Première table ronde - L'innovation dans le tourisme outre-mer : Quelles performances ? Quelles contraintes ?

Animatrice de la table ronde : Madly SCHENIN-KING

INTRODUCTION GÉNÉRALE
Sophie LACOUR, Dr Sciences Information & Communication, Directrice générale d'Advanced Tourism

Je suis ici pour vous parler du futur, et ce n'est pas chose aisée : nous assistons actuellement à des bouleversements technologiques extraordinaires, plus importants encore que l'invention de l'imprimerie et la généralisation de l'électricité, qui chambouleront à tout jamais notre monde. J'ai choisi de vous parler du futur à travers quelques avancées technologiques qui concerneront le tourisme et plus précisément les territoires ultramarins.

En matière de distribution et de commercialisation, nous allons assister à l'essor de la réalité augmentée, la RA, et de la réalité virtuelle, la RV. Ces innovations, qui sont déjà connues, se combineront avec les technologies haptiques, qui sont encore tout à fait émergentes : il s'agit de la capacité à toucher une réalité à distance, par exemple du sable ou des plantes. Ces technologies ouvriront la voie à de véritables pré-voyages cinesthésiques.

Dans une quinzaine d'années, toutes les technologies dont nous disposons déjà par l'intermédiaire de nos smartphones seront bien plus performantes qu'aujourd'hui. Nous pouvons déjà traduire des textes, des menus ou des panneaux indicateurs en les regardant à travers notre écran. Une technologie balbutiante mais très prometteuse va permettre la traduction instantanée orale par le biais de simples oreillettes. En 2025, nous pourrons également utiliser des lentilles bioniques, qui nous donneront des informations directement en surimpression sur l'oeil.

Parmi toutes ces avancées, je tiens à insister sur une technologie à laquelle je crois beaucoup : l'hologramme. Ce dernier sera extrêmement pratique dans les lieux où l'on ne peut pas poster un agent d'accueil en permanence, par exemple dans les gîtes, sur des plages, ou à certains moments de l'année, typiquement hors saison. Dès à présent, des hologrammes sont proposés dans de petits boîtiers pour quelques centaines de dollars. À mon sens, cette technologie est promise à un bel avenir.

Autre technologie qui va bouleverser l'information et la distribution, le BCI, ou Brain-Computer Interface , à savoir la communication entre le cerveau et l'ordinateur. Le BCI permettra de téléguider des robots dans des lieux peu accessibles ou lointains, à quelques milliers de kilomètres de distance, pour préparer une visite. Le BBI, ou Brain to Brain Interface , est encore plus extraordinaire : il s'agit de la communication de cerveau à cerveau. Ce domaine fait l'objet de recherches depuis un an déjà. Pour l'heure, on ne sait absolument pas quelles seront les conséquences du BBI en matière de marketing, mais il faut se préparer à l'arrivée de ces technologies dans le tourisme dans une dizaine d'années.

Diverses innovations vont intervenir dans le domaine des transports, comme l' hyperloop qui permettra dans moins de 5 ans de faire 500 km en 30 mn. Plus futuriste l' Evacuated Tube Transport qui utilise une technique fondée sur le principe du pneumatique, c'est-à-dire sous vide, qui permettra d'effectuer le tour du monde en six heures. Dès lors, les destinations ultramarines seront à moins de trois heures de la métropole. Bien entendu, avec de telles facilités, le tourisme va connaître un nouvel essor.

Parallèlement, les nouveaux matériaux ouvrent la voie à des innovations extraordinaires, surtout dans des territoires où la nature exige d'être préservée : un projet japonais prévu pour 2025 porte ainsi sur des trains invisibles.

L'hybridation est également une perspective très intéressante. Dans le domaine du tourisme, l'interconnexion entre les aéroports et les gares constitue une problématique majeure. Un projet de l'université de Lausanne envisage de clipser directement une aile volante sur les wagons d'un train. Dès lors, plus de problème d'interconnexion voire d'aéroport, les trains atterrirons directement dans les gares. Pour les territoires qui ne peuvent accueillir d'importantes infrastructures aéroportuaires, ce qui est le cas de certaines de nos destinations ultramarines, Airbus a mis à l'étude un projet de porte-avions volant géant, comprenant de petites unités solaires qu'il sera possible de larguer au-dessus de la destination choisie.

L'imprimante en trois dimensions permettra des réalisations étonnantes, comme des avions imprimés dans des matériaux transparents. Personnellement, je ne monterai jamais dans un tel véhicule ! Mais, j'en suis persuadée, il s'agit là d'une avancée très intéressante pour pouvoir admirer le paysage à travers la carlingue.

Dans le même temps, les innovations permettent de réactualiser d'anciens moyens de transport. C'est ainsi que le Zeppelin réapparaît parmi les projets de la société Dassault qui imagine pour 2025 des croisières dans les nuages.

Encore plus haut, pour les territoires disposant déjà d'infrastructures propres à l'exploration spatiale, une entreprise japonaise est en train de construire un câble de 96 560 kilomètres qui reliera la terre à une station géostationnaire. C'est en quelque sorte un ascenseur de l'espace qui permettra d'accéder à des structures hôtelières en orbite autour de la terre.

J'en viens au secteur de l'hébergement pour lequel, à mon sens, trois tendances vont se dessiner.

Premièrement, l'hébergement du futur sera intégré. Le Mirror cube est l'un des meilleurs exemples d'intégration dans le paysage. Un projet chinois propose un complexe hôtelier qui épouse les formes d'une falaise, traversé par une cascade qui se déverse dans une marina en contrebas. Dans le cadre d'un autre projet, jordanien celui-là, un hébergement est creusé dans la falaise et seules les ouvertures sont visibles. L'infrastructure hôtelière s'intègre donc parfaitement et préserve intacte l'intégrité du paysage.

Deuxièmement, cet hébergement sera écologique, par exemple parce qu'il poussera : figure dans cette catégorie un projet français d'habitat individuel qui pousse, grâce à des greffons végétaux. Bien sûr, ces modes de logement impliquent certains délais, mais ces derniers ne concourent-ils pas au charme de tels habitats ?

Troisièmement, l'hébergement du futur sera nomade. Le tourisme doit faire face à de graves problèmes saisonniers. Il n'est pas optimal de laisser les structures en place après la fin de la saison. De tels projets permettent d'installer les structures là où on en a besoin. Il en est ainsi du magnifique et très poétique projet du Morphôtel : il s'agit d'une colonne vertébrale mouvante et navigante de 800 mètres de long, qui s'amarre de port en port. De son côté, la Russie développe un projet singulier : l'Aérotel, une île artificielle légère et déplaçable assortie d'une petite marina et d'infrastructures flottant dans l'air. Des infrastructures de cette nature sont idéales pour palier la saisonnalité et le climat.

Enfin, les activités de loisir sont elles aussi appelées à évoluer. Elles seront robotisées et virtuelles. Outre les hologrammes, de nouveaux dispositifs favoriseront la découverte des oeuvres d'art : on pourra se promener à l'intérieur d'un tableau de Van Gogh pour, par exemple, tourner autour des meubles qui y sont représentés.

Dans le même temps, la robotique est déjà en plein essor dans le domaine touristique : c'est une tendance que j'ai conceptualisée il y a deux ans sous le nom de R-Tourisme. Depuis l'été dernier, un célèbre croisiériste a mis un robot-barman à la disposition de ses clients. J'ignore s'il y a grand intérêt à discuter avec un robot le soir, autour d'un whisky... Quoi qu'il en soit, les robots sont en train d'arriver, en back office comme en front office .

En définitive, quel sera le e-touriste de demain ? Il sera vraisemblablement augmenté, avec des yeux et des oreilles bioniques ; il aura accès à une information dématérialisée à toute heure et dans tout lieu ; enfin, il vivra ses expériences en réel, mais avec le concours de la technologie augmentée !

PREMIÈRE SÉQUENCE - L'INNOVATION DANS LES OUTRE-MER EN MATIÈRE DE TOURISME DES SIGNAUX ENCOURAGEANTS ET DES ATOUTS CERTAINS
Adrien LANOTTE, Directeur recherches et publications, Hospitality ON, MKG Group

Après Madame Lacour, qui nous a invités à nous projeter vers l'avenir, j'ai la tâche, difficile, de présenter le diagnostic et l'état des lieux. Toutefois, mon exposé sera également optimiste ; et je reviendrai sur plusieurs points très intéressants relatifs aux initiatives déployées outre-mer.

Le cabinet MKG a mené cette étude nationale sur le diagnostic et les perspectives de l'innovation dans le tourisme en France pour le compte de la Direction générale aux entreprises (DGE) du ministère de l'économie et des finances. Le document complet est d'ailleurs disponible sur le site internet du ministère ( http://www.entreprises.gouv.fr/etudes-et-statistiques/innovation-tourisme-diagnostic-et-perspectives ).

Dans le cadre de ce travail, nous avions deux objectifs : établir un diagnostic et formuler des préconisations à l'échelle nationale, puis avec une déclinaison spécifique à l'outre-mer (DROM uniquement). À cette fin, nous avons interrogé divers acteurs, dont plusieurs sont présents dans cette salle aujourd'hui. Je saisis cette occasion pour remercier toutes celles et tous ceux qui nous ont apporté leur concours.

Cette étude s'appuie sur des données de volumétrie, à l'aide d'outils relevant du data scraping : le but était d'identifier des entreprises innovantes à l'échelle nationale par diverses clefs d'entrée - présence dans des incubateurs, portefeuilles d'investisseurs financiers, présence dans divers salons, etc. Cette information a ensuite été qualifiée, en précisant les caractéristiques de chacune des innovations étudiées. En outre, une volumétrie a été définie à l'échelle nationale. Ce travail a été couplé avec des entretiens approfondis pour cerner qualitativement la réalité du terrain. Ce faisant, il a été possible de décliner des diagnostics et des préconisations.

À ce stade, je tiens à rappeler quelques chiffres qui sont établis à l'échelle nationale mais qui ont un impact sur la situation ultramarine.

Aujourd'hui, le paysage de l'innovation touristique comprend 35 000 à 40 000 entreprises créant de la richesse dans nos territoires. Parmi elles, on distingue plusieurs profils.

Plus de 10 % des entreprises traditionnelles de tourisme - structures d'hébergement, agences de voyages, croisiéristes, etc. - ont développé une innovation. On constate d'emblée que l'innovation ne se limite pas aux start-up : les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui irriguent les territoires sont d'ores et déjà présentes dans ce domaine ! Le soutien à l'innovation ne se limite donc pas à celui des start-up , ou au seul univers du numérique, mais doit être pensé pour l'écosystème du tourisme dans son ensemble.

Dans le même temps, entre 2 500 et 5 000 sociétés ont développé une innovation en matière touristique alors qu'elles étaient, à l'origine, totalement étrangères au tourisme. Il s'agit typiquement de sociétés informatiques, de portails internet, d'agences de communication ou de conseil. Il faut donc, à l'inverse, penser aussi les dispositifs favorisant le tourisme pour des structures qui ne sont pas des pure players du secteur.

J'en viens plus spécifiquement aux outre-mer.

En la matière, un point très positif doit être souligné, car il constitue une réelle force de la France par rapport à d'autres pays : la présence d'écosystèmes dédiés à l'innovation dans les cinq territoires étudiés, à savoir la Guadeloupe, la Martinique, Mayotte, la Guyane et La Réunion.

Toutefois, aucun de ces écosystèmes n'est réellement spécialisé dans le domaine du tourisme.

De plus, les structures elles-mêmes, à l'instar des porteurs de projets, nous ont fait part de certaines limites en termes d'accompagnement, notamment dans la durée ou pour la mise en réseau.

Aujourd'hui, il convient donc de passer d'une offre d'hébergement et de soutien technique aux entreprises à un écosystème à haute valeur ajoutée, apportant une véritable expertise métier aux porteurs de projets en outre-mer.

En termes d'accompagnement, il est possible de mentionner divers enjeux.

