D. DES FINANCEMENTS EUROPÉENS SUBSIDIAIRES MAIS INDISPENSABLES POUR LA RÉALISATION DES GRANDS PROJETS

1. Des soutiens européens en hausse depuis 2000 et dont la France est l'un des premiers bénéficiaires

Au départ limitée aux projets transfrontaliers , la politique européenne des transports est dotée, au titre du Mécanisme pour l'interconnexion en Europe (MIE) pour la période 2014-2020 85 ( * ) , de 24 milliards d'euros , dont 11 milliards d'euros affectés spécifiquement aux États membres éligibles aux fonds de cohésion. Le MIE a pour principal objectif de financer des projets d'infrastructures nouvelles permettant d'achever le réseau transeuropéen de transport , constitué de neufs corridors.

Le budget de l'UE consacré aux transports a sensiblement augmenté ces dernières années, puisqu'il s'élevait seulement à 8 milliards d'euros entre 2007 et 2013 , au titre du programme Réseau transeuropéen de transport (RTE-T). À ces financements spécifiques viennent s'ajouter les fonds structurels européens , dont une large part bénéficie aux transports. Au total, 94 milliards d'euros seront ainsi fléchés vers les transports entre 2014 et 2020.

Lors de la mise en place en 2015 du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) - couramment appelé « plan Juncker » - une controverse était née en raison du transfert de 2,2 milliards du MIE vers le FEIS. Le plan Juncker ne retenant aucun fléchage thématique, des craintes que les crédits retranchés au MIE ne bénéficient pas in fine aux transports avaient été exprimées.

Entendus par votre groupe de travail, les services de la direction générale des transports de la Commission européenne ont indiqué que les douze projets sélectionnés dans le cadre du plan Juncker à la fin juin 2016 devraient permettre de réaliser un investissement total de 8,5 milliards d'euros , supérieur au montant d'investissements qui auraient pu être généré si les 2,2 milliards d'euros avaient été alloués sous forme de subventions au titre du MIE 86 ( * ) . L'effet de levier observé dans le domaine des transports, inférieur à dix, reste cependant inférieur à l'effet multiplicateur de 15 fixé comme objectif dans le cadre du plan Juncker.

Financements du budget de l'UE en faveur des transports

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de la Commission européenne)

Par ailleurs, les projets dans le domaine des transports peuvent bénéficier de prêts de la Banque européenne d'investissement (BEI) .

Entre 2011 et 2015, la BEI a investi près de 12 milliards d'euros en France dans les réseaux d'infrastructure de transport et de télécommunication , ce qui place notre pays au quatrième rang des bénéficiaires de la BEI. Pour la seule année 2015, 2,2 milliards d'euros ont été investis dans des projets d'infrastructure de transport français , soit 29 % de l'ensemble des prêts délivrés en France par la BEI pour cette même année.

Même si elle dispose de fonds structurels d'un montant moindre par rapport aux pays moins développés et éligibles aux fonds de cohésion, la France se classe parmi les principaux bénéficiaires des programmes européens en faveur des transports .

Au cours de la période 2007-2013, 1,1 milliard d'euros , sur un total de 7,2 milliards d'euros de subventions , ont été alloués à la France , soit 15 % du montant total . La France occupe ainsi la première place , en montant absolu, devant l'Italie (1 milliard d'euros), l'Allemagne (834 millions d'euros) et l'Espagne (586 millions d'euros). Cette somme, certes importante, ne représente toutefois moins de 7 % du budget de l'AFITF sur l'ensemble de la période .

Pour 2014-2020, la France, traversée par cinq corridors transeuropéens, devrait à nouveau figurer parmi les principaux bénéficiaires des subventions européennes en matière de transports .

