III. TABLE RONDE N°2 : RÉUSSIR LA TRANSMISSION ET LA REPRISE D'ENTREPRISES, UNE PRIORITÉ DANS NOS TERRITOIRES

M. Emmanuel CUGNY

Avant d'accueillir les intervenants à cette table ronde, je vous propose de regarder un bref reportage portant sur le travail mené par la mission sénatoriale des entreprises et les rapporteurs.

Vidéo de présentation par les co-rapporteurs de la Délégation sur la la transmission d'entreprise

Le rapport de la Délégation aux entreprises du Sénat sur la transmission d'entreprises sera examiné le 27 octobre prochain. Un résumé de ce rapport vous a été remis.

Nous allons à présent évoquer le sujet de cette table ronde avec les invités suivants :

• M. Florent Bonniou, dirigeant de l'entreprise Sobrefer, société bretonne de ferraillage spécialisée dans la réalisation d'armatures métalliques ;

• Mme Nelly Hemmo-Haladjian, Directrice générale du groupe Haladjian, leader des solutions globales dans les secteurs de la construction, des mines et de l'industrie ;

• Me Jean-François Desbuquois, avocat fiscaliste, membre du Cercle des fiscalistes et de l'Institut des avocats conseils fiscaux (IACF) ;

• M. Frédéric Parrenin, membre de la Direction de la législation fiscale à Bercy.

Florent Bonniou, pourriez-vous nous présenter votre entreprise et nous expliquer comment s'est déroulé votre projet de reprise ? En effet, l'histoire et les motivations de cette reprise sont très intéressantes.

M. Florent BONNIOU, dirigeant de l'entreprise Sobrefer

J'ai repris Sobrefer il y a de cela un an. Il s'agit d'une société de ferraillage implantée à Locmaria-Plouzané, à l'ouest de Brest. Nous sommes 21 collaborateurs pour une activité dégageant environ 3 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Nous réalisons des armatures métalliques pour le béton armé. Les poutres métalliques que nous fabriquons sont distribuées à tous les acteurs du gros oeuvre sur le secteur brestois.

Cette très belle entreprise aura 50 ans cette année. Elle a été créée en 1972. Il s'agissait originellement d'une entreprise familiale créée par l'oncle du cédant. Elle a ensuite été transmise au chef d'atelier. L'entreprise a de nouveau été transmise au neveu de la famille fondatrice en 2022. Ce même neveu me l'a transmise il y a de cela un an.

J'appartenais auparavant à un grand groupe international au sein duquel je dirigeais une entité de 50 personnes. Or j'avais toujours souhaité entreprendre, mais je ne savais pas comment aborder le sujet. Il n'existe effectivement pas de guichet unique auquel s'adresser pour reprendre une entreprise.

Le bouche-à-oreille m'a permis de rencontrer le conseil qui m'accompagne encore à ce jour. Nous avons évoqué non pas des questions de fiscalité, mais mes goûts et mes envies. J'ai donc été amené à mener un travail sur moi-même pour déterminer le type d'entreprise que je souhaitais reprendre.

M. Emmanuel CUGNY

Le cédant vous a-t-il fixé des conditions pour la reprise ?

M. Florent BONNIOU

Les choses se sont faites très simplement. Nous avons eu une entrevue d'une heure en novembre 2020. Le cédant m'a alors fait visiter l'entreprise. À la fin de la visite, il m'a fixé deux conditions : d'une part, que l'entreprise reste à Locmaria-Plouzané. Le cédant avait effectivement à coeur de vendre les parts et les murs, ce qui me convenait très bien. D'autre part, il m'a demandé une somme pour l'entreprise. L'affaire était réglée. La confiance s'est établie dès le départ.

Je me préparais à cette reprise depuis quatre ans. J'avais défini ma cible et préparé mes moyens financiers. Mon apport s'élevait à 155 000 euros. Tout s'est par ailleurs bien passé avec les banques. Ainsi, j'ai pu bénéficier de prêts à taux zéro. Il est cependant à noter que ces prêts ne sont accordés que lorsque la reprise est signée. La question de l'apport est donc un vrai sujet.

M. Emmanuel CUGNY

Nelly Hemmo-Haladjian, malgré quelques similitudes sur la forme et le fond, votre expérience est foncièrement différente. Vous n'avez pas repris une entreprise, mais vous êtes inscrite dans une démarche de transmission.

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN, Directrice générale du groupe Haladjian

Le groupe Haladjian propose des solutions globales dans les domaines de l'industrie, des mines et de la construction.

Cette société basée dans le sud de la France, près d'Avignon, a été créée par mon grand-père, ancien mécanicien.

Nous dégageons à l'heure actuelle 120 millions d'euros de chiffre d'affaires et comptons 300 collaborateurs, 250 en France et 50 au sein de nos filiales internationales. Nous sommes notamment présents sur le continent africain, au Burkina Faso, au Sénégal et en Côte d'Ivoire.

J'ai rejoint le groupe il y a 15 ans, au départ en tant que cheffe de projet pour la mise en oeuvre d'un important système d'information. Cette mise en oeuvre avait été décidée par mon père et ce dernier ne parvenait pas à achever son implémentation. Ce projet structurant était en effet compliqué à appréhender pour une entreprise de cette taille.

