B. COMPTE RENDU DE LA TABLE RONDE

Modératrice :
Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax
Intervenants :
Sophie DESCHAMPS, Présidente de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD) ;
Francis DONNAT, Secrétaire général de France Télévisions ;
Laurent FRISCH, Directeur du numérique de Radio France ;
Radu MIHAILEANU, Président de l'ARP (Auteurs, réalisateurs, producteurs) ;
Bruno PATINO, directeur éditorial d'ARTE France ;
Nathalie SONNAC, membre du CSA

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax . - Il revient à présent aux participants à la seconde table ronde de l'après-midi de trouver des réponses et de définir la stratégie, la création et la régulation de la nouvelle ère numérique.

Les débats ont montré qu'une des attentes très fortes vis-à-vis de l'audiovisuel public était de fédérer, de rassembler, de créer du lien social. Comment, alors qu'il existe une multiplicité d'offres, d'émetteurs, de distributeurs, peut-on à la fois parler à chacun et à tous ? Quelle stratégie de distribution et quelle stratégie éditoriale adopter ?

Je vais commencer par poser la question aux trois représentants de l'audiovisuel public ici présents. Tous ont fortement participé à l'évolution numérique de l'audiovisuel public. Francis Donnat a également travaillé chez Google. Ils savent tous ce que signifient les mutations numériques.

Comment est-on à la fois universel, créateur de lien social et capable de s'adresser à tous via le numérique ?

Francis DONNAT, Secrétaire général de France Télévisions. - J'essaierai de répondre en quatre points.

En premier lieu, il ne faut pas enterrer trop vite le hertzien ni le linéaire, d'abord parce que le poids de la consommation linéaire est encore massif en France.

En 2017, la durée d'écoute moyenne en France s'élevait à 4 heures 14 minutes. 83 % de la durée représentait de la télévision live , soit 3 heures 31 minutes. Actuellement, un jour moyen, plus de 50 % de la population française de quatre ans et plus regarde au moins une fois France Télévisions en direct. N'enterrons donc pas trop vite le linéaire.

N'enterrons pas non plus trop vite le hertzien. Il reste encore incontournable ou nécessaire à nombre de nos compatriotes, d'un point de vue technique ou économique. D'un point de vue technique, 25 % de la population française ne peut avoir accès à la télévision qu'à travers le hertzien. Ce chiffre a évidemment vocation à diminuer dans le futur, mais selon Nicolas Curien, il sera encore de 8 % dans dix ans. Pour les médias de service public que nous sommes, c'est autant d'usagers qui paient la redevance auxquels il faut continuer à s'adresser.

J'ajoute qu'il faut également mettre en rapport le montant de la redevance, qui est inférieur à 12 euros par mois, avec le prix d'un abonnement haut débit auprès d'un fournisseur d'accès à Internet. Pour bon nombre de Français, ce n'est pas neutre. Le hertzien, c'est encore gratuit !

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - Couper le hertzien de France 4 pour toucher les jeunes, ce n'est pas une bonne idée ?

Francis DONNAT, Secrétaire général de France Télévisions. - On y reviendra...

Deuxièmement, ceci ne doit pas nous interdire de développer une stratégie numérique. Les diffuseurs que nous sommes changent progressivement de métier. Nous serons encore diffuseurs durant de nombreuses années, mais ce métier va peu à peu devenir différent.

Notre ambition, à France Télévisions, est de faire en sorte que l'application france.tv ne soit plus simplement une plateforme de rattrapage, mais devienne un mode d'exposition de nos contenus à part entière et, à terme, devienne la première antenne du groupe. Que faut-il faire pour cela ? Selon nous, il faut absolument garder le contact avec nos publics. Ce lien est essentiel. Nous ne pouvons être désintermédiés par d'autres acteurs. La perte de contact avec nos publics serait terrible et remettrait en cause le coeur même de notre mission de service public, qui est de montrer à nos publics des contenus qui, sans nous, n'existeraient pas ou ne seraient pas exposés tels qu'ils le sont.

La stratégie, Delphine Ernotte l'a brièvement exposée le 4 juin dernier. Le premier élément repose sur les transformations internes. On en a dit un mot à l'instant : nous allons redéployer substantiellement des moyens en interne, et réorganiser l'entreprise pour aller d'une logique de contenant à une logique de contenus. Par ailleurs, nous allons doubler le budget numérique que nous consacrons actuellement à France Télévisions.

Enfin, nous allons faire un usage pertinent des réseaux sociaux, qui sont des outils principalement américains, que nous devons utiliser pertinemment pour rapatrier du trafic vers france.tv pour faire gagner à notre entreprise et à nos contenus de la notoriété et de la visibilité, atteindre d'autres publics, notamment les plus jeunes. Notre objectif principal est de ne pas perdre le contact avec nos publics.

