C.  MIEUX VALORISER LES CARRIÈRES ET FLUIDIFIER LES PARCOURS

1. Des mesures ont récemment été prises pour revaloriser la rémunération des policiers municipaux et des gardes champêtres, ce qui plaide pour la réalisation d'un bilan avant toute nouvelle évolution
a) Les cadres d'emplois des policiers municipaux et des gardes champêtres
(1) Les cadres d'emplois de la police municipale

Concernant la police municipale, il existe trois cadres d'emplois, dont les statuts sont fixés par voie réglementaire.

Le premier cadre d'emplois est celui des directeurs de police municipale156(*), appartenant à la catégorie A de la fonction publique et qui dispose de deux grades (directeur et directeur principal). Un poste de directeur de police municipale peut être créé dans les services de police municipale comptant plus de 20 agents à encadrer. À ce jour, selon la DGAFP, 152 directeurs de police municipale sont recensés, dont 24 au second grade.

Le deuxième cadre d'emplois correspond à celui des chefs de service de police municipale157(*) et appartient à la catégorie B de la fonction publique. Il est divisé en trois grades (chef de service, chef de service principal de deuxième classe et chef de service principal de troisième classe). On compte aujourd'hui plus de 1 000 chefs de service de police municipale.

Le troisième cadre d'emplois est celui des agents de police municipale158(*), appartenant à la catégorie C de la fonction publique et divisé en deux grades (gardien-brigadier et brigadier-chef). Plus de 25 000 fonctionnaires appartiennent à ce cadre d'emplois.

(2) Le cadre d'emplois des gardes champêtres

Il n'existe qu'un unique cadre d'emplois de gardes champêtres159(*), comportant deux grades (garde champêtre chef et garde champêtre chef principal), appartenant à la catégorie C de la fonction publique.

(3) Les règles d'avancement
(a) L'avancement d'échelon

L'avancement d'échelon se fait, pour les policiers municipaux comme pour les gardes champêtres, uniquement à l'ancienneté.

(b) L'avancement de grade

Concernant l'avancement de grade, celui-ci se fait par inscription à un tableau annuel d'avancement. Cette inscription peut se faire :

« au choix », pour l'ensemble des cadres d'emplois de la police municipale et des gardes champêtres ;

- ou par examen professionnel pour les policiers municipaux de catégorie B.

L'avancement de grade est dans les deux cas, subordonné au suivi de la formation continue obligatoire et nécessite également une certaine ancienneté dans le grade et la catégorie hiérarchique du cadre d'emplois concerné.

Ainsi, à titre d'exemple, pour l'avancement au grade de chef de service de police municipale principal de deuxième classe, il faut :

- concernant l'avancement « au choix », au moins un an dans le 8è échelon du grade de chef de service de police municipale et au moins cinq ans de services effectifs en catégorie B ;

- concernant l'avancement après examen professionnel, il faut avoir au moins un an dans le 6e échelon du grade de chef de service de police municipale et au moins trois ans de services effectifs en catégorie B.

(c) La promotion interne d'un cadre d'emplois vers un cadre d'emplois supérieur

Outre le concours interne, voie de promotion « classique » de la fonction publique, il existe des possibilités de promotion interne par inscription sur une liste d'aptitude. Le nombre de postes ouverts à la promotion interne est cependant contingenté.

L'inscription sur la liste d'aptitude peut se faire :

- soit après un examen professionnel pour les deux cadres d'emplois de la filière « police municipale », ouvert aux agents de police municipale et aux gardes champêtres justifiant d'au moins huit ans de services effectifs dans leur cadre d'emplois pour l'accès à la catégorie B, et aux agents justifiant de dix ans de services effectifs dans un cadre d'emplois de la filière dont cinq ans dans celui de chef de service de police municipale pour l'accès à la catégorie A ;

- soit « au choix » et uniquement pour la promotion de la catégorie C à la catégorie B. Cette possibilité est ouverte aux agents de police municipale du second grade justifiant d'au moins dix ans de services effectifs dans leur cadre d'emplois.

b) La rémunération des policiers municipaux et des gardes champêtres
(1) La rémunération de base des policiers municipaux et des gardes champêtres

La rémunération de base des policiers municipaux et des gardes champêtres est composée :

- du traitement indiciaire calculé en fonction d'un indice majoré correspondant à l'échelon occupé dans leur grade et augmentant à l'ancienneté ;

