AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Si la sinistralité au travail se stabilise désormais à un niveau historiquement bas 1 ( * ) , la France enregistrait encore en 2015, en valeur absolue, le nombre le plus élevé d'accidents du travail mortels (595) en Europe, non seulement devant des pays à la population active comparable comme l'Italie (543) et le Royaume-Uni (260) mais également devant l'Allemagne (450) 2 ( * ) .

Le coût des accidents du travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles, de 12 milliards d'euros pour la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP) en 2018, pèse en outre fortement sur les performances de notre économie : ces événements et pathologies ont occasionné un total de 58 095 626 journées perdues en 2017, en augmentation, par rapport à 2013, de 11,2 % au titre des accidents du travail, de 5,7 % au titre des accidents de trajet et de 13,5 % au titre des maladies professionnelles 3 ( * ) .

Les deux dernières grandes réformes de la santé au travail, intervenues en 2011 4 ( * ) et 2016 5 ( * ) , ont essentiellement eu pour objectif de pallier le manque de médecins du travail, en renforçant la pluridisciplinarité au sein des services de santé au travail puis en modernisant les modalités du suivi individuel de l'état de santé des salariés, notamment par un allongement de la périodicité des visites médicales. Toutefois, la gouvernance du système de santé au travail, les modalités de son financement et le contenu de ses missions n'ont pas fait l'objet d'une véritable refonte.

Dans un contexte de prise de conscience de la complémentarité entre santé et performance, la préoccupation de plus en plus importante tant chez les employeurs que chez les salariés pour l'amélioration des conditions de travail a conduit le Gouvernement à solliciter en janvier 2018 de la députée Charlotte Lecocq et MM. Henri Forest et Bruno Dupuis une étude sur la définition des enjeux et objectifs du système de santé au travail et sur l'amélioration de sa gouvernance, jugée peu lisible et fragmentée entre de nombreux acteurs à l'articulation insuffisante.

Le schéma de gouvernance proposé en août 2018 par cette mission a eu le mérite de poser la question de la cohérence de notre système de santé au travail et de son sens pour les principaux intéressés. Face à une multitude d'acteurs aux logiques parfois redondantes ou concurrentes, les employeurs et les salariés continuent en effet d'identifier la médecine du travail sinon comme une contrainte, au mieux comme une formalité déconnectée de la réalité de l'entreprise.

Le rapport de Mme Lecocq et MM. Forest et Dupuis 6 ( * ) plaide pour une remise à plat de la gouvernance du système de santé au travail organisé autour d'interlocuteurs uniques national et régionaux recentrés sur la prévention des risques professionnels : un établissement national, « France Santé Travail », résultant de la fusion de plusieurs organismes nationaux, aurait la responsabilité d'animer un réseau de guichets régionaux uniques de santé au travail rassemblant les différents acteurs intervenant dans la prévention des risques professionnels 7 ( * ) et financés par une cotisation unique de santé au travail versée par les employeurs.

Ce schéma, qui présente le mérite d'une vraie simplification, a toutefois été accueilli diversement par les acteurs de la prévention concernés dont certains ont reproché aux auteurs du rapport de ne pas saisir les spécificités de leurs interventions. Soucieuses d'impliquer les partenaires sociaux dans cette réflexion, la ministre des solidarités et de la santé et la ministre du travail ont alors proposé aux membres du groupe permanent du conseil d'orientation des conditions de travail (COCT) « d'identifier les sujets en lien avec la santé au travail sur lesquels les partenaires sociaux ont vocation à négocier et ceux sur lesquels une concertation est préférable. » 8 ( * )

À l'issue de plus de trois mois d'échanges au sein du COCT, les partenaires sociaux ont annoncé, le 12 juillet 2019, avoir échoué à s'entendre sur les orientations à impulser à la réforme de la santé au travail. Les organisations syndicales ont dénoncé les trois principales « lignes rouges » posées par les organisations patronales, à savoir : le refus d'une gouvernance paritaire des services de santé au travail interentreprises (SSTI) et le maintien de la présidence de leurs conseils d'administration par les employeurs, le refus d'une cotisation unique prélevée par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf) et le souhait d'une distinction des activités de contrôle et de conseil.

Dans ce contexte, votre commission entend apporter sa contribution au débat sur la réforme de la santé au travail. La réflexion conduite par ses deux rapporteurs s'appuie sur 51 auditions et entretiens avec plus de 100 personnes, représentant l'ensemble des parties prenantes, des ministères aux différents opérateurs de la santé au travail en passant par les partenaires sociaux et les agences sanitaires, ainsi que sur deux déplacements, dans la région des Hauts-de-France et au Danemark. Les contributions partagées par les interlocuteurs de la mission ont ainsi permis d'alimenter le présent rapport qui part des constats suivants :

• La santé au travail n'est traditionnellement pas envisagée comme une composante à part entière de la santé publique en France. Les services de santé au travail (SST) tout comme les instances paritaires régulatrices de la santé au travail 9 ( * ) ne s'appuient encore que très insuffisamment sur le savoir-faire et l'expertise de nos agences sanitaires nationales en matière de prévention primaire. Le système de santé au travail reste en effet piloté par le ministère du travail, avec pour principale conséquence un périmètre de la santé au travail historiquement centré sur la lutte contre des risques professionnels traditionnels associés aux secteurs de l'industrie et du bâtiment et des travaux publics, en particulier l'exposition aux substances toxiques, le travail en hauteur et la manutention.

