N° 348

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 février 2019

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (1) et de la délégation sénatoriale aux outre-mer (2) sur les actes du colloque « L'engagement des femmes outre-mer : un levier clé du dynamisme économique » du 20 février 2019,

Par Mme Annick BILLON et M. Michel MAGRAS,

Sénateurs

(1) Cette délégation est composée de : Mme Annick Billon, présidente ; M. Max Brisson, Mmes Laurence Cohen, Laure Darcos, Joëlle Garriaud-Maylam, Françoise Laborde, M. Marc Laménie, Mme Claudine Lepage, M. Claude Malhuret, Mmes Noëlle Rauscent, Laurence Rossignol, vice-présidents ; Mmes Maryvonne Blondin, Marta de Cidrac, Nassimah Dindar, secrétaires ; Mmes Anne-Marie Bertrand, Christine Bonfanti-Dossat, Céline Boulay-Espéronnier, Marie-Thérèse Bruguière, MM. Guillaume Chevrollier, Roland Courteau, Mmes Chantal Deseyne, Nicole Duranton, Jacqueline Eustache-Brinio, Martine Filleul, M. Loïc Hervé, Mmes Victoire Jasmin, Claudine Kauffmann, Valérie Létard, M. Martin Lévrier, Mme Viviane Malet, M. Franck Menonville, Mmes Michelle Meunier, Marie-Pierre Monier, Christine Prunaud, Frédérique Puissat, Dominique Vérien.

(2) Cette délégation est composée de : M. Michel Magras, président ; MM. Maurice Antiste, Stéphane Artano, Mme Esther Benbassa, MM. Pierre Frogier, Jean-Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Jean-François Longeot, Mme Vivette Lopez, MM. Victorin Lurel, Dominique Théophile, vice-présidents ; M. Jacques Genest, Mmes Victoire Jasmin, Viviane Malet, M. Gérard Poadja, secrétaires ; M. Guillaume Arnell, Mme Viviane Artigalas, MM. Jean Bizet, Patrick Chaize, Mme Catherine Conconne, MM. Mathieu Darnaud, Michel Dennemont, Mme Nassimah Dindar, M. Daniel Gremillet, Mme Jocelyne Guidez, M. Abdallah Hassani, Mme Gisèle Jourda, MM. Antoine Karam, Nuihau Laurey, Henri Leroy, Thani Mohamed Soilihi, Georges Patient, Mme Catherine Procaccia, MM. Michel Raison, Jean-François Rapin, Claude Raynal, Charles Revet, Gilbert Roger, Jean Sol, Mme Lana Tetuanui, M. Michel Vaspart.

OUVERTURE

Gérard LARCHER

Président du Sénat

Mesdames et Messieurs, mes chers collègues,

Je salue la présence dans cette salle de deux anciens ministres de l'outre-mer, que je retrouve avec beaucoup de plaisir, ainsi qu'Olivier Stirn. Je salue aussi la présidente de la Délégation aux droits des femmes, Annick Billon, le président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer, Michel Magras, ainsi que notre collègue vice-président du Sénat, Thani Mohamed Soilihi, et tous nos collègues sénatrices et sénateurs.

Je tiens à souligner auprès de nos compatriotes des outre-mer le bonheur que nous avons à les accueillir ici.

Le Sénat représente les territoires, les départements, les collectivités et les territoires d'outre-mer qui font partie de la conception de la République que nous défendons d'une façon particulière, ici au Sénat.

Je me rends compte que je ne me rends pas assez souvent dans les outre-mer. J'y retournerai, et pas uniquement en Martinique ! En Martinique, les Larcher sont des cousins, tant historiquement que réellement.

