RÉSOLUTION N° 22 (2021-2022) VISANT À AFFIRMER LA NÉCESSITÉ D'UN ACCORD AMBITIEUX LORS DE LA COP26 DE GLASGOW PERMETTANT DE GARANTIR L'APPLICATION EFFECTIVE DE L'ACCORD DE PARIS SUR LE CLIMAT, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT LE 2 NOVEMBRE 2021

Le Sénat,

Vu l'article 34-1 de la Constitution,

Vu le chapitre XVI du Règlement du Sénat,

Conscient que la multiplication et l'intensification des phénomènes climatiques et météorologiques extrêmes sont causées par le réchauffement climatique, dont le caractère anthropique est largement établi par les travaux scientifiques internationaux, synthétisés par le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) ;

Que le changement climatique est porteur de conséquences dramatiques dont l'étendue et la nature sont encore sous-estimées en matière économique, sociale, culturelle, à l'instar de ses conséquences alimentaires ou sanitaires, en favorisant par exemple l'émergence de maladies à risques pandémiques ;

Que le changement climatique constitue, en ce sens, une menace existentielle pour l'espèce humaine et les civilisations qui la composent, ainsi que pour les espèces animales et végétales qui peuplent la planète ;

Que les conséquences de ce réchauffement, si elles n'épargnent aucun État, peuple ou individu, frappent tout particulièrement les pays en développement, plus vulnérables, et affectent davantage les femmes, directement exposées du fait de leur plus grande pauvreté et de leur situation d'exclusion ;

Convaincu du caractère vital, pour contrer cette menace, du cadre multilatéral placé sous l'égide de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques ;

De l'importance historique de l'Accord de Paris, premier accord international sur le climat à caractère universel et unique cadre juridique à même de contenir l'élévation de la température moyenne de la planète à un niveau bien inférieur à 2 degrés Celsius par rapport aux niveaux
préindustriels et de poursuivre les efforts pour limiter encore davantage l'augmentation de la température à 1,5 degré Celsius ;

Du bien-fondé du paradigme ascendant de cet accord, reposant sur l'engagement des États parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques à travers des contributions déterminées au niveau national, actualisées tous les cinq ans, garantes d'une transition écologique démocratique et respectueuse des piliers économiques et sociaux du développement durable ;

Conscient également de la fragilité d'un tel accord, reposant sur le principe des responsabilités communes mais différenciées, consacré par le droit climatique international, du devoir d'exemplarité des pays moteurs de l'action climatique multilatérale et de la nécessité d'une coopération et d'une réciprocité dans l'application de cet accord ;

Juge nécessaire que soit poursuivi, lors de la COP26 de Glasgow, le chemin initié lors de la COP21 de Paris ; Qu'à cette fin, en application des articles 4.2 et 4.9 de l'Accord de Paris, les États parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques soumettent, d'ici le début de la COP26, des contributions déterminées au niveau national correspondant à une progression par rapport aux contributions antérieures, afin de s'approcher des objectifs d'atténuation de l'accord, conformément au principe du relèvement continu de l'ambition posé à l'article 4.3, et s'articulant autour d'un calendrier commun, comme le prévoit l'article 4.10 ;

Soutient à cet égard la position européenne tendant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55 % d'ici 2030 par rapport à 1990, rappelle l'engagement de la France pour participer à l'atteinte de cette cible dans le cadre du règlement (UE) 2018/842 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre par les États membres de l'Union européenne et appelle les autres pays émetteurs à élever leur ambition dans des proportions similaires, sans préjudice du respect du principe des responsabilités communes mais différenciées ;

Qu'en application de l'article 4.19 de l'Accord de Paris, les États parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques formulent et communiquent également des stratégies à long terme de développement à faible émission de gaz à effet de serre, de manière à aligner les contributions déterminées au niveau national et l'objectif collectif de long terme de neutralité carbone, tendant à parvenir à un équilibre entre les émissions anthropiques et les absorptions anthropiques au cours de la deuxième moitié du siècle ;

Juge impératif que les modalités d'application de l'article 6 de l'Accord de Paris, relatif à la coopération entre États pour la mise en oeuvre des contributions déterminées au niveau national, soient enfin arrêtées lors de la COP26 de Glasgow ;