Le ministère de la santé n'est aujourd'hui pas en capacité de peser sur les orientations de notre politique de santé au travail et ne constitue donc pas un contrepoids efficace pour rééquilibrer la prévention vis-à-vis de la réparation. Comme cela avait déjà été le cas pour l'amiante, le ministère de la santé ne joue pas son rôle de vigie sanitaire face aux ministères à vocation économique comme le ministère du travail et le ministère de l'agriculture, alors que l'utilisation des produits phytosanitaires, les nuisances sonores ou encore la montée en puissance des risques psychosociaux auront un impact délétère à long terme sur l'état de santé de la population, avec une multiplication des maladies chroniques que l'assurance maladie devra prendre en charge.

• Le système français de santé au travail est, de façon inhérente, profondément inégalitaire principalement à deux égards :

Ø certaines catégories de travailleurs restent exclues de la médecine du travail : c'est le cas des chefs d'entreprises mais également des travailleurs indépendants, des commerçants et artisans. D'autres, bien qu'en principe couvertes, en demeurent éloignées, notamment les travailleurs intérimaires et les salariés des entreprises sous-traitantes qui échappent bien souvent à un suivi médical régulier. Or les conditions de travail constituent un facteur aggravant des inégalités socioéconomiques. Ce sont généralement les salariés les moins qualifiés qui sont exposés aux conditions de travail les plus délétères en termes de santé et l'« ubérisation » de nombreux métiers ne peut qu'aggraver cette situation ;

Ø le système français de santé au travail est organisé de telle sorte que les mieux servis restent ceux qui disposent des moyens les plus importants, en particulier les grandes entreprises dont les services de santé au travail autonomes (SSTA) captent une grande partie de la ressource médicale au détriment des SSTI. Les très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME) demeurent les plus éloignées de la culture de prévention.

• La perception actuelle de la santé au travail reste problématique chez les employeurs qui, pour partie, y voient un système ineffectif et sans rapport avec son coût. Les dernières réformes n'ont pas fait bougé le curseur, la prévention restant le parent pauvre de la santé au travail.

• La santé au travail continue d'être pensée par le prisme des enjeux industriels alors que le monde du travail a considérablement évolué au cours des deux dernières décennies. On assiste à une psychologisation progressive des problèmes de santé au travail, souvent liée à l'organisation du travail et marquée par une interconnexion croissante des difficultés personnelles et professionnelles.

Dans ces conditions, ce rapport s'articule autour de 43 propositions destinées à moderniser notre système de santé au travail :

- dans un souci de lisibilité et de cohérence, la gouvernance du système sera confiée à une agence nationale de la santé au travail chargée d'établir le référentiel de certification des SST afin de garantir un niveau de qualité des prestations de santé au travail homogène sur l'ensemble du territoire. Le réseau territorial de la santé au travail s'articulera autour des SST ainsi certifiés. Leur collaboration contractuelle sera renforcée avec les Carsat et les Aract qui, réunies au sein d'une seule et même entité régionale compte tenu de la complémentarité de leurs approches et expertises, leur apporteront une ingénierie couvrant l'ensemble des risques professionnels, de la prévention des risques traditionnels aux actions sur les déterminants de l'organisation du travail et l'amélioration des relations interprofessionnelles ;

- le financement de la santé au travail restera articulé autour de deux cotisations, l'une au titre du financement de la branche AT-MP, l'autre au titre du financement des services de santé au travail. Dans un souci de transparence, le montant de la cotisation de chaque SST s'inscrira dans une fourchette définie par le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens conclu par le SST avec l'autorité administrative et la Carsat, qui tiendra compte du profil de l'entreprise et des spécificités de ses besoins ;

- la santé au travail sera consacrée comme un service universel pour l'ensemble des travailleurs, et concernera obligatoirement les chefs d'entreprises et les travailleurs indépendants. Une mutualisation de la ressource médicale sera organisée entre les SSTI et les SSTA afin de garantir également une prise en charge efficace des travailleurs intérimaires et des salariés des entreprises de sous-traitance ;

- le contenu des missions obligatoires des SST sera rénové afin d'y inclure la co-construction par le SST d'une stratégie de prévention primaire avec les employeurs et les représentants des salariés, en particulier avec les TPE et PME au travers de l'élaboration et de la mise en oeuvre du document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP). Le renforcement de la collaboration des SST avec les Carsat/Aract leur permettra en outre de mettre en oeuvre des protocoles de prévention de la désinsertion professionnelle et d'amélioration de la qualité de vie au travail adaptés à chaque entreprise.

I. LA SANTÉ AU TRAVAIL EN FRANCE : UN PAYSAGE FRAGMENTÉ ET PEU LISIBLE

A. UNE ORGANISATION D'UNE COMPLEXITÉ REDOUTABLE

Le manque de lisibilité du système français de santé au travail obère largement l'efficacité de la politique de prévention des risques professionnels conduite par une multiplicité déconcertante d'acteurs. Ce constat est placé au coeur de la réflexion portée par le rapport « Lecocq » précité qui déplore « des périmètres de compétences entre acteurs qui ne sont pas exempts de zones de recouvrements et d'interférences ». Si la diversité des organismes nationaux et locaux permet de croiser les expertises et d'enrichir le contenu des politiques conduites sur le terrain, les éventuelles redondances dans leurs champs d'intervention sont sources de confusion tant auprès des entreprises, en particulier des TPE/PME, dans l'accès aux outils de prévention que des salariés dans la compréhension de leurs droits.

