IV. ÉNERGIE

A. LOI N° 2017-1839 DU 30 DÉCEMBRE 2017 METTANT FIN À LA RECHERCHE AINSI QU'À L'EXPLOITATION DES HYDROCARBURES ET PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS RELATIVES À L'ÉNERGIE ET À L'ENVIRONNEMENT

1. Au-delà des hydrocarbures, la loi comprend plusieurs mesures importantes pour le secteur énergétique

La loi du 30 décembre 2017 organise l'arrêt progressif, d'ici au 1 er janvier 2040, de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures sur le territoire national, à l'exception de l'exploitation du gaz de mine et des hydrocarbures dits « connexes », qui renvoient en pratique au gaz de Lacq.

Cette interdiction s'applique aux demandes nouvelles mais aussi, rétroactivement, aux demandes en cours d'instruction , avec pour effet de faire « tomber » toutes les demandes d'octroi initial d'un titre de recherche ou d'exploitation à l'exception des concessions attribuées en application du droit de suite qui peuvent l'être pour une durée n'excédant pas le 1 er janvier 2040, sauf démonstration par le titulaire que l'équilibre économique exige d'aller au-delà.

La loi a par ailleurs élargi l'interdiction de la fracturation hydraulique posée par la loi du 13 juillet 2011 à « toute autre méthode non conventionnelle » , selon une définition qui pose question et s'avère surtout sans portée pratique dès lors qu'aucune de ces techniques n'est mise en oeuvre aujourd'hui en France.

La loi comportait d'autres mesures , parmi lesquelles :

- la réforme de l'accès au stockage souterrain de gaz naturel , à laquelle le Sénat a contribué et qui prévoit en particulier le recours à des enchères pour commercialiser les capacités de stockage, la constitution d'un « filet de sécurité » en cas d'insuffisance des capacités souscrites pour garantir la sécurité d'approvisionnement, la régulation du revenu des opérateurs de stockage par la Commission de régulation de l'énergie (CRE) et la couverture tarifaire de l'écart éventuel entre ce revenu autorisé et le produit des enchères, avec un sort particulier réservé aux sites fortement consommateurs pour préserver leur compétitivité ;

- la réduction jusqu'à 40 % , sur proposition de l'Assemblée nationale, des coûts de raccordement des installations de biogaz raccordées aux réseaux de transport (extension du mécanisme dit de la « réfaction tarifaire ») ;

- l'encadrement de la pratique dite du « commissionnement » par laquelle les fournisseurs d'électricité se font rémunérer pour la gestion de clientèle effectuée pour le compte du gestionnaire de réseau ;

- une nouvelle réforme des règles applicables au raccordement des énergies marines renouvelables après celle déjà adoptée dans la loi du 24 février 2017 ( cf. infra ) et qui consiste, pour l'essentiel, à prévoir qu'à compter du troisième appel d'offres en cours, RTE assumera à la fois le financement et la réalisation du raccordement , et à fixer des règles d'indemnisation plus favorables au producteur ;

- la définition des réseaux intérieurs des bâtiments , circonscrits, à l'initiative du Sénat, aux immeubles à usage principal de bureaux appartenant à un propriétaire unique et aux seuls bâtiments contigus ou parties contiguës d'un même bâtiment ;

- la mise en place , sur proposition du Sénat, d'un dispositif transitoire de protection des filières française et européenne de biocarburants contre la concurrence déloyale de certains biocarburants importés ;

- l'instauration , à l'initiative de l'Assemblée nationale, d'obligations nouvelles pour assurer la distribution suffisante de carburants compatibles avec tous les véhicules et engins roulants ;

- enfin, une série d'apports du Sénat : la faculté pour les communes de déployer des points de ravitaillement en gaz ou en hydrogène ; la possibilité pour les établissements publics de coopération intercommunale adoptant un plan climat-air-énergie territorial à titre facultatif, ainsi que pour les syndicats d'électricité, de réaliser des actions de maîtrise de la demande d'énergie ; la réforme des sanctions applicables en cas de non-respect de l'obligation de pavillon français et l'assouplissement des obligations d'économies d'énergie applicables aux distributeurs de fioul domestique .

