B. UN COMPROMIS À ASSUMER : DES MESURES INTRUSIVES MAIS PLUS CIBLÉES ET LIMITÉES DANS LE TEMPS

Le présent rapport propose donc de recourir bien plus fortement aux outils numériques dans le cadre de la gestion des crises sanitaires ou des crises comparables (catastrophe naturelle, industrielle, etc.), notamment en vue de contrôler au niveau individuel le respect des mesures imposées par la situation, et y compris si cela implique d'exploiter des données de manière intrusive et dérogatoire .

En contrepartie, ces mesures pourraient être bien plus limitées, à la fois dans leur nature, dans le nombre de personnes concernées, et dans la durée , épargnant à la société les conséquences de confinements prolongés et de restrictions générales. Pour reprendre l'exemple évoqué au début de la deuxième partie du présent rapport, on pourrait imaginer que seules les personnes diagnostiquées positives, soit environ 0,1 % de la population fin mai 2021 , soient soumises à des mesures d'isolement, mais que ces mesures soient étroitement contrôlées (par une géolocalisation en direct par exemple) et sévèrement sanctionnées (par une amende prélevée automatiquement, par exemple). Aucune autre restriction ne serait imposée au reste de la population ni à la vie économique et sociale en générale, et l'épidémie pourrait être freinée plus vite .

Dans un tel exemple, des technologies intrusives sont nécessaires, et des traitements de données dérogatoires aussi : il s'agit en effet de croiser des données personnelles, y compris des données sensibles relatives à l'état de santé, avec des données de géolocalisation et des données bancaires. Rien d'impossible techniquement, et rien de très exceptionnel en comparaison de ce que font les GAFA à des fins purement commerciales mais, s'agissant de l'État, de l'intérêt général et de la santé publique, il s'agirait d'une grande nouveauté.

Il ne s'agit là que d'un exemple parmi de multiples possibilités, dont l'opportunité doit être appréciée au cas par cas, en fonction de la gravité de la menace et au regard des autres restrictions imposées. En toutes circonstances, il faut raisonner en termes de proportionnalité et de rapport coûts-bénéfices , en comparant les atteintes aux libertés « numériques » à celles portées aux libertés « physiques » .

Comme l'avait déclaré le secrétaire d'État chargé du numérique, Cédric O, à l'époque du développement de l'application française de contact tracing 128 ( * ) : « StopCovid n'est pas une application de temps de "paix". Un tel projet n'existerait pas sans la situation créée par le Covid-19 ». Cette remarque vaut d'une manière générale.

Reste, concrètement, à répondre à cette question : comment avoir les avantages du numérique (l'efficacité du ciblage individuel en temps réel) sans ses inconvénients (son caractère intrusif et le risque d'utilisation détournée) ? Les propositions qui suivent proposent quelques pistes.


* 128 https://cedric-o.medium.com/stopcovid-ou-encore-b5794d99bb12

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