- d'une indemnité de résidence pour tenir compte des variations du coût de la vie selon les zones géographiques et calculée par un pourcentage du traitement indiciaire brut, en fonction de la zone ;

- du supplément familial de traitement (SFT) en fonction du nombre d'enfants à charge avec un montant fixe et un montant proportionnel au traitement ;

- d'une nouvelle bonification indiciaire (NBI) pour les agents exerçant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (+ 15 points d'indice majoré) ou pour les responsables de service (+ 10 à + 18 points d'indice majoré) ;

- et le cas échéant, d'indemnités horaires pour travaux supplémentaires (IHTS)160(*) et de primes et indemnités compensant le travail de nuit, le dimanche ou les jours fériés ainsi que les astreintes et le dépassement régulier du cycle de travail161(*).

(2) Le régime indemnitaire propre aux policiers municipaux et gardes champêtres

Les policiers municipaux bénéficient, aux termes de l'article L. 714-13 du code général de la fonction publique, d'un régime indemnitaire propre, dont les modalités et les taux sont fixés par décret.

(a) Le régime indemnitaire des policiers municipaux et des gardes champêtres applicable jusqu'au 31 décembre 2024

Jusqu'à la fin de l'année 2024, le régime indemnitaire des fonctionnaires de la police municipale et des gardes champêtres162(*) était composé de :

l'indemnité spéciale mensuelle de fonctions (ISFM), qui pouvait être versée aux quatre cadres d'emplois et qui correspondait à un pourcentage du traitement brut ;

l'indemnité d'administration et de technicité (IAT), facultative et tenant compte de la manière de servir de l'agent dans l'exercice de ses fonctions.

Ce régime se caractérisait par une structure complexe et rigide, ne favorisant pas les parcours de carrière. Par ailleurs, il comportait des plafonds indemnitaires sensiblement inférieurs à ceux dont bénéficiaient la quasi-totalité des autres cadres d'emplois de la fonction publique territoriale éligibles au régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP), et disposant de grilles indiciaires équivalentes.

Pour toutes ces raisons, le régime indemnitaire des policiers municipaux et des gardes champêtres a donc été modifié récemment, afin de simplifier la structure du régime indemnitaire des fonctionnaires de la police municipale et des gardes champêtres et d'offrir la possibilité aux collectivités territoriales de procéder à des revalorisations salariales.

(b) Le régime indemnitaire des policiers municipaux et des gardes champêtres en vigueur depuis le 1er janvier 2025

Le décret n° 2024-614 du 26 juin 2024 relatif au régime indemnitaire des fonctionnaires relevant des cadres d'emplois de la police municipale et des fonctionnaires relevant du cadre d'emplois des gardes champêtres est venu instituer le nouveau régime indemnitaire dont peuvent bénéficier les fonctionnaires de la police municipale et les gardes champêtres, sur délibération des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.

Les policiers municipaux et gardes champêtres bénéficient désormais, en plus des éléments de la rémunération de base évoqués précédemment, d'une indemnité spéciale de fonction et d'engagement (ISFE), composée de deux parts :

une part fixe, liée aux fonctions et responsabilités exercées, calculée en appliquant au montant du traitement soumis à retenue pour pension un pourcentage fixé par l'organe délibérant, dans la limite de taux maximums prévus par le décret ;

une part variable tenant compte de l'engagement professionnel et à la manière de servir, dont le plafond est déterminé par l'organe délibérant dans la limite de montants maximums également fixés par le décret.

Le calcul de l'IFSE

La part fixe de l'ISFE, versée mensuellement, est déterminée en appliquant au montant du traitement soumis à retenue pour pension un taux individuel fixé par l'organe délibérant dans la limite des taux suivants :

- 33 % pour le cadre d'emplois des directeurs de police municipale ;

- 32 % pour le cadre d'emplois des chefs de service de police municipale ;

- 30 % pour le cadre d'emplois des agents de police municipale ;

- 30 % pour le cadre d'emplois des gardes champêtres.

La part variable de l'ISFE tient compte de l'engagement professionnel et de la manière de servir appréciés selon des critères définis par l'organe délibérant. L'organe délibérant détermine le plafond de la part variable dans la limite des montants suivants :

- 9 500 euros pour le cadre d'emplois des directeurs de police municipale ;

- 7 000 euros pour le cadre d'emplois des chefs de service de police municipale ;

- 5 000 euros pour le cadre d'emplois des agents de police municipale ;

- 5 000 euros pour le cadre d'emplois des gardes champêtres.

