 200 systèmes, l'on n'en produit que 100, le coût unitaire de chaque système augmente mécaniquement. La majorité des augmentations constatées par la Cour des comptes sont dues soit à une réduction de la cible d'achat, en raison d'un strict effet mécanique, soit à des étalements dans le temps des programmes. Il est clair que lorsque l'on demande à un industriel de rallonger son délai de production, cela représente un coût supplémentaire pour l'Etat. L'essentiel de nos dépassements de coûts sont dus à des mesures budgétaires. Nous possédons un système interne de fiabilisation de nos prévisions de prix et de coûts de programmes qui a fait ses preuves. Nous analysons systématiquement la cause de toute augmentation de coût. Nous avons ainsi pu constater qu'il ne s'agissait pas d'une sous-estimation initiale, mais d'un manque de ressource de l'Etat qui conduit à étaler voire à réduire les commandes.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - La Cour des comptes constate que la quasi-totalité des programmes connaissent une augmentation importante des coûts par rapport aux prévisions et vous demande d'ajuster vos estimations de coûts...

Mme Monique Legrand-Larroche . - Lorsque nous lançons un programme, nous le faisons dans un périmètre et avec une cible d'achat donnés. Je ne peux pas savoir, au moment du lancement de ce programme, que cinq ans plus tard, pour des raisons souvent budgétaires, on va me demander soit de diminuer la cible du programme, soit d'étaler dans le temps les livraisons pour réduire le flux de paiement. Je ne peux pas, comme le demande la Cour des comptes, prendre d'emblée, au moment du lancement, l'hypothèse qui consisterait à diminuer la cible d'achat. Lorsque le Tigre a été lancé, 215 hélicoptères devaient être produits. De loi de programmation en loi de programmation, nous sommes passés à 67 appareils. Le coût de développement du Tigre n'a pas évolué. Mais si l'on divise le coût total du programme par 67 au lieu de le diviser par 215, mécaniquement, le coût unitaire sera plus élevé. Il ne s'agit pas d'une sous-estimation.

M. Daniel Raoul . - Ma question concerne la politique d'achat de la DGA. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi un boulon destiné à l'armement coûte trois fois plus cher que lorsqu'il est destiné au civil ? Cette question vaut y compris pour l'équipement en véhicules blindés légers, pour lesquels différents constructeurs pourraient être mis en concurrence. J'ai été alerté par un l'un d'entre eux à ce sujet. La question se pose pour les hôpitaux de la même façon. Une perceuse destinée à un bloc opératoire voit son prix multiplié par deux. Je m'interroge sur le rôle des fonctions d'achat d'organismes tels que la DGA.

Mme Monique Legrand-Larroche . - Nous n'achetons pas un boulon, mais un système. Or, nous demandons à un système d'armes de pouvoir évoluer et de durer de 25 à 30 ans, ce qui n'est pas le cas avec la voiture que nous achetons à titre personnel. Nous lui demandons également d'être utilisable en opérations, dans des conditions extrêmement sévères et variables, dans un environnement qui va du très froid au très chaud et au très humide. Les matériels que nous achetons sont destinés à un usage dans la durée et dans des conditions environnementales très difficiles pour assurer les missions opérationnelles. Il s'agit nécessairement de matériel durci, qui est de surcroît produit en petites séries.

M. François Cojan . - Si je devais racheter demain un véhicule de l'avant blindé (VAB) ou un véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI), je suis certain que je pourrais trouver sur le marché des boulons, des pneus, etc ., moins chers. Mais si je dois m'adresser à un nouveau fournisseur, il faudra que je reproduise des essais pour vérifier que le VBCI reconstruit est conforme au cahier des charges. Outre le fait que nos systèmes sont en général prévus pour être employés dans des environnements extrêmement difficiles, ils sont également prévus pour être soutenables pendant des dizaines d'années, ce qui n'est pas le cas du véhicule de Monsieur tout le monde. Compte tenu de l'importance de l'aspect « système », nous ne pouvons pas remettre en concurrence systématiquement le fournisseur d'un boulon ou d'un pneu sous prétexte d'obtenir un meilleur prix, parce qu'il faudrait alors renouveler des essais systèmes et des essais d'ensemble particulièrement onéreux. Une fois que nous avons réussi à mettre au point l'ensemble d'un système, nous nous efforçons de maintenir nos filières d'approvisionnement sur une longue durée, ce qui représente un coût. Mais ce coût est souvent moins important que celui du renouvellement des essais complexes nécessaires à chaque changement de fournisseur. C'est l'une des raisons des surcoûts apparents sur certaines pièces détachées.

