EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 21 juin 2023, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport d'information de M. Olivier Henno et Mme Annie Le Houerou, rapporteurs, sur la prestation partagée d'éducation de l'enfant (PreParE).

Mme Catherine Deroche, présidente. - Mes chers collègues, nous allons maintenant entendre la communication d'Olivier Henno et Annie Le Houerou faisant suite à la mission d'information qu'ils ont conduite au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) sur la prestation partagée d'éducation de l'enfant, la PreParE. Je vous rappelle que les travaux de nos collègues s'inscrivent dans le programme des contrôles de la Mecss pour la session 2022-2023, dont le bureau de la commission a pris acte à la fin de l'année dernière.

M. Olivier Henno, rapporteur. - Nous remercions tout d'abord le président René-Paul Savary de nous avoir confié la rédaction de ce rapport. Je remercie également Annie Le Houerou ; nous n'étions pas d'accord sur tout, mais nous avons su dépasser nos désaccords et même nous en enrichir.

La prestation partagée d'éducation de l'enfant, ou PreParE, indemnise les parents qui interrompent partiellement ou totalement leur emploi pour s'occuper de leur enfant de moins de 3 ans. Depuis sa naissance en 2014, à travers la transformation du complément de libre choix d'activité (CLCA), cette prestation a fait l'objet de nombreux rapports institutionnels : Conseil de la famille, inspection générale des affaires sociales, Commission des 1 000 premiers jours, Cour des comptes... Pourquoi dès lors se saisir une nouvelle fois du sujet dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) ? Tous ces rapports ont dressé un bilan peu élogieux de la prestation telle qu'elle fonctionne actuellement et, pourtant, jamais le législateur n'a été saisi d'un projet de réforme. Elle a visiblement été oubliée, jusqu'à présent, par le Gouvernement. Il fallait donc bien que notre commission se saisisse du sujet et dessine des perspectives pour les congés parentaux.

Permettez-moi de rappeler brièvement les paramètres de cette prestation, qui ne doit pas être confondue avec le congé parental d'éducation. Ce dernier permet au salarié ayant une année d'ancienneté dans l'entreprise de suspendre son contrat de travail pendant une durée maximale d'un an, renouvelable trois fois, pour élever un enfant de moins de 3 ans.

La branche famille de la sécurité sociale accorde par ailleurs une prestation aux parents d'enfants de moins de 3 ans à temps partiel ou cessant totalement leur activité. Ni les durées de versement ni les conditions d'octroi, plus restrictives, de la PreParE ne sont alignées sur celles du congé parental. De 8 % à 17 % des bénéficiaires d'un congé parental d'éducation ne perçoivent donc pas la PreParE.

Le montant de la prestation dépend de la quotité d'activité professionnelle : 430 euros pour une interruption totale de travail, 278 euros pour un temps de travail inférieur ou égal à un mi-temps et 160 euros pour un temps de travail entre 50 % et 80 %.

Les durées de versement ont évolué avec la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes, l'ambition étant de réduire l'éloignement des femmes de l'emploi et d'inciter au partage du congé parental au sein du couple. En instaurant la PreParE en lieu et place du complément de libre choix d'activité (CLCA), la réforme de 2014 a ainsi pénalisé les familles dont le second parent ne recourait pas à la PreParE. Pour les familles ayant un seul enfant, la durée du congé indemnisé a été étendue de six mois à un an, sous réserve que six mois soient pris par le second parent. Pour les familles de deux enfants ou plus, la durée maximale de versement de la prestation au même parent est limitée à deux années contre trois ans sous le régime du CLCA. Les trois années ne peuvent être atteintes que si chaque parent recourt à la prestation.

La PreParE a perdu 54 % de ses bénéficiaires entre 2014 et 2021. Cette tendance à la baisse préexistait certes à l'instauration de la PreParE mais la réforme de 2014 a amplifié le désintérêt des familles pour la prestation. La réforme a, au contraire, provoqué un report vers les autres modes de garde formels - crèches, assistantes maternelles, garde à domicile - mais aussi vers de modes de garde informels - famille, voisins.

Plusieurs raisons peuvent être avancées pour expliquer cette chute de bénéficiaires. Premièrement, le partage - pourtant espéré - entre parents de la prestation ne s'est pas produit, comme vous le verrez. Dès lors, 88 % des bénéficiaires de la PreParE sortent du dispositif après les 2 ans de l'enfant.