2. Les réformes du stockage du gaz et des règles de raccordement des énergies marines renouvelables sont en grande partie applicables

Selon le recensement effectué par la commission des affaires économiques, 19 dispositions de la loi « Hydrocarbures » appellent une mesure d'application . Au 31 mars 2018, quatre d'entre elles sont devenues applicables après la parution de leur texte d'application :

- dans le cadre de la nouvelle régulation de l'accès au stockage souterrain de gaz naturel prévue à l'article 12 , plusieurs mesures réglementaires ont permis, avec les délibérations prises par le régulateur , la mise en oeuvre rapide de l'essentiel de cette réforme qui assure la sécurité d'approvisionnement en gaz naturel pour l'hiver 2018-2019, ce dont la commission se félicite :

• un arrêté du 13 mars 2018 a fixé le niveau des stocks minimaux de gaz nécessaires au 1 er novembre 2018 pour garantir la sécurité d'approvisionnement jusqu'au 31 mars 2019 (1990 GWh/j en débit de soutirage dans l'ensemble des infrastructures) ;

• le décret n° 2018-221 du 30 mars a précisé les modalités de constitution des stocks complémentaires (le « filet de sécurité ») : sur la base des informations transmises par les gestionnaires de réseaux et les opérateurs de stockage qu'il fixe par ailleurs, le texte prévoit que l'obligation éventuelle de constitution des stocks complémentaires, édictée au plus tard le 30 juin de chaque année, reposera sur les opérateurs de stockage dans la limite de 20 TWh ; au-delà , et si la somme des capacités souscrites et des stocks complémentaires n'atteint pas le niveau des stocks minimaux requis pour assurer la sécurité d'approvisionnement, il pourra être fait appel , à la même date, aux fournisseurs pour constituer des stocks globaux ;

• De son côté, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a successivement défini :

ü les modalités des enchères , avec pour objectif premier de maximiser les souscriptions, un prix de réserve nul, des règles transparentes et simples et un étalement sur plusieurs jours avec une commercialisation par lots (délibération n° 2018-039 du 22 février 2018) ; les enchères organisées par TIGF et Storengy, qui se sont déroulé du 5 au 26 mars, ont permis d'allouer la quasi-totalité des capacités disponibles , à des prix variant entre 0 et 2,02 €/MWh ; le volume total des capacités souscrites 15 ( * ) a atteint 128 TWh, dépassant le niveau des stocks minimaux fixé par l'arrêté du 13 mars ;

ü les revenus autorisés des opérateurs de stockage pour l'année 2018 , dans un cadre tarifaire simplifié fixé pour deux ans, avec régularisation a posteriori des écarts entre le prévisionnel et le réalisé et incitation des opérateurs à la maximisation des souscriptions et du revenu des enchères : ces revenus ont été fixés respectivement à 523,1 millions d'euros pour TIGF, 153,4 millions pour TIGF et 38,1 millions pour Géométhane, soit 714,6 millions au total (délibération n° 2018-068 du 22 mars 2018) ;

ü et le niveau du terme tarifaire inclus dans le tarif de transport pour compenser l'écart entre le revenu issu des enchères - estimé à 186,1 millions - et le revenu autorisé des opérateurs : ce terme tarifaire est fixé à partir du 1 er avril 2018 à 297,1 €/MWh/j/an , pour un montant global de compensation de 528,4 millions d'euros ( délibération n° 2018-074 du 27 mars 2018), en ligne avec le montant estimé avant la réforme d'environ 500 millions - sur la base duquel une centaine de millions d'euros d'économies était attendue pour les consommateurs par rapport au système antérieur ;