Troisième élément : la taille est importante. L'union fait la force. Les acteurs américains disposant de moyens considérables, seules des stratégies d'union peuvent fonctionner.

L'union doit d'abord se réaliser entre les entreprises françaises de service public. C'est pour cela que nous sommes particulièrement fiers de Franceinfo, qui est aujourd'hui, avec 20 millions de visiteurs uniques, le premier site d'information en ligne en France. C'est aussi le sens des projets de plateformes éducatives en ligne avec les entreprises du service public ou de média social commun que nous avons annoncés.

C'est d'abord l'union entre les entreprises de service public et ses logiques de synergie que conduit la ministre de la culture. C'est aussi l'union au niveau national entre entreprises de l'audiovisuel. Salto a été mentionné : nous sommes heureux de cette initiative d'agrégation public-privé en commun avec TF1 et M6, dans la ligne de ce qui se fait partout en Europe - Allemagne, Espagne, Royaume-Uni -, sans parler de Hulu aux États-Unis.

Enfin, l'union se fait également au niveau européen. En 2017, Amazon et Netflix ont dépensé 9,5 milliards d'euros dans la création mondiale. Ce chiffre impressionnant doit être mis en rapport avec le chiffre 18,8 milliards d'euros, montant que les entreprises de service public européennes ont investi l'an dernier au même moment dans la création. Les moyens sont là, à condition de les mettre en commun, d'où l'alliance avec la ZDF et la RAI. D'autres partenaires vont bientôt nous rejoindre pour coproduire et cofinancer des séries européennes d'envergure internationale.

Enfin, tout cela ne saurait prospérer sans un petit « coup de pouce » du législateur et du régulateur. Aujourd'hui, la législation de l'audiovisuel doit être modernisée et adaptée aux nouveaux usages et aux nouvelles technologies.

Laurent FRISCH, Directeur du numérique de Radio France. - On a peu parlé de la radio me semble-t-il aujourd'hui. Radio France va plutôt bien pour un média qui a tendance à se tasser dans le temps, lentement, régulièrement, inexorablement.

Ce tassement cache deux réalités distinctes, d'une part des publics plus âgés qui fréquentent la radio et l'écoutent de plus en plus, d'autre part des publics plus jeunes, de moins de 25 ans, qui l'écoutent beaucoup moins qu'il y a vingt ans, non par désaffection mais parce qu'ils sont plus exposés que le reste de la population à une concurrence féroce entre les usages. Les concurrents de Radio France ne sont pas tant RTL, Europe 1, NRJ, etc., que toutes les autres possibilités offertes en permanence aux personnes connectées via leur smartphone.

Que fait-on face à cela ? Merci à David Assouline d'avoir rappelé que nos podcasts sont écoutés de manière croissante. On a aujourd'hui 180 millions d'écoutes par mois de la radio sur supports numériques, sous une forme ou une autre - podcasts , streaming , vidéo sur YouTube, etc.

Il y a un an, au festival d'Aix-en-Provence, France Musique, qui a probablement le public radio le plus âgé, a filmé un jeune homme, Jakub Jòzef Orliñski, un contre-ténor polonais assez jeune, plutôt beau gosse, en bermuda et baskets, en train de chanter du Vivaldi. Le fait de l'avoir filmé et de l'avoir diffusé à la radio nous a permis de toucher 2 millions de personnes, parmi lesquelles une population importante chez les moins de 25 ans, qui n'écoutent probablement jamais France Musique.

Je me suis récemment rendu compte que des étudiants de 19 à 20 ans qui écoutent peu la radio connaissaient cependant France Inter et écoutaient une fois par jour les humoristes filmés et diffusés sur les réseaux sociaux et YouTube. C'est une porte d'entrée inattendue et une de nos missions.

Trois choses me semblent importantes. Tout d'abord, on doit aller à la rencontre du public sur les plateformes numériques. C'est une des grandes différences par rapport au broadcast : le public venait nous chercher, à nous d'aller le trouver. Cela signifie travailler les formats, l'incarnation, l'écriture, ne jamais dévoyer notre propos ni transiger sur la qualité, ne jamais se comporter différemment de ce qu'on est.

Deuxièmement, ce public, on doit l'écouter. Le public réagit en permanence et en temps réel. Il accepte ou non ce qu'on lui propose. Lorsqu'il est content, il le dit. Lorsqu'il ne l'est pas, il se fait entendre, il nous écrit, sur Facebook, sur les sites web. Il nous appelle encore parfois. L'écouter signifie comprendre ce qu'il fait de nos contenus, de nos propositions éditoriales. Cela ne signifie pas les changer, mais comprendre comment interagir et parler avec ce public.