1. Une multitude d'opérateurs intervenant dans la prévention des risques professionnels à l'extérieur des entreprises
a) Un ministère du travail à la manoeuvre, un ministère de la santé encore marginalisé

Le système de santé au travail reste essentiellement piloté par le ministère du travail, notamment au travers du plan « Santé au travail » (PST), le ministère de l'agriculture conservant la responsabilité de la gestion spécifique des risques professionnels dans le secteur primaire. De l'avis de la plupart des personnes auditionnées par vos rapporteurs, l'implication du ministère de la santé demeure insuffisante, ce qui tend encore à cantonner la santé au travail à la lutte contre certains risques professionnels « historiques » (substances toxiques, travail en hauteur, manutention...) sans pleinement l'intégrer dans une approche plus large de santé publique. La santé au travail est pourtant désormais inscrite dans la stratégie nationale de santé pour la période 2018-2022.

Les 13 directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) de France métropolitaine et leurs unités territoriales au niveau départemental, de même que leurs équivalents dans les départements et collectivités d'outre-mer 10 ( * ) , veillent au respect par les entreprises et les services de santé au travail (SST) de leurs obligations législatives et réglementaires en matière de santé au travail, notamment par le biais de leurs médecins inspecteurs régionaux du travail (MIRT) et de leurs agents de contrôle. L'agrément des SST est ainsi délivré par les Direccte. La conclusion avec chaque SST agréé d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM), en partenariat avec la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), doit permettre de décliner le plan régional de santé au travail (PRST), élaboré au niveau du comité régional d'organisation des conditions de travail (Croct) en cohérence avec le PST.

Le système d'inspection du travail animé par les Direccte comprend, en outre, des moyens d'intervention réglementaires qui ont été renforcés dans la période récente. Comme le rappelle la direction générale du travail (DGT) du ministère du travail dans ses réponses adressées au questionnaire de vos rapporteurs, les agents de contrôle de l'inspection du travail peuvent ainsi :

- prévenir les risques, en s'assurant que l'évaluation des risques sous la responsabilité de l'employeur a été correctement réalisée et que les mesures de protection sont effectivement mises en oeuvre et en adressant, le cas échéant, des observations aux entreprises ;

- conduire des enquêtes à la suite d'accident grave du travail et transmettre, le cas échéant, des procès-verbaux à la justice ;

- prononcer, après mise en demeure, des arrêts de travaux dès lors que ceux-ci exposent les salariés à des produits cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR) ;

- retirer des travailleurs exposés à un danger grave et imminent dû à un risque de chute de hauteur, à un risque d'ensevelissement, à une exposition à l'amiante, à un risque électrique ou lié à l'utilisation d'un équipement de travail ;

- intervenir en direction de publics particulièrement vulnérables, exposés à un risque sérieux d'atteinte à leur santé, à leur sécurité ou à leur intégrité physique ou morale. Jusqu'à récemment cette prérogative ne concernait que les apprentis. Depuis la publication du décret n° 2019-253 du 27 mars 2019 11 ( * ) , l'inspection du travail peut agir pour retirer les jeunes de moins de 18 ans de situations dangereuses ;

- engager, en application d'une ordonnance du 7 avril 2016 12 ( * ) , des transactions pénales en droit du travail, homologuées par le procureur de la République, sanctionnant le responsable de l'infraction d'une amende transactionnelle et pouvant mettre à sa charge des obligations visant à faire cesser l'infraction ou à renouveler son renouvellement ;

- s'assurer du bon fonctionnement des instances représentatives du personnel sur les sujets de santé et de sécurité au travail, en participant aux réunions de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), appelés à devenir les commissions « santé, sécurité et conditions de travail » du comité social et économique (CSE).

Les Direccte ne disposent néanmoins pas des moyens nécessaires à l'exercice optimal de leurs missions et font elles-mêmes face à la pénurie de la ressource médicale. En effectifs insuffisants, les MIRT ne sont pas en capacité d'anticiper suffisamment en amont les situations les plus problématiques en santé au travail et se voient contraints d'intervenir, comme l'ont souligné les représentants des médecins du travail à vos rapporteurs, dans des contextes déjà fortement dégradés (accidents du travail mortels, suicides en entreprise...). Il est également ressorti des auditions conduites par vos rapporteurs qu'un certain nombre de Direccte n'étaient pas en mesure de garantir le respect par les SST agréés de plusieurs obligations fondamentales, dont le caractère pleinement pluridisciplinaire de leurs équipes médicales ou encore la prise en charge des salariés d'entreprises de sous-traitance ou des salariés intérimaires.

Alors que les PST successifs se sont accompagnés d'une inflation d'actions, les Direccte et l'inspection du travail ne se sont plus vus attribuer de moyens supplémentaires depuis le deuxième PST 13 ( * ) . Si elles doivent gérer la pénurie de moyens en leur sein, les Direccte doivent également s'accommoder de la rareté de la ressource médicale dans l'exercice de leurs missions. Dans ses réponses au questionnaire de vos rapporteurs, la DGT a ainsi reconnu que « la portée réelle des outils de pilotage est significativement affaiblie par le contexte de pénurie médicale dans certaines parties du territoire. Cette situation contraint de fait les services de l'État à accorder les agréments aux services qui le demandent, sachant qu'un refus aurait pour conséquence de priver les travailleurs de suivi médical. »

b) La prise en charge des risques professionnels par la sécurité sociale
(1) Par la branche AT-MP de la CNAM

Le réseau de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles (AT-MP) de la caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM) est articulé autour des caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat), chargées de mettre en oeuvre les trois missions principales de la branche : réparation, tarification et prévention.