• En revanche, trois aspects de la réforme attendent encore leurs textes d'application : il s'agit du délai de préavis en cas de sortie du périmètre des actifs régulés, du calcul du montant des sanctions applicables en cas de manquement aux obligations de constitution et de remplissage des stocks, et du mécanisme destiné à compenser les effets de la réforme pour les industriels gazo-intensifs ( cf. infra ) ;

- en application de l'article 15 sur le raccordement des énergies marines renouvelables , le décret n° 2018-222 du 30 mars 2018 (trois occurrences) a fixé le barème d'indemnisation applicable en cas de retard ou d'indisponibilité du raccordement d'une installation renouvelable en mer dont le coût de raccordement est supporté par le gestionnaire de réseau : cette indemnisation ne pourra excéder trois ans en cas de retard et ne débutera, en cas d'indisponibilité, que si l'indisponibilité excède une durée cumulée supérieure à dix jours dans les cinq premières années du contrat d'achat, trente jours dans les dix suivantes et quarante-cinq jours ensuite jusqu'au terme du contrat. Deux textes d'application doivent désormais fixer le plafond des indemnités et de la part dont le gestionnaire de réseau est redevable ( cf. infra ).

3. Certaines dispositions sont inapplicables mais le délai de six mois après la promulgation n'est pas échu

15 dispositions sont, en l'état, inapplicables faute de parution de textes d'application . La commission des affaires économiques ne porte pas de jugement, à ce stade , sur l'absence de leurs mesures d'application dès lors que le délai de six mois après la publication de la loi, au terme duquel toutes les mesures réglementaires doivent avoir été prises selon l'objectif fixé dans la circulaire primo-ministérielle du 29 février 2008, n'est pas encore échu .

Elle a cependant recueilli, auprès du Gouvernement, les éléments d'information suivants :

- à l'article 4 , le décret en Conseil d'État qui doit préciser les conditions dans lesquelles l'exploitant remet, cinq ans avant la fin de sa concession, un dossier présentant le potentiel de reconversion des installations ou du site, devrait être publié fin mai ;

- à l'article 9 , un décret est attendu pour fixer annuellement le mode de calcul de l'intensité d'émissions de gaz à effet de serre (GES) unitaire sur l'ensemble du cycle de vie par unité d'énergie des hydrocarbures importés que les sociétés importatrices d'hydrocarbures sur le sol français rendent publique , chaque année, à compter du 1 er janvier 2019 ; le Gouvernement indique que de telles modalités de calcul sont déjà établies dans le cadre d'une obligation nationale de rapportage prévue par le droit européen depuis 2011 16 ( * ) et laisse à penser qu'un décret ne sera pas nécessairement pris ; la commission s'étonne cependant de ce que le décret ne figure pas dans l'échéancier d'application de la loi publié sur Légifrance, censé lister tous les décrets attendus, y compris ceux fixant des dispositions annuellement ;

- à l'article 12 sur la réforme du stockage souterrain de gaz naturel :

• un arrêté doit fixer le délai de préavis pendant lequel une infrastructure de stockage qui ne serait plus considérée comme nécessaire à la sécurité d'approvisionnement continuera d'être régulée, et verra donc ses coûts compensés.

Dans un courrier adressé à la mi-mars au ministre de la transition écologique et solidaire, la présidente de la commission des affaires économiques a signifié son souhait que, dans le dialogue instauré avec la Commission européenne au titre du contrôle des aides d'État, le Gouvernement défende la préservation des sites actuels dans le périmètre des actifs régulés lorsqu'ils sont nécessaires à notre sécurité d'approvisionnement , et qu'en tout état de cause, la durée fixée pour ce préavis donne aux opérateurs une visibilité suffisante .

En réponse, le ministre a indiqué que, dans le cadre de l'élaboration de la nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie, le travail est en cours pour actualiser la liste des infrastructures essentielles d'ici la fin de l'année 2018 , « en tenant compte [des] caractéristiques actuelles et des évolutions envisageables à moyen et long termes [du système gazier] , des perspectives de consommation et des conditions d'approvisionnement sur la période 2018-2028. Pour cela, une démarche d'analyse prudente, proportionnée aux enjeux et tenant compte des incertitudes inhérentes à tout exercice prospectif, est mise en oeuvre ». De même, les réflexions sur le délai de préavis , menées en concertation avec les opérateurs, sont en cours .