Tout d'abord, il faut passer d'une mise en réseau locale à une vision nationale, voire internationale. C'est d'ailleurs déjà le cas pour certaines start-up . Toutes les sociétés qui naissent outre-mer ont tôt ou tard vocation à s'étendre aux autres territoires ultramarins, à leur secteur régional, qu'il s'agisse de la zone Caraïbes ou de l'océan Indien, voire à l'échelle métropolitaine. Il faut donc, dès l'origine, anticiper l'accompagnement en conséquence.

Ensuite, il vaut mieux tirer parti d'atouts qui restent sous-exploités alors qu'ils sont disponibles dans les structures publiques. J'y reviendrai dans quelques instants.

De surcroît, en matière de constitution de dossiers, il est nécessaire d'aller au-delà du simple accompagnement au montage de dossiers de financement public. Certains écosystèmes aujourd'hui présents outre-mer ont déjà amorcé ce travail. C'est là une autre bonne nouvelle.

Enfin, la France est, dans son ensemble, très efficace en matière d'amorçage, de soutien aux start-up dans les premiers instants. En revanche, au-delà des deux ou trois ans d'existence, au-delà de certains tickets d'investissement, 1 ou 2 millions d'euros, lesquels constituent la fameuse « vallée de la mort », les entreprises ont beaucoup plus de mal à être bien accompagnées. C'est le cas en métropole ; c'est également le cas outre-mer.

Quelques initiatives inspirantes ont déjà été prises outre-mer. Je ne donnerai que quelques exemples, d'autres figurent bien sûr dans l'étude que nous avons réalisée. Ainsi, le portail Guyane Entreprendre permet un partage de données entre les acteurs ; MartiniqueTech est un réseau d'échanges développé sur l'initiative des entreprises privées ; s'y ajoutent Initiative Outre-mer, Outre-mer Network, qui propose divers services, le FabLab de Jarry, en Guadeloupe, etc.

En termes de financements, un point positif mérite d'être souligné : de nombreux dispositifs permettent de bénéficier de crédits publics, et certains d'entre eux sont très avantageux, notamment outre-mer. En revanche, ces procédures sont plutôt méconnues et, parfois, mal ciblées. Ainsi, des portails internet ou des agences de voyage auront du mal à y accéder. Surtout, ces dispositifs peuvent paraître chronophages au regard du montant sur lesquels ils portent. Enfin, et c'est aussi applicable plus largement à l'échelle nationale, les porteurs de projets peinent parfois à savoir pourquoi leur dossier a été refusé ou accepté. Aussi, la transparence quant aux critères d'obtention serait également un moyen d'encourager les porteurs de projets à candidater davantage au titre des nombreux dispositifs disponibles.

Cela étant, le véritable enjeu outre-mer est certainement le manque d'investissement privé et le déficit d'accès aux réseaux, français et internationaux. Pourtant, ces derniers sont potentiellement sensibles au dispositif. Aujourd'hui, les actions menées sont plutôt centrées sur l'immobilier ou sur d'autres structures. Il conviendrait de les orienter davantage vers l'innovation.

Au surplus, une valeur ajoutée potentielle peut d'ores et déjà être mobilisée : les comités régionaux du tourisme, les offices du tourisme ou encore Atout France exercent des missions dont certaines seraient très utiles pour des porteurs de projets. Je songe bien sûr à la formation, à l'observation statistique et à l'animation de réseaux. Trouver des réseaux et des partenaires professionnels est un véritable enjeu pour un porteur de projets. Je songe également à l'ingénierie, à la prospective et à la veille. Ce sont là autant de services lourds au titre desquels de réelles économies d'échelle peuvent être dégagées.

Ces constats ont été dressés par l'ensemble des porteurs de projets, en outre-mer comme en métropole. Il est nécessaire d'assurer le partage et la diffusion des données touristiques, d'autant que les projets d' open data du tourisme, en cours de structuration dans certaines régions métropolitaines, ne sont pas encore lancés outre-mer.

Tous ces éléments de diagnostic nous ont permis d'aboutir à des préconisations d'action.

Plusieurs objectifs définis au niveau national ont une importance spécifique pour l'outre-mer.

Tout d'abord, on a pu constater que la lisibilité des dispositifs constituait une problématique clef. Les porteurs de projets souhaitent bénéficier d'un outil leur permettant de flécher directement les dispositifs auxquels ils peuvent prétendre selon leurs choix stratégiques, notamment selon leurs choix d'implantation.

Ensuite, il faut élargir les critères d'obtention du financement au caractère innovant pour l'utilisateur, notamment dans le cas précis des outre-mer : sans être innovant à l'échelle de la métropole ou globale, un projet peut l'être au sein des territoires ultramarins. Dès lors, il doit pouvoir être financé à ce titre.

En outre, il convient de mener une politique active sur le front des marchés publics et des appels d'offres et de financer des actions opérationnelles, comme par exemple des frais de développement, des frais de traduction, leur permettre de bénéficier de dispositifs de réduction de cotisations sociales pour le premier salarié. Les porteurs de projets ont particulièrement insisté sur ce point, et à cet égard l'outre-mer a des atouts spécifiques à faire valoir vis-à-vis de la métropole.

Dans le même temps, il faudrait déployer un dispositif particulier pour les entreprises à haut potentiel, des outils de veille, des outils permettant de faciliter les accès aux salons et de favoriser les rencontres à l'échelon local. Ce dernier objectif est très important dans les outre-mer où la visibilité est d'autant moins grande que l'on manque de bases de données. Les porteurs de projets ont donc véritablement besoin de pouvoir accéder à leurs partenaires locaux.

Différents volets doivent être consacrés à l'amélioration de l'accompagnement.

De surcroît, il faut encourager l' open data et permettre une meilleure appropriation des innovations par les opérateurs touristiques, notamment en assouplissant les conditions d'adhésion aux organismes du tourisme. Une société informatique qui a développé une application dans le domaine touristique peut être intéressée par des outils de veille spécifiques à ce secteur, et de présence aux salons.

J'en viens aux objectifs portant plus spécialement sur les outre-mer.

Je le répète, il convient de mieux prendre en compte les spécificités des territoires ultramarins sur le front des actions innovantes. À ce titre, il faut généraliser l'approche par appels à projets. Je mentionne également une démarche intéressante, due à l'Agence française de développement de Mayotte : le lancement d'une enquête visant à identifier les besoins réels des entreprises locales du tourisme, destinée à déployer des actions opérationnelles plus spécifiques. La création de prêts à taux zéro s'inscrit également dans ce cadre.

Tous ces éléments peuvent être assortis d'indicateurs de suivi : la création de critères ou de dispositifs spécifiques à l'outre-mer, et surtout l'évolution du nombre des dispositifs demandés outre-mer ainsi que des types de profils sollicités.

Il s'agit également de clarifier le système d'attribution et de mieux communiquer à son sujet. Cet objectif peut lui aussi être mesuré, à travers la formalisation des dispositifs, la création d'un outil de suivi des demandes de financement et des montants attribués au terme d'un process de communication aux porteurs de projets.

Pour favoriser l'investissement privé, il faudrait réorienter les stratégies et mettre en oeuvre une démarche proactive afin d'attirer outre-mer les investisseurs métropolitains, mais aussi les investisseurs étrangers auxquels on ne pense pas assez. De réelles opportunités existent sur ce plan.

Parallèlement, il faut s'appuyer sur les écosystèmes de l'innovation via l'ensemble des structures identifiées pour faire connaître les entreprises innovantes de l'outre-mer. C'est ce que certains acteurs, dont les représentants sont présents aujourd'hui à ce colloque, font d'ores et déjà. Cet objectif peut lui aussi se mesurer, à travers l'évolution du nombre de business angels et d'entreprises ultramarines financées.

Il est également très important de mieux mettre en réseau les écosystèmes et les acteurs, afin de leur permettre d'atteindre une taille critique pour apporter une véritable expertise métier. Des structures peuvent se répartir géographiquement dans les différents territoires. Mais il faut également disposer d'outils apportant une expertise métier spécifique au tourisme à l'échelle de l'ensemble des territoires ultramarins ou au niveau national. À cette fin, il faut constituer un réseau et mettre en service un outil d'information commun aux différents écosystèmes locaux.

De plus, il s'agit de renforcer l'accompagnement des porteurs de projets et les entreprises innovantes, à travers des ateliers et des formations, et non uniquement au titre du soutien au montage de dossiers.

Dans le même temps, il faut mieux accompagner les entreprises dans l'utilisation des fonds. On a appelé notre attention sur le cas d'une société qui n'avait pu bénéficier des dernières tranches de crédits qu'elle avait obtenus à l'origine, au motif qu'elle n'avait pas respecté certains critères très spécifiques du dispositif. Or son plan de financement tout entier a dès lors été remis en question. Les porteurs de projets ont besoin de visibilité et d'accompagnement pour pouvoir s'assurer qu'ils emploient dans le cadre idoine l'argent public qui leur est confié.

La création d'un incubateur pérenne spécialement dédié au tourisme est une autre piste à explorer. Pour en évaluer le succès, il sera possible de mesurer le nombre d'entreprises candidates et accueillies.

Plus largement, il faut penser aux partenariats qu'il serait possible de nouer avec les destinations voisines, dans les Caraïbes ou l'océan Indien. Ainsi, en France, le Welcome City Lab a lancé des jumelages, notamment avec Mexico. Lorsqu'un marché est ouvert, les entreprises concernées doivent bénéficier d'une certaine souplesse pour aller à La Réunion, en Martinique ou en Guadeloupe. Cette piste compte au nombre des initiatives à potentiel.

Enfin, l'un des grands enjeux est d'améliorer les outils d'observation et les bases de données des organismes du territoire. Certains ont déjà mis en oeuvre des outils de cette nature. Dans tous les cas, ces instruments doivent être perfectionnés. Parfois, ils doivent tout simplement être créés. Des standards uniques de collecte de données pourront être définis, dans le cadre d'une meilleure intégration au projet datatourisme . Il s'agit là d'un projet mené, à l'échelle nationale, par la DGE.

Tout l'enjeu est de faire communiquer efficacement les bases de données. Ainsi, les innovations créées pourront être très rapidement déployées outre-mer. Il est très important pour les porteurs de projets de disposer d'une vue sur l'offre et sur la demande : dès lors, ils pourront idéalement disposer, en temps réel et de manière actualisée, des éléments d'information permettant la prise de décision au sein des territoires.

Jean-Pierre PHILIBERT, Président de la Fédération des entreprises d'outre-mer

Monsieur le président,

Mesdames, Messieurs les parlementaires,

Mesdames et Messieurs,

Le fait de connaître nombre d'entre vous me donne le stress du médecin généraliste qui est invité à s'exprimer lors d'un congrès de spécialistes. En effet, je dois expliquer à des personnes qui connaissent le sujet beaucoup mieux que moi ce qu'il faudrait faire pour innover dans les différents domaines. Comme le disait mon vieux père : « Quand tu ne sais pas toi-même, essaie d'être intelligent par procuration . » Cela implique de faire travailler un certain nombre de personnes et d'essayer de restituer, en ayant l'air de comprendre ce que l'on dit, ce qu'elles ont élaboré parfois depuis des années.

Je remercie tout d'abord ceux qui, au sein de notre Fédération et autour de la secrétaire générale, Samia Badat-Karam, dont nous connaissons l'investissement, ont contribué, tels Yann Monplaisir, Katherine Chatel et le président Nicolas Vion, aux différentes propositions que nous allons porter dans quelques semaines ou quelques mois auprès des décideurs publics lors des grandes échéances à venir, en leur expliquant que ces mesures nous semblent, à nous entreprises, dans un secteur essentiel comme le tourisme, nécessaires pour innover dans les domaines divers du financement, de l'aide, etc.