Deuxièmement, certaines mères attachées à la continuité du mode de garde ont préféré renoncer complètement à la prestation.

Troisièmement, d'autres mères se sont détournées d'un dispositif qui ne permettait pas une indemnisation suffisante de leur interruption d'activité : en 2023, cette prestation ne représente qu'un tiers du Smic.

En conséquence, en 2022, les dépenses annuelles liées à la PreParE pour la branche famille étaient inférieures de 1,2 milliard d'euros par rapport à 2014, soit une chute de 61 %. Un report sur les dépenses liées aux autres modes de garde a certainement été induit en partie.

Le premier objectif de la réforme de 2014, consistant à mieux répartir les responsabilités parentales au sein du couple, n'a donc pas été une grande réussite. Le nombre de pères bénéficiaires a décru, passant de 19 000 en 2014 à 15 000 en 2020. Seules 2,5 % des familles bénéficiaires partagent la prestation. L'absence d'engagement des pères tient en grande partie au faible montant de la prestation, qui ne parvient pas à déjouer les arbitrages économiques défavorables aux femmes au sein des ménages : dans 67 % des cas, le bénéficiaire de la PreParE percevait un revenu d'activité inférieur à celui de son conjoint ou de sa conjointe. En outre, des stéréotypes de genre peuvent encore expliquer le renoncement des hommes au bénéfice de la prestation.

Mme Annie Le Houerou, rapporteure. - En revanche, le second objectif, consistant à inciter les mères à garder un lien avec l'emploi, est plus satisfait. Une étude récente publiée par France Stratégie et le Conseil de la famille montre que la réduction de la durée d'indemnisation du congé parental a augmenté la probabilité pour les mères non seulement de reprendre une activité professionnelle lors de la troisième année mais encore d'être en emploi trois ans après la sortie de la prestation. Autrement dit, la réforme de 2014 a agi positivement sur l'emploi des femmes à moyen terme. Les chiffres de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) étayent ce résultat : la proportion de mères de jeunes enfants ayant déjà travaillé occupant un emploi à temps complet est plus élevée de neuf points de pourcentage en 2018 qu'en 2014.

De même, le revenu des mères a globalement augmenté grâce à la reprise précoce d'un emploi mais aussi, il faut le dire, à un glissement de certaines d'entre elles vers le chômage. La réforme a en effet eu des effets disparates selon les profils socio-économiques des bénéficiaires et la Drees signale ainsi que « les mères les plus exposées à la pauvreté ne travaillent pas plus souvent à temps complet en 2018 qu'en 2014 ».

Sans atteindre les objectifs qu'elle s'était fixés, la réforme de 2014 a tout de même eu des effets plus nuancés que ce que les tout premiers rapports d'évaluation ont pu laisser entendre. Il n'en demeure pas moins que les voies d'amélioration de la PreParE sont nombreuses. En nous appuyant sur les propositions qui ont été versées au débat depuis quelques années, nous recommandons de réformer la prestation en deux temps. La première réforme est paramétrique et devrait être engagée sans plus attendre. La seconde, plus structurelle, devra nécessairement être entreprise lors d'une réflexion globale sur les modes d'accueil de la petite enfance.

La PreParE est une prestation complexe, peu lisible pour les familles et verrouillée à de nombreux égards. Nombre de ses règles ne nous semblent plus aller de soi et nécessiteraient d'être assouplies, voire, pour certaines, supprimées.

Seuls les parents ayant cotisé huit trimestres au cours d'une période de référence variant selon le nombre d'enfants sont éligibles à l'allocation. Or les périodes de formation professionnelle rémunérée et les périodes de chômage ne sont présumées satisfaire cette condition d'activité antérieure que pour les parents de plus de deux enfants. Nous proposons d'étendre cette reconnaissance aux parents d'un seul enfant.

En outre, ces conditions d'activité antérieure pour l'octroi de la prestation sont exigées y compris lorsque la prestation est accordée à taux partiel et que les parents maintiennent, par définition, une activité professionnelle. Nous estimons que cette situation ne se justifie pas et qu'il convient de supprimer toute condition d'éligibilité pour la prestation à taux réduit. Cet assouplissement est d'autant plus cohérent que le temps partiel est bien moins pénalisant pour l'emploi des parents. À la sortie d'une PreParE à taux partiel, 90 % des parents exercent une activité professionnelle contre seulement 57 % des parents ayant opté pour une PreParE à temps plein.