Après des études de commerce à Grenoble, j'étais allée en Chine pour une expérience à l'international. Lorsque mon père m'a demandé de rejoindre le groupe, je n'ai pas réfléchi, endossant immédiatement ce rôle de cheffe de projet digital pour ensuite évoluer sur la partie SI dans un contexte de transformation de nos outils. J'ai ensuite occupé diverses fonctions opérationnelles.

Mon frère m'a rejoint il y a une dizaine d'années et, depuis 5 ans, nous travaillons véritablement sur la transmission.

Nous n'étions pas destinés à reprendre l'entreprise. Notre père avait toujours instillé l'idée que seule la passion assure la réussite. Cependant, tout naturellement, mon frère et moi en sommes arrivés à travailler au sein de l'entreprise familiale et à développer un attrait substantiel pour cette activité. Nous avons donc indiqué à notre père que nous souhaitions reprendre l'entreprise ensemble.

La transmission et la reprise d'une entreprise impliquent d'organiser la gouvernance et les holdings animatrices pour faire en sorte que les choses se fassent dans de bonnes conditions.

M. Emmanuel CUGNY

Votre statut au sein de l'entreprise procède-t-il de votre droit d'aînesse ?

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

J'occupe les fonctions de présidente du groupe et de la holding animatrice. Nous avons mis en oeuvre, mon frère et moi, une présidence tournante. Chacun occupe ces fonctions pendant 3 ans.

Il a bien évidemment fallu se mettre d'accord et établir un pacte d'actionnaires, ce qui n'est pas toujours évident pour un frère et une soeur. Il était néanmoins nécessaire, pour notre père et nous, que nous ayons exactement les mêmes ambitions. Il était important que les choses soient écrites et structurées.

Je précise que notre père n'avait pas eu cette chance, car il avait dû reprendre le groupe à la mort de notre grand-père. Rien n'avait donc été préparé.

M. Emmanuel CUGNY

Deux cas différents nous ont été présentés : une reprise et une transmission. Jean-François Desbuquois, les deux exercices sont-ils réellement différents sur le fond ?

M. Jean-François DESBUQUOIS

Le second exemple est un peu plus complexe, car il met en jeu des relations familiales. Les paramètres techniques sont également plus compliqués, car ce type de transmission procède du droit civil de la famille et donc d'une fiscalité qui diffère complètement de celle d'une cession.

Comme cela a été décrit, une transmission familiale suppose une anticipation. Il peut cependant s'agir d'une transmission suite à un décès ce qui peut occasionner des situations catastrophiques lorsque la reprise doit se faire brutalement.

Je souhaiterais insister sur la dimension fiscale de la transmission ou de la donation. Ce volet doit absolument être maîtrisé, faute de quoi la transmission sera extrêmement difficile. Il convient d'aborder ces questions le plus tôt possible afin de se donner tout le temps nécessaire pour bien les examiner et les gérer. Ce paramètre est fondamental, car la possibilité d'un décès accidentel ne peut jamais vraiment être écartée. Sans anticipation, cela peut générer un réel traumatisme.

M. Emmanuel CUGNY

Frédéric Parrenin, entre transmission et reprise, une des deux options est-elle plus avantageuse que l'autre à vos yeux ?

M. Frédéric PARRENIN, Direction de la législation fiscale

Les choses dépendent avant tout de choix inhérents à la famille concernée ou aux aspirations de l'entrepreneur.

Je tiens dans un premier temps à recadrer mon intervention : j'appartiens à un bureau très particulier de la Direction de l'administration fiscale. Je ne m'occupe donc pas des droits de mutation à titre onéreux, mais bien des questions de fiscalité du patrimoine. Je travaille en outre au sein de la sous-direction de la fiscalité des particuliers. Compte tenu de mes attributions, je suis relativement limité dans ma capacité à répondre à certaines questions.

Ceci étant dit, notre bureau est sensible aussi bien à la transmission sous forme de cession qu'à la transmission à titre gratuit. Outre la mise en place du prélèvement forfaitaire unique au cours de la précédente législature, nous avons maintenu l'abattement de 500 000 euros dédié aux cessions d'entreprises en vue du départ en retraite. Cet abattement est propre aux personnes cédant une structure dans un délai qui suit ou précède de 2 ans leur départ en retraite ou leur cessation d'activité. La prorogation de ce dispositif jusqu'en 2024 a aussi été décidée du fait des difficultés rencontrées par les personnes souhaitant procéder à des cessions pendant la période de pandémie.

Par ailleurs, nous avons donné la possibilité aux personnes parties en retraite depuis 2019 de céder leurs entreprises dans un délai non plus de 2 ans, mais de 3 ans.

Nous sommes sensibles au fait que les entreprises sont un tissu à entretenir. Cependant, comme le disait Me Desbuquois, parler de transmissions à titre gratuit revient à évoquer des questions de droit civil et de patrimoine. Il n'est donc pas possible de raboter à l'envi les droits dus sur les transmissions d'entreprises, ne serait-ce que par respect des principes fondamentaux d'égalité devant l'impôt. Ce message est essentiel.

M. Emmanuel CUGNY

Florent Bonniou, compte tenu de l'importance de la notion de temps long, comment se préparer à une reprise ? Faut-il travailler conjointement avec des avocats ?