Je ne referai pas le constat qui a été très bien dressé avant moi et dont d'autres reparleront ultérieurement. Je n'aborderai pas non plus ce qui constitue sans doute la mutation la plus importante à laquelle nous ayons assisté, c'est-à-dire la désintermédiation du choix de l'offre touristique. Avant, j'allais voir un tour operator , un spécialiste ; aujourd'hui, je clique, et quand je fais cela, on vient parfois me solliciter. Ce sont les robots dont parlait Sophie Lacour, mais on leur donne encore dans leur forme une personnalisation, souvent féminine d'ailleurs - c'est Emma, la charmante voix off d'une compagnie aérienne, m'informant d'un tarif attractif sur une destination donnée, etc. C'est important, mais ce n'est pas le sujet.

Je vais également vous surprendre - j'espère que les représentants des pouvoirs publics le seront heureusement -, car je ne vais pas commencer par dire ce que l'État devrait faire pour que la situation s'améliore. Rassurez-vous, cela viendra après, monsieur le directeur.

En revanche, je vais essayer de voir comment nous - ou plus exactement vous, les professionnels, et nous, qui vous accompagnons -, pourrions travailler, réfléchir différemment et innover dans l'offre touristique et la recherche de nouveaux clients. Nous sommes en effet totalement persuadés, à la Fedom, que si l'on se contente de vendre des destinations brutes ou balnéaires, le tourisme outre-mer ne décollera jamais.

Par conséquent, à côté des dispositifs d'incitation budgétaire qui sont naturellement nécessaires compte tenu des handicaps structurels de nos territoires, il est impératif de réfléchir à cette offre touristique outre-mer et de la construire en favorisant l'innovation.

Comme vous le savez, à la Fedom, nous militons depuis un certain temps en faveur de ce que nous appelons « le tourisme de sens », c'est-à-dire d'une offre touristique fondée sur la mise en valeur de l'histoire et du patrimoine mémoriel, naturel, culturel, gastronomique et architectural des outre-mer.

Au lieu d'essayer de se calquer à tout prix sur des modèles économiques des pays voisins, le all inclusive , la formule plage, contre lesquels nos territoires ultramarins ne pourront jamais rivaliser, notamment en raison des coûts de main-d'oeuvre et des législations sociales complètement différentes, les acteurs chargés des affaires touristiques outre-mer - je salue aussi Madame la présidente et Messieurs les présidents des comités régionaux du tourisme, qui effectuent un travail remarquable en la matière -, devraient mettre au point une offre touristique complète, en invitant aussi autour de la table Atout France, les régions, ainsi que les tour operators naturellement. Cette offre pourrait comprendre le vol, l'hébergement, mais aussi la découverte des richesses des outre-mer par la visite des maisons créoles, de la Station spatiale - j'ai rencontré tout à l'heure le représentant du CNES -, des parcs naturels, du musée du rhum, le fameux « spiritourisme » que nous a un jour longuement expliqué Charles Larcher, président du Comité martiniquais d'organisation et de défense du marché du rhum, le Coderum - ce terme de « Spiritourisme » m'évoquait au départ un tourisme spirituel, mais il s'agit bien de spiritueux ! Je pourrais également citer le Mémorial ACTe ou encore la forêt amazonienne, etc.

Une collaboration étroite entre les comités du tourisme, qui pourraient financer cette partie « visite des sites », et dont la pré-vente pourrait être envisagée, et les principaux tour operators est indispensable.

Nombre d'autres pistes pourraient être explorées ou développées, mais je me contenterai de les décliner brièvement, faute de temps.

Il pourrait, par exemple, être judicieux, comme j'en entends souvent parler même si ce n'est pas encore acté, de transformer les croisiéristes en touristes de séjour, c'est-à-dire de coupler l'offre hôtelière en basse saison, le fameux pay five, stay seven , qui comprendrait cinq jours sur le bateau et, au début et à la fin, deux nuitées à terre.

Le système français étant parmi les meilleurs au monde, il convient de développer le tourisme médical, comme cela avait été préconisé ici. Un certain nombre d'initiatives extrêmement intéressantes, à partir de La Réunion, ne sont plus des projets et commencent à devenir des réalisations concrètes. Par exemple, des touristes partent de La Réunion en bateau et bénéficient à bord de services médicaux, notamment de dialyse. Jeanne Loyher, directrice du groupe Clinic futur, avait présenté cette offre ici même l'année dernière.

Il faut développer le tourisme senior, la silver economy , mais sur des durées plus longues, en profitant, comme je l'ai dit tout à l'heure devant la presse, et même si on peut le déplorer, de ce qui a incontestablement amélioré notre situation cette année, à savoir l'affaiblissement des offres touristiques de pays comme la Turquie, l'Égypte ou la Tunisie. L'essor du tourisme à destination de cette clientèle devrait encore augmenter de façon importante, notamment en basse saison.

Nous devons aussi développer le tourisme sportif - j'ai l'impression d'enfoncer des portes ouvertes -, avec l'entraînement des athlètes durant l'hiver, « base arrière » des jeux Olympiques et des coupes du monde. Nous disposons de formidables infrastructures dans ce domaine, notamment à La Réunion et aux Antilles.

Il faut élaborer des contrats multidestinations, comme cela a cours à La Réunion, permettant à un territoire français et à un territoire proche de vendre des packages , à condition qu'ils soient reliés par une desserte aérienne ou maritime directe.

Nous devons favoriser le mécénat pour accompagner les projets liés à l'environnement, l'embellissement, avec une incitation fiscale à la clef.

Il faut aussi développer, j'y crois profondément car on le fait dans de nombreux autres pays dans le monde dans lesquels des touristes, Français ou autres, vont à la rencontre des populations, ce que l'on appelle le people to people , par exemple des médecins ou des agriculteurs venant rencontrer leurs homologues à La Réunion, ou des fabricants d'espadrilles désireux de rencontrer Willem Germany, à l'origine de ces magnifiques espadrilles madras.

Nous devons examiner tous les problèmes de normes qui nous pèsent encore, à commencer par l'assouplissement des règles de navigation commerciale. À titre d'exemple, le nombre de passagers autorisés est de 28 à Saint-Martin et de 56 à Sint Maarten, à côté ; il existe donc, pour un même territoire, deux réglementations différentes.

Cessons de voir la saisonnalité comme un handicap majeur, et mettons tout en oeuvre pour capter une nouvelle clientèle en misant sur nos atouts. Un territoire français est toujours le gage d'hôpitaux de qualité et de sécurité des soins...

Poursuivons la réflexion sur les exemptions de visas pour les touristes en provenance de pays émergents comme la Russie, l'Afrique du Sud et le Brésil, ou encore le Venezuela, l'Indonésie et le Japon. Concrètement, à l'instar de ce qui est entrepris à La Réunion, il est essentiel d'aller chercher les visiteurs potentiels dans leur propre pays.

Tous ces éléments ont été exposés par les professionnels du tourisme, qui ont bien conscience de l'importance d'avancer en ce sens.

La Guyane, quant à elle, est une destination touristique qui donne à ceux qui la vendent un formidable potentiel.

Le représentant de l'État doit se réjouir que je ne puisse pas lui demander comment il pourrait nous aider à faire mieux. Je serai donc très bref.

Lorsque l'État crée et gère ses propres investissements, notamment ceux qui ont un caractère très structurant comme les aéroports ou les ports, il est indispensable de les concevoir comme des composants des politiques touristiques de nos territoires et d'en tirer les conséquences en termes d'équipements et de fonctionnalités.

On consent parfois des efforts démesurés pour assurer aux croisiéristes des structures d'accueil à la sortie des ports. Essayons, pour une fois, de voir grand, après avoir fait dans notre pays la promotion du « petit », qui est toujours pour nous extrêmement sympathique : « On va boire un petit coup entre amis, on va se faire une petite bouffe, on a un petit ami... »

Nous avons un Haut comité, une Haute autorité, mais nous pensons souvent small . Pensons un peu plus grand !

Pour ce deuxième point, je vais juste tirer le fil sans plus de détail. Le financement des investissements neufs, autant que celui de leur rénovation, est une condition qui doit être réaffirmée et normalisée. Il n'est pas satisfaisant que la défiscalisation et le crédit d'impôt soient à ce jour gérés d'une façon que personne n'est capable de décrypter, notamment les transporteurs aériens à qui l'on continue de mettre des bâtons dans les roues et d'imposer des conditions insupportables s'agissant du financement et du renouvellement de leur flotte aérienne, préalable pourtant indispensable au développement du tourisme.

Nous sommes confrontés au vrai problème de l'autorité de l'État. À côté du financement de l'envol d'une start-up , il faut prévoir le financement de l'accompagnement des projets.

Il est nécessaire de mettre un terme à l'anarchie inflationniste peu transparente qui prévaut en ce qui concerne les taxes de séjour. L'outre-mer n'est pas à Paris, et un abattement sur les plafonds s'impose à mes yeux.

Je pourrais aussi évoquer l'instauration d'un système compensatoire du coût du travail à la chambre louée, l'octroi de garanties aux compagnies aériennes, notamment pour attirer des touristes, évidemment dans les conditions de conformité avec les règles communautaires, l'adaptation du statut des intermittents de l'hôtellerie.

En conclusion, nous avons surtout besoin de simplifier, de rendre accessibles les dispositifs existants et de mieux communiquer sur ceux-ci. L'étude de MKG qui avait été commandée à l'occasion du colloque sur l'innovation organisé par la DGE prouve que les professionnels ne se retrouvent pas dans la masse des dispositifs d'aide existants : ils sont méconnus, les démarches sont chronophages et le manque de transparence est patent. Nous souhaitons, conformément aux préconisations du rapport Baudon, la mise en place d'un portail unique pour toutes ces questions. Telles sont les orientations que la Fedom portera.

Madly SCHENIN-KING, Directrice de Veille tourisme Antilles

J'ai changé de casquette. Je dois à mon tour tenir les délais.

Outre mon rôle de modératrice aujourd'hui, je suis entrepreneure. À ce titre, j'ai créé un magazine, VTA magazine, VTA pour « Veille tourisme Antilles » sur www.veilletourismeantilles.com . Nous sommes le fournisseur officiel d'information stratégique à propos du tourisme aux Antilles-Guyane.

Je vais vous expliquer pourquoi il est important de se doter d'un outil d'information à destination des professionnels.

La Caraïbe, c'est 30 millions de touristes chaque année, dont plus de 2 millions aux Antilles françaises - Martinique, Guadeloupe, Saint-Barthélemy, etc. Ce secteur a été défini comme priorité économique et génère des devises et des emplois. Pourtant, en raison de trois paradoxes, son développement touristique est entravé.

Premier constat, les professionnels du tourisme évoluent sans visibilité. Ils naviguent dans le brouillard. Imaginez l'industrie automobile qui évoluerait sans connaître les tendances. C'est encore le cas aujourd'hui aux Antilles.

Deuxième constat, ce secteur d'activité est très fragmenté, cloisonné. Le tourisme présente l'avantage d'être transversal et de nourrir nombre de secteurs d'activités. Pourtant, en tout cas sur le bassin caribéen, les hôteliers parlent aux hôteliers, les restaurateurs parlent aux restaurateurs, les agences de voyage parlent aux agences de voyage.

Le troisième constat est l'absence de données statistiques, comme cela est indiqué dans de nombreux rapports parlementaires.

Face à cette situation, il fallait trouver une solution. Mais je voudrais d'abord vous dire comment j'ai pu dresser ces constats.

En 2010, j'étais étudiante au CELSA, l'École des hautes études en sciences de l'information et de la communication, rattachée à l'université Paris-Sorbonne, et non dans le secteur touristique. Mais j'ai décidé de choisir ce sujet en master et, pour ce faire, j'ai commencé à chercher de l'information. J'ai réalisé l'interview de plus d'une cinquantaine de professionnels du tourisme, publics, privés, associatifs. Ils me répondaient chaque fois qu'ils n'avaient aucune information, aucune donnée sur la situation exacte.

Ma quête a été quelque peu difficile. Pour moi, une entreprise sans informations n'est pas aujourd'hui en mesure de se développer. On dit souvent que l'information, c'est le pouvoir ; dans le business , c'est encore plus vrai. Il fallait trouver une solution.