À cette même fin - ne pas décourager l'activité partielle -, nous souhaitons déplafonner le montant reçu de PreParE lorsque les deux parents travaillent à temps partiel. Aujourd'hui, la somme perçue par le couple ne peut être supérieure au montant à taux plein de la PreParE, soit 430 euros, ce qui représente une perte de 126 euros pour deux parents à mi-temps. Nous proposons également de revoir les quotités maximales d'activité professionnelle pour être éligible à la prestation. En l'état, deux parents réduisant chacun de 10 % leur activité ne peuvent recevoir une prestation à taux réduit.

J'en viens maintenant au défaut principal de la prestation sous sa forme actuelle : le trop faible niveau de son montant assure un remplacement insuffisant des revenus d'activité des parents. L'indemnisation, aujourd'hui fixée à 430 euros, a diminué de 38 % depuis 1994 par rapport aux salaires... Afin de redonner aux familles une réelle liberté de choix du mode de garde, d'inciter les pères à recourir à la prestation et d'éviter la paupérisation des bénéficiaires, nous proposons de revaloriser le montant de la PreParE de 41 % pour le porter à 607 euros, soit le montant du revenu de solidarité active (RSA). À comportement constant des familles, les dépenses de PreParE majorées de 41 % représenteraient un coût annuel de 300 millions d'euros pour la branche famille.

À terme, nous jugeons nécessaire de remplacer le principe d'une indemnisation forfaitaire par une logique de prestation proportionnelle au revenu, mais cette réforme, complexe à mener pour les caisses d'allocations familiales, ne peut se faire dans l'immédiat.

Enfin, nous pensons que les efforts sur la formation professionnelle des bénéficiaires de la prestation doivent être accentués. Pour cela, il convient de rendre effectives les dispositions de la loi du 24 décembre 2021 permettant aux allocataires sans emploi de bénéficier d'une formation débutant un an avant l'extinction de leur droit à la PreParE. De même, il convient de lever l'obstacle juridique qui interdit aux bénéficiaires de la PreParE qui souhaiteraient préparer leur reprise d'emploi de cumuler une formation professionnelle rémunérée avec une PreParE à taux plein.

Voilà, mes chers collègues, les quelques axes d'amélioration qui, pour celles qui relèvent du domaine de la loi, pourraient nous être soumis dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale.

À plus long terme, nous pensons qu'une réforme d'ampleur est indispensable. Celle-ci pourrait suivre le modèle qui semble aujourd'hui faire consensus. Il ressort des nombreux rapports institutionnels qui nous ont précédés, mais aussi de nos auditions, que la formule d'un congé plus court mais mieux rémunéré présente de nombreux avantages.

M. Olivier Henno, rapporteur. - Dans le scénario de réforme que nous proposons, l'indemnisation des congés parentaux aurait une durée d'une année, quel que soit le nombre d'enfants à charge. Cette durée se composerait de quatre mois non transférables, attribués à chaque parent, et de quatre mois à répartir librement au sein du couple. Cette solution maintiendrait une incitation à partager la prestation entre les deux parents sans restreindre excessivement la durée de versement si un seul parent en bénéficie.

En effet, cumulé aux congés maternité et paternité, le congé parental indemnisé permettrait, dans tous les cas, d'atteindre le premier anniversaire de l'enfant. Or favoriser la garde parentale la première année est conforme tant aux préconisations scientifiques, qui insistent sur l'intérêt de la présence des parents dans les tout premiers mois de l'enfant, qu'aux aspirations des familles. Au moins 45 % d'entre elles trouvent préférable qu'un parent garde l'enfant jusqu'à ses 12 mois.

Notre scénario de réforme aurait pour objectif de redonner aux familles une réelle liberté de choix du mode de garde. Pour ce faire, il convient d'améliorer l'indemnisation du congé pour que les parents n'y renoncent pas en raison d'arbitrages économiques. La prestation serait ainsi rémunérée par des indemnités journalières permettant d'assurer un taux de remplacement équivalent à 60 % du salaire antérieur net, dans la limite du plafond de la sécurité sociale.