Troisièmement, on doit inventer en permanence de nouvelles façons d'écrire pour les supports numériques. Ce n'est pas quelque chose qu'on fait une fois pour toutes, mais plusieurs fois par mois, voire plusieurs fois par jour dans certains cas. Avec le numérique, on n'est pas au bout de l'histoire, mais au début de celle-ci. Tous les médias publics ou privés, traditionnels, nouveaux, apprennent en permanence, s'étonnent, sont parfois sidérés. On doit transformer cet état en inventivité, en créativité, en nouveaux formats qui nous permettent de conquérir les publics qui fuient les médias traditionnels - pas tant que cela en fait.

Bruno PATINO , Directeur éditorial d'ARTE France. - Je suis parfaitement en accord avec une partie de ce qui a été dit. J'aimerais cependant aborder quelques points complémentaires.

Cela fait un certain nombre d'années que nous faisons tous les trois du numérique, pour certains dans l'audiovisuel public - où Laurent et moi avons travaillé ensemble. J'en fais personnellement depuis vingt ans, et depuis dix ans dans l'audiovisuel public. On me pose toujours la même question : quelle stratégie numérique pour Radio France, France Télévisions ou Arte ? Je réponds que je ne souhaite pas avoir une stratégie « numérique », mais une stratégie « à l'heure du numérique ».

Nous sommes un certain nombre à ne plus opposer depuis très longtemps le numérique et l'analogique : c'est la société qui change et se connecte. Les médias ont une mission et doivent adopter une stratégie globale. Rassembler à l'heure du numérique, c'est agir dans une société qui se fragmente. Il ne s'agit pas de dire qu'on va oublier le linéaire, le poste de télévision, pour passer à la connexion.

Quand on est dans l'audiovisuel public, on a à la fois une grande chance, mais aussi une certaine malchance. Notre chance, c'est de pouvoir échapper à la loi d'airain de l'ère numérique selon laquelle les usages s'ajoutent, mais les modèles économiques se détruisent. Tout le monde, jeune comme moins jeune, a envie de tout avoir, le téléviseur, le smartphone, la connexion. En même temps, les opérateurs privés, lorsqu'ils développent tous les usages en même temps, ne peuvent que constater que les modèles économiques sont en forte compétition. Ils doivent opérer des choix. Grâce à son financement, l'audiovisuel public a la capacité de répondre aux usages du public. Notre chance est d'être, au sein d'un écosystème global, un acteur emblématique.

Malheureusement, on a tendance à vouloir aligner le calendrier de la réforme avec celui de l'innovation. Personnellement, comme praticien, je considère que la réforme prend forcément du temps, alors que développer et innover requiert de l'agilité, une forte rapidité d'action et de la réflexion, ce que nos structures ne nous permettent pas toujours de bien caler.

Avec Laurent, nous avons développé France TV Info en six mois. À l'époque, cela a été perçu comme un peu trop rapide. Je plaide pour bien dissocier les deux calendriers, avoir des structures agiles pour pouvoir développer les choses très vite, tout en réformant ce qui doit l'être.

Ce qu'a dit Laurent est très important : nous sommes là pour aller chercher les gens dans leurs usages. Pour moi, un usage, c'est une expérience, un mélange de trois éléments différents, le contenu, l'interface par laquelle on utilise ce contenu - téléviseur, réseau social, plateforme vidéo, nos propres sites - et la capacité de contextualiser cette consommation qui nécessite forcément de la data et une capacité à proposer. Dès lors que vous modifiez un de ces trois éléments, vous modifiez l'expérience.

Comme Francis et Laurent, je ne considère plus uniquement les plateformes et les réseaux sociaux comme des outils de distribution mais comme partie prenante à une proposition éditoriale intégrée.

C'est là que se situe le grand défi. Nous sommes tous obnubilés par le fait de développer les contenus - et il faut le faire - mais on se rend compte peu à peu qu'on ne propose pas la même chose suivant les plateformes. Une série de Netflix et une série de France Télévisions, ce n'est pas la même chose - écriture, rapidité, habitude d'un côté, addiction de l'autre - bien qu'une série France Télévisons puisse bien vivre chez Netflix et inversement. Il existe donc une rétroaction dans l'usage proposé et la façon de produire. C'est formidable, parce que cela nécessite une richesse de production qu'on n'a jamais eue jusqu'ici. On est tous concentré sur les contenus, mais on se demande comment ne pas trop perdre la main sur l'interface ou la contextualisation, sans être dépendant des GAFAM, des outils, des autres.

Tout en rejoignant Francis et Laurent sur les défis qu'ils ont mentionnés, je me permets d'en ajouter un qui n'efface pas le reste, le défi technologique. On sous-estime aujourd'hui profondément les besoins financiers, industriels et technologiques. Le défi, pour le service public, c'est de parvenir à faire en sorte que le public trouve des choses qu'il ne cherche pas. La culture, l'information, la diversité, la richesse sociale, la synchronicité sociale consistent à trouver des choses qu'on ne cherche pas et qui enrichissent, qui ouvrent l'esprit et émancipent. Je crois au service public comme force d'émancipation. C'est aussi un défi technologique.