Cette solution, c'est VTA magazine, qui repose sur trois piliers.

Le premier pilier, du côté éditorial, est de proposer aux professionnels un contenu fiable. Nous effectuons des analyses, dégageons des tendances, utilisons des brèves pour couvrir l'actualité économique du secteur touristique.

Le deuxième pilier est de mettre à disposition, d'agréger les données qui sont disponibles sur l'Institut d'émission des départements d'outre-mer, l'IEDOM, l'INSEE, etc. sur une seule plateforme. Plutôt que d'avoir à chercher à la fois sur le site des comités du tourisme, sur celui de l'IEDOM et différents autres sites, tout figure à un seul endroit.

Le troisième pilier est d'avoir une communauté. Je vous l'ai dit, le secteur est fragmenté. Là, nous essayons de mettre en relation les professionnels du tourisme entre eux, de créer des passerelles et de croiser les regards.

Pour voir la forme que cela prend, vous pouvez vous rendre sur le site web veilletourismeantilles.com . C'est un exemple de « une » que nous avons réalisée, avec du contenu éditorial. Voici les personnes qui, depuis la relance du site à la mi-juillet 2016, nous ont accordé des interviews. Parmi ces acteurs, certains ont du poids tels Airbnb ou Norwegian Airlines. Le fait qu'ils fassent confiance à la qualité de notre travail est pour nous un gage de légitimité. Nous avons aussi interviewé des acteurs locaux. Notre valeur ajoutée, c'est d'avoir à la fois cet ancrage territorial fort dans les Antilles, contrairement à d'autres revues, et de rester ouverts sur le reste du monde. Nous parvenons à capter les tendances.

Sur le même portail, vous avez accès aux données du tourisme. Pour rendre les tableurs Excel plus attrayants, nous essayons de leur appliquer un format beaucoup plus agréable, plus visuel.

Nous nous adressons à la communauté de professionnels et de passionnés grâce à notre newsletter . Nous animons des réseaux sociaux en ligne, suivis par plus de 15 000 personnes, et organisons des événements dont le dernier a eu lieu en Martinique sur le thème du tourisme et de la gastronomie.

J'imagine que vous vous demandez comment nous gagnons de l'argent avec cette activité.

Nous avons trois sources de revenus.

La première provient des abonnements : je vous invite d'ailleurs à vous abonner puisque, en tant que professionnel, ça vous revient à 39 euros par mois, une somme modique. La deuxième est issue de la publicité. La troisième source de revenus est liée à l'événementiel, avec des sponsorings et des partenariats.

Veille tourisme Antilles est le magazine qui couvre l'actualité économique du tourisme aux Antilles-Guyane. Si vous voulez en savoir plus, n'hésitez pas à me contacter.

SECONDE SÉQUENCE - LA TÉNACITÉ, UNE QUALITÉ INDISPENSABLE POUR GOMMER LES CONTRAINTES HÉRISSANT LA ROUTE DE L'INNOVATION
Stéphane FOUASSIN, Président de Île de La Réunion Tourisme

Tout d'abord, avant de parler de notre expérience, nous allons vous passer un petit teasing très court - je rassure notre maître du temps - sur l'île de La Réunion.

Nous partons de l'île intense et nous capitalisons, comme vous l'avez dit tout à l'heure, sur le tourisme expérientiel, car le voyageur qui vient à La Réunion retient et partage son expérience. Tel est exactement l'objet de cette web-série.

L'île de La Réunion décline l'intensité de l'expérience en 4 thématiques : culture, gastronomie, bien-être santé, nature avec en filigrane le modèle du « vivre ensemble ».

L'île de La Réunion est intensément nature, comme vous avez pu le voir. La mise en scène de cette offre nature est l'une des priorités de l'île de La Réunion Tourisme.

Pour ce faire, nous nous appuyons sur les nouvelles technologies qui permettent au voyageur de s'immerger dans les sites exceptionnels et sites contraints. Vous en avez un exemple avec ce teasing . Nous avons rencontré des difficultés pour obtenir les autorisations légales de tournage et fait face à certaines critiques de 2 séries sur les 12 que nous avons diffusées.

La Réunion, une destination Geek : Les outils développés par l'IRT

Je commencerai par présenter les différentes actions et nouvelles technologies que nous avons mises en place à l'île de La Réunion. Elles sont multiples, à commencer par la web-série citée, le Google Trekker Street View en 2016, grâce auquel nous avons pu, au moyen de 12 appareils photos qui prennent simultanément des clichés pour faire des vues à 360 degrés dans un sac pesant dix-huit kilos et porté à dos d'homme, présenter cinquante itinéraires possibles, soit 255 kilomètres de sentiers, ou 425 heures de marches. Ce sont les ingénieurs de Google qui ont traité les photos et rassemblé les milliers d'images pour créer des panoramas à 360° (site web reunion.fr, rubrique randonnée).

Nous avons aussi créé une application disponible sur iPhone, iPad, ou smartphone Android qui permet, grâce à un téléchargement gratuit sur le site web reunion.fr, d'obtenir des vidéos à 360 degrés avec une sensation d'immersion dans le paysage.

Nous avons également créé Run Island-The Game , jeu de plateforme à la manière de Super Mario Bros et permettant de jouer avec des personnages emblématiques de La Réunion qui partent à la découverte de l'île à la fois sur terre, sous l'eau ou dans les airs.

Nous avons de plus mis en place des stations hydrométriques en montagne à la suite des accidents qui se sont produits lors de descentes de rivières par des canyonneurs. Ces stations permettent de donner aux touristes des indications en temps réel sur le niveau et le débit de l'eau de l'eau sur le site http://vigicrues-reunion.re et de faciliter la décision de s'engager ou non dans le canyon.

Nous avons installé des webcams panoramiques et des stations météo, qui montrent en direct sur le web une courte vidéo panoramique à 180° sur, par exemple, un site de décollage de parapente ou, sur une plage fréquentée par les baigneurs, kayakistes et kite-surfeurs . Les pratiquants visualisent ainsi les kayakistes et les kite-surfeurs .

Enfin, nous avons mis en place des écocompteurs pour analyser les flux sur les sentiers. Les nouvelles technologies sont une fois de plus intéressantes.

Néanmoins, le premier problème que nous rencontrons - c'est l'objet de cet atelier - est le mille-feuille foncier et administratif pour par exemple obtenir toutes les autorisations concernant un tournage ou encore l'installation d'infrastructures.

L'île de La Réunion compte une majorité d'activités de pleine nature, sur des terrains appartenant à des propriétaires fonciers différents, dont le département - Madame Nassimah Dindar, ici présente, le sait mieux que quiconque - dont la gestion du foncier est confiée à l'Office national des forêts. Sur un territoire largement classé en parc national, il existe une multitude d'acteurs : services déconcentrés de l'État, tels que la direction départementale de l'équipement, la direction de l'eau et de l'assainissement, la Direction générale de la cohésion sociale, la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, auxquels viennent se surajouter la région, les EPCI, les communes et les privés qui ont leur mot à dire sur ces différents territoires.

Du fait de la multiplicité des différents contacts et structures, il nous faut beaucoup de temps et d'énergie pour que nos demandes soient satisfaites. Je citerai un exemple : l'installation d'une simple balise météo pour un site de parapente peut prendre près de six mois, le temps de défaire le mille-feuille, feuille par feuille.

Le deuxième problème est la maîtrise foncière. Comment l'opérateur peut-il installer des infrastructures publiques sur du foncier qui ne lui appartient pas ?

Par ailleurs, dans nos îles, l'accès aux dernières technologies est difficile, car nous ne bénéficions pas du démarchage de fournisseurs, sur un marché qui est trop éloigné et trop restreint, et les délais de commande de matériels pour de l'acquisition, la livraison ou de la maintenance sont très longs. En outre, la transmission des données est délicate en raison de l'inégalité du réseau sur les différents territoires ultramarins.

Je citerai également le coût d'entretien des matériaux, dans des espaces où l'air marin est très corrosif et où sévissent régulièrement des cyclones accompagnés de pluies torrentielles et de vents violents. Nous devons enfin tenir compte, lors de nos démarches, des différentes sensibilités environnementales des internautes, très sensibles à ces problématiques.

Les clefs du succès sont, d'une part, d'organiser une gouvernance pour piloter la concertation et régler progressivement ces problèmes (par exemple pour obtenir les différentes autorisations) et, d'autre part, de décloisonner l'information. Il faut aussi mutualiser des moyens et les usages, anticiper les délais d'approche et d'approvisionnement, étudier scrupuleusement les modalités de maintenance avec l'appui d'experts, adapter le cadre réglementaire national aux spécificités de nos territoires.

Acquérir et préserver un foncier touristique à vocation de loisirs est important pour nous, afin de développer le parapente ou d'autres sports. Enfin, l'accompagnement à la carte des acteurs de terrains pour structurer l'offre est essentiel.

Je voudrais enfin compléter mon intervention en évoquant une autre nouveauté accordée par les autorités : après 3 ans d'échanges, La Réunion a obtenu le statut de Destination touristique autorisant l'exemption de visa pour faciliter la venue de touristes provenant de la Chine ou de l'Inde, pour des séjours à La Réunion qui n'excèdent pas quinze jours. Ces autorisations légales sont importantes, car elles nous permettent d'attirer plus de touristes sur nos territoires.

Depuis cette exemption de visas, nous avons pu, d'une part, développer la concertation avec la police de l'air et aux frontières et autres services de l'État concernés pour échanger les chiffres, analyser les refus, rassurer sur les risques (immigration,...) et, d'autre part, améliorer la diffusion de l'information auprès des clientèles chinoises et indiennes en travaillant en étroite collaboration avec les ambassades et consulats.

Je vous remercie pour votre attention.

Karine MOUSSEAU, Présidente du Comité martiniquais du tourisme

En Martinique, nous sommes totalement conscients de la nécessité d'innover pour être compétitifs. Comme l'a dit tout à l'heure Monsieur Philibert, nous ne pouvons pas nous contenter de vendre du balnéaire, d'autant que l'industrie touristique vit aujourd'hui une révolution technologique.

Les évolutions attendues sont très nombreuses, mais il se passe déjà beaucoup de choses actuellement. Cette révolution technologique bouleverse les modèles économiques, les process , etc. Si, comme le disait Schumpeter, l'innovation tombe du ciel, les acteurs publics ont tout leur rôle à jouer en la matière, en particulier au départ dans la recherche fondamentale, et pour être les catalyseurs de ces innovations.

Les principaux freins en Martinique sont les mêmes qu'ailleurs. Ce sujet ayant déjà été évoqué, je ne vais pas enfoncer des portes ouvertes.

Jusqu'à présent, ces processus ont souvent été mal maîtrisés en Martinique. La culture de gestion de l'innovation et des connaissances est encore peu développée, mais j'ai bon espoir que les choses changent, car le niveau de formation de notre jeunesse s'élève. Je reçois des jeunes, bien formés et motivés, qui ont des projets.

En tant qu'économiste, je me dois d'évoquer la petite taille de nos marchés et de nos entreprises, nous empêchant de réaliser, au moins au début, les économies d'échelle qui sont possibles pour d'autres destinations.

Le principal frein à l'innovation est l'obligation permanente de rechercher des ressources financières. Nombre de nos jeunes qui ont des projets connaissent des difficultés importantes, car les banques ne les suivent pas, ne leur font pas confiance. Il est vraiment attristant de voir ces jeunes motivés par une idée dont on sait qu'elle est bonne ne pouvoir la mener à son terme à cause des exigences des banques pour obtenir des hypothèques, des garants, etc.

Mon sujet était la ténacité pour innover. Oui, cette qualité est indispensable en Martinique, car il est très difficile d'avancer sans réseau.

Je le redis aussi à l'intention de nos politiques au plus haut niveau, la lourdeur et la complexité des procédures administratives sont vraiment dissuasives, car on n'y comprend rien et il manque toujours des papiers. J'espère qu'un jour on s'attaquera vraiment à ce mille-feuille.