À quelques jours de la Journée internationale des droits des femmes, vous avez souhaité, mes chers collègues des deux délégations, mettre en lumière l'influence et le rôle des femmes ultramarines, notamment dans le développement économique de leur territoire. Cet après-midi est consacré à des témoignages et des échanges avec des femmes engagées. Engagées dans les organisations représentant le tissu entrepreneurial de nos outre-mer, engagées dans le secteur agricole, secteur essentiel des économies ultramarines. Nous réunissons aussi au Sénat cet après-midi des femmes audacieuses, notamment en matière d'innovation, des femmes passionnées, ambitieuses pour elles-mêmes, pour leur famille, leur territoire, que nos deux délégations ont choisi de mettre à l'honneur, lors de ce colloque.

Cette initiative commune à nos deux délégations est un peu une première. Nous avons l'habitude, avec ces deux délégations, des « premières ». Celle-ci revêt une importance particulière, si j'en juge par le nombre important d'intervenantes venues de tous nos départements et collectivités d'outre-mer, mais aussi de la métropole. En effet, nous avons presque manqué de place : il nous faudrait un premier rang immense pour vous accueillir, ce qui témoigne de votre intérêt pour cet événement.

Bienvenue à toutes au Palais du Luxembourg !

Cette belle initiative - je le dis à nos deux présidents - permet de nouer des partenariats avec des acteurs économiques locaux, de renforcer des liens de proximité avec le monde des entreprises, acteurs essentiels de la vie des territoires. Cette approche territoriale est d'autant plus pertinente au regard des spécificités qui caractérisent les économies ultramarines. En ces temps de difficultés sociales et sociétales que traverse notre pays, c'est des territoires que vient la solidité de la République. Ne l'oublions jamais ! Ici, au Sénat, notre responsabilité constitutionnelle doit s'exercer de manière particulière.

De plus, nous connaissons le rôle structurant de nos petites et moyennes entreprises, dont le maillage est vital pour nos territoires en termes de rayonnement, d'équilibre et de cohésion sociale. Il est vrai qu'ici nous avons un regard particulier sur la valorisation des potentiels locaux. La valorisation et la promotion de l'entrepreneuriat féminin doivent être envisagées tout particulièrement dans les territoires ultramarins en tant que leviers de développement, de croissance, d'innovation, mais aussi comme une source d'émancipation, même si depuis longtemps l'autorité dans la sphère familiale est essentiellement maternelle. Aussi, nous ne pouvons que regretter que nous soyons assez pauvres en études statistiques sur ce sujet. Cette rencontre, comme ce fut le cas des conférences économiques de bassin, organisées ces dernières années par notre délégation aux outre-mer, toujours de très haute tenue, toujours passionnantes, ne manquera pas de mettre en lumière les nombreuses initiatives innovantes qui voient le jour grâce à vous. Le rôle de laboratoire d'innovation de nos collectivités ultramarines et de ceux qui y vivent, face aux grands défis (mondialisation, changement climatique, vieillissement des populations) est en effet aujourd'hui unanimement reconnu.

Les entrepreneures de ces territoires doivent faire preuve de toujours plus de créativité et d'anticipation pour dessiner l'avenir de secteurs clés comme l'économie bleue, l'économie verte, l'énergie, le numérique ou encore le secteur médical. Nous reprenons actuellement dans l'hexagone certaines expériences qui se déroulent en outre-mer, dans le secteur médical notamment.

Enfin, nous ne pouvons que nous réjouir de votre initiative, qui donne une visibilité concrète aux travaux menés par nos délégations. Le nombre et la diversité de vos profils, la qualité des intervenantes, traduisent les évolutions qu'a connues au cours de ces dernières années l'entrepreneuriat. Ils montrent l'influence des femmes dans le monde économique et particulièrement en outre-mer. Les femmes, par leur dynamisme et leur détermination, sont devenues des actrices incontournables. Vous me permettrez de leur rendre hommage, car en plus des difficultés liées au monde du travail, elles sont soumises à d'autres contraintes, la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle, mais aussi la nécessité d'une ardeur redoublée face au scepticisme de ceux qui considèrent encore trop souvent que l'entrepreneuriat serait d'abord une affaire masculine.