Elles ont ainsi vocation à déployer des actions de prévention au sein des entreprises les plus fortement exposées aux risques, de garantir une juste indemnisation aux victimes et d'en faire payer le juste prix aux entreprises dans la détermination de leur taux de cotisation AT-MP.

Les Carsat sont au nombre de 15. Les risques professionnels sont gérés, en Île-de-France, par la caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (Cramif) et, dans les départements et collectivités d'outre-mer, par des caisses générales de sécurité sociale (CGSS) et des caisses de prévoyance sociale (CPS).

Comme les autres caisses primaires de la sécurité sociale, les Carsat sont des organismes de droit privé chargés d'une mission de service public. Auprès du conseil d'administration de chaque Carsat, sont placés des comités techniques régionaux (CTR) de branche professionnelle chargés d'évaluer la sinistralité de chaque branche professionnelle et de proposer des mesures en faveur de la prévention des risques professionnels. Une commission régionale des AT-MP (CRATMP), composée de dix membres représentant paritairement les employeurs et les salariés, est en outre consultée pour avis sur toutes les questions de prévention et de tarification des risques professionnels.

Au 1 er janvier 2018, les Carsat comptaient 2 015 équivalents temps plein moyen annuel (ETPMA), dont 269 ingénieurs conseils, 554 contrôleurs de sécurité, 533 personnels administratifs de prévention et 658 personnels administratifs de tarification. Dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion (COG) de la branche AT-MP pour la période 2018-2022, le réseau des Carsat est appelé à se départir de 102 ETPMA d'ici 2022.

Évolution depuis 2014 des moyens des Carsat
en matière de santé au travail

(en millions d'euros)

Budget exécuté

Budget prévisionnel

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Fonctionnement

174,7

171,7

171,9

177,7

172,6

182,9

181,9

182

182,4

Investissement

1,3

1,9

1,8

2,9

0,8

2,3

2,3

2,3

2,3

Intervention

58,1

51,5

60,7

101,1

52

105

105

120

120

Total

234,1

225,1

234,4

281,7

225,4

290,2

289,2

304,3

304,7

Source : Branche AT-MP de la CNAM

(2) Par la mutualité sociale agricole

La gouvernance de la santé au travail dans le secteur agricole se distingue par une organisation spécifique en « guichet unique » pilotée par la mutualité sociale agricole (MSA) et intervenant dans les domaines de la protection sociale, de la santé et de la sécurité au travail et de l'action sanitaire et sociale.

La caisse centrale de la MSA (CCMSA) gère un réseau de 35 caisses de MSA (CMSA), elles-mêmes assistées par 23 comités techniques régionaux salariés (CTR). La CCMSA est assistée d'un comité de protection sociale des salariés (CPSS) et d'un comité de protection sociale des non-salariés (CPSNS), assurant une représentation des trois collèges d'assurés agricoles (salariés, employeurs et exploitants), et de cinq comités techniques nationaux salariés (CTN) représentant les filières professionnelles.

Chaque CMSA anime un service de santé au travail en agriculture 14 ( * ) (SSTA) qui assure le suivi individuel de l'état de santé des salariés agricoles, le déploiement d'actions en milieu de travail et la gestion et la promotion de la prévention des risques professionnels des salariés et des non-salariés agricoles. Le réseau de services de santé et sécurité au travail des CMSA est composé de 984,7 ETP pour le régime agricole.

Gouvernance de la santé au travail dans le secteur agricole

Source : Mutualité sociale agricole

c) Les organismes de prévention nationaux

Au niveau national, le système de santé au travail comprend également plusieurs organismes et agences aux statuts divers. L'absence de réelle coordination de leurs interventions contribue à complexifier davantage l'offre de service disponible en prévention des risques professionnels pour les employeurs.

L'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact) :

Créée par la loi du 27 décembre 1973 15 ( * ) , l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact) est un établissement public national à caractère administratif placé sous la tutelle du ministre chargé du travail. Dans le cadre du 3 e PST et de son contrat d'objectifs et de performance pour la période 2018-2021, elle contribue prioritairement à l'amélioration des conditions de travail en intervenant principalement sur les facteurs organisationnels du travail et les relations professionnelles. À cet effet, elle met en oeuvre, en s'appuyant sur le réseau des 17 associations régionales pour l'amélioration des conditions de travail (Aract), des expérimentations destinées à être capitalisées et diffusées en milieu de travail, ainsi que des partenariats avec des entreprises ou des acteurs relais auprès de ces dernières.

L'action des Aract : l'exemple des Hauts-de-France

Lors de leur déplacement dans le département du Nord 16 ( * ) , vos rapporteurs ont relevé l'investissement remarquable des personnels de l'Aract des Hauts-de-France en faveur de l'amélioration des conditions de travail au sein des entreprises locales, en dépit de moyens extrêmement limités. En s'appuyant sur une équipe de 19 personnes réparties sur deux sites à Lille et Amiens, elle est, à près de 80 % de ses moyens, mobilisée sur les entreprises de moins de 250 salariés. Elle conçoit et diffuse des méthodes et outils destinés à leur permettre de concilier durablement la qualité de vie au travail et la performance. Les expérimentations de l'Aract des Hauts-de-France ont ainsi principalement porté sur :

- la qualité de vie au travail (QVT) : les trophées de la QVT récompensent des entreprises exemplaires et trois clusters QVT regroupent 20 établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) qui bénéficient d'un accompagnement personnalisé. En outre, des ateliers de travail (« workshops ») sur la QVT et une procédure d'évaluation des démarches de QVT sont proposés aux entreprises ;

- le dialogue social : l'Aract accompagne les entreprises dans le processus de fusion de leur comité d'entreprise (CE) et de leur comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en comité social et économique (CSE). Elle contribue également, par la mise en place de formations à destination des managers et des membres des instances représentatives du personnel, à l'amélioration des conditions dans lesquelles prennent place les négociations au sein de l'entreprise, comme sur le temps de travail.