Pour ma part, je ne présente pas de diaporama ; j'ai préféré être accompagnée de deux femmes, deux exemples de ténacité, qui vont rapidement vous expliquer en quoi elles ont été tenaces.

Madly SCHENIN-KING, modératrice . - Vous disposez chacune d'une minute !

Nadège DURAND-PELLEGATTA, directrice générale de l'hôtel French Coco . - On peut dire beaucoup de choses en une minute...

En Martinique, nous avons ouvert le 1 er juillet l'hôtel French Coco, premier établissement des Antilles françaises labellisé Small Luxury Hotel of the World . Près de huit ans séparent le moment où l'idée a germé et l'ouverture de l'hôtel. Nous sommes tenaces, certes, mais les clefs de notre succès tiennent, d'une part, à la rénovation d'un hôtel traditionnel par un professionnel de l'hôtellerie, précédemment ingénieur, qui a su évoluer dans ce secteur durant vingt ans. Elles tiennent, d'autre part, à la mise en pratique de mes réflexions, qui sont différentes puisque je viens d'ailleurs. Ce mix a fonctionné, comme vous pourrez le constater sur Facebook et internet : vous vous ferez votre propre opinion. À bientôt !

Karine MOUSSEAU . - Comme je travaille beaucoup avec la Guyane, je suis aussi accompagnée d'une Guyanaise. J'en profite pour vous faire passer un autre message : nous devons vraiment travailler ensemble, main dans la main, sans être en compétition, bien au contraire.

Nathalie PRUDENT, directrice de Guyane Évasion . - Je ne dépasserai pas ma minute de parole...

En ce qui me concerne, je viens de créer ma nouvelle agence réceptive de tourisme local en Guyane française. Je le confirme, de nombreuses barrières se dressent devant les jeunes qui veulent créer leur propre structure. On nous parle beaucoup d'accompagnement, mais on ne sait jamais vraiment où s'orienter. En dépit d'une vraie motivation, nous avons besoin d'être pris en charge, encadrés. Le concept du magazine, qui consiste à rassembler toutes les informations sur un même site, est formidable à cet égard. Je tiens à féliciter Madame Schenin-King pour son action. Quant à moi, si j'ai réussi à monter cette agence, c'est grâce à ma ténacité, car je ne lâche rien, j'aime beaucoup mon pays, et je suis à l'écoute de tout pour développer le tourisme culturel, participatif, en impliquant les habitants dans cette démarche. Je m'y investis à 100 %.

En réalité, j'ai rencontré Madame Mousseau hier, et après un échange très constructif, nous avons décidé de proposer des séjours sous forme de package en Martinique, pour le balnéaire, et en Guyane, pour la nature et son patrimoine culturel. J'espère vraiment que, avec les Antilles et d'autres destinations, et animés de cet esprit d'ouverture, nous pourrons enfin développer le tourisme dans les départements d'outre-mer.

Karine MOUSSEAU . - Vous avez devant vous deux exemples de ténacité, mais nous avons encore beaucoup de travail !

Jean-Louis ANTOINE, Gérant de l'agence de voyage Réceptive Jal Voyages et Président du Groupement croisière Guyane

La ténacité, pour moi, c'est quarante ans de Guyane !

La Guyane, c'est la France qui réussit en Amérique du Sud. Cela fonctionne à travers le spatial et l'écotourisme. Vous me direz : « C'est facile, la Guyane présente tellement d'atouts . »

Pour le spatial, étant sur l'Équateur, nous sommes des précurseurs en écologie. Nous permettons de réaliser 30 % d'économies d'énergie pour lancer les fusées, ce qui nous rend très compétitifs. De plus, nous bénéficions d'une météo absolument exceptionnelle, avec le même ensoleillement qu'à Tahiti, à la Martinique, sans aucun tremblement de terre ni cyclone. Quant à la température, il valait mieux être cet été en Guyane qu'en métropole, qui a connu un épisode caniculaire...

La Guyane recèle des milieux naturels extraordinaires. La diversité des espèces d'arbres est plus grande dans un hectare de forêt en Guyane que dans toutes les forêts d'Europe.

La forte originalité de la Guyane française par rapport aux pays voisins comme le Suriname ou le Brésil tient à la présence, de l'Orénoque à l'Amazone, c'est-à-dire du Venezuela jusqu'au Brésil, de massifs montagneux proches de l'océan. La grande forêt primaire naturelle, qui n'a pas été submergée au quaternaire, n'est visible facilement qu'en Guyane, à quelques minutes de Cayenne. Vous pouvez marcher sur les traces des naturalistes français, tels Fusée-Aublet, et découvrir la plus belle végétation amazonienne.

Nous avons réalisé un lodge flottant et des lodges navigants à l'Est de Cayenne, sur une zone inondée qui s'étale sur 100 000 hectares. Vous connaissez déjà des zones inondées ailleurs dans le monde, qu'il s'agisse des Everglades, en Floride, ou du Pantanal, au Brésil. En Guyane, c'est la même chose, mais en plus intime, en plus sympa, avec des collines autour et des paysages luxuriants.

La diversité de la faune, à côté de la flore, est exceptionnelle en Guyane. On y trouve énormément de reptiles, dont les fameux caïmans noirs, et des oiseaux extraordinaires comme l'hoazin, le seul oiseau ruminant au monde, ou le petit grébifoulque, seul oiseau capable, grâce à ses poches sous ses ailes, d'emmener ses petits avec lui. La Guyane réserve nombre de très belles surprises aux ornithologistes et aux enfants.

La faune est-elle exhaustive en Guyane ? Il n'y a pas de moustiques, mais personne ne s'en plaindra... Les 100 000 hectares de marais en milieu tropical en sont exempts, ce qui a permis de développer un lodge à Carbet. Le principe est celui d'une structure complètement ouverte, qui nous permet de développer notre concept, à savoir l'immersion totale dans la nature. Vous choisissez votre hébergement, éventuellement une suite pour profiter du confort maximal, vous choisissez votre couchage, lit ou hamac, et vous vous immergez totalement dans la nature. C'est un milieu miraculeux !

Pourquoi n'y a-t-il pas de moustiques à cet endroit ? Parce que les eaux sont riches en acides humiques, couleur cola. Même quand vous arrivez de métropole, vous vous mettez dans l'eau et vous avez l'air bronzé ! Vous pouvez faire de belles photos...

Nous avons imaginé une structure avec des toits arrondis. C'est en montant le lodge près du débarcadère de la route de Kaw que nous avons compris notre réussite : il se fond totalement dans les collines. Tout a été construit en bois de Guyane et avec des matériaux locaux d'une qualité exceptionnelle du point de vue tant de la résistance que de l'esthétique. Nous avons confié ce travail aux Compagnons du Tour de France charpentiers, car nous pouvons faire appel à des professionnels hautement qualifiés en Guyane.

Lorsqu'on pratique l'écotourisme, il faut bénéficier des meilleures conditions. Nous proposons tout le confort nécessaire, avec une eau traitée et chaude grâce à des panneaux solaires qui fonctionnent de façon remarquable en raison d'un fort ensoleillement.

Notre vraie force, en Guyane, ce sont les équipes accompagnatrices de naturalistes, forts sympathiques et dont les connaissances sont très étendues. Ils sont vraiment capables de vous faire partager des émotions. Mais ce n'est pas leur seul atout : quand un guide amérindien peut vous imprégner d'un milieu à travers sa culture en vous expliquant, en français, comment telle espèce de poisson est cuisinée ou quelle est la visée thérapeutique de l'utilisation de telle espèce d'arbre, vous pouvez participer, vous enrichir et donner à votre tour des explications à votre interlocuteur. Ce n'est pas du tourisme, c'est un véritable échange.

Les musts , c'est d'abord la découverte, avec des moments magiques et des outils pour y parvenir. Nous avons en Guyane un rhum excellent. Certains d'entre vous font la moue ; je vous invite à venir le goûter. Je vous l'assure, un petit punch au coucher du soleil, quand la rivière devient mauve, c'est un moment exceptionnel. Même si nous avions un mauvais rhum, cela n'y changerait rien !

L'avantage de passer une nuit en forêt en Guyane, c'est l'absence de moustiques et la présence de phénomènes étranges : vous dormez tranquillement et vous entendez tout d'un coup un bruit étonnant, qui est émis par les singes hurleurs. Vous vous en souviendrez longtemps.

Je dois accélérer, car je vais maintenant passer aux choses sérieuses, les critiques envers l'État.

D'un point de vue médiatique, nous avons bien réussi. Nous passons sur TF1, sur le Figaro magazine. Le problème est que nous avons quelques freins à lever pour continuer à avancer.

La réserve naturelle nationale est un frein au développement durable.

Il est très important de mettre en adéquation les outils de protection des espaces naturels pour permettre un véritable développement durable à travers l'écotourisme qui puisse être profitable aux populations locales.

Par exemple, la Réserve naturelle nationale de Kaw met l'homme et ses activités en dérogation. Elle ne permet pas de développer un écotourisme intégrant le village et sa population qui sont totalement abandonnés. Il faut faire évoluer ce statut, par exemple en parc national, pour impulser une politique de développement durable.

Le frein majeur, et je m'adresse au sénateur Antoine Karam qui se bat fortement sur ce dossier, résulte de la stigmatisation de la Guyane à cause de l'obligation de vaccination contre la fièvre jaune qui n'existe dans aucun autre pays d'Amérique du Sud. C'est un scandale ! Résultat : nous perdons 30 % de nos clients. Cette situation pénalise aussi le Centre spatial, lorsqu'il lance des invitations pour le lancement d'une fusée : 30 % des personnes ne font pas le déplacement.

Il s'agit d'un racket, dont l'auteur est soit l'État, soit Sanofi. Le coût du vaccin est de 80 euros, non remboursé par la sécurité sociale. Ce frein systématique à la découverte de la Guyane est inacceptable. Je veux que vous soyez avec nous aujourd'hui pour que, après-demain, le remboursement de ces frais soit effectif et que, d'ici à la fin de l'année, l'obligation de vaccination contre la fièvre jaune soit supprimée. C'est un vrai scandale, d'autant que cela ne concerne que les passagers prenant l'avion avec des bagages en soute et non les voyageurs munis de bagages à main. Si vous passez la frontière par bateau ou en voiture, rien ne sera exigé non plus.

Au niveau du Conseil économique et social, nous avons obtenu des avancées concernant la fièvre jaune, notamment la disparition de l'obligation de double vaccination.

Nous avons également progressé sur la question des visas pour les Brésiliens. Cela est important compte tenu du potentiel de visiteurs, de 2 millions d'habitants à Manaus et de 2 millions à Belém, à une heure et demie de vol. Nous devons proposer des produits combinés et continuer dans cette voie avec les visas touristiques pour nos voisins surinamais. Si on leur impose un visa Schengen à 180 euros le week-end, ils ne viennent pas !

En conclusion, la Guyane, ça marche ! Mais si vous nous aidez à lever deux ou trois freins stupides qui n'ont aucune conséquence en termes de santé publique, la Guyane sera encore plus gagnante.

Gérard MAYER, Président de la Société d'exploitation de l'aéroport de Mayotte

Je vais parler de Mayotte. Cela permettra, je l'espère, de répondre en partie à certaines des questions qui viennent d'être posées.

J'évoquerai les aéroports. Très souvent, l'aéroport est considéré par les spécialistes du tourisme comme un point logistique obligé, un lieu où l'on rencontre souvent des problèmes, à l'arrivée comme au départ. Si nous voulons développer le tourisme dans les territoires d'outre-mer, il nous faut effectuer ensemble un travail de fond pour faire des aéroports de véritables outils de fluidité, où le touriste, à l'aller comme au retour, se sent bien. L'aéroport ne doit pas être un simple lieu de passage et de formalités obligatoires, avec tous les ennuis afférents, mais le véritable début de votre voyage.