• un décret en Conseil d'État doit préciser les conditions dans lesquelles les fournisseurs de gaz naturel sont tenus d'assurer la continuité de fourniture de leurs clients . Ce décret est prévu au premier alinéa d'un nouvel article L. 443-8-1 du code de l'énergie qui a aussi introduit la possibilité d' une sanction financière en cas de manquement , en pratique bien plus dissuasive car plus opérationnelle que les sanctions antérieures 17 ( * ) .

Considérant que l'ajout de cette sanction pécuniaire a déjà pour effet de renforcer, en pratique, l'obligation de continuité de fourniture des fournisseurs, le Gouvernement ne juge pas nécessaire de rehausser le niveau de cette obligation , qui demeure régie par les articles R. 121-3 et R. 121-4 du code de l'énergie créés par le décret n° 2004-251 du 19 mars 2004 ; à ce stade, il n'est donc pas prévu de prendre un nouveau décret en Conseil d'État . Dans le cadre d'un rapport d'inspections paru en février dernier 18 ( * ) , il a par ailleurs été recommandé de ne pas modifier le critère de sécurité d'approvisionnement en gaz retenu en France, qui est déjà plus contraignant que le minimum fixé réglementairement au plan européen ;

• un arrêté (deux occurrences) doit encore définir la méthodologie de détermination de la valeur des stocks de gaz applicable pour calculer le montant de la sanction pécuniaire en cas de manquement à l'obligation de constitution de stocks par les opérateurs de stockage ou les fournisseurs ou à l'obligation de remplissage des capacités souscrites par les fournisseurs ; cet arrêté a été examiné fin février par le Conseil supérieur de l'énergie et devrait être publié d'ici fin mai ;

• un arrêté doit fixer le niveau de remplissage que les fournisseurs ayant souscrit des capacités doivent dépasser au 1 er novembre de chaque année 19 ( * ) ; comme le précédent, cet arrêté a été examiné fin février par le Conseil supérieur de l'énergie et devrait être publié d'ici fin mai ;

• un arrêté doit préciser les modalités du mécanisme additionnel d'interruptibilité créé pour neutraliser les effets de la réforme du stockage du gaz sur les industriels gazo-intensifs. Les dispositifs d'interruptibilité gazière , qu'il s'agisse du mécanisme « de base » instauré par la loi « Transition énergétique » ( cf. infra ) ou de ce dispositif additionnel, sont en cours de notification à la Commission européenne pour contrôle de leur conformité aux règles relatives aux aides d'État ; les textes réglementaires correspondants ne pourront donc être publiés qu'après confirmation , par les services de la Commission, de leur compatibilité avec le droit européen ;

• un arrêté doit enfin fixer le taux de prise en charge par le tarif des coûts de raccordement au réseau de transport des installations de biogaz ;

• on signalera aussi que deux textes réglementaires , non explicitement attendus par la loi , ont été, pour le premier, publié après la période de contrôle du présent rapport et, pour le second, présenté au Conseil supérieur de l'énergie en janvier dernier : il s'agit du décret en Conseil d'État n° 2018-276 du 18 avril 2018 révisant la partie réglementaire du code de l'énergie relative aux stockages souterrains et d'un arrêté fixant les modalités de prise en compte des capacités de stockage souscrites un autre État membre de l'UE en cas d'activation du « filet de sécurité », conformément à une décision de la Cour de justice de l'Union européenne ;

• enfin, l'article 12 habilite aussi le Gouvernement à légiférer par ordonnances , d'ici au 30 décembre 2018, sur trois sujets : la modification des missions des acteurs du système gazier , l' extension de l'actuel mécanisme d'interruptibilité à des clients raccordés aux réseaux de distribution et la définition des règles de délestage des consommateurs, incluant la possibilité de réduire les tarifs d'utilisation pour tenir compte des différents niveaux de qualité d'acheminement garantis aux consommateurs ;