Je considère que l'entrepreneuriat féminin est une richesse pour notre économie et que les pouvoirs publics doivent tout mettre en oeuvre pour favoriser cette voie, dès le parcours éducatif, mais aussi en renforçant l'accompagnement des créatrices d'entreprise. Je me suis procuré les statistiques existantes en matière de financement. Le taux de rejet des crédits demandés par les femmes est presque deux fois plus élevé que ceux demandés par les hommes. Un tel chiffre ne saurait être uniquement conjoncturel : ce point m'apparaît comme un problème structurel, d'approche et de regard sur les projets, en fonction de celle ou de celui qui les porte. Cette étude n'est pas ancienne. Elle date de 2017. Elle a été réalisée par la Fondation Entreprendre et AXA.

Vous avez également souhaité, mes chers collègues, consacrer au cours de cet après-midi une séquence spécifique dédiée au rôle des femmes dans l'agriculture, dans le prolongement d'un travail approfondi accompli par notre délégation aux droits des femmes et du colloque sur les agricultrices, organisé en 2017. Je me réjouis de ce choix, car les femmes jouent un rôle essentiel dans le secteur agricole, pas simplement dans notre histoire. Il y eut des périodes de notre histoire où elles furent au coeur du secteur et de la survie. Elles représentent plus du quart des chefs d'exploitation et des co-exploitantes. Dans les jeunes générations, elles sont souvent plus diplômées que les hommes. C'est une réalité ! La part des diplômés « bac et plus » est plus importante chez les femmes que chez les hommes.

En outre, les études du ministère de l'Agriculture montrent qu'elles ont une appétence plus grande pour répondre aux nouvelles demandes de la société. Je pense au secteur bio, aux circuits courts, à la vente directe ou encore au développement de l'agrotourisme. Ce ne sont là que quelques exemples, car les secteurs de l'agriculture et de l'agroalimentaire sont particulièrement générateurs de nouveaux projets et porteurs d'innovation. Ainsi, à l'image de ce qui se passe dans la France hexagonale, elles sont souvent pionnières, contribuant à la modernisation du monde agricole et à la dynamisation du monde rural.

Nos deux délégations, en valorisant l'entrepreneuriat féminin, contribuent à donner envie à d'autres femmes d'oser se lancer et donc de réussir. Je vous souhaite de riches échanges, mais je me dis qu'il faut se pencher sur cette question du crédit, car nous savons bien que sans accès au crédit, il est extrêmement difficile de faire une réalité de son désir d'innovation et d'entreprendre. C'est un point que je retiens en tant que président du Sénat. Ce sujet mérite de ne pas simplement être traité le temps d'un colloque.

Je vous souhaite une excellente après-midi au Palais du Luxembourg.

[Applaudissements.]

Michel MAGRAS

Président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer

Monsieur le Président du Sénat,

Monsieur le Ministre, Madame la Ministre,

Madame la Présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, chère Annick,

Mesdames et Messieurs les parlementaires et les élus,

Mesdames qui représentez les forces vives des territoires et qui avez accepté de franchir les océans pour être leur voix aujourd'hui, en portant haut leurs singularités qui font la richesse de nos îles,

Mesdames et Messieurs, chers amis,

Monsieur le Président du Sénat, j'ai été très sensible à votre propos, qui témoigne s'il en était besoin, car nous nous connaissons depuis onze ans, de la force de votre engagement et de la sincérité de vos propos quand il s'agit de parler des outre-mer. Cela me fait toujours plaisir de vous écouter.

J'ai également apprécié le fait que vous nous ayez, non pas tracé le chemin mais au moins ouvert la voie, sur des sujets qui nous donneront du travail, à moi-même et à mes successeurs, pour encore quelques années.

Je suis heureux et fier de notre manifestation d'aujourd'hui, organisée en synergie avec la Délégation aux droits des femmes du Sénat, et qui célèbre nos femmes d'outre-mer en soulignant l'importance de leur rôle dans la vie économique et entrepreneuriale de nos territoires.