C'est ce que nous avons essayé de faire à Mayotte. Mayotte, c'est notre petit département au milieu de l'océan Indien, quelques milliers de kilomètres au nord de La Réunion, dans le canal du Mozambique. Mayotte possède 195 kilomètres de barrière de corail, très peu connus, qui comptent parmi les plus beaux spots de plongée au monde. Son petit aéroport accueille 350 000 passagers par an. L'île se trouve à 8 000 kilomètres d'ici - grâce à nos amis d'Air Austral, on ne parcourt plus que 8 000 kilomètres pour s'y rendre : depuis peu de temps, nous disposons de deux liaisons directes par semaine. C'est fabuleux !

Lorsque vous vous rendiez à Mayotte, il y a moins de deux ans, vous atterrissiez dans un aéroport des années 1950 : pour les voyageurs, c'était vraiment l'enfer. Nous avons tâché, dans le cadre de notre délégation de service public et en accord avec l'État, de faire de l'aéroport de Mayotte un aéroport moderne et, malgré les quelques attaques subies au moment d'initier le projet - puisque nous utilisions du bois, nous avons été accusés de construire des bangas -, authentiquement écologique, avec une consommation minimale d'énergie. À l'exception des salles d'embarquement, rien n'est climatisé, en dépit des très fortes chaleurs que peut connaître Mayotte. Notre ambition a été de construire un lieu propice au développement d'un véritable tourisme durable.

L'aéroport est un lieu où chacun doit se sentir bien, à l'arrivée comme au départ. Mais le rôle d'un aéroport, c'est également la gestion d'un espace. Mayotte a un gros défaut : on veut y développer le tourisme - c'est bien -, mais l'île, aujourd'hui, n'a que 200 chambres à offrir aux touristes.

Malgré tout, les tour-opérateurs sont persuadés qu'il sera possible de programmer beaucoup de vols charters vers Mayotte. L'objectif est donc de faire de la zone aéroportuaire une véritable zone de vie, via la création d'un premier hôtel. Nous avons été critiqués, au motif que nous construirions un hôtel 3 ou 4 étoiles, et non 5 ou 6 étoiles, comme le voulaient certains ! Mais nous avançons pas à pas, tranquillement, en construisant un hôtel qui correspond aux besoins de la population ; si, à l'avenir, nous pouvons faire mieux, il reste de la place, et nous ferons mieux !

À Mayotte, il existait très peu d'endroits où organiser des séminaires, des colloques. Nous avons créé, à proximité de l'aéroport, un centre d'affaires, qui ouvrira à la fin de l'année.

Je veux insister, à l'intention des parlementaires et des représentants de l'État, sur le point suivant : l'aéroport doit être considéré non comme une simple source de revenus, comme un lieu de passage, mais comme un véritable outil de développement touristique. Si, avec les opérateurs locaux, les compagnies aériennes, les offices de tourisme, nous travaillons bien, nous pouvons faire de l'aéroport un lieu où les voyageurs se sentent bien.

Ce que je vais dire risque de ne pas plaire à mon ami d'Air Austral, mais ce n'est pas grave : nous nous connaissons bien. Notre ambition de développer le tourisme à Mayotte est contrariée par deux petits soucis.

Le premier est qu'évidemment - c'est parfaitement logique - l'aviation civile défend le pavillon français. Il me paraît néanmoins possible de le défendre tout en recherchant un équilibre : aujourd'hui, aucune compagnie étrangère, ou presque, ne dessert Mayotte - l'exception est Air Madagascar, mais les Malgaches viennent rarement pour des motifs touristiques -, parce que les compagnies étrangères ne disposent pas des droits de trafic. Or Mayotte ne se développera pas si les Sud-africains ou les Chinois n'y viennent pas. Un équilibre doit donc être trouvé, afin d'attirer un peu de monde à Mayotte.

Le deuxième problème que nous rencontrons à Mayotte - j'entendais tout à l'heure nos amis de la Guyane parler de la fièvre jaune -, c'est celui des visas. Je ne vais pas parler aujourd'hui du problème de l'immigration clandestine dans l'île - nous en aurions pour toute la journée, et cela créerait peut-être quelques émeutes. Aujourd'hui, il est impossible de venir à Mayotte avec un visa touristique, lequel suffit pourtant pour se rendre à La Réunion. Cela bloque le développement du tourisme à Mayotte. Je ne dis pas que la solution à ce problème est simple, mais il s'agit d'un frein véritable.

Dernier frein : l'objectif est que l'aéroport de Mayotte, dans un département dont nul n'ignore les difficultés, soit autosuffisant. Les compagnies aériennes y paient des redevances élevées mais, avec 350 000 passagers par an, l'équation est très compliquée à résoudre. En outre, l'Europe nous impose, pour 2018, des obligations considérables, que nous ne sommes pas capables, pour le moment, de satisfaire.

L'État français doit comprendre que nous aurons besoin d'un accompagnement, et que l'effort financier ne pourra être supporté par les seuls acteurs privés, compagnies aériennes et passagers - ces derniers paient d'ailleurs déjà très cher leurs billets d'avion. Il est nécessaire que des investissements soient réalisés. S'ils ne le sont pas - ce serait vraiment dommage -, Mayotte, à la fin de l'année 2017, ne pourra plus accueillir les long-courriers, ni même les moyen-courriers.

Voilà pour les difficultés rencontrées par Mayotte ; j'ajoute qu'on en fait un peu trop, me semble-t-il, sur la sécurité. Il s'agit d'une île fabuleuse ; je l'ai découverte en 2011, lorsque je m'y suis rendu pour créer ce nouvel aéroport. Nous avons besoin d'aide pour continuer à recevoir du monde à Mayotte.

Dominique DUFOUR, Secrétaire général d'Air Austral

Avant de parler d'innovation, je vais vous parler de notre compagnie, Air Austral, de son histoire et de la raison pour laquelle je suis devant vous aujourd'hui.

Air Austral est la compagnie française de l'océan Indien ; elle est basée à La Réunion, où elle opère sur deux plateformes aéroportuaires auxquelles il faut ajouter celle de Dzaoudzi à Mayotte. Elle emploie environ 1 000 personnes, ce qui en fait le troisième employeur de l'île. Elle travaille sur douze destinations, notamment Paris-Charles de Gaulle, qu'elle dessert presque deux fois par jour. C'est le premier transporteur de l'île, avec 50 % de parts de marché. Cette compagnie transporte chaque année un peu plus d'un million de passagers, son chiffre d'affaires est d'environ 350 millions d'euros. Elle est bénéficiaire depuis deux ans.

Elle est née en 1990 du développement d'une petite compagnie locale, qui s'appelait Réunion Air Services. Elle s'est imposée sur le territoire de l'océan Indien en s'inscrivant dans la continuité des vols d'Air France, qui desservaient alors La Réunion uniquement. Elle a d'abord permis la desserte d'îles situées à proximité de La Réunion avant de s'engager, en 2003, dans l'aventure du long-courrier. Cela s'est très bien passé, jusqu'à la survenance d'un choc de conjoncture en 2011. La société y a perdu beaucoup d'argent, frôlant le dépôt de bilan, ce qui a nécessité une reprise en main et un soutien appuyé des collectivités locales, région et département de La Réunion, qui, en tant qu'actionnaires, ont réinvesti dans l'outil. Depuis 2013, nous sommes engagés dans un grand chantier de développement et de modernisation qui porte ses fruits.

Pour résister, dans le secteur aéronautique, lequel est extrêmement concurrentiel, il faut constamment innover : si l'on n'innove pas, on recule !

Air Austral a la prétention d'innover, en premier lieu, sur le plan de la méthode. Se développer, innover, exigent d'adapter ses paradigmes et ses raisonnements à l'évolution du marché. Or, seule, une petite compagnie comme la nôtre a peu de chances de parvenir à des résultats. L'ambition et l'audace exigent donc de construire des partenariats, sur le plan du réseau aérien notamment. Nous sommes bien implantés dans l'océan Indien ; nous souhaitons désormais desservir le grand océan Indien, vers l'Inde, la Thaïlande, la Chine. Nous n'y arriverons pas seuls. La concurrence, c'est très bien ; mais, même avec des concurrents, il existe aussi des sujets qui se prêtent aux partenariats.

Nous avons ainsi signé des accords de partage de codes avec Air France : de cette manière, nous desservons chaque jour 40 destinations, en Europe et dans le reste du monde, via Paris-Charles de Gaulle. Cela nous permet aujourd'hui d'espérer attirer des touristes venus de l'Europe entière notamment.

Nous avons également souhaité, en partenariat avec des investisseurs mahorais, nous développer dans le canal du Mozambique, en créant une petite compagnie, qui est notre bébé, mise sur pied il y a trois ans : Ewa Air dessert sept destinations. Elle a été créée afin de faire de l'aéroport de Mayotte un véritable hub dans cette région jusqu'alors peu couverte. Ewa Air est désormais bénéficiaire ; elle emploie une vingtaine de personnes, et dessert un réseau très apprécié au départ de Mayotte.

Construire des partenariats, c'est enfin regarder ce qui se passe autour de nous. Dans le cadre de la Commission de l'océan Indien (COI), nous avons créé l'Alliance Vanille avec nos partenaires d'Inter Îles Air, compagnie comorienne, d'Air Seychelles, d'Air Mauritius et d'Air Madagascar. Le principe directeur était le suivant : au-delà des zones dans lesquelles nous sommes concurrents, il est possible de travailler ensemble. L'Alliance Vanille constitue une véritable force dans l'océan Indien : nous couvrons 50 destinations, notre flotte cumulée comprend plus de 40 avions, nous employons 6 000 professionnels de l'aérien.

Notre volonté est de travailler sur des sujets qui n'étaient jusqu'alors pas suffisamment défrichés, la connectivité notamment - l'objectif est qu'un vol par jour au moins, direct ou non, relie chaque île de l'océan Indien à chaque autre île. Donner aux Comoriens, aux Malgaches, aux Seychellois, la possibilité de se rendre chaque jour sur n'importe quelle autre île, voilà déjà une belle avancée ! D'autres chantiers sont en cours. L'alliance a été créée il y a tout juste un an : nous y travaillons avec nos partenaires.

Voilà pour la méthode.

Mais, pour réaliser notre ambition, qui est de renforcer la place du pavillon français dans l'océan Indien, nous agissons aussi sur des leviers d'innovation plus pragmatiques. Le premier levier est la modernisation de la flotte d'Air Austral, via l'achat d'avions neufs et performants. Nous avons renouvelé une grande partie de notre flotte long-courrier, dont l'âge est aujourd'hui de deux ans et demi, dans une optique de contribution systématique à la baisse des émissions de CO 2 - le volume de nos émissions a ainsi baissé de 20 % en trois ans. Grâce à la dextérité de nos équipes techniques, nous avons pu acquérir le premier Boeing 787 opérationnel en France, que nous avons fièrement positionné sur la ligne directe Mayotte-Paris, ouverte le 10 juin dernier.

L'innovation, c'est aussi le travail sur le programme, avec une offre en constante augmentation : le nombre de sièges offerts pour rejoindre Mayotte et La Réunion a augmenté de 9 % en un an, ce qui, en volume, représente un nombre de sièges extrêmement important - point toujours positif pour le développement du tourisme.

Est en jeu également l'amélioration de la desserte : je me contenterai de mentionner l'ouverture du premier vol direct entre Mayotte et Paris - il s'agit, à raison de deux vols par semaine, d'un véritable succès, sans parler des connexions offertes par Ewa Air sur le canal du Mozambique - et l'ouverture maîtrisée sur l'Asie, avec la desserte de Bangkok, de la Chine à la fin de l'année, et bientôt de Chennai, dans l'Inde du Sud, qui exigent un travail très important de promotion de la destination avec IRT, Île de La Réunion Tourisme, et l'équipe de Stéphane Fouassin. Nous développons également une activité complémentaire au départ du second aéroport de La Réunion, afin de mieux desservir Maurice et Rodrigues, ainsi que les escales régionales et l'Afrique australe, notamment Johannesburg.

