II. QUELLE UNION EUROPÉENNE À L'HORIZON 2025 ?

Le deuxième volet du programme de travail pour 2019 s'inscrit dans la perspective du Conseil européen de Sibiu, organisé le 9 mai prochain et dédié à l'avenir de l'Union européenne. Comme l'an passé, la Commission européenne devrait présenter plusieurs initiatives en vue de définir les contours d'une Union européenne renforcée à l'horizon 2025.

Plusieurs axes sont envisagés :

- l'extension du recours à la majorité qualifiée dans plusieurs domaines ;

- le renforcement du rôle international de l'euro ;

- la consolidation de l'État de droit au sein des pays membres ;

- l'amélioration de la communication autour de l'Union européenne.

La plupart des propositions de la Commission européenne devraient être détaillées au cours des premier et deuxième trimestres. Leur annonce appelle néanmoins déjà plusieurs remarques.

A. LE PASSAGE À LA MAJORITÉ QUALIFIÉE

L'article 48 du traité sur l'Union européenne permet au Conseil européen d'adopter, à l'unanimité, après consultation du Parlement européen et de la Commission européenne, une décision autorisant le Conseil à statuer à la majorité qualifiée dans les domaines pour lesquels l'unanimité est habituellement requise.

Le programme de travail cible plusieurs champs dans lesquels la Commission européenne souhaiterait un passage à la majorité qualifiée :

- la politique fiscale ;

- la politique sociale ;

- les questions relatives à l'énergie et au climat.

Votre commission des affaires européennes s'est déjà prononcée sur cette option à l'occasion de l'examen du programme de travail pour 2018, ciblant en premier lieu le domaine fiscal. Elle avait fait valoir à l'époque que l'approfondissement de la coopération fiscale au sein de l'Union européenne passait, à moyen terme, par :

- la lutte contre l'évasion fiscale, considérée comme une priorité, tant elle pose la capacité de l'Union à lutter contre les distorsions de concurrence en son sein ;

- une taxation plus juste des grandes entreprises du secteur numérique (GAFA) permettant de compenser la réduction du manque à gagner fiscal pour les États membres sur le territoire desquels s'exercent les activités des GAFA ;

- le passage du vote à l'unanimité au vote à la majorité.

Cette ambition mérite en effet d'être soutenue tant elle doit favoriser un rapprochement des fiscalités, préalable indispensable à toute ambition industrielle européenne. Comme l'a rappelé le groupe de suivi sur le retrait du Royaume-Uni et la refondation de l'Union européenne dans son rapport de février 2017 sur la relance du projet européen, un grand groupe européen ne pourra réellement se développer et tirer profit des potentialités offertes par plusieurs États membres que s'il peut s'appuyer sur une fiscalité à la fois favorable à l'investissement et harmonisée au sein de l'Union 19 ( * ) . Cette harmonisation passe indubitablement par une plus grande souplesse dans la prise de décision au Conseil.

La Commission européenne envisage également une extension du passage à la majorité qualifiée dans le domaine de l'énergie. Vos rapporteurs rappellent que toute intervention de l'Union européenne doit être traitée sans préjudice de la compétence, reconnue à chaque État membre, de déterminer le « mix énergétique » sur son territoire. Tout texte doit, de fait, respecter scrupuleusement la répartition des compétences entre l'échelon de l'Union et l'échelon national, telle qu'elle résulte du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Dans ces conditions, nous ne pouvons qu'être réservés sur un changement des règles de vote au Conseil sur ce point.

S'agissant de la politique sociale, il conviendra d'attendre le détail des propositions de la Commission européenne, attendues au cours du premier trimestre 2019. Vos rapporteurs constatent, à première vue, que les textes les plus emblématiques - à l'instar du détachement des travailleurs ou des règles en matière de congé parental - sont déjà adoptés à la majorité qualifiée. Au-delà de l'approche juridique, il convient avant tout de mettre en oeuvre un mécanisme d'incitation financière à la convergence sociale, comme l'a proposé le Sénat dans une résolution européenne adoptée à l'initiative de votre commission des affaires européennes 20 ( * ) . Le texte visait la mise en place progressive d'un dispositif destiné à permettre un rapprochement des règles relatives aux marchés du travail et aux systèmes sociaux. Les fonds seraient orientés vers l'atteinte d'objectifs sociaux, définis préalablement, à l'aide du tableau de bord annexé au socle européen des droits sociaux. Des bilans d'étape seraient alors effectués tout au long du cadre financier pluriannuel pour évaluer la poursuite des financements. Un tel mécanisme devrait permettre de conférer une réelle valeur au socle européen des droits sociaux.


* 19 Relancer l'Europe : Retrouver l'esprit de Rome - Rapport d'information n° 434 (2016-2017) de MM. Jean-Pierre Raffarin et Jean Bizet, fait au nom du groupe de suivi sur le retrait du Royaume-Uni et la refondation de l'Union européenne, déposé le 22 février 2017.

* 20 Résolution européenne du Sénat n° 108 (2017-2018) sur la convergence sociale dans l'Union européenne, 26 mai 2018, et Le socle européen des droits sociaux : première ébauche d'un Code de convergence sociale ? - Rapport d'information n° 457 (2017-2018) de Mmes Pascale Gruny et Laurence Harribey, fait au nom de la commission des affaires européennes, 20 avril 2018.

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