PREMIÈRE PARTIE - UNE SITUATION ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DES OUTRE-MER QUI DEMEURE PRÉOCCUPANTE

I. DES DONNÉES SOCIO-ÉCONOMIQUES DÉGRADÉES

La situation économique et sociale des outre-mer apparaît contrastée : « îlots de prospérité » au sein de leur environnement géographique immédiat, ils accusent cependant un retard de développement considérable par rapport à l'hexagone .

A. UNE ÉGALITÉ RÉELLE AVEC L'HEXAGONE QUI DEMEURE THÉORIQUE

Le phénomène de rattrapage vis-à-vis de la métropole, qui s'était amorcé dans le courant des années 1990, s'est brutalement interrompu avec la crise économique de 2009 .

Au total, selon l'Agence française de développement, l'écart de développement par rapport à l'hexagone était compris entre 12 ans pour la Guadeloupe et 28 ans pour la Polynésie française en 2012 . En d'autres termes, en 2012, l'IDH de la Polynésie française correspondait à celui enregistré par l'hexagone en 1984 .

Les départements et collectivités d'outre-mer continuent d'afficher des résultats inférieurs à ceux de la métropole selon les trois critères pris en compte dans la construction de l'indice de développement humain : espérance de vie (à l'exception de la Martinique), éducation et revenu (cf. tableau infra ).

Indice de développement humain (IDH)

(par critère)

Espérance de vie

Éducation

Revenu

IDH

Wallis-et-Futuna ( b )

0,856

0,730

0,758

0,763

La Réunion

0,858

0,672

0,731

0,750

Nouvelle-Calédonie

0,886

0,702

0,789

0,789

Polynésie française

0,890

0,635

0,709

0,737

Mayotte

0,916

0,532

0,592

0,653

Guyane

0,930

0,618

0,702

0,739

St Pierre-et-Miquelon

0,942

0,680

0,708

0,762

Guadeloupe

0,949

0,769

0,762

0,822

Saint-Martin

0,949

0,537

0,712

0,702

Saint-Barthélemy

0,949

0,488

0,753

0,688

Martinique

0,970

0,731

0,758

0,813

Métropole

0,968

0,870

0,817

0,883

Source : Cour des comptes, d'après des données du programme des nations unies pour le développement (PNUD)

1. Des taux de chômage particulièrement élevés, chez les jeunes notamment
a) Des taux de chômage en moyenne supérieurs à 20 %

Selon l'Insee, en moyenne en 2014, le taux de chômage dans l'ensemble des départements d'outre-mer était supérieur de 14 points à celui de la France métropolitaine , avec près d'un actif sur quatre au chômage . La Martinique présente le taux de chômage le plus faible (19,4 %) et La Réunion le plus élevé (26,8 %). La Guyane et la Guadeloupe sont dans des situations intermédiaires (respectivement 22,3 % et 23,7 %).

En juillet 2015, 58 040 demandeurs d'emploi étaient recensés par Pôle Emploi en Guadeloupe (+ 2,2 % par rapport à juillet 2014), 44 961 en Martinique, (- 0,6 % par rapport à juillet 2014), 23 320 en Guyane (+ 4,6 % par rapport à juillet 2014), 136 650 à La Réunion (+ 0,9 % par rapport à juillet 2014), 11 460 à Mayotte (+ 44,9 % par rapport à juin 2014) et 360 à Saint-Pierre-et-Miquelon en mars 2015 (- 2,5 % par rapport à mars 2014).

b) Un phénomène touchant particulièrement les 15-24 ans

La population des 15-24 ans représente dans les territoires ultramarins 15,47 % de la population totale (14,4 % en Guyane et près de 60 % à Mayotte), contre 12,6 % dans l'hexagone.