Cet événement concrétise une action commune de deux instances du Sénat qui ont uni leurs savoir-faire et leur enthousiasme au service d'une double cause, celle des femmes et celle des outre-mer.

Chère Annick, nous partageons un même goût pour l'organisation d'événements qui donnent de la visibilité aux valeurs que nous défendons et la parole aux personnes qui les incarnent : je forme donc le voeu que le colloque de ce jour constitue la première étape d'un cheminement commun et je remercie le président du Sénat d'en être le témoin actif, par sa présence à nos côtés et ses encouragements chaleureux.

Notre initiative s'inscrit en amont de la Journée internationale des droits des femmes du 8 mars et chacun sait ici que la femme est une figure centrale de la plupart de nos cultures d'outre-mer. Le matriarcat constitue un modèle répandu et parfois même une véritable institution dans nos traditions.

Les sociétés polynésiennes en sont une illustration où certaines îles, comme Maiao dans l'archipel de la Société, considéraient comme étrangère toute personne n'ayant aucune filiation maternelle avec une habitante vivante ou décédée de l'île. Les plus hautes fonctions politiques pouvaient leur échoir : je pense bien sûr à la Reine Pomaré et ses cinquante ans de règne, mais aussi aux îles Marquises où la polyandrie était de mise.

Si l'on met le cap sur l'océan Indien et plus spécifiquement sur Mayotte, alors que l'île a été soumise à des influences culturelles multiples et est aujourd'hui majoritairement musulmane, l'organisation sociale demeure fondée sur deux piliers : la matrilinéarité, d'une part, puisque la filiation se définit dans la lignée maternelle, et la matrifocalité, d'autre part, puisque la famille réside chez la mère qui détient le patrimoine et en assure la transmission héréditaire. L'époux est seulement un invité de passage.

Enfin, aux Antilles, le matriarcat est également traditionnellement prévalent, avec un système d'organisation familiale centré sur l'autorité maternelle au sein du foyer. C'est la femme « potomitan », terme qui désigne le poteau central du temple vaudou et qui est passé dans le langage courant dans toutes les Antilles.

Cependant, si la femme incarne et exerce souvent l'autorité dans la sphère domestique, dans la sphère privée, il n'en va pas de même pour ce qui concerne la sphère publique, dans laquelle elle n'apparaissait généralement, au mieux, qu'au second plan.

Mais les temps changent : les dynamiques économiques et sociales du monde moderne, et notamment le phénomène du développement de la monoparentalité, particulièrement prégnant outre-mer, font de facto supporter aux femmes un lourd fardeau dans l'ordre des responsabilités éducatives et de l'économie domestique. Ainsi en 2011, selon l'Ined, les familles monoparentales avec enfant de moins de 25 ans représentaient 25 % des familles de métropole avec à leur tête 85 % de mères. Cette proportion était portée au double, voire davantage, dans les départements tels que la Martinique (54 %), la Guadeloupe (51 %), la Guyane (46 %) et La Réunion (38 %).

Parallèlement, l'élévation du niveau d'éducation dont les femmes des outre-mer ont su bénéficier et les lois républicaines en faveur d'une réelle reconnaissance de leurs capacités et de leurs mérites les ont conduites à faire irruption dans les sphères décisionnelles.

Très investies dans l'univers associatif qui tisse un maillage social serré dans nos outre-mer, les femmes ont très naturellement étendu leur champ d'investigation vers les sphères politiques et économiques, dès que des ouvertures se sont présentées. Il n'y avait qu'un pas de l'économie domestique à l'économie entrepreneuriale et elles l'ont vaillamment franchi ! Si elles souffrent d'un taux de chômage généralement de deux à trois points supérieurs à ceux des hommes, contrairement à la situation qui prévaut dans l'hexagone, leur situation en termes d'égalité salariale est globalement plus enviable, avec des écarts en moyenne inférieurs. Rappelons que dans presque tous les territoires, la part des diplômés de niveau Bac et plus est plus importante chez les femmes que chez les hommes et que celles-ci sont globalement bien plus qualifiées.