Au chapitre de l'innovation doit être également mentionnée, au-delà du travail sur la méthode et sur les avions, l'innovation de produit : nos passagers attendent des produits toujours améliorés. Nous avons créé la gamme des « extras », c'est-à-dire les « plus » proposés à nos clients, toute classe confondue - « extra » repas, permettant à chacun, selon ses goûts, de manger hamburgers, cuisine créole ou cuisine asiatique ; « extra » siège, permettant aux passagers de la classe loisirs de bénéficier d'une meilleure assise et de sièges plus larges ; « extras » bagages, champagne, caviar, et même la possibilité de fêter son anniversaire à bord, toutes choses qui améliorent l'expérience de voyage de nos passagers.

L'innovation, c'est aussi le wifi à bord, la mise à disposition d'écrans tactiles, ou l'extra-couchette, une offre spéciale destinée aux familles, qui permet aux passagers de dormir allongés en classe loisirs.

Pour conclure, et créer le débat, je souhaite évoquer les manques qui restent à combler - nous sommes aussi réunis pour cela.

Loin de nous l'idée de donner des leçons, mais nous souhaitons que l'audace et l'ambition soient partagées par tous. Je vous livre donc quelques idées, jetées en vrac : d'abord, la suppression du visa pour les passagers indiens en transit. Aujourd'hui, les Indiens, grâce aux décisions prises par l'État, peuvent venir à La Réunion en exonération de visa ; en revanche, ils ne peuvent, faute de visa de transit, se rendre dans d'autres destinations de la zone en s'arrêtant à La Réunion. Les Indiens connaissent Maurice ou Johannesburg, mais pas La Réunion. Si nous voulons « vendre » La Réunion, nous devons leur permettre de venir en transit.

Autre idée - je jette un pavé dans la mare : le développement plus volontariste de l'aéroport Roland-Garros. Il existe deux façons de développer un aéroport : soit l'objectif est simplement que ce développement accompagne la progression du nombre de passagers, soit il est de créer ladite progression en améliorant l'infrastructure. Je suis plutôt partisan de la seconde stratégie.

Je serais également favorable à un soutien plus marqué des instances de promotion touristique nationales à la valorisation de nos destinations d'outre-mer. Nous nous donnons l'ambition d'attirer des touristes dans les territoires d'outre-mer, mais soyons réalistes : tout le monde ne connaît pas l'outre-mer ! Or nous disposons de supports nationaux de promotion extrêmement efficaces, dont la force de frappe est très lourde. Il faut nous en servir pour « vendre » davantage l'outre-mer !

Dernière piste : l'assouplissement de la réglementation européenne sur le soutien à l'ouverture de lignes nouvelles. L'Union européenne encadre l'aide publique à l'ouverture de lignes européennes, afin d'éviter les distorsions de concurrence ; mais l'ouverture d'une ligne nouvelle outre-mer n'est absolument pas comparable à l'ouverture, par exemple, d'un Paris-Dublin !

Source : Air Austral

Didier TAPPERO, Directeur général d'Aircalin (Air Calédonie International)

Bienvenue à bord pour un voyage dans le Pacifique Sud. Nous avons beaucoup parlé de l'océan Indien, des Caraïbes ; je voudrais maintenant vous parler d'une zone ultramarine bien éloignée de la métropole et des grands couloirs aériens. J'ai été un peu dépité en écoutant Madame Lacour : j'ai compris que nos jours étaient comptés et que, grâce aux pneumatiques, la Nouvelle-Calédonie serait bientôt à trois heures de Paris. Mais, en attendant, nous avons encore besoin d'avions !

Aircalin, comme toutes les compagnies aériennes ultramarines, est un catalyseur d'économie. Ces compagnies aériennes desservent des zones qui n'intéressent pas nécessairement les grandes compagnies : il s'agit de petits volumes, de petits trafics. Pour autant, les dessertes aériennes sont évidemment essentielles dans notre zone.

Quelques chiffres : la compagnie a été créée en 1983 ; son actionnaire principal est désormais la Nouvelle-Calédonie, à plus de 99 %, depuis qu'elle a connu, comme beaucoup de compagnies amies du Pacifique et, plus généralement, de l'outre-mer, un certain nombre d'exercices très déficitaires - ce secteur d'activité est en effet particulièrement compétitif. La flotte comprend deux avions long-courriers, des Airbus A-330, deux moyen-courriers et deux petits Twin-Otter dédiés à la desserte du territoire de Wallis-et-Futuna. La compagnie emploie près de 500 salariés ; il s'agit d'emplois à forte valeur ajoutée, pour lesquels beaucoup de compétences sont nécessaires.

Quelles sont ses missions ? Favoriser le déplacement des Calédoniens, bien sûr ; relier la Nouvelle-Calédonie avec la métropole et les pays ultramarins du Pacifique - Aircalin est la seule compagnie aérienne française assurant une liaison avec la Polynésie française et avec Wallis-et-Futuna - ; participer au développement touristique du territoire.

La poursuite de ce dernier objectif est évidemment nécessaire pour l'économie de la Nouvelle-Calédonie, mais également pour le développement d'une compagnie aérienne comme la nôtre. Le marché calédonien, en effet, est mature : la croissance de la population est faible et le marché intérieur ne suffit pas à assurer le développement de la compagnie.

Notre réseau s'étend sur une zone qui, je l'espère, vous fera rêver, avec la desserte du Pacifique Sud, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, un partenariat avec Air Tahiti Nui qui étend la présence de notre code jusqu'aux États-Unis, et un partenariat avec Air France - nous assurons la partie du voyage qui mène jusqu'au Japon ; les passagers peuvent ensuite poursuivre leur voyage sur des vols Air France, mais aussi sur des vols proposés par d'autres compagnies : la clientèle qui souhaite relier la métropole a le choix. Nous proposons, a minima , une relation par jour avec la France, via le partenariat entre Aircalin et Air France.

J'entendais tout à l'heure le responsable de l'aéroport de Mayotte évoquer le problème des droits de trafic. Ces derniers, en Nouvelle-Calédonie, sont ouverts : il existe des quotas, mais le ciel calédonien n'est pas fermé. Pour autant, les Japonais - il leur serait possible, pourtant, de venir neuf à dix fois par semaine - ne viennent pas ; quant aux Australiens, qui pourraient venir seize fois par semaine, ils ne viennent que quatre fois. Si les compagnies ne desservent pas la Nouvelle-Calédonie, c'est que les marchés sont extrêmement réduits, et les modèles économiques difficiles à construire.

Pourquoi le développement du tourisme est-il nécessaire ? La Nouvelle-Calédonie a fondé son économie sur le nickel - elle possède des réserves importantes, et deux usines supplémentaires ont été construites ces dernières années, ce qui augmente les capacités de production de ce métal. Or, nous traversons une crise du nickel sans précédent, qui risque d'être relativement longue.

Il est donc évidemment essentiel de développer une économie de substitution, telle que le tourisme. En 2015, le tourisme représente 5 000 emplois et engendre 200 millions d'euros de revenus. Les atouts de la Nouvelle-Calédonie, en la matière, sont nombreux : le multiculturalisme, point d'intérêt important, la biodiversité, propice à l'écotourisme, un lagon classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO, dont la barrière de corail, très bien préservée, fait 1 000 kilomètres de long. Il faut promouvoir ces atouts qui sont encore, nous semble-t-il, trop méconnus.

Quelle stratégie avons-nous adopté pour innover en matière de développement touristique ? Nous avons, avec l'ensemble des partenaires de l'industrie touristique et les institutions, mis en place des contrats de destination : au lieu que les uns, les hôteliers, rejettent la faute des mauvais chiffres du tourisme sur les autres, les transporteurs aériens, et vice-versa - nous étions tous d'accord, de toute façon, pour dire que c'était la faute de l'État ! -, nous avons travaillé ensemble pour tenter de « booster » ces chiffres, notamment sur les marchés de proximité que sont l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon. Cet effort s'est traduit par une augmentation de capacité en sièges et des innovations commerciales de la part de la compagnie, avec l'idée forte, cependant, que si les touristes viennent en Nouvelle-Calédonie c'est principalement pour la destination, et seulement en second lieu pour la compagnie aérienne elle-même.

Toute notre stratégie a été axée sur ce développement touristique, avec des résultats probants, en tous cas ces trois dernières années : les arrivées de touristes ont augmenté de 33 % en provenance d'Australie, de 35 % depuis la Nouvelle-Zélande et de 28 % depuis le Japon. Cela ne veut pas dire que c'est gagné, mais c'est encourageant ! Les revenus supplémentaires générés sur ces trois marchés ont été de 14,3 millions d'euros. Les résultats de la compagnie, après quelques années difficiles, sont redevenus positifs : depuis 2014, nous sommes à l'équilibre, et même légèrement bénéficiaires. Nous continuerons à tout mettre en oeuvre pour que cela puisse durer.

Toujours au chapitre de l'innovation, et dans le cadre de la nécessaire recherche de compétitivité, la compagnie s'apprête à renouveler sa flotte, avec l'achat d'avions modernes dont je vous épargne la description des caractéristiques

Mais le thème qui nous réunit aujourd'hui est celui des difficultés et des contraintes que nous devons surmonter lorsque nous cherchons à innover. De ce point de vue, je voudrais relever un paradoxe : il existe bien, avec la défiscalisation, un mécanisme d'aide aux compagnies aériennes d'outre-mer, récemment prolongé pour une période de dix ans. C'est très bien, c'est utile, c'est même indispensable.

Pour autant, alors que ce dispositif existe, il est assez difficile, concrètement, pour des compagnies aériennes comme la nôtre, dont le marché est de petite dimension mais qui doivent consentir des investissements extrêmement importants, d'obtenir ces aides. Celles-ci ne sont délivrées qu'à l'issue d'un véritable parcours du combattant : les compagnies doivent prendre des risques importants et s'engager financièrement auprès des constructeurs aéronautiques, en espérant que la réponse de l'État, qui n'interviendra que dans quelques années, sera positive.

Il serait important que ce problème soit résolu, afin que le travail des compagnies aériennes soit rendu un peu plus aisé.

Source : Aircalin

Marie-Laure BELZIC, Directrice du Comité territorial du tourisme de Saint-Barthélemy

Avant d'entrer dans le vif du sujet, celui de la stratégie numérique, permettez-moi tout d'abord de vous présenter Saint-Barthélemy : il s'agit d'une petite île de 21 kilomètres carrés, de 10 000 habitants, desservie par un aéroport de taille modeste accueillant des avions dont la capacité maximale est de 18 passagers, mais dont le trafic aérien, paradoxalement, nous place parmi les dix premiers aéroports de France. L'île est également desservie par un port reconnu et apprécié par les croisiéristes et les plaisanciers.

Saint-Barthélemy a fait du tourisme sa première activité économique et s'est d'emblée placée sur le créneau du haut de gamme dans tous les secteurs de l'activité touristique.

Notre volonté a toujours été de présenter à notre clientèle une offre d'hébergement diversifiée, allant de l'hôtel 5 étoiles aux structures familiales, de la villa de luxe aux cases locales.

Notre volonté a été aussi d'offrir une qualité d'accueil irréprochable, un service haut de gamme, avec un large éventail d'activités de loisirs, une gastronomie diversifiée et un calendrier événementiel choisi sur mesure, ce que vous pourrez apprécier grâce à la projection d'un film que nous avons produit.

Tout cela se résume à un seul et même objectif : l'activité touristique ne consiste pas seulement à faire venir le visiteur, elle consiste aussi et surtout à le faire revenir, en le fidélisant et en créant des liens.

Les professionnels et les pouvoirs publics ont très vite compris qu'il fallait faire du numérique le principal vecteur de développement qualitatif de notre destination.

Le numérique s'est très tôt imposé comme un outil de communication et de promotion incontournable. Il est également la meilleure façon d'apporter sans délai une réponse à toutes les questions que peut se poser un visiteur lors de son voyage et de son séjour.