À la suite d'un contrôle des comptes et de la gestion de l'Anact pour la période 2013-2017, la Cour des comptes a adressé au Gouvernement un référé 17 ( * ) en mai 2019 recommandant un renforcement de la sécurité juridique du réseau Anact-Aract dont les fragilités identifiées sont les suivantes :

- une partie des ressources de l'Anact et des Aract découle de la conclusion de contrats de prestations de services, principalement avec des établissements publics. Or ces contrats interviennent dans des domaines relevant du champ concurrentiel sans que l'Anact ou les Aract, qui sont respectivement des personnes morales de droit public et des personnes de droit privé soumises aux règles de la commande publique, aient été mises en concurrence avec d'autres prestataires de personnes publiques ;

- les Aract ne sont pas dotées d'un comptable public alors même qu'elles sont en partie financées par des personnes publiques, dont l'Anact et les Direccte, afin de mettre en oeuvre les missions de service public qui leur sont déléguées.

Vos rapporteurs estiment que la réforme de la gouvernance de la santé au travail devra tenir compte des réserves émises par la Cour des comptes afin de lever les problèmes juridiques qui fragilisent le réseau Anact-Aract.

Évolution des effectifs et des ressources du réseau Anact-Aract
sur la période 2014-2018

2014

2015

2016

2017

2018

Anact

Effectifs
(en ETP)

83,1

78,8

78,7

79,7

76,7

Moyens
(en millions d'euros)

13,8

16

14,2

15,7

14,7

Aract

Effectifs
(en ETP)

199

199

199

197

192

Moyens
(en millions d'euros)

21

21

21

20,9

20,2

Source : Direction générale du travail du ministère du travail

L'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) :

L'article L. 4643-1 du code du travail prévoit que sont constitués des organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail dans des branches d'activités présentant des risques particuliers, chargés de promouvoir la formation à la sécurité, de déterminer les causes techniques des risques professionnels et de susciter les initiatives professionnelles en matière de prévention.

Créé par arrêté du 9 août 1947, l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP) est le fruit d'une volonté ancienne de prévenir les risques professionnels spécifique à cette branche 18 ( * ) . Désormais régi par les articles R. 4643-2 et suivants 19 ( * ) du code du travail, l'OPPBTP est un organisme à gouvernance paritaire responsable de la promotion de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi que de l'amélioration des conditions de travail dans ses entreprises adhérentes, à savoir les entreprises relevant des caisses de congés payés des professions du BTP. Il dispose de 13 agences régionales réparties sur le territoire.

Évolution des effectifs et des ressources de l'OPPBTP
sur la période 2014-2018

2014

2015

2016

2017

2018

Effectifs
(en nombre de collaborateurs)

341

332

326

324

324

Moyens
(en millions d'euros)

46

44

44

46

46

Source : Direction générale du travail du ministère du travail

L'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) :

Constitué en 1947 « sous l'égide de la caisse nationale de l'assurance maladie et des travailleurs salariés » 20 ( * ) , l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) est une association placée sous le régime de la loi du 1 er juillet 1901, sans but lucratif, proposant des outils et services en matière de prévention aux entreprises, aux médecins du travail et aux différents acteurs de la prévention. Aux termes de ses statuts, l'INRS est tenu d'exercer ses missions suivant les directives de la CNAM et sous le contrôle de celle-ci dans le cadre de la politique définie par le ministre chargé de la sécurité sociale.

Financé par le fonds national de prévention des AT-MP (FNPAT) et disposant de 570 salariés, l'INRS intervient par quatre modes d'action principaux : il réalise des études et des recherches en matière de prévention des risques professionnels ; il assure la formation, ou y contribue, des médecins du travail, des agents des Carsat, des élus des CHSCT et habilite les organismes assurant la formation des préventeurs ; il assiste les acteurs de la prévention, les employeurs et les salariés en répondant à près de 12 000 questions par an ; il diffuse, essentiellement par le biais de son site Internet, une documentation sur la santé au travail.

Évolution depuis 2014 des moyens de l'INRS

(en millions d'euros)

Budget exécuté

Budget prévisionnel

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

79,4

85,7

79,5

78,9

76

79

79

79

79

Source : Branche AT-MP de la CNAM

Eurogip :

Eurogip est un groupement d'intérêt public créé en 1991 21 ( * ) entre la CNAM et l'INRS et chargé de recueillir des ressources sur les questions relatives à l'assurance et à la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles aux niveaux international et européen.

d) Les agences sanitaires et d'expertise scientifique

Au niveau national, le système de santé au travail est, en outre, complété par l'intervention en soutien à la prévention des risques professionnels de plusieurs agences sanitaires et d'expertise scientifique :