Enfin, la réduction de deux ans à huit mois de la durée de prestation au titre d'un seul parent permettrait de réduire l'éloignement à l'emploi et l'effet de la parentalité sur les carrières.

Le coût de cette réforme dépend du comportement des familles mais il serait, de toute évidence, assez important. Comme la prestation regagnerait en attractivité, il est tout à fait possible que les dépenses liées à la PreParE retrouvent un niveau équivalent aux années antérieures à 2014 et se traduisent par une hausse de plus de 1 milliard d'euros par rapport aux dépenses de 2022.

Toutefois, cette réforme ne serait pas sans incidence sur les autres modes de garde : elle réduirait la demande pour les accueils d'enfants de moins de 1 an mais s'accompagnerait d'un besoin supplémentaire pour l'accueil des enfants, de leur premier anniversaire jusqu'à leur scolarisation. Il convient donc qu'une offre fournie en modes de garde formels soit accessible aux parents : cette condition préalable n'est pas aujourd'hui satisfaite par le secteur de la petite enfance. L'objectif de création de 30 000 places en établissement d'accueil du jeune enfant (EAJE) n'a pas été atteint sous la précédente législature. La capacité théorique dans les modes d'accueil formels a même décru de 2014 à 2020 et la pénurie de professionnels vient réduire encore davantage l'offre disponible.

Mme Annie Le Houerou, rapporteure. - Mes chers collègues, notre rapport propose donc des pistes concrètes d'amélioration d'une prestation laissée en pilotage automatique depuis neuf ans. En identifiant les défaillances du dispositif actuel, à commencer par un montant dérisoire, nous pouvons réformer une allocation pour réellement répondre aux besoins des familles. Nous verrons si le Gouvernement, dans le cadre du service public de la petite enfance, saura entendre nos recommandations.

Nous vous remercions pour votre attention.

Mme Catherine Procaccia. - Je vous remercie de votre travail. J'ai participé à ces débats en 2014 ; les intentions étaient positives mais je n'y croyais pas. J'avais l'impression très nette qu'il s'agissait, en premier lieu, de faire des économies. Aussi, quand vous évoquez les montants qui ne sont plus alloués, je comprends que c'était bien la politique familiale qui était en cause.

Votre proposition de réduire à un an la durée du congé tout en proposant une meilleure indemnisation est difficile à appliquer, surtout en milieu urbain dense où, pour l'enfant âgé de 1 an, il n'y a plus de mode de garde disponible, que ce soit en crèche ou chez une assistante maternelle.

Le Val-de-Marne est l'un des rares départements à avoir ses propres crèches ; il en compte 80 mais il ne parvient pas à les remplir faute de personnel. La loi ne résoudra pas ce problème. Il s'agit surtout de rendre les métiers de la petite enfance plus attractifs. Merci donc pour ce travail : il est très bon sur le fond, mais il conforte mes inquiétudes sur ce sujet.

Mme Michelle Meunier. - Ce travail permettra de compléter utilement ce qui est en préparation pour le service public de la petite enfance. En 2014, j'étais la rapporteure de ce projet et j'entendais déjà les réticences concernant les faibles taux d'indemnisation par rapport aux salaires.

Réduire le congé à un an ne me paraît pas judicieux du point de vue du bien-être de l'enfant, parce que c'est l'âge auquel il a développé un attachement très fort à sa mère, à son père, au parent qui lui donne du soin.

Je pense qu'il faut reprendre ce travail de conciliation entre la vie personnelle et la vie familiale ; il faut redonner de l'espérance aux couples qui souhaitent avoir des enfants : cela passe par une revalorisation des aides accordées et par l'accompagnement.

Mme Pascale Gruny. - Votre travail est important, notamment parce que vous avez pensé, d'une part, aux femmes et à la manière de préserver l'emploi, via la formation, et, d'autre part, à l'indemnisation, qui est ridicule et n'offre pas de réel choix dans la mesure où ce sont les femmes qui s'arrêtent le plus souvent puisque leur rémunération est inférieure à celle de leur conjoint. Je souligne également que l'article 10 du projet de loi pour le plein emploi ne révolutionne pas les choses. Les plans Crèches qui se succèdent sont toujours aussi peu efficaces et les assistantes maternelles, indispensables dans les communes rurales, perçoivent des rémunérations trop faibles...

