C. LA MODERNISATION DES INSTRUMENTS D'INSTRUCTION : UNE TRANSITION VERS LE NUMÉRIQUE BIENVENUE MAIS QUI SUPPOSE UN ACCOMPAGNEMENT

1. La transition vers des procédures d'instruction et de dépôt des demandes de titre dématérialisées : une démarche déjà bien engagée
a) Face à l'obsolescence du système d'information « historique » AGDREF, une modernisation d'abord conduite localement

La dématérialisation des démarches d'accès au séjour constitue un levier incontournable pour résoudre les difficultés d'accès au guichet des préfectures et optimiser les modalités d'instruction des demandes de titres . De fait, l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF), système d'information « historique » du ministère de l'intérieur, a atteint ses limites. Lors de son audition, le directeur général des étrangers en France a ainsi admis que ce système, qui remonte à 1993, était frappé « d'obsolescence ».

Dans ce contexte, la modernisation des systèmes des applications informatisées de traitement des demandes de titres de séjour a d'abord été mise en oeuvre sur la base d'initiatives locales.

La pandémie de Covid-19 a eu pour effet indirect d'accélérer significativement ce basculement vers des démarches dématérialisées . L'interruption de l'accueil et le recours massif au télétravail ont, en effet, contraint les préfectures à envisager des modes opératoires alternatifs afin d'assurer la continuité du service public des étrangers.

Concrètement, deux vecteurs ont été principalement utilisés par les préfectures pour opérer ce virage numérique. Le premier est celui des modules de prise de rendez-vous par internet ( voir supra ) 76 ( * ) .

Le second vecteur est le recours à l'application « Démarches simplifiées ». C ette plateforme « prête à l'emploi » est mise à la disposition de tous les organismes publics par la direction interministérielle du numérique afin de les assister dans le processus de dématérialisation des démarches administratives relevant de leurs compétences. Un peu moins de 6 millions de dossiers auraient été déposés par l'intermédiaire de cette application depuis sa création en 2018 77 ( * ) . En ce qui concerne le droit des étrangers, les préfectures ont recours à cette application soit comme un simple module de prise de rendez-vous en ligne, soit, de manière plus ambitieuse, afin de dématérialiser les phases de dépôt et d'instruction de certains titres de séjour.

Cet outil a néanmoins les inconvénients de ses avantages. Parce qu'il permet de faire une « dématérialisation sur mesure », les préfectures s'en saisissent pour opérer le basculement en ligne des démarches pour lesquelles elles l'estiment le plus pertinent. Il leur a également permis de s'adapter rapidement aux contraintes organisationnelles engendrées par la pandémie. Cela se fait toutefois au prix d'un défaut d'uniformisation selon les préfectures et les démarches concernées , comme l'a notamment relevé la Défenseure des droits, qui pointe par ailleurs l'insuffisant encadrement du recours à cette application de la part des services centraux du ministère de l'intérieur 78 ( * ) . À titre d'exemple, « Démarches simplifiées » est utilisée par la préfecture du Calvados comme outil de pré-demande en ligne pour la plupart des primo-demandes de titre de séjour, tandis que les préfectures de la Marne et de la Mayenne n'y ont recours que dans le cadre des demandes de document de circulation pour étrangers mineurs 79 ( * ) .

b) Un virage vers le « tout dématérialisé » : l'Administration numérique des étrangers en France (ANEF)

Le basculement vers des démarches d'accès au séjour en ligne a franchi un palier avec le lancement de « l'Administration numérique des étrangers en France » (ANEF). Ce projet, dont l'origine remonte à 2014, a pour objectif de dématérialiser 100 % des démarches concernant le séjour des étrangers en France d'ici à la fin de l'année 2022 .

Une direction de programme dédiée a été créée en au sein de la DGEF afin d'assurer la gouvernance de ce projet de très grande envergure. Signe de l'importance des enjeux, la DGEF indique que 50 millions d'euros ont été engagés sur la période 2014-2020 pour mener à bien le déploiement de l'ANEF et que 20 millions d'euros restent à engager d'ici à la fin de l'année 2023. L'ANEF concernera à terme près de 10,1 millions d'usagers-étrangers ou d'entreprises et sera utilisé par près de 10 000 agents instructeurs relevant du ministère de l'intérieur et des autres administrations compétentes.

Le déploiement de l'ANEF s'effectue de façon incrémentale, « brique par brique » selon les termes employés par la directrice de programme ( voir schéma ci-dessous ). L'avantage est double : certaines démarches en ligne peuvent être ouvertes aux usagers au fur et à mesure de l'avancée des développements, tandis que cette progressivité permet aux administrations de disposer du temps nécessaire pour s'approprier ce nouvel outil.