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - Nous allons passer la parole aux créateurs.

Vous êtes des raconteurs d'histoire. Le défi qui vous est lancé pour aider le service public à être innovant est d'être aussi des créateurs d'expériences. Le ressentez-vous ainsi ?

Sophie DESCHAMPS, Présidente de la SACD. - Je trouve que les auteurs ne sont pas suffisamment au centre de ce qu'on a entendu aujourd'hui. Qui va amener l'innovation, la créativité si ce ne sont les auteurs ?

Or on est pour l'instant mal engagé. Les pouvoirs publics annoncent la sanctuarisation des investissements. Nous écrivons de la fiction : nous savons que les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent. La dernière sanctuarisation s'est soldée par une baisse de 10 millions d'euros !

On ne peut tenir notre promesse que si les investissements touchant la création sont sanctuarisés dans la loi de finances chaque année. Il faut la légitimer afin qu'elle ne joue plus le rôle de variable d'ajustement. La sanctuarisation n'est cependant pas tout. Quand on nous annonce une dotation qui baisse, ce sont les droits d'auteur qui baissent. Les auteurs sont rémunérés proportionnellement au chiffre d'affaires des chaînes.

Dans le numérique, les rémunérations sont encore assez faibles, mais négociées. Cela ne nous pose pas de problème. Que signifie sanctuariser la création alors qu'on va baisser la rémunération des auteurs, alors que les producteurs n'ont pas augmenté les contrats des auteurs depuis vingt ans, dans un monde qui n'est pas salarié et ne touche pas le chômage ? Je sais que je m'adresse à une salle où les trois quarts des personnes sont salariés et n'ont aucune notion de nos métiers. Il faudrait que ceux qui nous gouvernent ne tuent pas les auteurs et ne les appauvrissent pas. La paupérisation des auteurs n'est pas la mission du service public. Pourtant, c'est ce qui se profile ! Aidez-nous, car cela va plutôt mal.

Les auteurs sont tous prêts à l'exploitation numérique. Cela ne leur pose aucun problème. On a tous les contrats qu'il faut, mais la transition numérique ne doit pas être une casse numérique. Je voudrais remercier ici Catherine Morin-Desailly d'avoir proposé un moratoire destiné à établir une transition, après l'annonce de suppression de la chaîne des enfants sans consultation, dans une ignorance absolue de la réalité. La BBC a perdu 85 % de son audience après l'avoir fait et y est vite revenue !

L'animation est un fleuron français. Il faut donc continuer et négocier avec les auteurs. Si France Télévisions ne peut plus rémunérer les auteurs, ceux-ci iront sur les plateformes qui les rémunèrent et qui vont être de plus en plus productrices d'oeuvres - je parle bien d'oeuvres, et non de contenus, qui est un terme affreux.

Il faut que l'audiovisuel et les chaînes conservent les auteurs d'excellence et l'animation, car c'est la fiction qui fait la stabilité de l'audience. Nous avons des pics d'audience formidables avec le football, mais cela demeurent des pics. C'est la fiction qui stabilise l'audience. D'ailleurs les plateformes proposent-elles autre chose ?

Il faut aussi moderniser la chronologie des médias et que France Télévisions propose enfin le cinéma en télévision de rattrapage. Je m'adresse à ceux qui nous gouvernent : remettez les auteurs au centre et ne les paupérisez pas, sous peine de tout perdre !

Radu MIHAILEANU, Président de l'ARP. - J'aimerais remercier Catherine Morin-Desailly, Jean-Pierre Leleux et David Assouline d'avoir organisé ce colloque, qui est très important. Je trouve toutes les interventions brillantes, et je me demande pourquoi on ne se met pas tous autour d'une table durant deux ou trois jours. On trouverait beaucoup de solutions, car nous sommes tous complémentaires.

L'ARP regroupe 218 auteurs, réalisateurs et producteurs parmi les plus connus : Éric Toledano, Olivier Nakache, Jean-Louis Bertuccelli, Michel Hazanavicius, etc. Nos illustres prédécesseurs - Claude Berry, Claude Lelouch, Agnès Varda et les autres - ont inventé un concept extraordinaire, l'exception culturelle, qui nous protège encore et nous guide philosophiquement. Leur combat d'il y a 30 ans, même s'il est très différent, la révolution numérique étant passée par là, a cependant des points communs avec celui d'aujourd'hui. L'exception culturelle est née du combat face au GATT et à Hollywood qui, comme les plateformes ou les GAFAM aujourd'hui, voulaient conquérir tous les marchés et les esprits pour imposer leur façon de penser et de consommer. C'étaient aussi des envahisseurs économiques qui voulaient vendre des produits américains.