Aujourd'hui, à Saint-Barthélemy, toute la société locale s'organise autour du vecteur numérique.

À l'heure où les touristes organisent leur voyage, planifient leur séjour, réservent leur hôtel à « Saint-Barth » sur internet, que ce soit devant leur propre écran ou par l'intermédiaire d'une agence, l'objectif est de connecter le « touristonaute » à toutes les informations dont il pourrait avoir besoin avant, pendant et après son séjour.

La connectivité fait partie intégrante du voyage et, lors de son séjour à « Saint-Barth », le touriste exige de disposer d'un service wifi d'excellente qualité. Il doit rester relié au monde entier et pouvoir communiquer avec sa famille, son entreprise, son business , envoyer ses messages, partager ses photos, consulter les réseaux sociaux.

Mais pour mener à bien cette politique du tourisme connecté, une équipe doit être au service du touriste.

C'est cette offre de services qui est assurée au niveau privé par les hôtels et les agences de location, et au niveau public par la collectivité de Saint-Barthélemy.

J'en viens à la place et au rôle de la collectivité dans cette politique de tourisme connecté.

Lors de son passage en collectivité d'outre-mer en juillet 2007, Saint-Barthélemy s'est vue transférer la compétence en matière de tourisme. Elle s'est d'abord dotée d'un comité territorial du tourisme, dont je suis la directrice, qui contribue à la préparation et à la diffusion de documents promotionnels, en collaboration constante avec les professionnels, afin de contribuer à fournir le meilleur service à la clientèle et de représenter la destination à l'étranger. Elle a également créé le site de la destination et les différents comptes de réseaux sociaux tels que Facebook ou Instagram, qui nous permettent de diffuser en ligne tous nos documents de promotion.

Mais si le numérique s'est imposé comme un vecteur d'attractivité de Saint-Barthélemy, c'est aussi parce que nous veillons à ce que nos sites et contenus soient d'accès facile, de grande qualité, et surtout disponibles en plusieurs langues, parmi lesquelles l'anglais reste incontournable.

Dernière innovation lancée par le comité territorial du tourisme : nous avons mis à disposition, en accès libre, des tablettes numériques, dans tous les endroits stratégiques de l'île, le port, l'aéroport, l'office du tourisme, permettant au touriste de donner sans délai son avis sur son séjour.

En outre, la collectivité a écrit et dessiné son schéma d'aménagement numérique du territoire, avec pour objectif de couvrir la totalité de l'île.

Ainsi, elle s'est rattachée aux deux câbles sous-marins qui nous relient aujourd'hui au monde entier. Je précise malgré tout que ces câbles passent par Miami ; à ce titre, la France a sans doute une politique à mener, car c'est le cas pour toutes les îles françaises de la Caraïbe. La collectivité a décidé d'amener la fibre optique dans tous les quartiers de l'île et au plus près du citoyen.

Elle a également structuré ses relations avec les opérateurs et les fournisseurs d'accès, leur laissant le soin d'assurer la terminaison et de se faire concurrence uniquement sur l'offre de services à la clientèle.

À ce jour, tous les hôtels 5 étoiles sont raccordés à la fibre, et nous espérons bientôt mettre en service l'ensemble du réseau.

Nous serons alors capables de fournir à nos visiteurs, mais aussi à nos citoyens, du haut, voire du très haut débit.

Je tiens à souligner la forte volonté politique de la collectivité de « Saint-Barth » et la mobilisation, y compris financière, du monde professionnel, pour réussir à faire du numérique le meilleur moyen de vaincre l'isolement et de développer un tourisme durable.

Mais je tiens également à rappeler la nécessité de l'intervention de l'État et des élus nationaux pour tenter de faire baisser le coût encore exorbitant du numérique sur nos îles d'outre-mer, et, plus particulièrement, celui du chargement et du transfert de données.

Claude GIRAULT, Directeur général adjoint des outre-mer

Je remercie d'abord le président Magras de son invitation.

J'ai entendu, au gré des interventions des différents orateurs qui m'ont précédé, très riches et passionnantes, quelques mots-clés. La ténacité, d'abord - c'était le titre d'une des séquences. Le contenu de la table ronde démontre que vous n'en manquez pas ; l'État non plus n'en manque pas pour appliquer sa politique. La ministre des outre-mer, Éricka Bareigts, l'a rappelé lundi dernier, en clôture de la journée que nous avons organisée au ministère des outre-mer - beaucoup d'entre vous étaient présents -, afin que nous abordions ensemble toutes ces questions et construisions ensemble, dans la durée, les réponses qui doivent y être apportées.

Nos discussions font également suite à la décision du Gouvernement, l'année dernière, à l'écoute des professionnels et des élus, de mettre en place un Conseil de promotion du tourisme, dont les travaux ont abouti à un plan en 27 mesures, porté, à l'époque, par Laurent Fabius et George Pau-Langevin, et dont la vocation est de répondre au défi du tourisme dans les outre-mer. Nous avons déjà initié la réalisation d'un certain nombre de ces mesures, et la ministre a annoncé, lundi dernier, que plusieurs initiatives locales seraient prises, de concert avec les préfets et les hauts-commissaires, dans des environnements dont je ne ferai pas l'injure, au Sénat de rappeler la diversité institutionnelle, qui va de pair avec des pouvoirs d'intervention différenciés de l'État - le droit de l'Union européenne peut d'ailleurs s'y appliquer ou non.

Parmi les fils conducteurs stratégiques de nos discussions, je voudrais citer le rôle des acteurs publics, les problématiques de visa, celles de santé, de formation. J'en profite pour répondre à la question posée tout à l'heure par le responsable du master tourisme de Paris 3 sur les problèmes de promotion. Je salue les collègues d'Atout France qui sont présents dans cette enceinte, ainsi que les membres du cluster tourisme des outre-mer d'Atout France, qui travaillent, précisément, sur les questions de promotion des destinations ultramarines, au moins sur les marchés européens. Le Conseil de promotion a notamment mis en évidence qu'il fallait aller au-delà de ces marchés européens, pour ouvrir nos territoires et mieux les faire connaître. Mais nous devons trouver ensemble le moyen de le faire.

Les questions de financement ont été abordées par le président Philibert, via le débat, qui sont d'une importance absolument essentielle, sur la défiscalisation - on l'a vu à propos des compagnies aériennes, mais on le voit également s'agissant des investissements structurants et des investissements productifs. Nous pourrions parler aussi du logement social : bien que ce ne soit pas le thème du jour, il s'agit d'une question très importante.

Quoi qu'il en soit, en matière de défiscalisation, le Gouvernement a rappelé son engagement et son soutien au maintien des dispositifs. Je dis et répète que nous travaillons sans relâche, avec les partenaires économiques et les collègues de Bercy, pour simplifier et accélérer l'instruction des dossiers de défiscalisation, exercice parfois complexe, du fait de dispositions juridiques pas toujours tout à fait compatibles les unes avec les autres : lorsqu'une compagnie aérienne s'équipe, les durées d'amortissement sont de dix, douze, quinze ans, là où, pour bénéficier des dispositifs fiscaux, l'adéquation exigée entre dépenses et subvention est mesurée sur des durées beaucoup plus courtes. Il faut travailler à construire des positions équilibrées, tout en permettant aux décideurs publics, qui ont des comptes à rendre devant le Parlement et sont régulièrement audités par la Cour des comptes, de pouvoir justifier de ces dépenses.

Le numérique est également un enjeu considérable ; nous y travaillons avec les collègues de Bercy. Cette question nous rapproche de celle de l'innovation - nous nous en étions quelque peu éloignés en abordant le problème des mesures permettant de répondre aux handicaps économiques structurels qui sont ceux que l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne reconnaît à nos régions ultrapériphériques. En ce moment même, une conférence des présidents des régions ultrapériphériques se tient à Madère, en présence des représentants de la Commission européenne : ce débat est donc au coeur de l'actualité.

Les responsables de compagnies aériennes ont évoqué l'étroitesse du marché. Nous ne souffrons pas tant des conséquences d'un protectionnisme exacerbé que, dans certains cas, d'un problème de solvabilité et de taille critique du marché qui rend difficile d'attirer des acteurs. J'ai très souvent ce débat, tant avec les hôteliers qu'avec les compagnies aériennes : les uns déplorent que les autres n'ouvrent pas suffisamment de sièges pour remplir les hôtels ; les autres répondent qu'elles ne peuvent ouvrir une ligne sans savoir si des passagers l'emprunteront.

Il est donc fondamental de rapprocher les acteurs. Ce rapprochement se fera d'abord localement. Les marchés ne seront pas gérés depuis Paris : c'est impossible ! L'État central peut seulement créer l'environnement favorable au financement et à la gouvernance de notre dispositif.

J'occupe ces fonctions depuis quelques années ; nous débattons tous les ans, en septembre, à l'occasion du salon français des professionnels du tourisme et des voyages, Top Resa, du tourisme des outre-mer, de manière désormais structurée. Nous renvoyons d'ailleurs une image que je trouve de plus en plus attrayante. De ce point de vue, je regrette d'être ici, dans une salle en sous-sol, plutôt que dans l'une des destinations dont le nom s'affiche sur l'écran derrière moi ! Nos territoires d'outre-mer renvoient une image extrêmement dynamique et tonique, qui évolue très positivement. Ensemble, nous donnons cette capacité d'action et cette envie d'investir dans nos territoires à des porteurs de projet : ce sont des lieux d'innovation et d'activité.

S'agissant des visas, un travail est accompli en permanence avec le ministère de l'intérieur et le Quai d'Orsay pour ajuster les visas à la complexité des situations. Aujourd'hui, nous parlons de tourisme. Nous avons entendu des témoignages dont je ne sais s'il faut les classer dans la catégorie du tourisme, concernant en particulier les problématiques de santé.

Je rappelle aussi que la question de l'ouverture des frontières peut être, localement, très sensible, les populations pouvant réagir très fortement : lorsque l'on parle des visas à Mayotte ou en Guyane, il faut être d'une extrême prudence. L'équilibre que nous tâchons de conserver, avec les préfets et les hauts-commissaires, est donc complexe. Nous avons fait des avancées : par exemple, nous avons travaillé avec la Polynésie française à l'ouverture des visas, notamment pour les équipages, afin de permettre à des croisiéristes d'y baser des croisières. L'enjeu économique est de taille, le secteur maritime, et en particulier celui des croisières, figurant au titre des richesses de notre patrimoine, donc de nos opportunités d'action.

Quant à la formation, elle n'est plus de la compétence de l'État. Ce sont les régions ou les collectivités uniques qui sont compétentes s'agissant de l'élaboration des schémas de formation et de la prise en compte des besoins de formation des entreprises.

Le ministère des outre-mer dispose d'un opérateur, LADOM, l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité ; certains de ses étudiants ont d'ailleurs peut-être suivi le master dont le responsable est intervenu tout à l'heure. LADOM finance les frais de transport et quelques frais d'accompagnement des ultramarins qui viennent se former en métropole sur des filières soit saturées, soit inexistantes sur leur territoire.

Ce dialogue avec les collectivités territoriales doit se poursuivre, pour permettre à des étudiants de se former localement, dans leur environnement régional - l'idée a été exprimée à plusieurs reprises, je la trouve tout à fait passionnante -, et pas simplement en métropole. Dans certaines zones, la formation linguistique constituerait une véritable ressource. Cette lacune a d'ailleurs été identifiée à plusieurs reprises comme un obstacle depuis le début de nos travaux. La décision, en la matière, est aux mains des collectivités, qui sont compétentes pour arrêter le schéma de formation : l'État est en seconde ligne, en accompagnement des dispositifs.

Je pourrais parler deux heures ; malheureusement, le temps de parole du Gouvernement est compté !

Voilà, en tout cas, quelques-unes de mes réactions face aux enjeux et aux défis qui nous occupent. Il y a là, dans la boîte à outils que je vous ai présentée, toute une série de réponses aux interrogations très légitimes qui me sont adressées.

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