C. L'ESPAGNE, UN MODÈLE ?

L'Espagne fait figure de pionnière dans la lutte contre les violences conjugales, par l'arsenal législatif et les financements déployés 17 ( * ) .

Évolution des « féminicides » de 2003 à 2019

Au 4 décembre Total annuel

Source : ministère espagnol de la présidence, des relatons avec le Parlement et de l'égalité 18 ( * )

Chronologie de la genèse du Pacte

En 2004 : loi intégrale sur la violence de genre, par le gouvernement Zapatero, votée à l'unanimité.

Novembre 2015 : marche historique des femmes, poussée par la volonté de réforme (et de retour en arrière) de la loi sur l'avortement par Alberto Gallardón, alors ministre de la justice (le gouvernement renoncera à cette réforme de l'avortement face à la pression de la société civile, ce qui provoquera la démission de M. Gallardón).

En 2016 : décision du Congrès des Députés de créer une sous-commission pour les violences faites aux femmes au sein de la commission égalité, qui regroupe tous les partis politiques. Cette sous-commission entendra une soixantaine d'experts pendant 4 mois.

À l'été 2017, cette sous-commission est prête à dévoiler un plan qui deviendra le Pacte d'État sur les Violences faites aux femmes , doté d'un budget de 1 milliard d'euros à répartir sur cinq ans.

Voté à la quasi-unanimité des groupes parlementaires (sauf Podemos qui s'est abstenu) des deux chambres en septembre 2017, l'exécutif et les collectivités territoriales ont rejoint le Pacte en décembre 2017.

Le Pacte contient 214 mesures à l'initiative du Congrès des députés et 267 mesures à l'initiative du Sénat .

Il prévoit des mesures dans tous les domaines, que la Délégation du gouvernement en matière de violences faites aux femmes a divisées en 10 axes principaux :

1- la rupture du silence: sensibilisation et prévention ;

2- amélioration de la réponse institutionnelle, coordination, travail en réseau ;

3- perfectionnement de l'assistance, aide et protection aux victimes ;

4- intensification de l'assistance et de la protection des mineurs ;

5- amélioration de la formation qui garantit la meilleure réponse ;

6- suivi statistique ;

7- recommandations aux communautés autonomes (régions), entités locales et autres institutions ;

8- visualisation et attention d'autres formes de violences contre les femmes ;

9- engagement économique ;

10- suivi du Pacte.

De l'été 2017 au printemps 2018, le gouvernement a paralysé le dossier. C'est le gouvernement du PSOE qui a repris le Pacte et a adopté un décret royal le 3 août 2018 dit de mesures urgentes . Il reprend en effet les mesures considérées comme les plus urgentes du Pacte pour leur mise en oeuvre immédiate (reconnaissance du statut de victime facilitée, Assistance psychologique aux mineurs avec le seul consentement maternel, renforcer l'assistance juridique, Rendre les compétences aux municipalités, Compatibilité avec les aides sociales locales).

Source : ministère des affaires étrangères français

Le budget prévu par le Pacte est d'un milliard d'euros sur cinq ans . Soit environ 200 millions par an jusqu'en 2022 . Ce budget a été voté par la loi de finances annuelle de 2018, prorogé en 2019. Les 200 millions se répartissent de la manière suivante : 80 millions pour l'administration centrale, 100 millions pour les régions et 20 millions pour les municipalités. Régions et villes doivent justifier à l'État de l'utilisation de cette dotation. C'était la première fois, en 2018, qu'un item spécifique était consacré dans le budget de l'État à la lutte contre les violences faites aux femmes.

Toutefois, au vu des informations disponibles et transmises aux rapporteurs, des fragilités semblent exister dans le modèle espagnol . La mobilisation des crédits annoncés dans le cadre du Pacte voté en 2017 a ainsi pris presque un an. Par ailleurs, un certain manque de transparence semble prévaloir quant à l'exécution et à l'utilisation des crédits.

Il n'en demeure pas moins que ce pays constitue un exemple à suivre dans son engagement public clair en faveur de la lutte contre les violences faites aux femmes.


* 17 Concernant les autres pays , la Délégation aux affaires européennes et internationales des ministères sociaux a produit en septembre 2019 une note sur « les politiques de lutte contre les violences envers les femmes dans 16 pays : cadre législatif, pilotage, acteurs » (Espagne, Allemagne, Royaume-Uni, Danemark, Suède, Finlande, Italie, Canada, États-Unis, Russie, Maroc, Argentine, Uruguay, Paraguay, Chili, Chine)

* 18 ECPRD REQUEST #4074: Gender-Based Crimes and Domestic Violence,

http://www.violenciagenero.igualdad.mpr.gob.es/violenciaEnCifras/victimasMortales/fichaMujeres/home.htm

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