Cette génération a trouvé une réponse géniale. On revient à la question de savoir comment lutter contre les GAFAM. Face à un monstre, il ne suffit pas toujours de créer un autre monstre pour le combattre. C'est là l'histoire de la condition humaine. L'exception culturelle a démontré qu'on pouvait avoir de meilleures idées !

Je parlerai ici au nom des auteurs. Nous nous posons beaucoup la question du sens. Nous ne sommes pas naïfs : nous savons bien que nous vivons une nouvelle révolution. Ce qui a été dit par les diffuseurs est très intéressant : c'est à présent un dialogue à double sens, entre le téléspectateur et le poste de télévision et vice-versa. Le langage a changé avec les outils, mais cela demeure des outils. Qui est l'outil et qui est le maître ? Quid de l'humanité ?

Certains services audiovisuels jouent un grand rôle en matière d'éducation, et je suis très heureux que vous ayez invité le ministre de l'éducation nationale. L'audiovisuel a en effet aujourd'hui énormément d'influence dans ce secteur, et pas uniquement sur la façon de penser. Je ne puis m'interdire, en tant que rescapé de la dictature, de regarder le destin de l'Europe qui avance, et me poser la question de notre rôle au milieu de cette révolution numérique qui comporte des acteurs globalisants dont le seul but est d'accaparer le maximum de marchés. Netflix, Google, Amazon, lorsque le marché chinois, demain, sera ouvert, nous imposeront de ne pas les gêner sur des marchés très porteurs.

Certains acteurs audiovisuels recourent également à l'addiction. L'addiction est-elle compatible avec le savoir, la démocratie et le libre arbitre ? N'est-on pas en train de transformer l'être humain en un mouton qui suit d'autres moutons ? Les auteurs et les acteurs du service public doivent jouer un rôle de précurseurs et ne pas être esclaves du marché. Ils doivent créer une pensée différente.

Pour nous, l'essence du service public est d'être gratuit, avec un paiement obligatoire, comme l'éducation nationale. Si on demandait leur avis aux enfants, certains ne voudraient faire que du sport, d'autres ne désireraient que dessiner. Notre rôle d'adultes n'est pas uniquement de leur donner ce qu'ils désirent, mais de mettre à leur disposition des éléments qui peuvent les aider à devenir des adultes, dans un monde de plus en plus complexe.

Le numérique est pour nous aussi une chance, mais elle ne sera valable que si nous évitons, grâce à la régulation, de nous faire piétiner par des monstres qui nous demandent de penser comme ils veulent.

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - La transition est parfaite pour évoquer la régulation. Olivier Bomsel nous a expliqué que les bases de celle-ci étaient en train de chanceler, que l'échange d'une fréquence contre des obligations n'allait plus fonctionner longtemps, et qu'il fallait à présent trouver comment réguler l'OTT.

Que peut nous dire le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) sur ce point ?

Nathalie SONNAC, Membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) - Merci à Catherine Morin-Desailly et Jean-Pierre Leleux de m'avoir invitée à participer à cette réflexion, qui me semble fondamentale.

Il ne faut pas oublier - ce que fait, me semble-t-il, Olivier Bomsel - que les médias marchent sur deux pieds. Tout d'abord, les médias sont vecteurs de démocratie. Qu'ils soient publics ou privés, ils sont porteurs de sens et véhiculent des valeurs indispensables au bon fonctionnement de notre société. C'est donc une industrie entièrement à part, du fait de la valeur intrinsèque qu'ils véhiculent.

Cette industrie crée de l'emploi, de la valeur ajoutée, exporte. C'est du soft power , de la création, et cela participe donc à notre économie. Il s'agit d'un secteur riche, qui a beaucoup à apporter, sans lequel on ne peut vivre, pour des raisons culturelles mais aussi économiques. Je rejoins en ce sens Olivier Bomsel.

En second lieu, l'audiovisuel et le numérique redistribuent les cartes du secteur. On assiste à plusieurs révolutions centrales : une révolution technologique, une révolution économique, où l'on trouve de nouveaux acteurs pour la plupart américains - GAFAM, Netflix - qui viennent concurrencer directement les autres de façon déloyale. Il existe une véritable asymétrie réglementaire, mais aussi fiscale. Si on a la possibilité de « consommer » un ensemble d'oeuvres audiovisuelles dans des conditions distinctes, en revanche, les modèles d'entreprises sont très différents.

Troisièmement, nous ne sommes pas uniquement dans une réflexion nationale, on l'a vu ce matin - on pense à la Suisse, à l'Allemagne, à l'Angleterre. Tous les secteurs publics sont bousculés et subissent des modifications en termes de financement, d'organisation, de gouvernance. On a besoin d'une véritable réforme de l'audiovisuel à tous les niveaux de la chaîne des valeurs.