En 2015, deux projets d'ampleur se sont vus octroyer un financement du MIE à hauteur de 40 % : le canal Seine-Nord-Europe en raison de sa participation au projet de liaison fluviale Seine-Escaut (976 millions d'euros) et le tunnel de base transfrontalier entre Lyon et Turin (813 millions d'euros) . Pour la Commission européenne, ces deux projets constituent des pierres angulaires du réseau transeuropéen et doivent à ce titre être soutenus , même si elle admet que des doutes subsistent concernant leur soutenabilité financière.

Principaux projets d'infrastructure de transport situés en France financé
par le Mécanisme pour l'interconnexion en Europe

(montants en millions d'euros)

Nom du projet

Type de dépense

Contribution de l'UE

Taux de cofinancement

Seine-Escaut 2020

Étude et travaux

979

40%

Section transfrontalière de la nouvelle liaison ferroviaire Lyon-Turin - Tunnel de base du Mont-Cenis

Étude et travaux

813

40%

LGV Bordeaux-Dax

Étude

52

50%

Ligne ferroviaire Montpellier-Perpignan

Étude

12

50%

Modernisation de la ligne Serqueux-Gisors

Étude et travaux

71

30%

Déploiement du système de signalisation ferroviaire sur la partie française de la ligne Anvers-Bâle

Travaux

55

50%

Projets sélectionnés dans le cadre du deuxième appel à projets

Divers

140

-

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données de la Commission européenne)

Répondant à des objectifs différents de ceux définis au niveau national, l'UE peut ainsi apporter un soutien décisif à des projets qui ne seraient pas considérés comme prioritaires d'un point de vue strictement national , comme par exemple le projet de LGV Bordeaux-Dax dont les études sont financées à hauteur de 52 millions d'euros par l'UE (soit 50 % du coût total).

Enfin, il convient de noter qu'environ vingt projets ont été sélectionnés par la Commission européenne dans le cadre du deuxième appel à projets du MIE, pour des subventions d'un montant total de 140 millions d'euros et que le projet du grand contournement Ouest de Strasbourg a été retenu dans le cadre du plan Juncker.

En-dehors du plan Juncker, la quasi-totalité des financements européens disponibles pour la période 2014-2020 en faveur des transports a ainsi été allouée .

2. Des initiatives au niveau européen pour élargir la palette des instruments de financement des infrastructures

Hormis les subventions du budget de l'UE, les prêts de la BEI et le plan Juncker, des initiatives ont été prises, ces dernières années, au niveau européen afin d' élargir la base des investisseurs dans les projets d'infrastructure . Les obligations de projet ( project bonds ) et les fonds européens d'investissement à long terme (ELTIF) cherchent ainsi à inciter les acteurs financiers non bancaires tels que les compagnies d'assurance à financer des investissements de long terme.

La France joue un rôle actif dans le développement de ces nouveaux outils. En juillet 2014, elle a ainsi lancé, avec la BEI, le premier project bond européen dans les infrastructures numériques .

Selon la direction générale du Trésor, « les conclusions de cette expérience pilote semblent plutôt positives et plaident pour qu'elle continue à être déployée ». Dans le domaine des transports, il convient également de noter que l'instrument de réhaussement de crédit de la BEI ( Project bond credit enhancement ) a permis au port de Calais de boucler son plan de financement du projet « Calais Port 2025 » et d'attirer des investisseurs en fonds propres.

S'agissant des fonds « ELTIF », censés favoriser l'investissement de long terme grâce à un label européen facilitant l'identification et la commercialisation, ils constituent avant tout un outil de marketing et de promotion des fonds d'infrastructure . Du point de vue de la direction générale du Trésor, ils ne peuvent donc pas être considérés comme de véritables nouveaux instruments de financement.


* 85 Le MIE était initialement doté de 26,4 milliards d'euros, avant transfert de 2,2 milliards d'euros vers le FEIS.

* 86 En raison du taux de cofinancement plus élevé dans le cadre du MIE, pouvant atteindre jusqu'à 40 % pour certains réseaux ferroviaires et routiers.

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