- à l'article 15 , un arrêté doit préciser la part des indemnités due aux producteurs d'énergie marine renouvelable dont le gestionnaire de réseau est redevable et un décret est attendu pour fixer le montant maximal par installation des indemnités versées aux producteurs ; ces deux textes sont encore à l'étude ;

- à l'article 16 , le décret d'application du chapitre du code de l'énergie dédié aux réseaux intérieurs des bâtiments est attendu ; le texte, en cours de finalisation , sera prochainement soumis pour consultation au Conseil supérieur de l'énergie ;

- à l'article 18 , un décret en Conseil d'État doit préciser les modalités de mise en oeuvre des contrôles et sanctions administratives en matière de biocarburants et bioliquides , s'agissant en particulier de l'assermentation de certains des agents chargés de ce contrôle ; le projet de décret rédigé est en cours d'examen par le Conseil d'État ;

- à l'article 19 , deux arrêtés sont requis pour assurer la distribution suffisante de carburants compatibles avec tous les véhicules et engins roulants ; le premier, qui doit fixer la liste des carburants concernés par l'obligation d'une double distribution - carburants compatibles avec tous véhicules et carburants dont la compatibilité est limitée, devrait être publié avant l'été 2018 ; en revanche, aucun carburant dont la fourniture devrait être maintenue au motif que certains véhicules ne fonctionneraient qu'avec ces carburants sans pouvant être facilement modifiés n'a été identifié et le Gouvernement ne prévoit donc pas d'arrêté , à ce stade, sur ce point ;

- enfin, à l'article 28 relatif aux obligations d'économies d'énergie des distributeurs de fioul, un décret en Conseil d'État , non expressément attendu par la loi , devrait modifier la partie réglementaire du code de l'énergie et prévoir les modalités de transition de l'actuel au futur régime d'obligation qui entre en vigueur au 1 er janvier 2019 ; les consultations ont été menées et le texte sera prochainement examiné par le Conseil d'État .

4 rapports sont par ailleurs attendus :

- à l'article 7 , un rapport sur l'accompagnement des entreprises et des salariés impactés et sur la reconversion des territoires concernés , à remettre au plus tard d'ici au 30 décembre 2018 après concertation avec les parties prenantes ; selon les informations transmises par le Gouvernement, des contacts ont été pris avec les associations professionnelles et les détenteurs de titres qui ont fait part de leur accord de principe pour travailler à cette question. À raison d'un manque de visibilité sur leurs activités, faute d'avoir pu évaluer toutes les conséquences de la loi et de la révision de la fiscalité de leurs activités intervenue en loi de finances pour 2018, les opérateurs ont toutefois demandé un report de la discussion au second semestre .

Il a par ailleurs été indiqué à la commission des affaires économiques qu' une grande partie des opérateurs ont déposé ou envisagent de déposer des recours contentieux (indemnitaires et/ou pour prolonger les titres, voire des questions prioritaires de constitutionnalité), confirmant ainsi le risque juridique , qu'avait pointé la commission, d'une application rétroactive de la loi aux demandes en cours d'instruction ;

- à l'article 8 , un rapport évaluant l'impact environnemental des hydrocarbures mis à la consommation en France et la possibilité de différencier ces produits en fonction de cet impact, à remettre avant le 31 décembre 2018 ; le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET) ont été saisis avec pour objectif, fixé dans leur lettre de mission, de remettre le rapport pour le 31 août ;

- à l'article 10 , un rapport sur les concours de toute nature de l'État en soutien aux activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures en hors du territoire national , à remettre d'ici au 30 décembre 2018 ; les premières discussions de préparation ont débuté au sein du Commissariat général du développement durable (CGDD) mais l'incertitude sur la nature des concours visés rend ce travail complexe , comme la commission l'avait soutenue lors des débats ;

- enfin, à l'article 22 , un rapport sur la prise en compte des objectifs de développement durable , en particulier des objectifs d'amélioration de la qualité de l'air, lors de l'attribution des marchés publics , à remettre au plus tard d'ici au 30 décembre 2018 ; la rédaction de ce rapport a été confiée au Commissariat général au développement durable .