Calendrier de déploiement de l'ANEF

Date

Démarche

Volumétrie

Évolution de la volumétrie (en %)

2022 T4

Autres titres

112 400

100 %

2022 T3

Cartes de séjour « Vie privée et familiale »*

204 500

77,6%

Carte de séjour UE

32 000

60,4 %

2022 T2

Bénéficiaires de la protection internationale

53 000

57,7 %

Février 2022

Changements de situation

50 000

53,2 %

2022 T1

Titres de voyage

60 000

49 %

Janvier 2022

Documents de circulation pour étrangers mineurs

60 000

44 %

2021 T4

Duplicatas et changements d'adresse

19 000

37,5 %

2021 T2

Passeports talents

28 000

35,9 %

2020

Étudiants

199 000

20,9 %

* Conjoints de Français et parents d'enfants français

Source : Ministère de l'intérieur

Selon les données transmises par la DGEF, 52 % des titres sont à ce jour délivrés par l'intermédiaire du portail ANEF et les « gains de productivité et d'efficience ont été évalués à 16 millions d'euros par an à compter de 2027, soit un taux de retour sur investissement inférieur à 7 ans » 80 ( * ) .

2. Une dématérialisation des procédures qui permettra de résoudre certaines difficultés mais qui comporte des limites
a) L'ANEF : des avantages significatifs pour l'administration comme pour les demandeurs

Lors de son audition, la directrice de programme de l'ANEF a détaillé les bénéfices attendus pour l'administration de cette dématérialisation à grande échelle. Les trois principaux sont :

- la disparition définitive des files d'attentes devant les préfectures ;

- la réduction à une seule unité du nombre de passages au guichet nécessaires pour obtenir un titre de séjour , et ce afin de se voir délivrer physiquement ledit titre. Ce chiffre est néanmoins de deux dans les cas où un relevé d'empreintes biométriques est requis ;

- la fin de la dépendance à l'extérieur pour l'obtention des informations utiles à l'instruction : par la mise en place d'interconnexions avec les fichiers pertinents d'autres administrations publiques.

Côté usager, l'ANEF simplifie également considérablement les démarches . Dans son rapport précité, la Défenseure des droits identifie plusieurs avantages, notamment la possibilité de déposer sa demande en ligne à tout moment, d'en suivre le traitement en temps réel, d'obtenir un accusé de réception de démarche en ligne attestant, en cas de contentieux ultérieur, de la réalité des démarches entreprises. En outre, cette dématérialisation centralisée du traitement des demandes d'admission au séjour met de facto fin à l'hétérogénéité des pratiques provoquée par le recours des préfectures à « Démarches simplifiées ».

L'administration voit enfin dans l'ANEF une solution à la problématique d'attribution des rendez-vous en préfecture . D'une part car le nombre de passages en préfecture nécessaires devrait théoriquement diminuer et, d'autre part, car ils seraient automatiquement attribués une fois la phase d'instruction achevée.

b) Des faiblesses qui ne doivent pas être sous-estimées

Si les bénéfices de l'ANEF sont potentiellement importants, ce système présente également des faiblesses qui ne sauraient être minorées .

Premièrement, selon les premières remontées opérationnelles, les usagers de l'ANEF qui rencontrent des difficultés techniques dans le dépôt ou le traitement de leur demande ont parfois du mal à obtenir une assistance efficace ( voir encadré ci-dessous ). Le soutien aux usagers est assuré par le  centre de contact citoyen de l'Agence nationale des Titres Sécurisés (ANTS), joignable par téléphone et via un formulaire de contact, mais celui-ci ne dispose pas des leviers nécessaires pour intervenir directement afin de résoudre les difficultés. Il s'agit en effet d'un point de contact exclusivement consultatif qui est distinct du service instructeur et des services techniques .

Les difficultés rencontrées par des usagers de l'ANEF :
l'exemple de l'impossibilité d'enregistrer une demande de titre

L'association La Cimade a transmis à la mission d'information une contribution écrite présentant huit exemples concrets de difficultés qui lui ont été rapportées par des usagers de l'ANEF et qui illustrent les carences du dispositif d'assistance fourni par le centre de contact citoyen .

Est notamment présenté le cas du détenteur d'un titre de séjour étudiant depuis plusieurs années et qui a été confronté à l'impossibilité de finaliser le dépôt de sa demande. Les captures d'écran de ses nombreux échanges avec l'ANTS permettent de mesurer les progrès restant à accomplir. Les réponses sont en général standardisées, avec des formules types, telles que « Votre demande a bien été transmise au service technique, nous vous invitons à patienter un retour vous sera fait prochainement ». Face à la persistance des difficultés, il est finalement répondu que le centre de soutien possède un rôle uniquement consultatif et que, de ce fait, il lui est « difficile d'annoncer un délai de manière précise ». Le titre de séjour de cet étudiant est arrivé à expiration sans qu'il puisse enregistrer sa demande de renouvellement dans les délais.