Telles sont les tendances qui se dégagent des rares études et documents statistiques disponibles - vous en avez fait état, Monsieur le Président - car, comme sur bien d'autres sujets, les données sont insuffisantes et par trop lacunaires. C'est aussi pour cette raison que nous avons voulu organiser le présent colloque et donner la parole aux femmes investies dans la vie économique de nos outre-mer.

Mesdames - et je m'adresse plus particulièrement à nos quelque vingt-cinq intervenantes de cet après-midi - le recueil de vos témoignages sera publié et constituera un document inédit, visitant l'ensemble des territoires sur un sujet qui a jusqu'à présent suscité peu de travaux de recherche. Ainsi aurez-vous contribué à la visibilité de vos territoires, mais aussi à produire une précieuse information qui aujourd'hui fait cruellement défaut.

Les talents qui vont s'exprimer au cours des trois tables rondes, en provenance de tous les océans, seront en effet autant de témoignages de la vitalité de nos territoires et d'illustrations des tempéraments féminins comme tremplins de la réussite.

Avant de vous céder la parole, ma collègue et complice Annick Billon va à son tour vous souhaiter la bienvenue.

[Applaudissements]

Annick BILLON

Présidente de la Délégation aux droits des femmes

Monsieur le Président du Sénat, cher Gérard Larcher,

Monsieur le Président de la Délégation sénatoriale aux outre-mer, cher Michel Magras,

Chers collègues sénateurs et sénatrices,

Mesdames et Messieurs les élus,

Mesdames, Messieurs,

C'est pour moi et pour tous mes collègues de la Délégation aux droits des femmes du Sénat un plaisir particulier de nous trouver parmi vous cet après-midi, pour ce colloque qui met à l'honneur la contribution décisive des femmes au dynamisme économique des outre-mer.

Mes remerciements s'adressent tout d'abord et très naturellement à mon collègue Michel Magras, qui a spontanément accepté de prendre l'initiative de cette belle journée, commune à nos deux délégations. Nous l'avons expérimenté il y a quelques mois en nous réunissant ensemble pour la première fois : le croisement de nos champs de compétences respectifs, femmes et outre-mer, est très riche et prometteur. Je peux dire que cette première réunion avait été tellement réussie et chaleureuse que nous avons été obligés d'en programmer une seconde !

Grâce à ce colloque, nous sommes à nouveau réunis et c'est une grande joie.

Mes remerciements s'adressent également, bien sûr, à notre président, Gérard Larcher, qui malgré un agenda très contraint est toujours à nos côtés pour encourager par sa présence nos initiatives et nos manifestations. Un grand merci, Monsieur le président, pour votre présence.

Comme l'a dit Michel Magras, ce colloque est organisé à l'occasion du 8 mars - nous sommes en février, mais nous serons le 8 mars aujourd'hui - une date essentielle pour notre délégation. Je suis vraiment ravie que cette année, notre manifestation du 8 mars soit dédiée aux outre-mer.

Je voudrais donc saluer tout particulièrement nos vingt-cinq intervenantes qui nous ont fait l'amitié de venir de si loin, en cette occasion importante pour nous. Je tiens aussi à souligner ce que représentent les déplacements qu'accomplissent chaque mois les sénateurs des territoires ultramarins, à qui un trajet vers Paris ne prend pas seulement quelques heures, pour venir siéger au Sénat.

Mesdames, par-delà la diversité de vos parcours et de vos engagements, notamment associatifs, vous confirmez aujourd'hui qu'aucun secteur d'activité n'est fermé aux femmes, même des domaines qui ont longtemps semblé réservés aux hommes, comme le BTP, les sciences ou la viticulture. J'ai ainsi rencontré tout à l'heure une entrepreneuse qui cultive et vend le champagne Marie Césaire. Elle prendra la parole un peu plus tard. Merci, Madame, pour avoir déjà échangé avec moi sur le sujet des femmes dans la viticulture. Vous êtes également, chères intervenantes, les preuves vivantes que les femmes ne doivent en aucun cas se freiner ni, chères intervenantes, s'interdire aucune ambition.