Mme Colette Mélot. - En effet, les crèches peinent à recruter : 49 % des structures manquent de bras, il manque 10 000 agents et l'on estime que 120 000 assistantes maternelles partiront à la retraite en 2030. Si rien n'est fait, nous serons dans une situation compliquée. Les conditions de travail sont dures et les jeunes ne sont plus intéressés par les métiers de la petite enfance : espérons que le nouveau service public de la petite enfance prendra ce problème à bras-le-corps, parce que les parents ont besoin de crèche, notamment dans les villes.

M. René-Paul Savary. - Quand vous parlez d'un congé d'un an, voulez-vous dire un an par enfant ? En effet, cela favorise l'allaitement qui, s'il a lieu sur le temps long, est bénéfique au développement de l'enfant. À cet égard, cette prestation est vraiment importante.

Mme Catherine Deroche, présidente. - Il faudrait que les entreprises se montrent plus tolérantes pour que les femmes souhaitant allaiter après la reprise du travail puissent le faire.

M. Olivier Henno, rapporteur. - Monsieur Savary, à chaque naissance, il y a effectivement une recharge des droits.

Les auditions que nous avons menées nous ont permis d'identifier un besoin de souplesse et nous avons cherché à y répondre, d'où cette proposition d'un congé mieux rémunéré, même plus court. Dans l'idéal, il faudrait donc réfléchir à la proportionnalité de l'indemnisation au regard du salaire si l'on voulait vraiment résoudre la question des inégalités de traitement entre les hommes et les femmes ; cela nous emmènerait vers des questions budgétaires plus lourdes et donc une réforme plus globale.

C'est vrai, la question du mode de garde d'un enfant se pose pendant trois ans ; c'est donc une source de stress pour les couples qui envisagent de fonder une famille. C'est d'autant plus stressant que s'arrêter pour s'occuper d'un enfant représente un sacrifice pour sa carrière. Sur ce point, notre pays présente un retard par rapport aux pays scandinaves et le monde professionnel doit encore évoluer.

Il est vrai aussi que les métiers de la petite enfance attirent moins. À cela s'ajoute la difficulté pour les communes et leurs élus de mener des projets d'ouvertures de crèches publiques, en raison des coûts d'investissement et de fonctionnement.

Mme Jocelyne Guidez. - Pour moi, ce n'est pas l'investissement qui pose le plus problème mais les charges de fonctionnement qui pèsent lourdement dans les budgets des communes dans un contexte financier difficile pour elles.

Mme Annie Le Houerou, rapporteure. - Le premier objectif de la PreParE et de sa réforme était un meilleur partage de la responsabilité parentale entre les pères et les mères. On constatait, par ailleurs, que les mères enchaînaient plusieurs congés parentaux indemnisés et se retrouvaient très éloignées de l'emploi dix ans après la naissance de leur premier enfant. Le deuxième objectif était donc de faciliter leur retour vers l'emploi. Un troisième objectif était la maîtrise des dépenses publiques dans le contexte des finances publiques dont nous nous souvenons tous. L'absence de partage de la PreparE au sein des ménages et d'engagement des pères
- du fait de plusieurs facteurs dont le faible montant de la prestation - a conduit la branche famille à réaliser des économies plus élevées qu'attendues.

Les prestations familiales doivent pouvoir inciter à ce meilleur partage de la parentalité, de la même manière que la loi a permis d'instaurer la parité parmi les élus. Je trouve la comparaison intéressante : sans intervention législative, nous n'aurions pas amélioré la parité en politique. Par ailleurs, pour faire bouger la société, il faut mieux communiquer auprès des pères. L'objectif non tenu de partage des responsabilités au sein des familles est en effet le premier échec de la PreParE.

Les mesures concernant la PreParE ne doivent pas faire oublier les enjeux d'une vraie politique d'accueil du petit enfant, en matière d'investissement, de fonctionnement et d'attractivité des métiers. Rappelons qu'aujourd'hui des crèches ferment, faute de personnel ; l'enjeu est donc moins de créer des places pour les enfants que de recruter des personnes pour s'en occuper.

Enfin, la clé reste l'égalité femme-homme : le couple fait son calcul, et tant que l'égalité salariale n'aura pas été atteinte, le partage de la parentalité telle que nous la souhaitons n'aura pas lieu.

Les recommandations sont adoptées.

La commission adopte le rapport d'information et en autorise la publication.