Cela étant dit, il faut également savoir être un acheteur intelligent, en particulier dans le cadre du maintien en condition opérationnelle (MCO), quand des gains importants peuvent apparaître et l'on identifie des secondes sources potentielles, pour lesquelles les acheteurs du ministère n'hésitent pas à demander des requalifications, même onéreuses, pour réaliser des économies sur l'opération.

M. Daniel Raoul . - J'ai en tête l'exemple d'un véhicule blindé léger qui a subi les mêmes tests que les véhicules que vous achetez actuellement, et qui était proposé à un prix 30 % inférieur. Je comprends très bien les procédures, les conditions des opérations extérieures (Opex), ainsi que les questions de maintenance que vous évoquez. Je comprends vos arguments, mais reste circonspect.

M. François Cojan . - Je me posais les mêmes questions dans le cadre de mes précédentes fonctions au sein du service industriel de l'aéronautique. Ce service est l'un des acteurs du MCO du ministère de la Défense. Nous avons, dans certains cas, procédé au redéveloppement et à la requalification de certaines pièces d'avions anciens (Transall, Mirage 2000), parce que nous savions parfaitement que la source originale était onéreuse et qu'il existait des produits de qualité équivalente. Nous savions aussi que le travail du bureau d'étude, en interne ou chez notre fournisseur, avait un prix. Nous comparions le gain espéré sur une faible série de pièces aux coûts à engager pour la requalification en bureau d'étude. Il arrivait que nous lancions l'opération, qui permettait d'aboutir à un gain significatif, mais aussi que nous concluions qu'il était préférable de continuer de se fournir auprès du même fabricant à un prix plus élevé que ceux proposés par des fabricants alternatifs.

Mme Monique Legrand-Larroche . - J'ignore à quel véhicule vous faites allusion, mais nous sommes parfois conduits soit à passer en gré à gré avec un industriel donné, soit à lancer une mise en concurrence. Dans ce dernier cas, nous jugeons les performances sur des critères qui sont communiqués à l'avance aux candidats. Le critère technique a toujours un poids important, tout comme le critère de coût et le critère de délai. Le choix est déterminé par une commission de mise en concurrence. Lorsque les entreprises qui n'ont pas été choisies demandent des explications, nous les fournissons toujours. Il existe des voies de recours pour ces entreprises, mais depuis ma prise de poste, je n'ai jamais connu une telle procédure.

M. Daniel Raoul . - J'aimerais aborder le problème de l'accès des PME aux achats militaires. Les cahiers des charges techniques sont établis de telle sorte que, bien souvent, les PME ne disposent pas des moyens humains leur permettant de les analyser. Pourriez-vous préciser le pourcentage que représentent les PME dans vos achats ?

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Pensez-vous que la part des PME dans l'armement peut s'agrandir ? Si oui, à quelles conditions ?

Mme Monique Legrand-Larroche . - Il me semble difficile pour les PME d'avoir accès aux marchés les plus importants de nos systèmes d'armes en tant que titulaires. Ces marchés leur sont tout à fait accessibles en tant que sous-traitants. En matière d'études amont, nous privilégions souvent les PME pour leur permettre de monter en compétence et de proposer des produits d'un niveau de maturité supérieur.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Vous nous avez interpellés en indiquant que vous accordiez une grande importance au rapport qualité-prix. Les questions de l'empreinte carbone sont-elles prises en compte ? L'implantation des entreprises sur le territoire ou à proximité pour économiser le CO 2 est-elle prise en considération dans les appels d'offres ?

M. François Cojan . - En ce qui concerne les achats de l'ensemble des ministères, il s'agit de dimensions qui sont de plus en plus prises en compte. Pour le marché de l'armement, il me semble qu'il sera beaucoup plus difficile d'avancer, même si des progrès peuvent être accomplis. En revanche, nous allons pouvoir progresser dans le domaine de la maîtrise de nos chaînes d'approvisionnement, grâce au code des marchés publics et aux ouvertures de l'ordonnance relative aux marchés publics. Si nous ne sommes pas capables de mettre en oeuvre des mécanismes d'allotissement favorisant l'accès direct et systématique des PME aux grands systèmes d'armes, nous devons nous assurer que nos grands maîtres d'oeuvre mettent en place des filières d'approvisionnement stables et pérennes, en introduisant des critères de localisation au moins sur le territoire européen, ainsi que des critères de durabilité. Il s'agit d'une voie prometteuse dans laquelle nous devons continuer à nous engager. Certains composants liés à la sécurité sont critiques pour nos grands armements et ne sont proposés que par un nombre restreint de fournisseurs. Il convient de stabiliser les filières techniques susceptibles de les proposer.

