C. DES FINANCES COMMUNALES PARTICULIÈREMENT CONTRAINTES

Les communes polynésiennes sont freinées dans leur action par des difficultés financières récurrentes. Privées de toute capacité fiscale, elles dépendent du financement de l'État et de la part prélevée sur le budget de la Polynésie française dont le montant annuel reste source de contentieux.

En moyenne, le fonds intercommunal de péréquation (FIP) représente 42 % des recettes de fonctionnement et 38 % des recettes d'investissement des communes polynésiennes.

Ce fonds, créé en 1971, a été réformé en 2010 lors de la refonte des instruments financiers de l'État en faveur des collectivités polynésiennes. Il est dorénavant alimenté, d'une part, par la dotation territoriale pour l'investissement des communes en Polynésie (DTIC) qui lui est versée directement et, d'autre part, par une quote-part prélevée sur le budget de la Polynésie française.

Les transferts financiers à destination des communes polynésiennes

Le taux de prélèvement sur le budget de la Polynésie française, qui ne peut être inférieur à 15 % du budget de la Polynésie française selon la loi organique, est fixé par décret après avis de l'assemblée et du gouvernement de la Polynésie française.

Le comité des finances locales (CFL) répartit principalement les ressources du fonds entre les communes et leurs groupements selon trois catégories :

- une dotation non affectée de fonctionnement (DNAF) ;

- une dotation non affectée d'investissement (DNAI) ;

- des dotations affectées à des opérations identifiées.

Les dotations non affectées, représentant au moins 70 % des ressources de l'année (hors crédits reportés), sont calculées par commune en fonction de leur population et de leurs charges (superficie, population scolaire, éloignement par rapport à Tahiti, dispersion sur plusieurs îles notamment).

À compter de 2011 et à la suite de la réforme de la dotation globale de développement économique, le FIP reçoit en recettes une dotation territoriale pour l'investissement des communes de Polynésie française qui apparaît dans une section distincte. Cette dotation est affectée au financement des projets des communes et de leurs établissements en matière de traitement des déchets, d'adduction d'eau, d'assainissement des eaux usées, d'adaptation ou d'atténuation face aux effets du changement climatique et des projets de constructions scolaires pré-élémentaires et élémentaires. Elle est perçue directement par le FIP.

Les difficultés budgétaires et de trésorerie de la Polynésie française ont des répercussions, par la voie du FIP, sur les finances communales. Cette difficulté budgétaire a été exacerbée par un long contentieux sur le montant exact de la participation financière de la Polynésie française. Cette dernière souhaitait ne pas calculer le montant de son versement au FIP sur la base de son budget primitif mais en prenant pour référence les seules recettes émises et perçues. Le tribunal administratif de Papeete a contredit cette interprétation en estimant que le budget primitif servait bien d'assiette provisoire au calcul du montant du versement, sous réserve, éventuellement, de régulation au regard des recettes figurant au compte administratif.

Malgré cet avis, la Polynésie française a maintenu sa position, provoquant en 2010 une baisse de son versement de 8 %, d'où des difficultés de trésorerie pour le FIP, puis de 9,5 % en 2011. Par un arrêt du 12 avril 2013, le Conseil d'État a confirmé l'interprétation du tribunal administratif et la légalité du montant du prélèvement opéré sur le budget de la Polynésie française pour abonder le FIP.

Cette situation avait conduit nos anciens collègues Christian Cointat et Bernard Frimat à se demander, dans leur rapport d'information de 2008, si les communes polynésiennes n'étaient pas sorties de la tutelle administrative de l'État pour être placées sous une tutelle financière du pays.

Lors de leur visite à Rurutu dans les îles Australes, vos rapporteurs ont pris connaissance du programme de travaux de la commune dont le financement repose largement sur les aides de la Polynésie française et de l'État, y compris à travers la dotation d'action publique des sénateurs.

La dépendance communale par rapport aux transferts se traduit particulièrement au niveau des recettes de fonctionnement, puisqu'en moyenne 22,1 % seulement de ces recettes étaient issues des impôts et taxes en 2015. De fortes disparités existent de surcroît entre les archipels : si elles représentent une part importante des recettes de fonctionnement des communes de l'archipel de la Société, cette proportion est très faible (moins de 2 %) pour les communes des archipels des Tuamotu Gambier, des Australes et des Marquises en raison d'une base fiscale très limitée ou de l'absence de mise en oeuvre du levier fiscal par les communes éloignées.

Les élus municipaux rencontrés ont appelé à une refondation de la fiscalité communale, insistant sur l'importance pour une commune de disposer de ressources propres afin de garantir son autonomie de gestion. Au surplus, lorsqu'un lien existe entre le développement d'une commune et son niveau de recettes fiscales, il existe une incitation pour la commune à mener des investissements de nature à favoriser son attractivité et ainsi accroître ses rentrées fiscales.

La question de la réforme de la fiscalité communale a été régulièrement évoquée devant vos rapporteurs. Toutefois, sa mise en oeuvre relève de la compétence de la Polynésie française qui est dotée de l'autonomie fiscale. Or, aucune modalité concrète de cette évolution n'a été esquissée devant la délégation.

Page mise à jour le

Partager cette page