Cette part variable peut être versée mensuellement dans la limite de 50 % du plafond défini par l'organe délibérant.

(3) Une rémunération moyenne supérieure au reste de la fonction publique territoriale et des mesures récentes de revalorisation des rémunérations
(a) Une rémunération sensiblement plus élevée que les autres agents de la fonction publique territoriale

Les policiers municipaux perçoivent, en moyenne, une rémunération sensiblement plus élevée que les autres agents de la fonction publique territoriale. Ce constat est partagé par la DGCL, pour qui « l'ensemble de la filière police municipale se caractérise par un niveau de rémunération élevé ».

Ainsi, en neutralisant l'impact de certains facteurs (grade, ancienneté, sexe), la mission d'information estime qu'en moyenne, toutes choses égales par ailleurs, un policier municipal perçoit environ 500 euros de plus par mois qu'un autre agent de la fonction publique territoriale163(*).

Rémunération nette médiane par ETP au sein de la police municipale
et de la fonction publique territoriale par catégorie en 2021

(en euros)

Source : commission des lois du Sénat, à partir du SIASP.

La rémunération des policiers municipaux et des gardes champêtres a de plus sensiblement augmenté au cours du temps, bénéficiant d'une plus forte dynamique que le reste des agents de la fonction publique territoriale.

Rémunération nette mensuelle médiane par équivalent temps plein au sein de la police municipale et de la fonction publique territoriale entre 2015 et 2021

(en euros)

Source : commission des lois du Sénat, à partir du SIASP.

(b) Des mesures de revalorisation indiciaires et indemnitaires récentes

Les policiers municipaux et les gardes champêtres ont bénéficié de plusieurs mesures récentes de revalorisation indemnitaires et statutaires.

Concernant les mesures statutaires, la carrière des directeurs de police municipale a par exemple été alignée en 2023 sur celle des deux premiers grades du cadre d'emplois des attachés territoriaux (attaché et attaché principal) en lui adossant les échelles indiciaires correspondantes. Grâce à ces évolutions, lors de leur reclassement, les agents concernés ont bénéficié en moyenne de 26 points d'indice majoré pour le premier grade et 17 points d'indice majoré pour le second grade.

Par ailleurs, en 2023, afin de faciliter les avancements, la condition imposant de disposer d'au moins deux directeurs de police municipale pour permettre une nomination de directeur principal a été supprimée, ce qui devrait faciliter les avancements et donc, la hausse des rémunérations.

S'agissant des gardes champêtres, ceux-ci ont bénéficié d'un alignement sur les agents de police municipale, ce qui a représenté, en moyenne, 9 points d'indices majorés supplémentaires.

Les policiers municipaux et gardes champêtres ont en outre bénéficié des mesures liées à l'augmentation du point d'indice intervenues au cours des dernières années.

Concernant les mesures indemnitaires, le nouveau régime indemnitaire spécifique des policiers municipaux mis en place au 1er janvier 2025 et décrit dans les développements précédents, plus souple que le régime précédent, devrait simplifier le versement des indemnités. Les plafonds applicables à chaque cadre d'emplois ont, par ailleurs, bénéficié d'une revalorisation globale de leur montant.

Compte tenu de ces récentes évolutions, du niveau de rémunération déjà élevé des policiers municipaux par rapport au reste de la fonction publique territoriale et de la situation actuelle des finances publiques, il paraît par conséquent légitime d'attendre de pouvoir évaluer l'impact de ces mesures avant d'en envisager de nouvelles, notamment pour améliorer la progressivité des carrières.

Proposition n° 23 - Lorsque le recul sera suffisant, évaluer l'impact des récentes réformes indemnitaires et indiciaires de la police municipale.

2. Mieux valoriser les carrières sur le plan symbolique

La valorisation des carrières des policiers municipaux et des gardes champêtres passe également par la mise en place de mesures symboliques visant à reconnaître l'engagement des policiers municipaux.