Qu'à cette fin, soient fixées les règles de coopération volontaire bilatérale - qui permet, conformément à l'article 6.2, de transférer les résultats d'atténuation d'un État au niveau international - de manière à ce qu'elles s'opèrent dans le cadre d'un système fiable de comptabilisation, afin notamment d'éviter un double comptage des résultats d'atténuation, par le développement d'une information indicative, annuelle ou bisannuelle, sur les transferts effectués ;

Qu'à cette fin, soient également fixées les modalités de mise en oeuvre du mécanisme de développement durable, prévu à l'article 6 (6.4 à 6.7), afin de permettre une transition juste avec le mécanisme pour le développement propre issu du protocole de Kyoto, sans déprécier la valeur des futurs crédits du mécanisme de développement durable ;

Juge indispensable qu'un cadre de transparence robuste, garant de la réciprocité dans l'application de l'Accord de Paris, soit établi conformément à l'article 13 pour garantir la mise en oeuvre effective des contributions déterminées au niveau national et des stratégies à long terme de développement à faible émission de gaz à effet de serre et afin de permettre la réalisation du bilan mondial de l'accord à compter de 2023, comme le prévoit l'article 14 ;

Afin de faciliter l'application effective de l'accord sur la base de l'équité et dans le respect du principe des responsabilités communes mais différenciées, de manière à entraîner l'ensemble des pays, y compris en développement et en particulier ceux du continent africain, sur le chemin de la neutralité carbone, rappelle le caractère impératif de l'atteinte de l'objectif d'une mobilisation par les pays développés de 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 en faveur des pays en développement, formalisé lors de la COP15 de Copenhague ;

À cette même fin, rappelle l'importance d'une mobilisation prioritaire des mécanismes de compensation en faveur des pays en développement, en particulier ceux du continent africain ;

Forme également le voeu que la part de ces fonds consacrée à l'adaptation au changement climatique dans les pays les plus vulnérables soit progressivement augmentée, pour atteindre une part d'au moins 50 % des fonds publics et privés mobilisés ;

Que les États parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques se saisissent de l'article 7 de l'Accord de Paris en se fixant un objectif mondial en matière d'adaptation, symboliquement égal aux objectifs en matière d'atténuation ;

Qu'afin d'entraîner les pays en développement, en particulier ceux du continent africain, dans l'adoption d'une stratégie bas-carbone, notamment dans leur développement urbain ou dans la préservation de leur couvert forestier, l'action climatique internationale soit décloisonnée des sujets multilatéraux d'importance première pour les pays en développement, tels que l'allégement de leur dette publique et les vaccins contre la covid-19, dont l'accès doit être garanti par les pays développés ;

Sans préjudice du rôle joué par la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, appelle l'ensemble des instances internationales à faire de l'atténuation et de l'adaptation au changement climatique une priorité de leur action, à l'instar de l'Organisation mondiale du commerce dans la définition et l'application des règles régissant le commerce international, ou de l'Organisation mondiale de la santé dans la conduite de la politique internationale de santé publique ;

Juge par ailleurs nécessaire de décloisonner l'action climatique des autres axes de la négociation environnementale internationale, à l'instar de la biodiversité, en renforçant le dialogue et les actions communes entre la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, la Convention sur la diversité biologique et la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification ;

Rappelle l'importance des engagements pris par les acteurs non étatiques, en particulier par les collectivités concernant le relèvement de l'ambition climatique, notamment dans la suite de l'Agenda de l'action présenté lors de la COP21 ;

En particulier, juge indispensable la prise en compte des actions menées par les collectivités en matière de coopération décentralisée, outil essentiel de l'aide au développement, tant par les partenariats humains et financiers que par les transferts de technologies et d'ingénierie locale ainsi que par la prise en compte des savoirs locaux et autochtones ;

Souligne l'importance de la coopération interparlementaire, notamment dans le cadre de l'Union interparlementaire, pour faciliter la conduite d'un accord ambitieux à l'échelle internationale et sa déclinaison dans les politiques publiques nationales ;

Forme enfin le voeu que la France et l'Union européenne continuent d'être des moteurs de la négociation climatique internationale, en se posant en premiers défenseurs de l'Accord de Paris et en dressant une voie pour la transition de l'humanité vers un nouveau modèle de développement respectueux de la planète.

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