- l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS), issue de la fusion le 1 er juillet 2010 de l'agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset), est largement impliquée dans la mise en oeuvre du 3 e PST dont elle pilote quatre actions. Elle anime un réseau national de vigilance et prévention des pathologies professionnelles (RNV3P) qui regroupe 30 centres de consultation de pathologie professionnelle (CCPP), afin de favoriser les échanges entre cliniciens et professionnels de la santé au travail dans le repérage des risques émergents ou ré-émergents en santé au travail et l'établissement de l'imputabilité professionnelle d'une affection. Elle développe également, depuis 2014, en collaboration avec d'autres partenaires, un thésaurus des expositions professionnelles (TEP) ;

- l'agence nationale de santé publique « Santé publique France » 22 ( * ) assure, en matière de santé au travail, une mission d'ordre épidémiologique, en mesurant notamment l'impact des expositions, notamment professionnelles, sur la population. Elle contribue également au RNV3P ;

- en matière de prévention du risque nucléaire, interviennent l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), établissement public à caractère industriel et commercial chargé d'établir un bilan annuel de l'exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants, et l'autorité de sûreté nucléaire (ASN), autorité administrative indépendante ;

- l'institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (Irstea) est un organisme national de recherche participant notamment à l'évaluation de l'impact des expositions aux pesticides et produits phytosanitaires sur la santé des utilisateurs et travailleurs agricoles et contribuant à la réduction des risques physiques, mécaniques et chimiques dans le secteur agricole.

Compte tenu de la multitude des acteurs de la santé au travail et de la prévention mais surtout de l'absence d'un organisme chef de file bien identifié, il est difficile pour ces agences scientifiques de diffuser efficacement leurs recommandations auprès des SST et des entreprises sur l'ensemble du territoire. L'interconnexion entre la vie professionnelle et la vie personnelle et l'impact croissant du travail sur la santé publique rendent nécessaire la création au niveau national d'un interlocuteur institutionnel de pilotage de la santé au travail qui serait chargé de rediffuser à l'ensemble des acteurs de la prévention des risques professionnels les recommandations émises par les agences sanitaires et d'expertise scientifique.

2. La gestion des risques professionnels au sein de l'entreprise
a) Les services de santé au travail

L'institution de services médicaux du travail obligatoires chargés d'assurer le suivi médical des salariés remonte à une loi du 11 octobre 1946 23 ( * ) . Le principe de la création et du financement obligatoires par les employeurs des SST est désormais codifié à l'article L. 4622-1 du code du travail. Les dépenses afférentes aux SST sont ainsi à la charge exclusive des employeurs 24 ( * ) . Au sein du SST, la responsabilité du suivi médical est confiée à un médecin du travail 25 ( * ) dont le rôle est exclusivement préventif et « consiste à éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail, notamment en surveillant leurs conditions d'hygiène au travail, les risques de contagion et leur état de santé. » 26 ( * )

En fonction du nombre de salariés de l'entreprise, le SST chargé de leur suivi médical peut prendre la forme 27 ( * ) :

- soit d'un service de santé au travail interentreprises (SSTI) commun à plusieurs entreprises, auquel cas le financement du SSTI est réparti entre les entreprises adhérentes proportionnellement au nombre des salariés ;

- soit d'un service de santé au travail autonome (SSTA) et propre à l'entreprise. Cette modalité n'est ouverte qu'aux entreprises ou groupements d'entreprises dont l'effectif salarié est supérieur ou égal à 500 salariés 28 ( * ) . Le choix de la forme du SST revient dans ce cas à l'employeur ou, en cas d'opposition du CSE, au directeur de la Direccte.

Selon les données communiquées par le ministère du travail, on dénombrait, en 2018, 239 SSTI et 572 SSTA. Leur nombre connaît une baisse continue depuis 2013 : 254 SSTI en 2016 contre 277 en 2013 (- 8,3 %), et 651 SSTA en 2016 contre 756 en 2013 (- 13,9 %) 29 ( * ) . Cette évolution résulte, en partie, de la mise en oeuvre de l'exigence de pluridisciplinarité des équipes de santé des SST qui a incité certains SSTI à se regrouper avec l'accompagnement actif des Direccte dans le cadre des politiques d'agrément.

La diminution du nombre de SSTA découle, elle, de la fixation à partir de 2012 d'un seuil minimal d'effectifs à 500 salariés 30 ( * ) . Dans les deux cas, le ministère du travail indique veiller à ce que les services atteignent une taille critique assurant une couverture suffisante pour répondre aux besoins des entreprises et des salariés.

Évolution des effectifs et des ressources du réseau des SSTI et SSTA
sur la période 2014-2018

2014

2015

2016

2017

2018

SSTI

Effectifs
(en ETP)

9 553

-

10 091

13 637

14 462

Moyens
(en milliards d'euros)

1,3

1,632

1,645

1,5

-

SSTA

Effectifs
(en ETP)

2 164

-

3 246

-

-

Moyens
(en millions d'euros)

-

-

-

-

-

Source : Direction générale du travail du ministère du travail

Dans sa communication, l'association Présance, seul organisme de représentation des SSTI au niveau national, évoque pour sa part un effectif de 17 000 collaborateurs au sein du réseau des SSTI.

Le réseau des SSTI couvre l'ensemble du territoire et dispose de nombreux points d'accès afin de fournir un service de proximité aux entreprises et à leurs salariés. Dans l'édition 2018 de son rapport de bilan, l'association Présance fait état de 210 SSTI qui « comptent autour de 1 500 centres fixes, répartis sur l'ensemble du territoire, 10 220 centres annexes ou d'entreprises, et 11 580 points de stationnement d'unités mobiles, soit plus de 23 000 points de visites pour accueillir les salariés de leurs adhérents. » 31 ( * )

En revanche, la complétude et le niveau de qualité des prestations des SSTI restent hétérogènes. Face à la pénurie de médecins du travail, le nombre de salariés suivis par chaque médecin du travail peut varier sensiblement d'une région à l'autre et même au sein d'une région : la direction générale du travail du ministère du travail indique ainsi que, dans les Pays-de-la-Loire, un médecin du travail de SSTI doit suivre, selon les territoires, entre 2 891 et 9 144 salariés en prenant en compte les médecins collaborateurs. En excluant les médecins-collaborateurs, ces chiffres s'élèvent respectivement à 2 891 et 15 348.