Lors d'un déplacement de la mission d'information à Franconville, Hervé Lefez, directeur de la police municipale de Franconville, a ainsi appelé l'attention de la rapporteure sur la nécessité de :

- moderniser les appellations des grades, en s'inspirant de ceux existant pour les policiers nationaux ou pour les militaires ;

- moderniser la sérigraphie des uniformes des policiers municipaux ainsi que le flocage des véhicules, ceux-ci étant en effet très rarement modifiés.

Par ailleurs, lors de son audition par la commission des lois, le ministre auprès du ministre de l'intérieur, François-Noël Buffet, a annoncé la création d'une médaille afin d'assurer « une meilleure reconnaissance de la montée en compétences et une plus grande valorisation des forces de police municipale ».

La médaille d'honneur de la police municipale et rurale

Une médaille d'honneur de la police municipale et rurale a été créée par un décret du 3 avril 1903, à l'initiative d'Émile Combe, alors ministre de l'intérieur. Elle était destinée à récompenser les policiers ayant eu un comportement exemplaire tout au long de leur carrière.

Par décret en date du 17 novembre 1936, le nom de cette médaille a été modifié, au profit de l'appellation « médaille d'honneur de la police française », avant de devenir, en 1996, la « médaille d'honneur de la police nationale », désormais exclusivement réservée aux policiers nationaux164(*).

Lors de cette audition, François-Noël Buffet a également annoncé l'association des polices municipales à différentes cérémonies républicaines, pour mettre en avant leur travail.

Proposition n° 24 - Moderniser les appellations des grades.

3. Fluidifier les carrières à travers la création d'un permis de port d'arme national

Enfin, les carrières des policiers municipaux pourraient être fluidifiées par la mise en place d'une autorisation de port d'arme nationale.

À l'heure actuelle, les autorisations individuelles de port d'arme délivrées par le représentant de l'État dans le département, sur demande motivée du maire et après accomplissement d'une formation préalable à l'armement et réalisation d'une enquête administrative de sécurité, cessent d'être valables en cas de mutation.

Lorsqu'un policier municipal change de commune employeuse, une nouvelle demande d'autorisation doit par conséquent être formulée par le maire de cette commune et une nouvelle enquête administrative de sécurité doit également être conduite.

Or, comme indiqué à la mission d'information par Hervé Lefez, directeur de la police municipale de Franconville et par Karim Bouamrane, maire de Saint-Ouen-sur-Seine, cette procédure est particulièrement longue à mettre en oeuvre, notamment en raison de la réalisation d'une enquête administrative de sécurité.

Cette obligation de demander une nouvelle autorisation de port d'arme à chaque mutation empêche par conséquent les policiers municipaux d'être opérationnels dans leurs nouvelles fonctions, dès leur recrutement.

Compte tenu de ces éléments, il apparaît donc pertinent de mettre en place un permis de port d'arme national, qui resterait valable en cas de mutation.

Proposition n° 25 - Créer un permis de port d'arme national, ne nécessitant pas de renouvellement en cas de changement de commune employeuse.


* 156 Décret n° 2006-1392 du 17 novembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des directeurs de police municipale.

* 157 Décret n° 2011-444 du 21 avril 2011 portant statut particulier du cadre d'emplois des chefs de service de police municipale.

* 158 Décret n° 2006-1391 du 17 novembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des agents de police municipale.

* 159 Décret n° 94-731 du 24 août 1994 portant statut particulier du cadre d'emplois des gardes champêtres.

* 160 Décret n° 2002-60 du 14 janvier 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires.

* 161 Décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale.

* 162 Décret n° 97-702 du 31 mai 1997 relatif au régime indemnitaire des fonctionnaires du cadre d'emplois des agents de police municipale et du cadre d'emplois des gardes champêtres, décret n° 2000-45 du 20 janvier 2000 relatif au régime indemnitaire des fonctionnaires du cadre d'emplois des chefs de service de police municipale et décret n° 2006-1397 du 17 novembre 2006 modifiant le régime indemnitaire des fonctionnaires des cadres d'emplois de garde champêtre, d'agent de police municipale, de chef de service de police municipale et créant le régime indemnitaire des fonctionnaires du cadre d'emplois de directeur de police municipale.

* 163 Cette estimation est fondée sur une régression du salaire net médian par ETP sur les caractéristiques socio-économiques des agents de la fonction publique territoriale, dont les résultats figurent en annexe du présent rapport.

* 164 Décret n° 96-342 du 22 avril 1996 relatif à l'attribution de la médaille d'honneur de la police nationale.

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