M. Florent BONNIOU

J'ai effectivement contacté un avocat qui est d'ailleurs mon conseil depuis quatre ans. Pendant deux ans, j'ai aussi fait partie du CRA (association cédants et repreneurs d'affaires).

Dans les faits, il importe avant tout de définir son projet.

En outre, l'entreprenariat est indissociable de la dimension humaine, principalement incarnée par les salariés. C'est là que réside la valeur de l'entreprise. Or, dès la genèse de mon projet, cet aspect me tenait véritablement à coeur.

M. Emmanuel CUGNY

Considérez-vous qu'à l'heure actuelle, la France, ses institutions et ses banques favorisent la reprise d'entreprises ?

M. Florent BONNIOU

Dans mon cas, les choses se sont très bien passées, car je me suis préparé et ai pu bénéficier d'aides et de prêts à taux zéro. En outre, il existe un programme appelé Breizh Fab développé par la région Bretagne. Grâce à ce programme, j'ai pu bénéficier pendant 12 jours de l'accompagnement de consultants qui m'ont aidé à suivre mon projet de transformation. Cela représente une aide de plus de 20 000 euros.

Les choses sont relativement bien coordonnées en France. En revanche, la reprise de petites entreprises continue à poser problème. En effet, de nombreux repreneurs potentiels ne seront pas en mesure d'investir des fonds dans leur projet.

M. Emmanuel CUGNY

Parce qu'ils ne sont pas suivis par les banques ou parce que le business plan n'est pas satisfaisant ?

M. Florent BONNIOU

Plus les entreprises sont petites et plus les banques sont frileuses. Il faudrait peut-être que l'État mette en place des mesures incitatives pour que les banques examinent les petits dossiers.

En outre, le départ à la retraite d'un cédant peut être vécu comme un traumatisme. Il serait judicieux d'inciter ces cédants à réinvestir quelques fonds et/ou à accompagner les repreneurs pendant quelques années. D'une part, cela permettrait de combler les sommes qui manquent au repreneur et, d'autre part, le cédant resterait présent pendant quelque temps au sein de son entreprise dans une position de conseil.

M. Emmanuel CUGNY

Nelly Hemmo-Haladjian avez-vous rencontré des difficultés de ce type ? Avez-vous pu bénéficier d'aides ?

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

Nous avons effectivement été aidés. De surcroît, nous sommes passés en quelque temps du statut de PME régionale à celui d'ETI. Le fait de travailler avec mon frère et notre père nous a permis de nous répartir les sujets et d'aller chercher des conseils et des banques qui pouvaient nous accompagner dans notre démarche.

Nous avons fait usage du pacte Dutreil et nous continuons à l'utiliser. Il s'agit d'un outil formidable, mais très complexe.

Au final, il est crucial que le cédant soit prêt et que les repreneurs le soient aussi. Il peut arriver que les transmissions se passent mal parce que le cédant se dit prêt, mais ne l'est pas véritablement. Car, en outre, certaines conditions de direction opérationnelle et d'engagements des titres doivent aussi être satisfaites.

M. Emmanuel CUGNY

Me Desbuquois, serait-il possible d'établir une sorte de benchmark entre la France et l'Allemagne ?

M. Jean-François DESBUQUOIS

La France souffre d'un déficit dramatique de transmissions familiales. Nous ne disposons pas de statistiques précises sur le sujet, mais les sources s'accordent à dire qu'environ 15 % des transmissions sont familiales tandis que 85 % sont des ventes ou des cessions financées par un tiers. En Allemagne, le taux de transmissions familiales avoisine les 60 %. Par ailleurs, la proportion de transmissions familiales est de 70 % en Italie et d'environ 90 % en Suède. Les causes de cette disparité entre la France et les pays voisins sont complexes, mais tiennent en partie à la fiscalité française.

Il importe cependant de ne pas négliger les transmissions familiales. De fait, la transmission de certaines PME est compliquée par des contingences d'ordre géographique. Il est en effet difficile de faire venir des repreneurs dans certaines zones. Le marché de la cession est relativement équilibré, puisqu'il y a à peu près autant de repreneurs que de vendeurs. Cependant, le nombre de repreneurs est plus élevé en Île-de-France qu'ailleurs. Dès lors, la transmission familiale peut être une solution.

En outre, certaines très grandes entreprises françaises sont détenues par une même famille depuis plusieurs générations. Si la transmission familiale n'est plus permise, ces groupes devront être vendus. Or cela impacterait considérablement l'économie nationale.

Pour ce qui est des PME, sauf modèle économique extraordinaire, il faut leur laisser le temps de devenir des ETI. Là encore, si les transmissions familiales ne sont plus permises, cela pourrait entraîner des pertes de savoir-faire ou encore des délocalisations d'emplois. La société serait en outre dans l'obligation de payer, sous forme de distributions des dividendes, le remboursement des prêts nécessaires à son rachat.

M. Emmanuel CUGNY

À vous entendre, la transmission familiale est peu consommatrice de capital.

M. Jean-François DESBUQUOIS

Dans le cadre d'une transmission familiale, la seule consommation de capital a trait à la fiscalité. Cette consommation peut être fortement réduite grâce au pacte Dutreil.