De même, certains SSTI, bien qu'ayant obtenu leur agrément, ne satisfont pas pleinement à leurs exigences réglementaires minimales. Plusieurs services peinent encore à développer des actions de prévention sur le milieu de travail et se cantonnent à la délivrance de certificats d'aptitude, sans pouvoir consacrer une partie de leur activité à l'étude de postes en entreprise et au conseil des employeurs et des instances de dialogue social sur l'analyse et l'évaluation des risques professionnels.

D'autres ne sont parvenus à mettre en place qu'une seule équipe pluridisciplinaire en leur sein, en application de la loi « Travail » du 8 août 2016 32 ( * ) , alors même que des structures mieux organisées et plus proactives ont institué une équipe pluridisciplinaire à géométrie variable selon les principaux enjeux de santé au travail auxquels sont confrontées leurs entreprises adhérentes (troubles musculo-squelettiques, exposition aux substances toxiques, risques psychosociaux, addictions, maintien dans l'emploi...).

b) Le dialogue social sur la santé au travail au sein des entreprises

En application de l'ordonnance du 22 septembre 2017 33 ( * ) , les attributions en matière de santé, de sécurité et d'amélioration des conditions de travail sont transférées, pour les entreprises d'au moins onze salariés, du CHSCT au CSE. Dans les entreprises de 11 à 49 salariés, la délégation du personnel au CSE est ainsi chargée de contribuer à « promouvoir la santé, la sécurité et les conditions de travail dans l'entreprise » et de réaliser « des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel. » 34 ( * ) . Dans les entreprises d'au moins 50 salariés, le CSE se voit attribuer l'ensemble des compétences préalablement exercées par le CHSCT 35 ( * ) , avec l'appui, dans le cas des entreprises employant au moins 300 salariés, de l'expertise technique d'une commission « santé, sécurité et conditions de travail » (CSSCT).

L'organisation de la santé au travail en France

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

3. L'organisation spécifique de la santé au travail dans la fonction publique

Conformément au statut général de la fonction publique, qui prévoit que nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire « s'il ne remplit les conditions d'aptitude physique exigées pour l'exercice de la fonction compte tenu des possibilités de compensation du handicap » 36 ( * ) , le suivi médical des agents publics fait l'objet d'une organisation spécifique. Trois ensembles de dispositions réglementaires régissent la santé et la sécurité des fonctionnaires et contractuels de l'État, des collectivités territoriales et des hôpitaux :

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique ;

- le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale ;

- le chapitre VI du livre VI de la partie réglementaire du code du travail détermine l'organisation et le fonctionnement des services de santé au travail des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux. Le service de santé d'un établissement de santé peut ainsi être organisé sous la forme soit d'un service de santé autonome propre à l'établissement, soit d'un service de santé autonome constitué par convention entre plusieurs établissements. Les établissements comportant moins de 1 500 agents peuvent néanmoins passer convention avec un service de prévention médicale commun à plusieurs administrations publiques ou un SSTI.

Au-delà des règles encadrant les visites médicales d'aptitude avant l'entrée en fonction assurées par des médecins généralistes agréés, les deux décrets précités ont institué une médecine de prévention propre à la fonction publique d'État et territoriale. Le médecin de prévention de chaque administration est ainsi chargé de prévenir toute altération de la santé de ses agents, de conseiller l'administration et ses agents, d'assurer le suivi de l'état de santé de certains membres du personnel particulièrement vulnérables, dont les agents handicapés, et de prescrire, le cas échéant, des aménagements de poste.

Par lettre en date du 6 mars 2019, le Premier ministre a confié à la députée Charlotte Lecocq ainsi qu'à Mme Pascale Coton et M. Jean-François Forest une mission sur l'amélioration du dispositif de prévention des risques professionnels dans la fonction publique, soulignant l'insuffisance des plans d'action en prévention primaire, notamment en matière de prévention des risques psychosociaux. Les conclusions de cette mission sont attendues pour la mi-octobre 2019.

À l'occasion de l'examen du projet de loi de transformation de la fonction publique, le Sénat a adopté plusieurs amendements 37 ( * ) destinés à améliorer le suivi médical des agents publics et leur accompagnement en cas d'inaptitude, afin de tenir compte des recommandations formulées par sa commission des lois dans son rapport de mai 2019 sur la prise en compte du handicap dans la fonction publique 38 ( * ) :

- la mutualisation des services de médecine préventive entre les trois versants de la fonction publique est facilitée 39 ( * ) ;

- la période de préparation au reclassement est étendue aux agents dont la santé se dégrade, en amont de la déclaration d'inaptitude ;

- les agents pourront suivre une formation qualifiante ou effectuer un bilan de compétences pendant leur congé pour raison de santé, sur la base du volontariat et avec l'accord du médecin traitant ;

- est prévue la possibilité d'une expérimentation de la mise en place par l'État d'une liste de médecins généralistes et spécialistes autorisés à exercer les fonctions de médecin de prévention pour répondre à la pénurie de praticiens ;

- un entretien de carrière est désormais institué pour les métiers les plus pénibles afin d'examiner les difficultés rencontrées et de déterminer, le cas échéant, des actions de formation et de reconversion professionnelle.