Ces transformations s'inscrivent dans le cadre de la directive « service des médias audiovisuels » (SMA). Depuis 2013, la Commission européenne interroge l'ensemble des opérateurs audiovisuels européens à propos de différents points : de quoi a-t-on besoin ? Quels sont les nouveaux usages ? Comment appréhende-t-on ces nouvelles technologies ? Quel modèle d'entreprise peut-on retrouver ? La publicité est-elle suffisante, etc. ?

Le trilogue s'est achevé le 6 juin 2018. La dernière version de cette directive sera adoptée à l'automne avec deux apports essentiels, d'une part l'élargissement du champ de la directive, qui prend en compte l'ensemble des acteurs qui oeuvrent dans le domaine de l'audiovisuel - plateformes de partage de vidéo ou de streaming , réseaux sociaux... On leur impose les valeurs dans lesquelles l'Europe a envie de se projeter et où l'audiovisuel souhaite d'exister : protection des jeunes, des consommateurs, lutte et discours contre la haine, etc.

Deuxième valeur ajoutée au champ de la directive : quel que soit le pays dans lequel va s'implanter un certain type de plateformes distinctes de celle de Google, Netflix ou autres, ce ne sont plus les règles du pays d'origine qui vont s'appliquer, mais celles du pays cible, avec des valeurs démocratiques destinées à promouvoir les oeuvres européennes et nationales.

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - Y a-t-il encore des choses à faire ?

Nathalie SONNAC, Membre du CSA. - Il ne s'agit que d'un premier pas. On entre à présent dans la phase de transition. Il faut aller plus vite, enclencher la réforme, qui est indispensable. Le cadre de la loi de 1986 ne convient plus. Tous les acteurs, des auteurs jusqu'aux distributeurs, en pensant par les éditeurs, sont transcendés par cette vague numérique, et le CSA y participe.

Ce changement de paradigme va modifier la façon de concevoir l'intervention de la puissance publique à deux égards. Pouvoirs publics et régulateurs doivent s'interroger sur leur rôle respectif du fait du risque de surrégulation, qui peut freiner l'innovation et le développement du secteur, mais aussi du risque de sous-régulation, qui peut donner lieu à des pratiques abusives, discriminatoires, contraires aux grands objectifs de la loi de 1986, qui demeurent.

Pour cela, le CSA a besoin de disposer de moyens adéquats, que l'on connaît déjà pour certains. Le CSA les a testés, tout comme d'autres régulateurs audiovisuels extérieurs. De nombreux outils, dans un cadre souple et élargi, sont indispensables - autorégulation, corégulation, régulation participative -, pour tendre vers une supra-régulation. Ces nouveaux outils sont indispensables dans un univers ouvert, global et concurrentiel, mais on ne peut plus avoir de contrainte de résultats. Ce dont on a besoin, c'est d'une contrainte de moyens.

Le nouveau régulateur devra avoir une sorte de boîtes à outils à offrir à chaque opérateur. On pourra contrôler la boîte à outils et le fait que ces moyens sont ou non mis en place.

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - Que manque-t-il aujourd'hui en termes de régulation ?

Francis DONNAT, Secrétaire général de France Télévisions. - De très bons éléments viennent de l'Union européenne, comme la directive SMA : les plateformes de partage de vidéo vont pour la première fois être incluses dans le champ d'application de la régulation audiovisuelle. C'est historique, et c'est une question de valeurs européennes.

Je mets ceci en lien avec l'entrée en application du règlement européen sur la protection des données personnelles. Là aussi, c'est l'Union européenne qui se dote d'un corpus de règles qui va s'appliquer au numérique en Europe.

Beaucoup reste à faire par ailleurs au niveau national pour actualiser la loi de 1986 et aboutir à une loi plus simple, plus souple et plus stable, afin de lever un certain nombre d'asymétries de régulation qui existent encore. Elles sont le produit de l'histoire et issues de stratifications historiques des textes, mais ne sont plus justifiées pour beaucoup.

Troisièmement, je voudrais revenir sur ce qu'a dit le professeur Bomsel dans la vidéo que l'on a vu tout à l'heure : la régulation de l'audiovisuel est justifiée pour un double motif. Il s'agit en premier lieu - c'est un principe constitutionnel - de la régulation d'une ressource rare, tant publique que privée, qui est la fréquence hertzienne.

Un autre motif est encore plus important - c'est le Conseil constitutionnel qui le dit - : la régulation de l'audiovisuel, tant public que privé, doit permettre de garantir la liberté d'opinion, la libre circulation des idées, le pluralisme et la diversité culturelle. Tout cela découle d'éléments au coeur de notre pacte social de 1789. C'est pour cette raison qu'on a encore besoin d'une régulation de l'audiovisuel public et privé.