En outre, le chef d'entreprise cédant peut avoir besoin de reconstituer un patrimoine privé. En effet, le patrimoine privé du chef d'entreprise peut être relativement modeste par rapport à la valeur de son entreprise. Or, lorsqu'il transmet sa société à ses enfants, il ne perçoit pas de contrepartie financière.

M. Emmanuel CUGNY

Pourriez-vous nous présenter les avantages et les inconvénients du pacte Dutreil ?

M. Jean-François DESBUQUOIS

Le pacte Dutreil est un dispositif purement fiscal visant à favoriser les donations ou les successions portant sur des entreprises.

En France, le barème de droits de mutation à titre gratuit est considérable et sans commune mesure avec celui de tous les autres pays européens. Il s'agit en effet du troisième barème le plus lourd du monde. Ainsi, en France, les droits de succession montent très rapidement dans une tranche à 45 %. Dès lors, si les enfants d'un cédant sont dans l'obligation de payer pratiquement la moitié de la valeur de l'entreprise sous forme d'impôts de succession, la situation devient vite intenable. C'était pourtant bel et bien le cas dans les années 1982 à 2000. Par conséquent, il n'y a eu quasiment aucune transmission familiale pendant cette période. Le nombre d'ETI en France a alors connu une stabilité, voire une décroissance alors même que la France comptait presque autant d'ETI que l'Allemagne en 1980. À l'heure actuelle, nous dénombrons entre 4 500 et 5 000 ETI tandis que l'Allemagne en compte 13 000.

Le pacte Dutreil a été élaboré pour créer de meilleures conditions de transmission. Il est assorti d'un certain nombre de conditions qui permettent d'expliquer l'écart de fiscalité avec les autres redevables. L'une des conditions est de s'engager à conserver l'entreprise familiale pendant au moins 6 ans.

Les avantages attendus consistent en une exonération de 75 % de la valeur de l'entreprise qui n'est pas soumise au droit de succession ainsi qu'en une réduction d'impôt de 50 % ou une réduction lors de la conservation de l'usufruit. Le gain fiscal est significatif. Cependant, il est à noter qu'à terme, l'entreprise paye généralement elle-même les droits de donation et de succession, le dividende étant imposé.

Globalement, le taux est de 15 à 16 % pour une succession et d'environ 8 % pour une donation. Ces taux sont très favorables comparativement aux 45 % de droit commun en France. En revanche, ils sont beaucoup moins avantageux que les taux pratiqués par d'autres pays européens.

M. Emmanuel CUGNY

Frédéric Parrenin, pouvez-vous nous apporter quelques éclairages sur cet aspect fiscal ?

M. Frédéric PARRENIN

Il est nécessaire de garder à l'esprit qu'en France, plus de 80 % des successions en ligne directe sont exonérées.

Le manque de chiffres sur le sujet nous est souvent reproché. Des mesures visant à alléger les obligations déclaratives ont été prises. Or l'allégement occasionne une perte de matière informatique. Ce déficit d'information est donc le corollaire de la simplification de la vie des usagers.

Lors de la précédente table ronde, il avait été rappelé que les TPE représentent 90 % de l'effectif. Il faudrait peut-être rapprocher le nombre de TPE et la part des cessions réalisées en France. Cela ferait écho au propos de M. Bonniou selon lequel les banques ne s'intéresseraient pas aux TPE. Il s'agit de se demander si les enfants eux-mêmes sont intéressés par la perspective de reprendre les TPE de leurs parents. La question est ouverte.

En ce qui concerne les droits de mutation à titre gratuit, le taux appliqué aux transmissions en ligne directe peut atteindre les 45 %. Cependant, cela s'accompagne d'une batterie d'avantages. Dans le cadre de la transmission à des tiers, le taux s'élève à 60 %. Il est donc compréhensible que la transmission à titre gratuit fonctionne assez peu.

Outre le pacte Dutreil qui est un levier extrêmement puissant, il existe un dispositif d'abattement en faveur des transmissions à titre gratuit opérées au profit des salariés. Ce dispositif est assez puissant puisque l'abattement peut atteindre les 300 000 euros.

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

Ce débat est très technique et semble assez éloigné de notre quotidien de repreneurs d'entreprises. Au-delà des aspects fiscaux, la volonté de reprendre une entreprise est motivée par la passion. Or cette passion est parfois freinée par des débats un peu trop spécialisés.

Des dispositifs utiles existent et nous sommes déjà en mesure de travailler efficacement et en collaboration. Néanmoins, il faut continuer sur cette lancée et sanctuariser un certain nombre de dispositifs afin de les pérenniser.

M. Emmanuel CUGNY

À ce titre, avez-vous des propositions à formuler ?

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

Les indicateurs participent de la vie de l'entreprise. De fait, nous proposons, avec le METI, de mettre en place un indicateur de transmission concret. Cela ne serait pas très coûteux et permettrait de déterminer si les mécanismes existants contribuent véritablement à la transmission d'entreprises.

M. Emmanuel CUGNY

Florent Bonniou, avez-vous des réactions ou des propositions à formuler ?

M. Florent BONNIOU

Les transmissions et les reprises d'entreprises sont souvent auréolées de mystère. Les annonces proposant des reprises ne sont pas épinglées sur la place publique. Il importe donc de mener des actions d'information sur les dispositifs existants, et cela dès le plus jeune âge.

