III. LE CHOIX DÉTERMINÉ DU SOIN ET DE L'ACCOMPAGNEMENT

A. UN DÉBAT PARTICULIÈREMENT INTEMPESTIF

En période de crise écologique, géopolitique et sociale, il semble particulièrement maladroit de poursuivre de tels projets. Les effets collatéraux raisonnablement prévisibles de l'aide active à mourir pour la société tout entière éclipseraient les gains de liberté et d'apaisement apportés au petit nombre qui aspire réellement à pouvoir en disposer : rationalisation des ressources de l'offre de soins, pression exercée sur les plus fragiles, renforcement des inégalités.

Il faut en particulier s'interroger sur le signal que le législateur enverrait a priori aux personnes qui remplissent les critères, surtout si certains patients sont explicitement visés à longueur de discours : de la compassion pour l'expression subjective d'une souffrance, ne risque-t-on pas de glisser vers l'expression d'un jugement de valeur sur certaines conditions de vie ?

Comment faut-il comprendre l'empressement du chef de l'État à introduire l'aide active à mourir, plutôt qu'à présenter la loi grand âge et autonomie promise depuis cinq ans ?

B. PRIVILÉGIER UNE SOCIÉTÉ DE LA SOLLICITUDE

La médecine palliative a connu des avancées majeures depuis les années 1990-2000, de sorte que c'est essentiellement par défaut d'une bonne couverture sur le territoire que l'on meurt encore trop mal dans notre pays. C'est là que les efforts doivent être portés, non sur un dispositif d'aide active à mourir qui risquerait dangereusement d'être une option de repli faute d'offre de soins satisfaisante.

· Le « modèle français de fin de vie » que la commission appelle de ses voeux ne peut ainsi être que celui de l'accompagnement solidaire, fondé sur une éthique du soin.

Un tel modèle doit être facteur de solidarité à l'égard des plus vulnérables, accompagnés jusqu'au bout selon leurs choix, partout sur le territoire ; facteur de revalorisation du rôle des soignants, majoritairement hostiles à la réalisation d'un acte d'aide à mourir, et en quête de sens dans leur métier ; et facteur d'espoir pour chacun dans la vie collective, porteuse de sollicitude.

Il repose essentiellement sur deux piliers : la préservation du « trésor national » que constitue la loi Claeys-Leonetti, et l'application des recommandations du précédent rapport de la commission sur les soins palliatifs1(*).


* 1 Rapport d'information n° 866 (2020-2021) de Mmes Christine Bonfanti-Dossat, Corinne Imbert et Michelle Meunier, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 29 septembre 2021.

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