Bruno PATINO , Directeur éditorial d'ARTE France. - Effectivement, le problème provient des asymétries. Ce que Nathalie Sonnac a dit à ce sujet est tout à fait juste. J'ai malgré tout tendance à penser que notre comportement devant le téléviseur va se modifier fortement.

Aux États-Unis, on constate que le temps passé devant le téléviseur ne change pas tellement. En revanche, il existe une redistribution du temps au profit des offres « non linéaires » et de ce qui vient par le biais de l'OTT, etc. En France, le non linéaire devant le téléviseur passe avant tout par les réseaux managés de l'IPTV et par des acteurs certes de taille mondiale, mais plutôt français, qui n'échappent pas au système de régulation.

Je pense que le non linéaire va exploser. Certains estiment qu'en 2022, il représentera presque 50 % du temps passé devant le téléviseur pour une durée à peu près stable. La bataille qui va avoir lieu entre l'OTT et les réseaux managés, IPTV ou autres, va être considérable. S'il existe une asymétrie entre ces deux univers, auteurs et diffuseurs vont connaître un énorme problème. J'ai tendance à penser que l'OTT est un des défis principaux pour les diffuseurs qui deviennent éditeurs, les auteurs, les producteurs de fictions. Je ne vois cependant pas comment on pourra faire sans discuter avec les acteurs de l'IPTV. La tension qui a lieu aux États-Unis par l'intermédiaire des câblo-opérateurs arrive chez nous, avec des conséquences sur le plan de la régulation et de la production.

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - Pensez-vous que l'on puisse réenchanter l'audiovisuel public ?

Nathalie SONNAC, Membre du CSA. - Le CSA a mené une étude sur l'avenir de l'audiovisuel avec Nicolas Curien et une quarantaine d'experts, au sein du think tank CSA Lab, afin d'imaginer des scénarios. Parmi ceux-ci figure un scénario de fracture tout à fait possible où l'audiovisuel est totalement noyé dans le numérique et où la question technologique est centrale.

Le scénario auquel nous souhaitons aboutir est un scénario de symbiose, où l'audiovisuel historique a réussi à s'insérer et où les technologies de réseaux et les terminaux assurent un accès neutre. On est dans cette transition : nous souhaitons aller vers une offre riche, de qualité, accessible à l'ensemble des consommateurs, avec une technologie neutre, dans un environnement sain. Nous avons, pour ce faire, proposé une quinzaine de leviers.

On a un an ou deux ans devant nous. Il ne faut pas se précipiter mais prendre en considération l'ensemble des acteurs économiques, des innovations et des technologies pour arriver là où l'on souhaite, sans se faire « embarquer » dans un mouvement qui n'est pas celui qu'on a décidé et qui ne correspondrait pas à l'audiovisuel dont on a envie, avec des valeurs démocratiques garantissant la liberté d'expression.

Sophie DESCHAMPS, Présidente de la SACD . - Il faut aussi un partage des valeurs morales, et que la diversité soit sur les écrans. Il faut arrêter d'être entre « purs blancs ». C'est insupportable ! Réenchanter signifie que le personnel des chaînes ne soit pas tyrannisé par les supérieurs hiérarchiques. Il y a de l'humain à remettre là-dedans. Si on veut recréer du désir, de la force de travail et de la créativité, il faut sortir de ce phénomène de peur qui rejaillit sur toute la pyramide, de haut en bas. Il faut donc partager une certaine morale, des valeurs et surtout remettre de la diversité.

Bruno PATINO , Directeur éditorial d'ARTE France. - Le défi est en effet très grand, mais on ne part pas de zéro. Beaucoup de choses se font déjà dans les entreprises audiovisuelles françaises et dans l'audiovisuel public. Tout l'audiovisuel réalise aujourd'hui un appel d'offres commun dans le domaine des nouvelles écritures. Cela se fait naturellement entre les équipes, avec les auteurs et les producteurs. Il y a là une amorce de développement d'écosystème avec de nouvelles personnes, de nouvelles créations, etc.

Paradoxalement, je ne crois pas que les équipes de l'audiovisuel public soient dotées des plus mauvais en matière numérique. J'ai toujours été impressionné par la qualité des personnels des différentes entreprises que j'ai côtoyées. Le tout est de leur laisser un terrain de jeu qui puisse leur permettre d'exprimer leur créativité.

Francis DONNAT, Secrétaire général de France Télévisions. - À l'heure où l'on parle de fake news, de manipulation de l'opinion publique, d'enfermement algorithmique dans des bulles de préférence, le service public n'a jamais été aussi indispensable pour le lien social, la diversité culturelle et la diversité sociale.