4. Trois illustrations de l'application concrète de la loi : le traitement des demandes de titres en cours d'instruction, la remise des rapports démontrant l'absence de techniques interdites et la mise en ligne des demandes et titres

Au-delà des mesures réglementaires parues, la commission des affaires économiques s'est aussi intéressée à l'application concrète de la loi sur trois points .

• Le premier, essentiel, porte sur le sort fait aux diverses demandes de titres qui étaient en cours d'instruction à la date de publication de la loi en application des articles 2 et 3 .

Parmi les 33 permis de recherche recensés en septembre 2017 avant l'adoption de la loi, 12 avaient une date d'expiration postérieure au 1 er avril 20 ( * ) - dont le permis « Guyane Maritime » prolongé en septembre 2017 jusqu'au 1 er juin 2019 -, et 21 avaient fait l'objet de demandes de prolongation , parfois déposées depuis plusieurs années, mais auxquelles l'administration n'avait jusqu'alors pas répondu ; sur ces 21 demandes, 11 prolongations ont été accordées 21 ( * ) par des arrêtés parus entre décembre 2017 et avril 2018 et pour des durées s'étalant de mai 2018 à septembre 2021, 6 sont encore en cours d'instruction administrative et 4 ont été refusées pour des motifs inconnus , soit un total de 22 permis en cours de validité à date , et 29 si l'on inclut ceux dont la prolongation est encore en suspens .

En cas de découverte jugée rentable, ces permis pourraient par la suite faire l'objet d'une concession en application du droit de suite pour une durée n'excédant pas le 1 er janvier 2040, sauf s'il est démontré que leur équilibre économique exige d'aller au-delà.

Comme prévu par la loi, les 45 demandes déjà déposées de nouveaux permis de recherches ont été rejetées par une lettre des ministres en date du 31 janvier 2018 22 ( * ) .

S'agissant des titres d'exploitation, sur les 8 demandes de concessions nouvelles déposées avant la loi , les 5 concessions demandées en vertu d'un droit de suite ont été accordées en février et mars 2018 pour une durée allant jusqu'en février 2033 pour deux d'entre elles, jusqu'en août 2038 pour la troisième et jusqu'à la date limite prévue par la loi du 1 er janvier 2040 pour les deux dernières. Les 3 autres demandes de concessions ont été rejetées , pour deux d'entre elles, ou devraient l'être en application de la loi car ne relevant pas du droit de suite .

Enfin, l'ensemble des titres des 62 concessions existantes recensées avant la loi sont toujours valides , pour des durées s'étalant du 31 décembre 2018 au 31 mars 2054, sept concessions excédant la date du 1 er janvier 2040. Depuis la publication de la loi, 3 concessions dont le titre avait expiré ont été renouvelées , jusqu'en septembre et octobre 2031 pour deux d'entre elles et jusqu'à la date limite prévue par la loi du 1 er janvier 2040 pour la troisième, trois autres demandes de renouvellement de titres expirant en 2019 sont en cours d'instruction administrative et d'autres pourraient par la suite être déposées , avec pour limite cette même date du 1 er janvier 2040.

Au total, et sans présumer du sort des nombreux recours contentieux déposés ou à venir, la loi aura paradoxalement contribué à débloquer l'attribution d'un certain nombre de demandes de prolongation de permis de recherches (12 à ce jour si l'on inclut le permis « Guyane Maritime » renouvelé en septembre 2017) et d'octroi de concessions en application du droit de suite (5) sur lesquelles l'administration avait jusqu'à présent refusé de statuer. A contrario , elle aura fait « tomber » 45 demandes de nouveaux permis de recherche et trois demandes de nouvelles concessions ne pouvant se prévaloir du droit de suite .