* 1 Avec 33,4 accidents du travail pour 1 000 salariés en 2017 (L'assurance maladie - Risques professionnels, Rapport annuel 2017, janvier 2019).

* 2 Eurostat, « Accidents at work statistics », données extraites en juin 2018.

* 3 Assurance maladie - Risques professionnels, Statistiques de sinistralité 2017 tous CTN et par CTN.

* 4 Loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail.

* 5 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 6 Charlotte Lecocq, Bruno Dupuis, Henri Forest, avec l'appui d'Hervé Lanouzière, Santé au travail : vers un système simplifié pour une prévention renforcée , rapport fait à la demande du Premier ministre, août 2018.

* 7 Services de santé au travail interentreprises, préventeurs des caisses d'assurance retraite et de santé au travail, associations régionales d'amélioration des conditions de travail, antennes de l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics.

* 8 Agnès Buzyn, Muriel Pénicaud, Christelle Dubos, lettre de cadrage au secrétaire général du conseil national d'orientation des conditions de travail du 12 mars 2019.

* 9 Le conseil national des conditions de travail et les comités régionaux des conditions de travail, la commission AT-MP de la caisse nationale de l'assurance maladie et les commissions régionales AT-MP des conseils d'administration des caisses d'assurance retraire et de la santé au travail...

* 10 La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et La Réunion disposent de directions des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Dieccte). La Dieccte de la Guadeloupe est compétente pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy. À Saint-Pierre-et-Miquelon, ces compétences sont exercées par la direction de la cohésion sociale, du travail, de l'emploi et de la population (Dcstep).

* 11 Décret n° 2019-253 du 27 mars 2019 relatif aux procédures d'urgence et aux mesures concernant les jeunes âgés de moins de 18 ans qui peuvent être mises en oeuvre par l'inspection du travail.

* 12 Ordonnance n° 2016-413 du 7 avril 2016 relative au contrôle de l'application du droit du travail.

* 13 Seul le premier PST avait permis la création d'une cinquantaine de postes de scientifiques au sein de l'agence publique d'expertise en matière de santé au travail (l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail - Afsset - devenue en juillet 2010 l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail - Ansés -) et de cellules régionales d'appui scientifique et technique pluridisciplinaires au sein des Direccte (essentiellement des postes d'ingénieurs de prévention venant en appui des agents de contrôle).

* 14 Une CMSA a fait le choix de créer une association spécialisée en santé au travail.

* 15 Loi n° 73-1195 du 27 décembre 1973 relative à l'amélioration des conditions de travail.

* 16 Déplacement effectué le 11 juillet 2019.

* 17 Cour des comptes, référé, « L'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail et ses relations avec le réseau des associations régionales pour l'amélioration des conditions de travail », 24 mai 2019, disponible sur www.ccomptes.fr .

* 18 Dès 1859, la caisse d'assurance mutuelle de la chambre syndicale de maçonnerie versait aux ouvriers blessés à l'occasion de travaux la moitié de leur salaire pendant la durée du chômage constaté.

* 19 Hérités des décrets n° 85-682 du 4 juillet 1985 relatif à l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics et n° 2007-1284 du 28 août 2007 modifiant le décret n° 85-682 du 4 juillet 1985.

* 20 Statuts de l'INRS de juillet 2009.

* 21 Arrêté du 28 novembre 1991 approuvant la création du groupement d'intérêt public dénommé Eurogip.

* 22 Elle succède, depuis le 1 er mai 2016, à l'institut de veille sanitaire (InVS), l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpés) et l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Éprus).

* 23 Loi n° 46-2195 du 11 octobre 1946 relative à l'organisation des services médicaux du travail, adoptée par l'Assemblée nationale constituante et promulguée par le Président du Gouvernement provisoire. Une première loi adoptée sous le gouvernement collaborationniste de Vichy en 1942 avait imposé aux entreprises la mise en place de services médicaux dans le cadre de la participation de la France au service du travail obligatoire.

* 24 Art. L. 4622-6 du code du travail.

* 25 Art. L. 4622-2 du code du travail.

* 26 Art. L. 4622-3 du code du travail.

* 27 Art. L. 4622-5 du code du travail.

* 28 Art. D. 4622-5 du code du travail.

* 29 « Bilan de la mise en oeuvre des CPOM », enquête de la direction générale du travail du ministère du travail, 2018.

* 30 Décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 relatif à l'organisation de la médecine du travail. Auparavant, un « service de santé au travail d'entreprise » était mis en place lorsque l'effectif de salariés surveillés dépassait 2 200 ou lorsque le nombre d'examens médicaux pratiqués atteignait au moins 2 133 (article D. 4622-5 du code du travail).

* 31 Présance, Chiffres-clés 2017-2018 , rapport d'octobre 2018.

* 32 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 33 Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales.

* 34 Art. L. 2312-5 du code du travail.

* 35 Art. L. 2312-9 du code du travail.

* 36 Article 5 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

* 37 Modifications intégrées à l'article 40 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

* 38 Donner un nouveau souffle à la politique du handicap dans la fonction publique , rapport d'information de Mme Catherine Di Folco et M. Didier Marie, fait au nom de la commission des lois, n° 520 (2018-2019) - 22 mai 2019.

* 39 Modification de l'article 108-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

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