Qui plus est, il serait peut-être pertinent de centraliser les points d'accès à la reprise d'entreprises.

Sobrefer est la plus grande entreprise de Locmaria-Plouzané. Il est crucial que cette structure soit implantée à cet endroit. La question de l'ancrage territorial est donc fondamentale.

M. Emmanuel CUGNY

Jean-François Desbuquois, quelles réformes peuvent-elles être envisagées pour aller de l'avant et faciliter les transmissions et les reprises ?

M. Jean-François DESBUQUOIS, avocat fiscaliste

Il n'est pas certain qu'il faille lancer de nouvelles réformes sur la partie fiscale. En effet, la transmission familiale a déjà été beaucoup amendée. Le pacte Dutreil existe depuis 2000. Depuis cette date, 17 réformes législatives sont intervenues. Or, le dispositif étant assez complexe, chaque modification fait perdre un peu de stabilité aux redevables et aux conseils qui doivent alors se réapproprier le système. En outre, l'administration doit de nouveau le commenter, ce qui prend un certain temps. Il serait donc plus raisonnable de laisser ce dispositif fonctionner en l'état pendant un certain temps.

M. Emmanuel CUGNY

Dès lors, sur quels leviers est-il possible d'agir pour répondre aux attentes des entrepreneurs ?

M. Jean-François DESBUQUOIS

Il serait possible d'agir sur la fiscalité, mais en périphérie du pacte Dutreil. Ainsi, le sujet de la holding animatrice est la pierre angulaire de toute la fiscalité du chef d'entreprise. Cette notion a subi un certain nombre d'évolutions jurisprudentielles. Son cadre législatif n'est pas encore formé, ce qui laisse planer un flou et une insécurité juridique dramatique. De fait, une société transmise avec une qualification de holding animatrice qui se révèle erronée doit restituer tous les avantages fiscaux conférés au moment de la transmission. Ce point est donc à stabiliser et à clarifier.

D'autres sujets sur lesquels il serait possible d'agir concernent l'accompagnement du paiement, notamment des droits de donation et de succession. Le régime permettant d'échelonner ces paiements sur 15 ans mériterait d'être amélioré.

La situation est un peu différente dans le cadre d'une transmission familiale, car les successeurs ont vécu dans une famille de chefs d'entreprise. Ils connaissent la société et son activité.

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

Les parents chefs d'entreprise ne font pas forcément baigner leurs enfants dans l'entreprenariat, à plus forte raison si l'environnement de l'entreprise est extrêmement technique.

Ainsi, notre père souhaitait opérer une séparation entre les sphères professionnelle et privée. Quant à nous, nous essayons d'intéresser nos propres enfants à notre activité et à la compréhension de l'entreprise. Cependant, comprendre l'entreprise et vouloir la reprendre sont deux choses différentes. Se lancer dans une reprise uniquement pour reprendre le flambeau engendre des catastrophes.

M. Emmanuel CUGNY

Quelle est la réaction de vos enfants lorsque vous leur parlez de transmission et d'avenir ?

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

J'essaie de leur transmettre la passion de notre métier et la compréhension des raisons pour lesquelles nous nous battons quotidiennement. En revanche, il n'y a aucune obligation.

M. Jean-François DESBUQUOIS

La formation précoce des jeunes est un sujet très intéressant. Ainsi, certains grands groupes qui finissent par devenir des ETI ou des entreprises internationales comptent des centaines d'actionnaires familiaux. Les jeunes actionnaires sont formés très tôt afin non seulement de détecter les éventuels dirigeants potentiels, mais aussi de faire en sorte que tous les futurs détenteurs du capital soient conscients de leurs responsabilités.

M. Emmanuel CUGNY

Peut-être faudrait-il évoquer ce sujet avec l'Éducation nationale, laquelle a certainement un rôle à jouer sur ce volet.

Frédéric Parrenin, pourriez-vous synthétiser les changements possibles au niveau fiscal et nous donner des renseignements supplémentaires sur le pacte Dutreil ?

M. Frédéric PARRENIN

Originellement, le pacte Dutreil était limité aux transmissions par décès, avec un engagement de 16 ans. Il est donc clair qu'à l'heure actuelle, nous avons gagné en souplesse puisqu'au fil des ans, les conditions se sont sensiblement allégées. À tel point que nous craignons désormais que le Conseil constitutionnel ne vienne censurer le texte, car il serait en inadéquation avec l'objectif poursuivi. Dans ce cas-là, nous serions amenés à recréer un dispositif qui serait en définitive moins favorable.

J'abonde donc pleinement dans le sens de Me Desbuquois : il ne faut plus toucher à un texte dont la rédaction est d'ailleurs extrêmement disparate. En effet, ce texte a été modifié un peu à l'emporte-pièce. Il est donc affreusement complexe.

Concernant les holdings animatrices, le concept remonte à 1978 et a connu son essor lors de la mise en place de l'impôt sur les grandes fortunes. Il s'agit d'une construction prétorienne destinée à prendre en considération les grands capitaines d'industrie. Ce concept est cependant transverse et s'applique dans diverses situations de la vie fiscale des entreprises. Par conséquent, cette construction est également devenue un outil de fabrication de structures juridiques afin d'optimiser les transmissions.