• Le deuxième point a trait à la remise , par tout demandeur ou titulaire d'un titre, du rapport prévu à l'article 6 pour démontrer l'absence de recours aux techniques non conventionnelles interdites par la loi.

Aucune demande nouvelle de titre d'exploration ou d'exploitation ayant été faite depuis la publication de la loi, aucun rapport n'a logiquement été déposé à ce titre .

En revanche, la même obligation est faite aux titulaires actuels de titres qui doivent remettre ce rapport dans les six mois suivant la publication de la loi, soit d'ici au 30 juin prochain . Dans cette perspective, selon les informations fournies par le Gouvernement, l'Union française des industries pétrolières (Ufip) a travaillé avec les opérateurs à l'élaboration d' un modèle de rapport type qu'elle a soumis pour avis au ministère ; ce dernier en assurera, après validation, la diffusion auprès des titulaires en guise d'exemple. Comme prévu par la loi, ces rapports seront rendus publics sur le site du ministère.

• Le dernier point porte sur l'obligation faite au Gouvernement, par l'article 11 , de publier dans le mois suivant la promulgation , puis d'actualiser trimestriellement, la liste des demandes et titres, leurs caractéristiques principales ainsi qu'une carte présentant leur périmètre sous « forme électronique dans un standard ouvert librement réutilisable et exploitable ».

Si cette liste et cette carte ont bien été mises en ligne 23 ( * ) , elles l'ont été sous la forme de deux fichiers PDF certes consultables sans besoin de disposer d'une licence logicielle payante mais dont les données, s'agissant en particulier de celles du fichier présentant la carte, ne sont pas aisément réutilisables et exploitables par un système de traitement automatisé , conformément à la démarche d'ouverture des données ( open data ) que visait l'article.

Le Gouvernement objecte que ces listes peuvent être copiées et collées dans un éditeur de texte et que la lettre de la loi est ainsi respectée : c'est factuellement exact pour l'un des deux fichiers mais non conforme, sinon à la lettre de la loi, du moins à son esprit , alors même que les fichiers PDF publiés par le Gouvernement ne sont qu'une version dégradée de fichiers au format tableur dont il dispose par ailleurs, ce qui est regrettable.


* 15 Incluant certains capacités souscrites par ailleurs dans le cadre de contrats long-terme.

* 16 Art. 7 bis de la directive 2009/30/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 : « À partir du 1 er janvier 2011, les fournisseurs présentent à l'autorité désignée par l'État membre un rapport annuel sur l'intensité des émissions de gaz à effet de serre des carburants et de l'énergie fournis dans chaque État membre ».

* 17 Auparavant, seul un retrait ou une suspension de l'autorisation de fourniture était prévue, ce qui aurait obligé, en cas de mise en oeuvre, à trouver une solution alternative pour l'alimentation des clients du fournisseur dont l'autorisation aurait été retirée ou suspendue.

* 18 « Retour d'expérience des difficultés rencontrées pour la sécurité d'approvisionnement en électricité et en gaz durant l'hiver 2016-2017 - Évolution du critère de défaillance du système électrique et du critère de sécurité d'approvisionnement en gaz naturel », Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) et Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET).

* 19 Un autre arrêté peut, le cas échéant, lever cette obligation de remplissage mais n'entre pas dans les statistiques de suivi de l'application de la loi dès lors qu'il ne s'agit que d'une possibilité.

* 20 Pour dix d'entre elles, une ou deux demandes de prolongations pourraient encore être déposées à l'avenir.

* 21 Dont une ne l'a été qu'en exécution d'une décision de justice non définitive (car encore susceptible d'appel) alors que la loi permettait de la refuser (il est cependant prévu que l'arrêté puisse être abrogé en cas d'infirmation du jugement de première instance en appel).

* 22 De même que le serait toute demande de nouveau permis déposée ultérieurement.

* 23 Au bas de cette page https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/ressources-en-hydrocarbures-france .

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