Pour autant, des obstacles demeurent et le parcours de certaines peut encore être jalonné d'obstacles, qu'il s'agisse de la conciliation, toujours complexe, de la maternité et des responsabilités professionnelles, ou des défis associés au leadership féminin, parfois questionné. Vous l'avez souligné, Monsieur le Président, cher Gérard.

Néanmoins, vous montrez, Mesdames, que lorsque les femmes s'engagent, dans l'économie comme ailleurs, elles apportent toujours des qualités de dynamisme, de créativité et d'innovation. Mais elles sont aussi et surtout porteuses de valeurs, qu'il s'agisse du respect de l'environnement, de l'économie sociale et solidaire ou du tissu associatif local, créateur de lien social, qui en métropole comme dans les outre-mer doit tant aux femmes.

Ce point devait être souligné : la vie professionnelle des femmes, leur engagement citoyen et leurs responsabilités familiales forment souvent un tout : ils se complètent et s'enrichissent mutuellement.

Un mot, avant de finir, pour évoquer un anniversaire, que le président Gérard Larcher a évoqué : il y a deux ans, presque jour pour jour, le 22 février 2017, notre délégation aux droits des femmes organisait au Sénat une rencontre avec des agricultrices, à quelques jours du Salon de l'agriculture de Paris - comme aujourd'hui d'ailleurs.

Notre objectif était de mettre à l'honneur des femmes qui, trop longtemps, sont restées invisibles au sein d'une profession où elles ont toujours, pourtant, été très présentes. Nous souhaitions évoquer leur contribution au dynamisme de ce métier et essayer de prendre la mesure des inégalités qui persistent à leurs dépens, ne serait-ce qu'en matière de retraite.

Ce colloque, malgré sa réussite, avait un gros défaut : il ne comptait aucune intervenante des territoires d'outre-mer.

Le président l'a souligné : le parcours des femmes qui travaillent dans l'agriculture est souvent jalonné d'obstacles, pour les crédits aux entreprises, mais aussi pour l'accès au foncier. Il manque donc aussi à notre domaine d'activité des statistiques genrées. À ce titre, nous avons bien reçu, Michel et moi-même, la « feuille de route » de Monsieur le Président.

Fort heureusement, la lacune qui caractérisait notre colloque de 2017 sur les agricultrices est réparée aujourd'hui puisqu'une séquence sera dédiée au rôle des femmes dans l'agriculture des outre-mer. Cette table ronde fera vraisemblablement écho à nos travaux d'il y a deux ans. Je suis impatiente, Mesdames, d'entendre vos témoignages, qui confirmeront, sans aucun doute, que dans les outre-mer comme en métropole, les femmes prennent toute leur part à un secteur économique primordial pour notre économie et notre société.

Pour finir, je voudrais insister sur les mots clés qui caractérisent à mon avis l'engagement des femmes, que ce soit en politique, dans le milieu associatif ou dans la vie professionnelle : passion, défi, courage et surtout audace ! Nos intervenantes nous le montreront tout au long de l'après-midi.

Mesdames, Messieurs, chers amis, je vous souhaite un très bon 8 mars en ce 22 février, au Sénat, et je remercie nos collègues hommes d'être présents avec nous, en cette journée symbolique, car les combats pour les droits des femmes, nous en sommes convaincus à la délégation, ne sauraient se gagner sans les hommes.

Mais il est temps d'entrer dans le vif du sujet : je laisse sans plus tarder la parole à notre collègue Thani Mohamed Soilihi, sénateur de Mayotte et vice-président du Sénat, qui va introduire la première table ronde.

[Applaudissements]

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