Dans tous les cas, la holding animatrice reste une construction jurisprudentielle. Nous sommes donc très embarrassés à l'idée de légiférer sur ce sujet.

Nous avons récemment été confrontés à une décision de jurisprudence qui a montré que l'animation des filiales est un état de fait. En 2021, dans le cadre de l'affaire Finarea, la Cour de cassation a rendu un arrêt dans ce sens. Légiférer pour échafauder des critères sur un état de fait est donc assez compliqué. Il serait peut-être préférable de laisser cela à l'appréciation des juges.

M. Emmanuel CUGNY

Je cède à présent la parole à la salle.

Mme Dominique ALBA

Je dirige un certain nombre de petites entreprises dans le domaine de l'équipement de la personne.

Il a beaucoup été question de transmissions patrimoniales, mais moins de transmissions d'entreprises en difficulté.

Concernant le manque de statistiques, il me semble que ce problème tient à la structure même des entreprises en France et à leur taille. Au sein d'une entreprise de 20 personnes, il y a forcément 3 ou 4 salariés qui font l'entreprise. Lors d'une transmission ou d'une difficulté rencontrée par l'entreprise, ces salariés peinent à reprendre eux-mêmes la structure, cela pour deux raisons : d'une part, leur avis leur est rarement demandé ; d'autre part, parce qu'ils ne disposent pas des fonds nécessaires.

Dès lors, il serait pertinent de créer un compte destiné aux repreneurs/entrepreneurs qui correspondrait à deux ou trois années de salaire. Cela ne représenterait pas une dépense exorbitante pour l'État, compte tenu des indemnités de chômage et du fait qu'il faille, dans tous les cas, indemniser les salariés. Ces derniers pourraient ainsi disposer d'un capital et être intégrés intellectuellement et financièrement dans le fonctionnement de l'entreprise.

En outre, cela améliorerait la transparence. En effet, informer les salariés d'une potentielle transmission suscite généralement de l'inquiétude, de la démotivation et, souvent, des départs. Cela induit donc une dévalorisation de l'entreprise. Le fait de rendre possible l'accession des salariés au capital réglerait beaucoup de problèmes.

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

Les entreprises familiales ont à composer avec un volet patrimonial, mais aussi avec des aspects très opérationnels. De fait, pour fidéliser les collaborateurs, il est nécessaire de les faire monter au capital. Le groupe Haladjian prépare cette démarche. C'est aussi ainsi que nous pourrons développer notre activité et répondre à une réelle attente des salariés.

M. Jean-François DESBUQUOIS

Dans certains cas de figure, un chef d'entreprise souhaitant prendre sa retraite n'a pas de descendants et ne trouve pas de repreneur. Il arrive donc que ce dirigeant donne sa société à ses salariés. Le pacte Dutreil le permet. Dans ce type de situation, l'ancrage social et territorial d'une PME est conservé, car qui mieux qu'un salarié en activité depuis des décennies pour continuer à faire fonctionner une entreprise ?

Mme Géraldine BOURGEOIS

Je suis à la tête d'une petite entreprise de coiffure et d'esthétique dans l'Yonne.

Je souhaitais alerter sur le fait que pour les entreprises de l'artisanat, la problématique n'est pas de déterminer comment transmettre nos entreprises, mais de savoir qui va les reprendre.

Les études supérieures ont été fortement encouragées. Le corollaire est que les artisans ont énormément de mal à recruter des salariés et à trouver des personnes susceptibles de faire perdurer nos activités. Cela nous pousse à nous interroger sur le devenir des diplômés du tertiaire lorsqu'il n'y aura plus personne pour produire.

M. Jean-François DESBUQUOIS

Faire des études supérieures n'empêche pas d'envisager d'exercer des métiers manuels ou artisanaux. Certains jeunes retrouvent un attrait pour la gestion de toutes petites structures et souhaitent jouer un rôle social et avoir un ancrage local.

M. Guillaume MULLIEZ, président de l'association 60 000 Rebonds

Je préside l'association 60 000 Rebonds. Cette communauté de bénévoles accompagne les dirigeants qui déposent le bilan ou font faillite afin de les aider à rebondir.

Une des difficultés rencontrées dans le cadre d'un projet de reprise est le manque d'informations. Il n'existe pas de fichier regroupant les dirigeants souhaitant transmettre leurs entreprises.

En outre, il est à noter que les personnes souhaitant rebondir ont à coeur de recréer leurs structures et ne souhaitent pas immédiatement recruter des employés. Pourtant, environ 3 ans après la création, ils ont en moyenne 3,5 salariés.

Une autre problématique touche aux financements. Les entrepreneurs n'ont pas droit aux allocations chômage. Dès lors, il serait judicieux de prévoir une cagnotte afin de les aider à se remettre en selle.

M. André KERVEADOU

Je dirige une entreprise spécialisée dans l'ossature en bois implantée dans le Morbihan. Cette structure compte une trentaine de collaborateurs.