Deuxièmement, le basculement vers des démarches dématérialisées suppose un accompagnement renforcé des demandeurs de titre peu à l'aise avec l'outil numérique. Comme le constatent les députés Stella Dupont et Jean-Noël Barrot dans leur rapport précité, « la dématérialisation pose question lorsqu'elle s'adresse à des étrangers maîtrisant peu les outils numériques ». Cette problématique appelle d'autant plus à la vigilance qu'une alternative physique n'est pas systématiquement proposée , par exemple pour les titres de séjour étudiant.

Si l'article R. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise que « les personnes qui ne sont pas en mesure d'effectuer elles-mêmes le dépôt en ligne de leur demande bénéficient d'un accueil et d'un accompagnement leur permettant d'accomplir cette formalité », les dispositifs d'accompagnement en question sont en pratique mis en oeuvre dans des proportions variables. Comme indiqué précédemment, le dispositif des points d'accès au numérique (PAN) mis en place par les préfectures est ainsi encore insatisfaisant ( voir infra ).

En outre, l'ANEF souffre potentiellement de fragilités juridiques et un recours contentieux est actuellement examiné par le Conseil d'État. Lors de son audition, le Directeur général des étrangers en France a par ailleurs précisé des contentieux relatifs aux modules de prise de rendez-vous en ligne et à l'utilisation de l'application « Démarches simplifiées » étaient également en instance. L'absence de modalités alternatives de saisine de l'administration est notamment activement contestée par des usagers ou par des associations. Il s'agit également d'une revendication forte de la Défenseure des droits, qui recommande de « garantir plusieurs modalités d'accès effectif au service afin qu'aucune démarche administrative ne soit uniquement accessible par voie dématérialisée » 81 ( * ) .

Comme le soulignent les députés Stella Dupont et Jean-Noël Barrot dans leur rapport spécial précité, la publication du décret n° 2021-313 du 24 mars 2021 relatif à la mise en place d'une téléprocédure pour le dépôt des demandes de titres de séjour a permis d'imposer le recours obligatoire à un téléprocédure pour déposer les demandes de certains titres de séjours dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de l'immigration. Lors de son audition, le directeur général des étrangers en France a néanmoins exprimé une vive préoccupation quant à la multiplication et au devenir de ces contentieux .

Enfin, l'architecture du portail de l'ANEF est construite « en silo », ce qui réduit considérablement les marges de manoeuvre de l'administration lorsqu'elle est confrontée à des dossiers complexes , impliquant par exemple de nombreux changement de situation. En effet, le paramétrage de l'ANEF interdit de s'extraire des motifs initiaux de la demande et exige le plus souvent, pour s'adapter à son éventuelle évolution, de la clôturer et d'ouvrir un nouveau dossier. Comme évoqué précédemment, cela rend de facto l'ANEF incompatible avec une instruction à « 360° » des demandes de titres que la mission d'information appelle à expérimenter (voir supra ).

3. Accompagnement, adaptabilité et alternative : le triple A d'une dématérialisation réussie

Au vu de ses avantages pour l'administration comme pour les usagers, la mission d'information considère l'achèvement du déploiement de l'ANEF comme une priorité . S'il est conduit selon des modalités appropriées, ce basculement vers des démarches dématérialisées est de nature à résoudre un grand nombre des difficultés auxquelles sont actuellement confrontés les services des étrangers en préfecture , en particulier concernant la délivrance de rendez-vous aux demandeurs de titres.

Un point d'attention concerne toutefois la procédure d'admission exceptionnelle au séjour , dont le directeur général des étrangers en France comme la directrice de programme de l'ANEF ont indiqué au cours de leur audition que son intégration dans le portail ANEF s'avérait particulièrement complexe. Il s'agit pourtant d'un enjeu majeur : selon les données statistiques du ministère de l'intérieur, 23 375 décisions admissions exceptionnelles au séjour ont été prises par les préfectures en 2021 82 ( * ) . Qui plus est, les créneaux de rendez-vous pour ce motif d'admission sont particulièrement exposés au risque de captation et de revente, comme par exemple dans le cas de la Préfecture de police de Paris qui, en réponse, a dû mettre en place un système d'attribution de rendez-vous par l'administration après une pré-instruction du dossier. Dans ce contexte, l'intégration de l'admission exceptionnelle au séjour dans l'ANEF revêt la première priorité .

Recommandation n° 10 : Achever le déploiement de l'ANEF sur l'ensemble des procédures d'accès au séjour, en particulier l'admission exceptionnelle au séjour.