Mme Monique Legrand-Larroche . - En application de la directive européenne 2009/81/CE du 13 juillet 2009, lorsque nous ouvrons un marché à la concurrence européenne, nous pouvons prévoir des clauses de sécurité d'approvisionnement sur le territoire européen. Nous n'avons pas le droit d'exiger que la production soit proche de la France, car l'Europe considérerait qu'il s'agit d'une entrave à la concurrence et que nous lésons les autres pays. Il faudrait, pour permettre d'instaurer de tels critères, lancer une action au niveau européen pour faire en sorte que la prochaine directive l'autorise. Dans les marchés que nous ouvrons à la concurrence, la directive européenne interdit toute clause restrictive autre que pour la sécurisation d'approvisionnement. Cette possibilité représente toutefois un atout majeur, car elle permet d'assurer le maintien des compétences en Europe et d'éviter que des industriels officiellement basés en Europe ne déposent une offre s'appuyant sur une production effectuée ailleurs.

M. Daniel Raoul . - La DGA utilise-t-elle fréquemment l'article 53 du code des marchés publics, qui permet d'attribuer le marché selon une pluralité de critères, notamment environnementaux ?

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Les achats purement militaires ne relèvent pas de la première partie du code des marchés publics.

Mme Monique Legrand-Larroche . - Il faut souligner auprès des représentants de la Commission européenne à quel point la France est vertueuse dans l'application de la transposition de la directive 2009/81/CE précitée. Depuis 2011, nous avons publié 1 200 avis d'appel public à la concurrence au niveau européen. Les autres nations de l'Europe ne jouent pas du tout le jeu. Il est important de le signaler pour la défense de nos PME. L'Italie ne lance que 2 % de ses appels publics à la concurrence au niveau européen, les Pays-Bas 1,5 %, l'Irlande n'a lancé qu'un seul appel à la concurrence au niveau européen. L'objectif de la directive 2009/81/CE était de renforcer la base de défense européenne, de permettre l'accès de tous aux marchés, et d'interdire la demande de compensation économique ( offset ) en cas de marché passé avec un industriel d'une autre nation. Or, ce que nous disent nos entreprises, c'est que les autres nations européennes continuent, dans certains cas, de demander des offset . Il me semble important de faire savoir que de nombreux États membres ne respectent pas cette directive, alors que la France l'applique avec zèle, ce qui conduit selon moi à fragiliser nos PME par rapport à leurs homologues européennes.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Il est important que vous nous fournissiez la totalité de ces informations. Que pouvez-vous nous dire du système de paie Louvois ?

Mme Monique Legrand-Larroche . - Je suis mal placée pour parler du système Louvois, qui ne relève pas de la DGA. En revanche, je peux parler de Source Solde, qui a vocation à remplacer le système Louvois, et dont le projet nous a été confié par le ministère de la Défense.

M. François Cojan . - C'est un marché qui a été passé exceptionnellement dans le cadre de la première partie du code des marchés publics.

Mme Monique Legrand-Larroche . - Il ne s'agit pas d'un achat « spécifique défense ». Nous avons lancé une mise en concurrence avec dialogue compétitif, et nous avons notifié le marché en avril dernier à l'entreprise Sopra.

M. Daniel Raoul . - Quel est le montant de ce marché ?

M. François Cojan . - Il s'agit d'un contrat de 107 millions d'euros, qui a donné lieu à une intense compétition. Le dialogue compétitif a permis d'améliorer graduellement les propositions des concurrents sur le plan qualitatif et financier, et d'aboutir à une solution robuste.

Mme Monique Legrand-Larroche . - Nous avons notifié le marché le 22 avril 2015. La solution sera développée jusqu'à la fin de l'année et testée en 2016 avec réalisation de soldes à blanc. L'objectif est de rendre le système opérationnel pour la paie de la marine en 2017, pour l'armée de terre en 2018 et en 2019 pour l'armée de l'air et le service de santé des armées.

M. Martial Bourquin, rapporteur . - Merci de vous être prêtés à cet exercice.

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