Je souhaitais apporter un témoignage concernant deux transmissions intervenues dans cette entreprise. La première a eu lieu il y a 10 ans. L'entreprise avait alors 60 ans. Aucun membre de la famille du dirigeant ne souhaitait reprendre la société. La réserve de participation a permis aux salariés de monter au capital. Les banques ont suivi, car le dirigeant s'était rapproché de l'Union des SCOP, laquelle propose un financement interne voué à appuyer le financement bancaire. Le vendeur a en outre mis en place un crédit vendeur. Le montage a été réalisé très simplement et la reprise s'est extrêmement bien passée.

Pour ma part, je prendrai potentiellement ma retraite dans un an. La transmission est d'ores et déjà organisée. La gouvernance et le conseil d'administration sont en place et mon successeur est déjà nommé.

Tout cela pour dire qu'il est possible de conserver un ancrage territorial et de transmettre les entreprises aux salariés dans de bonnes conditions. Des systèmes existent, mais ils sont sans doute trop confidentiels. Je vous encourage donc, si vous le souhaitez, à vous rapprocher de vos Unions régionales de SCOP.

M. Nicolas TOUCHARD, associé Eurallia Finance

Eurallia Finance est une banque d'affaires dédiée aux PME. Nos 15 bureaux en France oeuvrent dans le domaine de la transmission d'entreprises. Nous aidons des chefs d'entreprise à trouver des repreneurs. Inversement, nous accompagnons aussi la recherche d'entreprises lorsqu'une ETI ou une PME souhaite se lancer dans une démarche de croissance externe. L'année dernière, nous avons réalisé 56 opérations de ce type.

Je souhaitais revenir sur la difficulté à trouver un repreneur pour les entreprises de très petite taille. À partir d'une certaine taille, si l'entreprise ne présente pas de défaut majeur, il est toujours possible de trouver un acquéreur. En revanche, pour les très petites structures, les entreprises unipersonnelles ou encore les sociétés ayant un très petit nombre d'employés ou de clients, il est extrêmement compliqué de trouver un repreneur.

Mme Élodie GARCIA, membre élue de la CCI d'Aix-en-Provence

Nous disposons, au sein de la CCI d'Aix-en-Provence, d'une cellule dédiée aux personnes souhaitant vendre ou racheter une entreprise. En outre, des études sont menées pour estimer si l'entreprise proposée au rachat est saine. Les chambres de commerce sont donc des portes d'entrée à ne pas négliger.

Je suis également cheffe d'entreprise. Or, mes enfants ne souhaitent pas reprendre ma société. Il est en effet évident que les dirigeants d'entreprise ne sont pas aidés, sont confrontés à des crises, rentrent tard le soir, etc. Beaucoup de jeunes ne veulent pas forcément de cette vie-là. La situation est un peu différente pour ce qui concerne les ETI, mais les PME n'exercent pas un pouvoir d'attraction très fort sur la jeune génération.

M. Emmanuel CUGNY

Par ailleurs, l'image donnée de l'entreprise dans certaines prises de paroles politiques n'est pas toujours très favorable. Cela n'aide pas en termes de communication et de pédagogie.

Mme Élodie GARCIA

J'ajouterais que ce désintérêt des jeunes n'est pas entièrement le fait de l'éducation, car il existe des écoles alternatives qui intègrent les sujets liés à l'entreprenariat.

M. Thibaut MAXIME, dirigeant d'ACPM

Je suis dirigeant d'ACPM, entreprise de plasturgie implantée dans les Hauts-de-France. Dans le cadre d'une croissance externe, nous avons fait l'acquisition d'une société située à Brétigny et comptons désormais 30 collaborateurs. Je me suis également lancé dans la reprise d'une entreprise familiale.

Dans l'industrie, les actifs sont importants. Les entreprises valent donc cher. Dans mon cas, la problématique majeure est de contracter un crédit pour payer l'impôt de mon père. Il est possible d'échelonner les paiements, mais les choses deviennent rapidement lourdes à porter.

Je souhaite aujourd'hui tirer la sonnette d'alarme : mon père s'est acquitté d'impôts toute sa vie. Or, nous devons une nouvelle fois payer des sommes exorbitantes, cela malgré les dispositifs existants. Nous n'en pouvons plus. Car en outre, dans le secteur de l'industrie, les crises s'enchaînent sans discontinuer. Le mot « résilience » a été prononcé dans le cours des débats. Cette notion est, à mon sens, celle qui caractérise le mieux les chefs d'entreprise.

J'ai deux enfants. Je ne souhaiterais pas qu'ils vivent ce que je vis actuellement. En outre, en travaillant 35 heures, ils gagneront peut-être mieux leur vie.

Nous sommes épuisés. Il est crucial d'abaisser la fiscalité en France sans attendre et de façon drastique. Ces problématiques sont connues depuis longtemps. Il importe désormais de cesser de discuter et d'agir.

M. Sébastien Gindro, dirigeant de Gindro S.A.S.

Je dirige une entreprise familiale de 45 salariés en Haute-Saône.

Nous avons abordé la question des transmissions, il serait aussi utile d'évoquer les manières de pérenniser ces transmissions. De fait, pour que ces projets s'inscrivent sur la durée, il est nécessaire de former correctement les chefs d'entreprise. Dans le cadre d'une transmission familiale, les repreneurs connaissent généralement l'entreprise, mais pas forcément tous les métiers qui la composent.

Pour ma part, j'ai été formé à l'école des managers. À l'époque, cette formation n'était pas diplômante. Il est dorénavant possible d'obtenir une qualification, mais au prix de démarches très contraignantes.