Les entreprises du service public, les équipes et les salariés de France Télévisions sont fiers d'assumer leur mission quotidienne de service public. Ils vont continuer à le faire dans le cadre d'un environnement qui se transforme. Nous nous transformerons au rythme de ces défis numériques.

Laurent FRISCH, Directeur du numérique de Radio France. - On n'a pas abordé le sujet de l'organisation. Le spectre hertzien est extrêmement important. Notre richesse principale, ce sont nos salariés, qui ont un savoir-faire extraordinaire.

Le numérique nous impose toutefois de revoir notre façon de travailler ensemble, et au sein de chacune de nos entreprises. On ne peut plus gouverner ces entreprises par le haut. Chaque semaine, je dois lire un document d'une trentaine de pages où chaque ligne est un fait marquant que je devrais connaître pour prendre des décisions éclairées. Je n'ai pas cette capacité. Je suis obligé d'organiser les actions autour du numérique comme des cellules qui savent fonctionner au sein de l'entreprise avec un certain degré d'autonomie. C'est extrêmement important et assez difficile à mettre en oeuvre.

Par ailleurs, les personnes qui traiteront demain du numérique au sein de l'audiovisuel public - en tout cas au sein de Radio France - ne sont pas différentes de celles qui font de la radio aujourd'hui. La radio est leur langue maternelle. Le numérique est en train de devenir une langue vivante qu'elles apprennent à grande vitesse, presque avec gourmandise, ce qui ne laisse pas de me surprendre et de me réjouir.

Radu MIHAILEANU, Président de l'ARP. - Que reste-il à réguler ?

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - On n'a plus assez de temps...

Radu MIHAILEANU, Président de l'ARP. - Ce n'est pas grave : je n'ai jamais rien eu et j'ai fait avec !

Il faut essayer de réunir les conditions d'éditeur, de distributeur, d'hébergeur, un tas de personnes jouant là-dessus pour se soustraire à leurs obligations. Qu'est-ce qu'une plateforme gratuite ? Qu'est-ce qu'une plateforme payante ? Amazon amorce un mouvement où la définition de l'abonné est vague, comme pour Canal Plus, qui navigue entre 4 millions et 8 millions d'abonnés. L'abonné n'est plus seulement celui qui a accès aux oeuvres.

Il existe là un danger de transfert de la valeur des oeuvres. On l'a vu avec la carte illimitée, qui a amené un transfert de la valeur du cinéma vers la confiserie et autres. C'est le cas dans l'audiovisuel avec Amazon Prime, où l'on paye 47 euros par an pour avoir accès aux oeuvres, alors que le chiffre d'affaires se fait ailleurs.

On n'a pas non plus évoqué le dumping. Il faut que l'on redéfinisse la loi à ce sujet. On voit bien comment BeIn Sports a détruit en partie Canal Plus, tout comme SFR Altice a failli détruire tout le monde, et ce que Spotify est en train de faire ! Amazon se considère comme une « jeune entreprise » qui a le droit de faire du dumping.

Didier Quillot, tout à l'heure, nous a fait sourire en disant que le football crée du lien social : où est ledit lien lorsqu'on vend la Ligue 1 à un acteur ibéro-chinois qui ne permet d'avoir accès au football qu'en payant ? Ceux qui ne peuvent payer ne pourront plus être devant la télévision. Je le remercie énormément !

On n'a pas non plus parlé de la valeur des datas et de leur transparence. La question de la fiscalité n'est par ailleurs toujours pas résolue, même si on a fini par régler la question de la TVA après quinze ans de bataille. On espère que la loi sur l'audiovisuel permettra d'obtenir un pourcentage sur le chiffre d'affaires du pays de destination afin de l'investir dans le préfinancement. Investir seulement dans le catalogue est très facile : il suffit, lorsqu'on s'appelle Netflix, d'acheter des oeuvres centenaires à un euro le kilomètre pour remplir le quota de 30 %. Cela n'aide toutefois en rien la création artistique.

Pour finir, je suis optimiste pour le service public. Il y a unanimité depuis ce matin pour dire que le service public doit être financé par le citoyen, que l'assiette doit donc être élargie à tous les écrans, voire plus, et qu'il serait idéal de le libérer complètement de la publicité afin qu'il ne soit plus l'esclave de l'audimat. Il y aurait de cette manière une complémentarité avec les acteurs privés, qui ne créeraient que de la qualité, étant obligés de se démarquer les uns des autres d'une autre manière.

Sophie DESCHAMPS, Présidente de la SACD. - Dernier voeu : qu'il y ait un tout petit peu plus de parité dans les débats !

Isabelle REPITON, journaliste à Satellifax. - Merci à tous.

De gauche à droite : Nathalie Sonnac, Sophie Deschamps, Bruno Patino, Francis Donnat,
Laurent Frisch, Radu Mihaileanu

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