Or une part importante de ces jeunes est en situation de chômage . Ainsi, malgré une diminution significative du chômage des jeunes entre 2014 et 2015 - 56,7 % en Guadeloupe (- 3,4 points par rapport à l'année précédente), 50,6 % en Martinique (- 17,6 points), 40 % en Guyane (- 4,8 points), 54,4 % à La Réunion (- 4,2 points), 37,4 % à Mayotte - le taux de chômage des jeunes ultramarins demeure est près de deux fois supérieur à celui des jeunes métropolitains (23,9 % en 2014) .

2. Des niveaux de qualification globalement inférieurs à ceux de la métropole

La part de la population ne possédant aucun diplôme est très significativement supérieure en outre-mer à celle de l'hexagone : si 17,5 % de la population de plus de 15 ans de la France hexagonale ne possédait aucun diplôme en 2011, en outre-mer, ce taux était compris entre 20 % à Saint-Pierre-et-Miquelon et 66,8 % à Mayotte (36,7 % en Guadeloupe, 35,2 % en Martinique, 50,6 % en Guyane, 45,6% à La Réunion, 58,7 % à Wallis-et-Futuna, 28 % en Nouvelle-Calédonie, 31 % en Polynésie française, 38,9 % à Saint-Martin et 26,5 % à Saint-Barthélemy).

Des écarts peuvent également être constatés s'agissant de la part de la population diplômée de l'enseignement supérieur . Ainsi, si 25,7 % de la population de la France hexagonale de plus de 15 ans était titulaire d'un diplôme du supérieur en 2011, ce taux était compris entre 9,8 % à Mayotte et 23,2 % à Saint-Barthélemy (15,7 % à La Réunion, 17,1 % en Guadeloupe, 18,5 % à la Martinique 15 % en Guyane, 17,1 % à Saint-Pierre-et-Miquelon, 16,7 % en Nouvelle-Calédonie, 12,1 % en Polynésie française, 10,3 % à Wallis-et-Futuna et 13,5 % à Saint-Martin).

3. Une situation sanitaire qui demeure tendue

Dans un rapport de juin 2014 2 ( * ) , la Cour des comptes rappelait que les territoires ultramarins sont confrontés à « une situation sanitaire marquée par des difficultés persistantes, des systèmes de santé à la peine et une absence de stratégie publique ».

Ainsi, s'agissant de la mortalité infantile, la Cour des comptes relevait qu' « une surmortalité infantile persiste dans tous les outre-mer . Elle provoque plusieurs dizaines de décès à moins de douze mois par an et par collectivité, et s'est en partie aggravée dans la période récente, avec un taux qui variait en 2012 de 4,1 à 9,9 pour mille naissances (moyenne DOM hors Mayotte : 8 contre 3,3 en métropole) », constatant que « malgré des progrès significatifs, les grossesses demeurent plus précoces et nombreuses qu'en métropole ; dans les zones les moins bien couvertes par la protection maternelle et infantile (PMI), la connaissance des examens de dépistage et la surveillance prénatale sont inégales. Le taux de prématurés est double de celui de la métropole, l'obésité maternelle et la pauvreté en expliquant une partie ».

Taux de mortalité infantile dans les outre-mer en 2000 et 2012

(pour 1 000 naissances)

2000

2012

Guadeloupe

7,8

9,9

Martinique

6,6

8

Guyane

12,5

9,2

La Réunion

5,7

8,5

Mayotte

nd

16,1

Nouvelle-Calédonie

4,6

4,1

Polynésie française

6,9

7,5

Wallis-et-Futuna

nd

5,6

Métropole

4,4

3,3

Source : Cour des comptes

La Cour des comptes mettait en outre en avant l'importance des risques infectieux et des maladies chroniques en outre-mer, soulignant en particulier que « l'augmentation des cas de surpoids et d'obésité est supérieure à celle observée en métropole, d'où le développement récent et rapide de maladies chroniques ».


* 2 Cour des comptes, « La santé dans les outre-mer, une responsabilité de la République », rapport public thématique, juin 2014.

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