Mme Nelly HEMMO-HALADJIAN

Ce point est fondamental, d'autant plus que les enjeux actuels sont extrêmement complexes. Il est donc impossible de tout savoir. En outre, le monde évoluant extrêmement vite, il est nécessaire de se former à des thématiques qui ne nous sont pas forcément familières.

De surcroît, nous sommes parfois enlisés dans nos problématiques opérationnelles liées à la gestion quotidienne et à la survie de l'entreprise. Dès lors, aider les chefs d'entreprise grâce à des dispositifs et à des accompagnements n'est pas dénué de bon sens.

M. Jean-Pierre RICHARD, président de la Chambre des métiers de l'Yonne et vice-président régional Bourgogne Franche-Comté

Pour les personnes recherchant une entreprise, la Chambre des métiers dispose de fichiers trans-artisanat et trans-commerce.

Par ailleurs, comme évoqué précédemment, la France va devoir faire face à un grave problème de gestionnaires. À force d'aller dans le sens d'une simplification du processus de création d'entreprise, nous allons perdre les capacités de gestion qui existaient auparavant.

M. Florent BONNIOU

Dans le cadre du cheminement qui m'a mené à la reprise de Sobrefer, j'ai effectué trois stages de trois semaines. J'ai contacté des entreprises spécialisées dans la fabrication d'armatures et suis parvenu à obtenir une convention. J'étais encore salarié et ai dû, pour ce faire, me rapprocher de Pôle Emploi après m'être mis en congé.

Ces stages m'ont été extrêmement bénéfiques, car j'ai pu découvrir la façon de travailler des entreprises qui m'accueillaient. J'ai également conservé des contacts qui m'ont été utiles par la suite, notamment en termes d'échanges de bonnes pratiques.

Par conséquent, il serait probablement profitable de mettre en place un système de stages dédiés aux futurs repreneurs d'entreprise.

M. Tony MIRANDE, président du Réseau Entreprendre Guyane

Je dirige le groupe Guy Hoquet en Guyane française et suis également président du Réseau Entreprendre et vice-président de l'association 60 000 Rebonds Antilles-Guyane.

À l'heure actuelle, il semble particulièrement important de prendre des mesures pour vaincre l'isolement des chefs d'entreprise. Il est en effet essentiel que les dirigeants de société puissent être entourés d'autres dirigeants. Des associations telles que Réseau Entreprendre ou 60 000 Rebonds jouent un rôle d'accompagnement crucial. Il serait donc pertinent de leur allouer plus de moyens.

M. Florent BONNIOU

Je fais moi-même partie de Réseau Entreprendre et ai pu bénéficier d'un prêt à taux zéro de 40 000 euros. En outre, cette association m'a assuré un suivi par un autre chef d'entreprise sous la forme de rendez-vous mensuels permettant de faire le point et de relater les difficultés rencontrées.

M. Christophe MAS, dirigeant du Cabinet 3LM

Je dirige un cabinet d'intermédiation et accompagne les cédants souhaitant trouver un repreneur ou les sociétés souhaitant entamer un processus de croissance externe.

Comme évoqué précédemment, le fait d'apprendre qu'une entreprise est en vente peut être facteur de stress. À ce titre, la loi Hamon apparaît comme un dispositif inadapté. De fait, lorsque les salariés sont avertis deux mois avant la cession, le processus est déjà achevé et le repreneur déjà trouvé. Par conséquent, cela ne fait que générer de l'inquiétude, voire des départs, ce qui peut remettre en cause l'acquisition.

M. Olivier RIETMANN, Sénateur de la Haute-Saône et co-rapporteur

L'une des 11 propositions formulées par notre rapport sur la transmission d'entreprises porte justement sur l'abrogation du dispositif d'information Hamon lequel génère effectivement de l'incertitude, voire parfois un effet de panique, et nuit gravement à la bonne transmission des entreprises.

M. Christian NIEL, ancien chef d'entreprise

Je suis stagiaire retraité. Mon associé et moi avons en effet vendu notre entreprise à deux jeunes repreneurs.

Nous nous sommes préparés à la transmission pendant près de 4 ans. L'un des repreneurs a été inscrit à l'école des jeunes dirigeants de la Fédération française du bâtiment pour une durée de 800 heures de formation. Le second repreneur avait un peu plus d'expérience. Nous l'avons donc inscrit au même module, mais sur un format beaucoup plus condensé correspondant à 200 heures de formation.

Bien que l'OPCO ait financé le coût pédagogique, l'entreprise a quand même dû assumer une charge d'environ 20 000 euros.

En outre, l'absence de deux éléments hyper-qualifiés de l'entreprise pendant 1 000 heures n'est pas sans impact. Les repreneurs ont donc accepté de travailler quelques heures supplémentaires afin de rattraper les chantiers. Or ces heures doivent être payées.

Tout cela génère un coût non négligeable. Un levier portant sur la formation des salariés à la reprise d'entreprises serait donc bienvenu.

M. Emmanuel CUGNY

Merci pour ces précieux témoignages.

Je vous rappelle que la version finalisée du rapport de la Délégation aux entreprises sera mise en ligne dans quelques jours.

Merci pour votre attention.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page