La mission d'information est néanmoins consciente des points de faiblesse du nouveau système ANEF et propose, pour les surmonter, une méthodologie de déploiement du service fondée sur trois principes cardinaux .

a) Accompagnement

Le premier principe est celui d'un accompagnement renforcé des demandeurs de titres dont la maîtrise de l'outil numérique est faible . Comme évoqué précédemment, une proportion importante de préfectures n'ont à ce jour pas mis en place de PAN et, lorsqu'ils existent, les modalités de prise de rendez-vous sont parfois trop restrictives, voire inadaptées, pour que les personnes ciblées puissent s'en emparer. Le cas des prises de rendez-vous s'effectuant par internet pour accéder à un service d'accompagnement au numérique est à cet égard emblématique. Dans ce contexte, il est fondamental de généraliser la mise en place de PAN dans l'ensemble des préfectures et prévoir des modalités de prise de rendez-vous adaptées aux personnes dont la maîtrise de l'outil informatique est limitée.

Recommandation n° 11 : Généraliser la mise en place de points d'accès au numérique dans l'ensemble des préfectures et prévoir des modalités de prise de rendez-vous adaptées aux personnes dont la maîtrise de l'outil informatique est limitée.

b) Adaptabilité

Le second principe mis en avant par la mission d'information est celui de l'adaptabilité . Comme évoqué précédemment, les modalités techniques de fonctionnement de l'ANEF sont actuellement trop rigides. Elles ne permettent que difficilement la prise en compte des réalités du terrain, où des situations personnelles atypiques et évolutives se présentent régulièrement, sans qu'elles puissent être correctement traitées dans le cadre de l'ANEF. Des développements techniques doivent donc être conduits afin pouvoir traiter les cas les plus atypiques sans recourir à l'ouverture d'un nouveau dossier.

La mise en place de l'ANEF représente un défi technique considérable et il serait naïf d'imaginer qu'elle puisse être déployée sans aucuns heurts. Pour autant, il n'est pas tolérable de voir des usagers privés de leur droit au séjour du fait qu'en présence d'une difficulté technique, aucune assistance appropriée ne leur a été apportée dans les délais. Il importe donc de développer un support technique robuste permettant la levée rapide des difficultés sur les dossiers atypiques signalés par les préfectures ou les usagers. Pour ce faire, il est indispensable d'établir des canaux de communication fonctionnels entre le centre de contact citoyen et :

- les services chargés de la maintenance informatique de l'ANEF pour traiter les difficultés relatives au système informatique en tant que tel ;

- les agents instructeurs , pour apporter des réponses adaptées aux intéressés lorsque leurs demandes ont trait au fond de leur dossier.

Recommandation n° 12 : Assouplir les conditions d'utilisation de l'ANEF afin de mieux prendre en compte les changements de situation et les situations atypiques.

Recommandation n° 13 : Mettre en place un support technique robuste permettant la levée rapide des difficultés sur les dossiers atypiques signalés par les préfectures ou les usagers.

c) Alternative

La question du maintien ou de non de modalités de saisines de l'administration alternatives à la saisine par voie dématérialisée est particulièrement épineuse.

Force est de constater que la multiplication des voies d'accès à l'administration contribue à accentuer la mise sous tension de services des étrangers déjà particulièrement sollicités . Les usagers tendent en effet à se saisir de tous les canaux de communication simultanément, de manière à obtenir une réponse à leur demande le plus rapidement possible. La réduction des points de contact permet indéniablement de soulager l'administration des étrangers d'une partie de la pression pesant sur elle. Pour autant, la mission d'information considère qu'il serait également excessif de ne prévoir aucune modalité de saisine alternative des préfectures , compte tenu des conditions d'usage encore imparfaites de l'ANEF et du fait que des situations personnelles urgentes ou d'une particulière complexité sont toujours susceptibles de survenir.

Afin de résoudre cette équation, la mission d'information propose de réserver les modalités alternatives d'accès au service public des étrangers aux seuls cas où une démarche administrative entamée via l'ANEF n'a pas pu aboutir , soit qu'une difficulté technique insurmontable ait été rencontrée, soit qu'un délai trop important depuis le dépôt de la demande de titre se soit écoulé.

Recommandation n° 14 : Préserver d'autres modalités d'accès au service public des étrangers lorsqu'une démarche administrative entamée via l'ANEF n'a pas pu aboutir.


* 76 Voir pages 26 et suivantes du rapport.

* 77 Statistiques accessibles sur le site internet de la plateforme « Démarches simplifiées », accessible à cette adresse : https://www.demarches-simplifiees.fr/

* 78 Défenseur des droits, Dématérialisation des services publics : trois ans après, où en est-on ? (février 2022).

* 79 Informations disponibles sur le site internet de la plateforme « Démarches simplifiées ».

* 80 Contribution écrite de la DGEF.

* 81 Rapport précité de la Défenseure des droits.

* 82 DGEF, L'essentiel de l'immigration, Chiffre clés, janvier 2022.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page